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dont quatre parmi les anciens officiers (David, du Mesnil, Pralard et Le Mercier) et quatre parmi ceux qui n'avaient pas passé par les charges (Valleyre, Lottin, Despilly et Clousier). Joseph-Gérard Barbou se chargea de les convoquer pour le 13 janvier 1746 à quatre heures du soir (1).

Au jour indiqué, les examinateurs questionnèrent le candidat << sur les connaissances propres et nécessaires à la profession de librairie », et, après avoir entendu ses réponses, par voie de scrutin, ils jugèrent qu'il devait être admis.

Deux jours après (15 janvier 1746), les syndic et adjoints procédaient à la réception de Joseph-Gérard de la même manière que pour son oncle Joseph, avec cette variante, c'est qu'en lui délivrant copie de la réception, ils lui déclaraient qu'il ne pourrait s'en servir « qu'après avoir été présenté par l'un d'entre eux au Tribunal de l'Université pour y prêter le serment in loco majorum, à l'effet d'obtenir lettres d'immatriculation de membre et suppost de la dite Université, conformément aux articles 5 et 6 du Règlement du 10 décembre 1725 ». Joseph-Gérard versa mille livres entre les mains du syndic, pour la Communauté des libraires.

Depuis 1742 au moins, Joseph-Gérard gérait l'imprimerie de la veuve de Joseph, sa tante. Du jour où il fut reçu libraire, il s'inscrivit pour parvenir à la maîtrise de l'imprimerie. Le 7 septembre 1750, il présenta une requête au Conseil d'Etat pour demander d'être reçu imprimeur, faisant valoir que, par actes passés devant notaires les 20 mai 1749 et 17 avril 1750, sa tante avait renoncé à ses droits, comme imprimeur, en sa faveur; que d'autre part il était entré en pourparlers avec J.-B.-C. Ballard pour lui acheter son imprimerie, mais que celui-ci étant mort sur les entrefaites, il s'était adressé à Mme Cottin, sa veuve, qui, par acte du 14 août 1750, s'était démise en sa faveur. Il produisit les justifications d'usage, et le roi ayant accédé à sa demande, il fut admis à « représenter ses titres et capacités et à subir l'examen et l'épreuve accoutumés » devant les syndic et adjoints de la Communauté des libraires et imprimeurs de Paris (2).

Le 15 septembre 1750, le registre de la Communauté constate que les syndic et adjoints ont <<< fait la visite et dressé le procèsverbal de l'imprimerie que le s Barbou a acquise pour servir à son établissement, et que celui-ci, conformément à l'article XLIV du Règlement, les a requis de le mettre en état de subir l'examen et épreuve sur le fait de l'imprimerie. » Ils lui ont fait tirer au sort les

(1) Bibliothèque nationale, Manuscrit, fonds français 21858, fo 63 ro. (2) Ibid., f 134, ro.

noms des huit examinateurs qui doivent, avec eux, juger de sa capacité, savoir: quatre parmi les anciens officiers (de Lépine, Josse, Coignard, Le Mercier) et quatre parmi ceux qui n'ont pas encore passé par les charges (Rabuty, Hardy, Prault père et Lottin), qu'il s'est chargé de convoquer pour le lendemain à trois heures du soir (1).

Le lendemain, en effet, les examinateurs interrogèrent JosephGérard sur « les différentes parties et usages de l'art de l'imprimerie », et, après avoir entendu ses réponses, par la voie du scrutin, « ils se trouvèrent réunis sur sa capacité et pensèrent qu'il méritait d'être admis à la maîtrise de l'imprimerie (2) ».

L'arrêt du Conseil d'Etat du 28 septembre 1750 ordonna que Joseph-Gérard serait admis comme imprimeur-libraire à Paris et il fut reçu en cette qualité par les syndic et adjoints le 6 octobre suivant (3). Joseph-Gérard donna 500 livres à la Communauté pour se réception.

Grâce à ses nombreuses et bonnes relations avec ses confrères, Joseph-Gérard put réaliser le projet qui souriait aux Barbou depuis longtemps, celui de posséder la Collection des auteurs latins pour les bibliophiles. On verra, par la suite, avec quelle persévérance il poursuivit la continuation de cette Collection, pour le plus grand honneur de sa maison.

La formation de cette Collection et sa valeur vont faire l'objet des lignes suivantes.

Il convient tout d'abord de dire de quels volumes se composait la Collection, à l'apparition du dernier ouvrage, celui du P. Rapin publié en 1780. Nous prendrons la liste dressée par Joseph-Gérard lui-même :

P. Terentii comœdiæ, 2 vol., 1753 (Le Loup et Mérigot).

Catullus, Tibullus, Propertius, 1754 (c'est l'édit. de 1743 avec changement de titre), réédité en 1792.

T. Lucretii Cari Opera, 1754 (c'est l'édit. de 1744 avec changement de titre).

Martialis Epigrammata, 2 vol., 1754 (c'est l'édit. de 1733 avec changement de titre).

Eutropius, 1754 (c'est l'édit. de 1746 avec changement de titre), réédité

en 1793.

