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merveilles de son organisation prévue; quelquefois même c'est la destruction de l'être organisé qui développe la vie d'un être semblable qui lui succède.

Une marche adoptée par la nature pour transporter l'organisation d'un individu à un autre, pourquoi ne serait-elle pas en analogie avec la marche qu'elle suit en transportant l'organisation d'une manière d'exister à une autre manière d'exister?

Ceux qui supposent la pensée dans l'organisation même, doivent admettre ou peuvent comprendre que l'organisation entraîne la conscience de l'existence, le sentiment de l'identité et de l'individualité, sentiment tout-à-fait indépendant des changemens extérieurs et des qualités visibles.

Dans le cas de transmission d'existence chez les plantes et les animaux, l'organisation latente doit être semblable à celle qui a existé, ou bien il y a un pouvoir caché qui communique à une matière nouvelle la forme organique ancienne. Mais ce n'est pas tout: la nature nous offre des cas dans lesquels l'organisation préordonnée et latente suppose une existence toute différente de celle où se trouve l'individu, lequel individu renferme, sans le savoir, cette organisation préparatoire d'une vie nouvelle. On peut découvrir à la longue les premiers indices des ailes dans la larve de la libellula, laquelle vit dans l'eau, et doit y passer deux ans encore, avant de s'élever dans les airs sous une forme nouvelle, avec des goûts et des appétits nouveaux, une forme et une organisation absolument différentes. Cet exemple prouve, entre beaucoup d'autres, que, dans la nature visible, l'intelligence suprême a caché et comme emboité certaines organisations dans d'autres tout-à-fait différentes, et qu'elle a un champ illimité pour préordonner et prédisposer la matière de manière à atteindre le but quelconque qu'elle peut se proposer.

Ceux qui rapportent les opérations de l'intelligence humaine à une substance tout-à-fait différente de la matière, ont sans doute une meilleure philosophie, et une manière plus juste de raisonner. Ils n'ont pas besoin au même degré des considérations qui précèdent. Mais beaucoup de gens, sans être des ma⚫térialistes, ont une peine extrême à s'affranchir des impressions qu'ils reçoivent continuellement de la destruction apparente

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des corps. Les observations et les raisonnemens précédens serviront du moins à leur rappeler la puissance infinie qui est sans cesse en action dans la nature, et les ressources sans børne de la suprême intelligence pour l'accomplissement de ses desseins; ils verront, en y réfléchissant, qu'il y a dans cette partie des œuvres de la nature qu'il nous est permis d'observer, beaucoup de cas dans lesquels la conscience de l'individualité peut se transporter d'une existence à une autre,

Quant à ceux qui objectent que nos facultés sont trop faibles et trop restreintes pour pouvoir être en accord avec une exis¬ tence telle que la religion révélée nous la fait espérer dans une autre vie, je leur demanderai si, en voyant un enfant, quelques heures après sa naissance, ils peuvent se représenter que cet être, qui n'a encore qu'une vie végétative, viendra à entendre des formules de la géométrie transcendante. Qui donc osera borner le développement possible des facultés de la raison et de l'intelligence, quelle que soit la constitution primitive, lorsque les circonstances et les objets seront changés, lorsque de nouvelles connaissances seront acquises, et lorsque les pouvoirs de l'âme et les facultés de perception seront mis en rapport avec ce qui appartiendra à cette nouvelle existence ?

Enfin, il y a une réflexion relative à notre état futur, qui doit toujours être présente à notre pensée, c'est que nous sommes dans les mains d'un Être tout bon, dont la puissance est infinie, et dont nous voyons l'intelligence appliquer sans cesse, et d'une manière admirable, les moyens d'exécution au but qu'il se propose.

Comment pourrions-nous douter des ressources que son pouvoir, sa bonté et sa justice trouveront pour l'accomplissement de ses vues sur les créatures raisonnables qu'il a placées sur la terre? Rapportons-nous-en donc à lui en pleine confiance; dans la mort comme dans la vie, nous sommes à lui, Nos jours s'écoulent en sa présence et sous son immédiate protection. Il disposera de notre nouvelle existence dans sa miséricorde.

