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naires que les circonstances ont exigés, et de n'avoir reçu qu'une quantité de terrain insuffisante pour l'entretien de leurs familles.

A cette occasion, qu'il me soit permis d'exprimer un vœu c'est que les colons russes jouissent de la protection particulière accordée aux colons étrangers, et d'une partie de leurs priviléges. Ils ne viennent pas, il est vrai, comme ceux-ci, chercher une nouvelle patrie et se soumettre à des lois étrangères. Mais, transplantés du nord au midi, ou d'une province dans une autre, parce qu'ils ne pouvoient plus subsister dans le lieu où ils étoient, ils ont nécessairement besoin de secours extraordinaires. Je sais qu'ils jouissent, pendant deux ou trois ans, de certaines exemptions. Mais pourquoi ne leur feroiton pas des avances en bestiaux, en instrumens aratoires, en argent pour se bâtir des chaumières?.... Ils les rembourseroient certainement avec non moins d'exactitude que les Italiens, les Allemands et les Juifs. Pourquoi encore ne les placeroit-on pas, et c'est l'essentiel, sous l'administration du bureau des colonies? Les soustraire pendant cinq ans, par exemple, à l'autorité des capitaines de district et à certaines contributions qu'il seroit inutile de nommer, seroit déjà un grand bienfait. Ces familles, dans ce laps de temps, pourroient se remettre, et le gouvernement alors les trouveroit prêtes à acquitter les

modiques impôts qu'il ordonne, et à rembourser, d'année en année, les petites avances qu'il leur auroit faites. Je ne veux pas dire que l'administration des colonies soit parfaite : quelle est l'institution humaine qui soit exempte des défauts inhérens à notre nature? Pour nous, le moins mal est toujours le meilleur ; et je suis persuadé que nos colons russes se trouveroient très-bien, s'ils étoient placés sous le bureau d'administration des colonies étrangères. Ailleurs, les lois d'exception à l'autorité ordinaire créent des abus: en Russie, elles sont la plupart du temps une sauve-garde contre eux.

MÉMOIRE

SUR

L'INDE SEPTENTRIONALE

D'HÉRODOTE ET DE CTÉSIAS,

COMPARÉE AU PETIT-TIBET DES MODERNES;

PAR M. MALTE - Brun.

LES Grecs n'ont eu des notions vraiment géographiques sur l'Inde que par l'expédition d'Alexandre-le-Grand; les traditions qui auparavant leur avoient été transmises par les Perses, n'offroient aucune indication précise des localités et des rapports de situation; mais ces traditions vagues s'étendoient néanmoins bien plus au nord que les observations plus positives des compagnons et des successeurs du conquérant macédonien, Les Perses avoient connu et peut-être dominé ces mêmes régions du Petit-Tibet, de Kaschkaur, d'Oun-Dès, que les derniers voyages des An

glois viennent de nous faire voir sous un jour nouveau. Nous allons démontrer que c'est dans ces régions, long-temps inconnues, qu'on doit chercher une partie de l'Inde d'Hérodote et de Ctésias. Nous essaierons ainsi de rattacher les plus anciennes traditions de la géographie à des découvertes les plus récentes.

Ces recherches sont d'un grand intérêt pour l'histoire; elles touchent à des questions célèbres et importantes. L'Inde étoit-elle civilisée du temps d'Hérodote? Possédoit-elle, au cinquième siècle, avant l'ère vulgaire, des cités populeuses, des temples magnifiques, des arts, des lois et un système religieux? Cette civilisation est-elle descendue des montagnes du Cachemyr vers la péninsule? N'est-elle pas plutôt remontée de la péninsule vers les montagnes? Si nous écoutons Hérodote, les Indiens étoient des sauvages ou tout au plus des barbares. Si nous méditons Ctésias, écrivain qui ne lui est postérieur que de trente à quarante ans, les Indiens possédoient des arts, des richesses et d'autres avantages d'une civilisation avancée. Ces contradictions s'expliqueront, si nous pouvons établir une distinction claire et nette entre les notions d'Hérodote et celles de Ctésias, trop généralement confondues, par les critiques et par les géographes.

Mais la fable enveloppe ces extrémités du monde ancien dans les brillans nuages du lan

gage allégorique, si cher à l'Orient : c'est ici que les griffons gardent une source où l'on puise l'or liquide à pleins seaux ; c'est encore ici que l'or, ramassé par des fourmis de taille gigantesque, leur est quelquefois enlevé par l'audace de l'homme : les airs, les eaux, les bois, tout est ici peuplé de merveilles. Les deux auteurs qui d'ailleurs nous servent de sources, vivoient avant la naissance de la géographie mathématique; ils s'exprimoient conformément aux idées poétiques et populaires dont se composoit la géographie primitive des Grecs. Le compas ne peut donc pas nous guider; il faut appeler à notre secours les ressources de la critique historique et philologique.

Exposé des connoissances modernes sur les pays voisins des sources de l'Indus.

Avant d'entrer dans aucune discussion sur les relations que les anciens nous ont laissées, il est nécessaire de tracer le tableau de ces régions d'après les rapports les plus modernes (1).

(1) C'est principalement sur les cartes jointes à l'excellente Relation de CABOUL, par M. MOUNTSTUART-ELPHINSTONE, qu'on doit suivre cette description.

Le volume du Précis de la Géographie universelle, qui traite de l'Asie, avoit paru avant Elphinstone, Mackinneir, etc., etc. Nous ne pouvions donc décrire ces pays que d'une manière bien imparfaite.

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