Phædri fabulæ, 1754 (il y avait deux édit.: celle de 1742 (Coustelier) et celle de 1747 (Grangé), dont les titres avaient été changés), réédité en 1783 et 1802 (Brotier).

(1) Bibliothèque nationale, Manuscrits, fonds français 21858, fo 134, vo. (2) Ibid., fo 135, гo.

(3) Ibid., fo 136, ro et vo.

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Sarbievii (Mathiæ Casimiri) carmina, 1759, réédité en 1791.
C. Cornelius Tacitus, 3 vol., 1760, réédité en 1793 (J.-N. Lallemand).
Selecta Senecæ Philosophi opera, 1761, réédité en 1790.

Publii Ovidii Nasonis Opera, 3 vol., 1762, réédité en 1793.

P. Virgilii Maronis Opera, 2 vol., 1767 (l'édit. de 1745 (Coustelier) formait 3 vol.), réédité en 1790.

Lucani Pharsalia, 1767 (il y avait eu une édit. en 1745).

Cornelius Nepos, 1767 (il y avait eu une édit. en 1745), réédité en 1784. Novum Jesu-Christi Testamentum, 1767, réédité en 1785.

M. T. Ciceronis Opera omnia, 14 vol., 1768 (J.-N. Lallemand).

Caii Plinii Secundi Epistolæ et Panegyricus Trajano dictus, 1769, réédité en 1788 (J.-N Lallemand).

Justinus, 1770.

Sarcotis et Caroli V Imp. Panegyris, carmina, auctore Masenio, 1771 (il y avait eu une édit. en 1757).

Sallustius, 1774 (il y avait eu des édit. en 1714, 1761), réédité en 1801. Jac. Vanierii Prædium rusticum, 1774 (petit in-8), réédité en 1786.

Q. Horatii Flacci Opera, 1775 (il y avait eu des édit, en 1746 et 1763). Titus Livius, 7 vol., 1775.

Juvenalis et Persii Satyræ, 1776 (il y avait eu une édit. en 1716 avec nouveau titre en 1754), réédité en 1801.

Senecæ de Beneficiis et de Clementia excerpta, 1776.

Velleius Paterculus et Florus, 1777 (il y avait eu une édit. en 1746). D. Erasmi Encomium Moriæ, et Mori utopia, 1777. (Il y avait eu une édition en 1765.)

F. J. Desbillons Fabulæ Æsopiæ, 1778 (il y avait eu des édit. en 1759 et 1769).

Amoenitates poeticæ, sive Th. Bezæ, Mureti poemata, et J. Secundi Juvenilia, J. Bellaii amores, 1779 (il y avait eu une édit. en 1757).

Caii Plinii Historia naturalis, 6 vol., 1779 (Brotier).

De Imitatione Christi, ex recens. J. Valart, 1780 (il y avait eu des édit.

en 1738, 1764 et 1773), réédité par Beauzée en 1789.

Renati Rapini Hortorum libri IV et Cultura hortensis, 1780.

Soit trente-quatre ouvrages en soixante-huit volumes.

Dans une Notice des éditions des auteurs latins (1), notice qui a dû être imprimée plusieurs fois, voici comment les Barbou exposent la formation de la Collection.

« Les éditions des Auteurs latins imprimées par les Elzévirs, si recherchées pour leur élégance, si commodes par leur format,

(1) Notice des éditions des auteurs latins, poètes, historiens, orateurs, philosophes, etc., qui composent la collection des Barbou, M. DCCC.vn. In-12 de 24 p. (Communiquée par M. Paul Delalain.)

devenoient plus rares de jour en jour, et peu de gens pouvoient parvenir à les compléter. M. Lenglet Dufresnoy conçut, en 1743, le dessein de suppléer à la rareté de ces éditions, en faisant réimprimer toute la suite des mèmes Auteurs Latins, en petits in-12, et, s'il se pouvoit, aussi proprement que les Elzévirs.

>> Son projet fut goûté de plusieurs libraires (et entr'autres d'Antoine Coustelier, fils d'Urbain, si célèbre dans la typographie françoise), qui publièrent successivement: Catulle, Tibulle et Properce réunis dans un seul volume, Lucrèce, Salluste, Virgile, Cornélius Népos, Phèdre, Horace, Velleius Paterculus, Eutrope, Juvénal, seconde édition de Phèdre, fort supérieure à la première, et Martial. Etienne-André Philippe de Prétôt, censeur royal, présida à plusieurs de ces éditions.

>> On paroissoit en rester là, quand BARBOU résolut de poursuivre l'entreprise. Il acquit, pour cet effet, le fonds des Auteurs déjà publiés par différents libraires, et ces Auteurs ont été la base de la belle Collection qu'il continue de former. Il a depuis publié lui-même César, Quinte-Curce, Plaute, Tacite, Ovide, Lucain, Cicéron, Justin, Pline le Jeune, Tite-Live, etc., ainsi que d'autres livres modernes qui ne déparent point cette suite. Il a encore réimprimé la plupart des précédents Auteurs qui manquoient, el les nouvelles éditions ne le cèdent aux premières, ni pour la correction, ni pour l'exécution typographique. >>>

Dans la Biographie Michaud, M. Gabriel Peignot donne quelques renseignements complémentaires sur la Collection.