Nouvelles et Mélanges.

ASIE.

INDE. Les Parsis, peuples de l'Inde, descendant des anciens Perses.Les Parsis adorent le feu ; c'est un péché terrible de l'éteindre. J'ai presque perdu un très-bon domestique, pendant le premier mois de mon séjour à Bombay, pour lui avoir ordonné d'éteindre une bougie. Ils verraient toutes leurs maisons et leurs effets brûler avec la plus parfaite patience, mais jamais ils ne jetteraient une goutte d'eau pour apaiser cet élément vorace. Dans l'année 1823, j'ai vu un singulier exemple de ce genre de dévotion. Je demeurais dans la ville de Bombay, qui est fortifiée, et au milieu de laquelle il y a une place carrée et couverte de gazon, qui est destinée pour l'exercice des soldats en tems de siége: mais en ce tems-là elle était malheureusement employée pour entreposer le principal article du commerce de Bombay, le coton. Celui-ci est toujours en balles si grandes, qu'il faut quatre hommes pour en lever une. La place en était entièrement remplie, et il y avait dans toute son éten due quatre de ces balles, empilées les unes sur les autres, et rangées aussi près que possible; la plupart appartenaient aux Parsis, et n'avaient pas encore été pressées, de sorte que le coton y était lâche, et d'autant plus combustible. Le soir d'un dimanche, pendant qu'on était dans l'église, on entendit les tambours dont on se sert à Bombay pour annoncer un incendie; tout le monde sortit du temple, et on vit le coton en feu; il faisait du vent, et l'air était peuplé de brandons voltigeans qui, par leur légèreté et leur mouvement, ressemblaient à des oiseaux de feu. Sar l'autre côté de la place, est l'arsenal, où on conserve la poudre, et si le vent fût venu à changer, toute la ville anrait sauté. Tous les Anglais et le gouverneur travaillaient à séparer les balles qui brûlaient de celles qui n'étaient pas encore allumées; à la fin ils réussirent, mais un quart de ces balles était déjà consumé. Pas un seul Parsis ne s'approcha, óu s'ils venaient, ils avaient plutôt l'air d'avoir de l'horreur que de la reconnaissance pour ée que faisaient les Anglais. Ce fut un moment pour moi que je n'oublierai jamais; de la terrasse de ma maison, je voyais l'incendie; la cloche de l'église sonnait pour appeler les gens de la campa

gne on tirait le canon pour avertir les troupes anglaises qui étaient à Caloba, et on continuait toujours à battre le tambour : au milieu de tout ce bruit, j'entendais distinctement la marche rapide, mais réglée, des soldats qui venaient d'arriver. Mon mari et mes amis étaient tous au milieu de ce coton enflammé, et cependant, lors même que je savais que toutes nos vies ne dépendaient que du vent, il y avait dans ce spectacle quelque chose de si magnifique, que je n'avais pas le sentiment de la peur. Il faisait un tems superbe : le ciel brillait d'étoiles, sans qu'il y eût an nuage pour le rendre moins calme, moins majestueux, et j`attendais tranquillement l'issue des efforts dont j'étais témoin, car je sentais que l'Être-Suprême, qui avait créé tous ces mondes d'une beauté si parfaite, aurait de la miséricorde pour nous tous, faible partie que nous étions de ce tableau. L'incendie avait été causé par un des gardes du coton, qui, s'asseyant au-dessus d'une de ces rangées de balles, avait fumé, et s'était endormi avec sa pipe à la main.

Pendant nne guerre entre les Anglais et les Peishwa du Deckan, les Parsis se sont formés en un corps d'infanterie, et ont offert leurs services aux Anglais, sous la condition qu'ils ne seraient jamais obligés de toucher les armes à feu.

Je ne sais rien de leurs temples, car ils ne permettent pas aux giaours d'y entrer, mais je sais qu'on n'y brûle rien que du bois de sandal, et que le feu n'a jamais été éteint, Lears prêtres sont nombreux, et on ne peut que les plaindre, lorsqu'on les voit tous les soirs, au coucher du soleil, à genoux, répétant des prières auxquelles ils ne comprennent pas un mot, car elles sont dans une langue tout-à-fait perdue.

