tomac, à moins qu'il ne soit excessivement plein, et comme il n'importe pas moins de ne pas le laisser long-temps vide que de ne pas trop le surcharger, il paraît que l'usage généralement adopté aujourd'hui en Europe, de faire trois repas par jour, le déjeûner, le dîaer et le souper, est bien préférable au systême de ceux qui voudraient qu'on se bornât à un seul repas, lequel ne saurait suffire ni aux personnes laborieuses, et qui faisant beaucoup d'exercice ont besoin de réparer fréquemment leurs pertes, ni aux personnes faibles et délicates qui ne pourraient ni avaler, ni digérer en un seul repas la quantité d'alimens nécessaire pour les soutenir pendant vingtquatre heures. A l'époque de leur plus grand luxe, les anciens Romains faiBaient pour l'ordinaire cinq repas, le déjeûner (jentaculum), le dîner (prandium), le goûter (merenda), le souper (cœna), qui était leur principal repas, et une espèce de collation ou de dessert (comissatio), qu'ils prenaient avant de se coucher. Quelquefois ils prenaient un second déjeuner (gustatio). Cependant au rapport d'Athénée et de Plutarque, les personnes sobres et tempérantes se bornaient à trois repas. En Angleterre on déjeûnait autrefois, même à la cour, de très bonne heure. On dînait à onze heures ou midi, et l'on faisait au moins deux autres repas dans le reste de la journée. « Le déjeuner semble devoir être le plus naturel de tous nos repas, celui pour lequel l'appétit doit être le plus réveillé. Car indépendamment du long intervalle qui le sépare du souper, le sommeil favorise la digestion, et l'estomac doit être plus vide le matin que dans aucun autre moment de la journée. Lorsqu'il en est autrement, c'est une preuve qu'on s'est laissé aller la veille à quelque erreur de régime, soit en mangeant trop, soit en se nourrissant d'alimens indigestes. C'est pourquoi les gens sobres et délicats devraient toujours faire du déjeuner un de leurs repas les plus substantiels. Cependant l'usage a presque généralement prévalu dans les temps modernes de n'en faire qu'un des plus légers, et tandis que les dames d'honneur de la reine Elisabeth, qui dînaient à onze heures, mangeaient cependant à leur déjeuner du boeuf ou d'autres viandes, et buvaient de la bierre forte; aujourd'hui, malgré l'heure tardive de nos diners, non seulement les grands seigoeurs et les belles dames, mais encore les campagnards, les artisans, ne prennent à leur déjeûner que du thé. Quel contraste! Certainement les déjeuners à la fourchette des Français sont bien plus naturels et doivent être bien plus sains (1). Mais si l'on se borne à quelques boissons chaudes, parmi lesquelles le chocolat, et surtout celui qui est mêlé de salep, passe pour l'une des meilleures, il conviendrait au moins d'en corriger les mauvais effets par l'addition de quelques alimens plus substantiels, tels que les œufs, la viande froide, le beurre frais, etc. (2). (1) Cela peut être vrai pour les gens oisifs. Mais puisqu'il est aujourd'hui bien démontré que le travail tant du corps que de l'esprit, immédiatement après la repas, nuit à la digestion, il semble qu'il doit être bien plus sain pour les gens de peine, obligés de tra vailler toute la matinée, de ne faire du déjeûner qu'un repas léger; et c'est peut-être par cette considération que l'heure du dîner a été graduellement reculée de nos jours jusqu'à celle du souper chez les anciens. Au surplus, rien n'est plus vague et plus hygrothétique que les règles de théorie qu'on peut donner à cet égard, comme sur plusieurs autres points de l'hygiène. Leur application est tellement modifiée par la diversité des habitudes et des tempéramens, que les exceptions pourraient presque toujours être justifiées par autant d'exemples que la règle même. C'est à l'expérience individuelle de chacun qu'on doit en appeller en dernier ressort. (0) (2) En Ecosse, les gens du peuple et les enfans déjeûnent presque tous avec une espèce de potage fort épais, fait avec de l'avoine (porridge). Les gens à leur aise qui prennent du thé, mangent en même-temps de la marmelade, espèce de compote qui se fait avec des écorces d'oranges amères et du sucre. Dans les comtés occidentaux de l'Angleterre, en prend du lait épaissi avec de la présure et dont on ne sépare ni la petit-lait, ni la partie caséeuse. C'est ce qu'on appelle « Le diner n'était chez les anciens Romains qu'une sorte de rafraîchissement sans viande et sans vin, qu'ils prenaient dans le milieu de la journée. Aujourd'hui, c'est le repas, ou pour mieux dire, l'affaire la plus importante du jour. -Les Français entendent si bien, diton, l'arrangement d'un grand dîner, que telle personne qui oserait à peine se permettre en Angleterre d'avoir plus de deux plats sur sa table, est tout étonnée en arrivant à Paris de pouvoir en goûter plus de vingt sans en être incommodée. Ce repas y est généralement composé de quatre services, 1. le potage, le bouilli, les hors-d'œuvres (parmi lesquels les petits pâtés tiennent le premier rang) et les entrées, qui sont communément des volailles, des côtelettes, des langues, des riz de veau, etc., apprêtés de différentes manières au bouillon, ou au beurre; 2. les viandes rôties et les salades; 3. l'entremets, composé de pâtisseries froides, de légumes; de poudings, et de crêmes; 4. enfin le des Com junket. Le docteur Beddoes en fait grand cas (Hygeia. Vol. II. Essay VIII. p. 67. Enfin l'on a surtout recommandé les déjeunés secs aux personnes sujettes au catarrhe et à la pituite. Marc Antonio s'était, diton, fort bien trouvé de ne manger en se levant qu'une espèce de biscuit dur, qui se mêlait par la mastication avec une abondante quantité de salive, et absorbair les glaires formées pendant la nuit.. Voyez Cleland' Institutes of Health, p. 42. (A) sert, qui consiste en fruits et en sucre. ries. Chacun de ces services a des vins particuliers et de différens pays qui lui sont exclusivement consacrés. Tous ces détails sont fort intéressans sans doute pour ceux qui mettent un grand prix aux plaisirs de la table; mais comme ils sont probablement fort étrangers à l'art de prolonger la vie ou de maintenir la santé, nous renvoyons les amateurs à l'Almanach des Gourmands, dont l'auteur, M. Grimaud, les discute fort au long. Il ajoute que la durée moyenne et raisonnable d'un bon dîner est au moins de cinq heures, quand la compagnie est nombreuse. " «<< Aussi ces sortes de diaers ressemblentils beaucoup, et par leur abondance, et par leur durée, et par l'heure à laquelle ils commencent, aux soupers des anciens; et cela est si vrai que dans la plupart des bonnes maisons on supprime aujourd'hui ce dernier repas. On le réduit au moins à quelques alimens très-légers, tels que des oeufs, du lait, du fruit, un plat de légumes, ou un simple potage. C'est ce qui peut expliquer pourquoi les médecins s'accordent si peu sur la question de savoir lequel de ces deux repas doit être le plus aboadant. Hippocrate, Celse et Galien se prononcent très-fortement en faveur des dîners légers et des bons soupers. D'un |