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...

En 1753, dit-il, le zèle des entrepreneurs des quatorze premières éditions formant dix-huit volumes (1) (dont un triple: Catulle, Tibulle, Properce), se ralentissant, Joseph-Gérard Barbou résolut de la continuer. En conséquence, il acquit le fonds des seize auteurs déjà publiés par différents libraires et en ajouta dix huit autres formant en 1780 soixante-huit volumes in-12. Joseph-Hugues céda sa librairie à M. Auguste Delalain, qui édita trois autres auteurs en quatre volumes: Juvencius (1809), 1 vol.; Musæ rhetorices (1809), 1 vol.; Quintilianus (1810), 2 vol. (2). Pour compléter cette jolie Collection, il faut y ajouter quatre autres tomes publiés en 1757, réunis deux à deux, par Philippe de Prétot (3), éditeur de la plupart des auteurs imprimés pour cette

(1) Nous donnons plus loin les titres des quatorze premiers volumes publiés.

(2) Ces trois ouvrages ne figurert plus sur le catalogue actuel de MM. Delalain, qui ont cependant quelques exemplaires encore du Musæ rhetorices.

(3) Probablement les Tablettes géographiques, 1755, 2 vol.

collection avant 1755. La collection complète était, en 1810, de soixante-seize volumes (1) ».

Les ouvrages que Joseph-Gérard acheta à Antoine Urbain II Coustelier étaient les suivants: 1o Phèdre, édition Le Mascrier, 1742, (imp. David); 2o Catulle, Tibulle, Properce, 1743, 3 tomes en 1 vol.; 3o Lucrèce, 1744 (des exemplaires portent le nom de Grangé, 1748), imp. C.-F. Simon; 4o Virgile, 1745, 3 vol.; 5o Lucain, 1745; 6o Horace, 1746; 7° Velleius Paterculus, 1746; 8° Eutrope, 1746 (imp. Ve Delatour); 9o Jurénal et Perse, 1746 (imp. Ve Delatour).

Il acheta en outre à David: Salluste, 1744 (imp. C.-F. Simon); Cornelius Nepos, 1745 (imp. C.-F. Simon); - à Grangé : Phèdre, éd. S.-A. Philippe, 1747 (imp. C.-F. Simon); à Le Loup et Mérigot: Térence, 1753, 2 vol.; - à Robustel et Le Loup: Martial, éd. Le Mascrier, 1753, 2 vol.

Tous ces ouvrages, sauf le Phèdre et le Martial, étaient édités par Etienne-André Philippe dit de Prétot.

Dès qu'il fut en possession de ces volumes, Joseph-Gérard en refit les titres à son nom, en substituant au premier millésime celui de 1754 (2), et il masqua le nom de l'imprimeur par une bande de papier. Nous n'avons trouvé que le Térence qui ait conservé son titre aux noms de Le Loup et Mérigot, probablement parce qu'il avait été tiré à trop grand nombre (3), ou bien parce que Barbou n'était pas seul propriétaire de cet ouvrage.

D'autres ouvrages étaient dans le même cas et ne furent pas réédités par Joseph-Gérard Barbou, tels sont : Catulle, Lucrèce, Martial, Eutrope et Phèdre (il possédait deux éditions de ce dernier) (4). Ce n'est qu'en 1761, huit ans après l'achat à Coustelier, que Barbou réédita l'un des premiers ouvrages, le Salluste.

(1) On a vu plus haut que le chiffre de Joseph-Gérard Barbou était de 68. M. G. Peignot, pour arriver au chiffre de 76 indiqué par lui en 1811, doit ajouter probablement les ouvrages suivants: Meursii elegantiæ latini sermonis, 2 tomes en 1 vol.; Tablettes géographiques, par Philippe de Prétot (1755), 2 vol., et les trois ouvrages édités par Auguste Delalain. (Biographie universelle ancienne et moderne, III, 354 (Paris, Michaud, 1811-33, 55 vol. et supplém. 1834-62, 30 vol.)

(2) L'achat à Coustelier doit remonter à 1753, car pour le Catulle de ce libraire, daté de 1743 (marque: Non solus. Lugduni Batavorum), Barbou refit le titre à cette date, vignette banale: Lutetiæ Parisiorum. Apud Josephum Barbou, vid San-Jacobœd, M. DCC. LIII). L'avis du Typographe au lecteur, daté des calendes d'octobre 1743, émane de Coustelier. (3) Il figure tel qu'il était en 1753 dans le Catalogue actuel de MM. Delalain. (4) Parmi les quatorze premiers ouvrages, voici ceux qui furent réédilés: 1761 el 1774 Salluste, 1763 el 1775 Horace, 1767 Virgile (en 2 vel. au lieu de 3), Lucain, Cornelius Nepos, 1776 Juvénal et Perse, 1777 Velleius Paterculus.

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