1. Leurs femmes ont des priviléges : il en est un qui charmera même les Européennes. Si une femme veut faire une visite à une de ses amies, elle n'a qu'à dire : je vais chez une telle pour quinze jours ou trois semaines, et le mari ne peut pas dire mot. Ils envoient leurs enfans, c'està-dire, les garçons, à des écoles où on leur enseigne à lire, à écrire et à chiffrer, et il me semble que leur système d'instruction ressemble beaucoup à celui de Lancaster, admis en Angleterre. Ils parlent et écrivent ordinairement un dialecte de l'Inde, nommé nagree, mais la plupart lisent et écrivent aussi l'anglais. Ils sont des petits-maîtres dans leur genre ; ils ne portent pas des colliers, des bijoux comme les Hindous, mais ils ont bien souvent de grosses perles aux oreilles, une belle montre avec chaîne et cachets venant d'Angleterre, et des diamans ou des ornemens d'une grande valeur à leurs doigts.

La manière dont on conclut un marché est digne d'être notée; tous les négocians anglais ont un courtier, qui mène avec lui celui qui veut acheter; après bien des discussions, le courtier et l'acheteur tiennent un

mouchoir avec leurs mains gauches sur leurs mains droites, qui sont jointes sous le mouchoir. Le courtier dit le prix: si l'acheteur donne une certaine touche, le marché est conclu, et s'il y manquait après cela, il serait déshonoré, comme un Européen après avoir signé un marché écrit.

Les Parsis n'enterrent jamais leurs morts; leur cimetière est couvert d'une grille en fer, sur laquelle ils posent leurs cadavres. Les morts sont portés de leurs maisons sur un brancard, par les prêtres, qui sont toujours voilés, afin de ne pas être connus, car il y a un grand préjugé contre ceux qui remplissent cet office; ceux qui les accompagnent, qui sont aussi voilés, ne se touchent jamais entr'eux, mais sont unis deux à deux par un mouchoir qu'ils tiennent de deux côtés. Personne n'entre dans le cimetière, que ceux qui portent le mort, et après l'avoir posé sur la grille, et en avoir soigneusement découvert la figure, ils se retirent à quelque distance, jusqu'à ce que les vautours aient arraché les yeux du mort; si celui-ci perd l'œil droit le premier, il est béni dans l'autre monde; si par malheur les vautours commencent sur le gauche, le mort est considéré comme maudit. Comme la médisance serait arrêtée, si nous avions quelque preuve semblable de la bonté ou de la méchanceté de notre prochain! On pourrait, avec cet avantage, écrire des épitaphes d'une vérité admirable. (Biblioth. Britann.):

AFRIQUE.

COTE-D'OR. Goutumes religieuses des naturels. Dans toutes les villes un peu importantes, les Pynins, sorte de magistrats, sont choisis par les habitans, pour prononcer sur les différends qui peuvent s'élever entre eux. Ces Pynins, qu'on prend parmi les hommes âgés, font partie du conseil du Caboceer ou chef du lieu, avec lequel ils siégent, quand il s'agit de questions importantes d'intérêt public. Ils portent, quand ils sont en fonctions, un chapeau de paille, orné de fenilles de vigne, emblême de la sagesse. Quelques-uns des naturels ont beaucoup d'éloquence, et parlent avec une chaleur et une facilité incroyables, quand ils plaident une cause qui les concerne. Les prêtres sont, sur la côte de Guinée, des fourbes, remplis d'hypocrisie; ils sont tous magiciens, et rien n'est plus facile que de les corrompre. Ce sont eux qui entretiennent ces peuples dans la plus grossière superstition. Chaque famille a son fétiche particulier, indépendamment du grand fétiche, sorte de dieu public, auquel on rend chaque année des hommages publics. Les habitans de la Côte-d'Or enterrent les morts dans leurs maisons. Le décès d'un citoyen

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