A partir de 1763. Barbou se lance dans les traductions françaises; dans le catalogue de cette année, il donne les titres de trente et un auteurs traduits. L'un de ses beaux ouvrages pendant cette période est le Malherbe, édité en 1757, 1764 et 1770, dont Cohen fait grand éloge, et qu'il estime de 15 à 20 fr. Il fit paraître aussi, de 1768 à 1773, trois Traités de Cicéron dans le format in-32, dont les éditions, accompagnées d'un portrait, sont exécutées avec beaucoup de soin et de goût. Les ouvrages relatifs au Limousin imprimés par Barbou sont si rares, que l'on nous permettra de signaler l'Histoire de la vie et du culte de Saint-Léonard en Limousin, par l'abbé Oroux, chanoine de Saint-Léonard de Noblat, imprimé en 1760. Joseph-Gérard, suivant l'usage d'alors, aimait à s'adresser au lecteur, au début de ses livres; il vantait naturellement les qualités de ses ouvrages, mais cependant d'une façon discrète et en fort bons termes. Ainsi on trouve en tête du Nouveau testament in-24 de 1771, l'avis suivant que nous traduisons: (1) « Pour le Nouveau Testament dans l'édition que l'on appelle ordinairement petit format, nous avons suivi l'édition déjà sortie de nos presses. C'est donc le même texte que nous avons reproduit, avec les mêmes sommaires en tête de chaque chapitre. Nous avons apporté le même soin, afin que, autant que possible, aucune faute ne déshonore le plus utile et le meilleur des livres. >> Nous avons entrepris cette double édition pour que tout chrétien puisse se procurer un Nouveau Testament d'un format plus commode et d'un prix modique. Si, en effet, l'imprimeur qui publie des livres destinés à être mis entre toutes les mains doit offrir ces deux avantages, il doit agir ainsi surtout quand il édite le Nouveau Testament ». Dans l'avertissement de la traduction d'Eutrope par de Wailly, parue en 1783, Barbou s'exprime ainsi : <<< Dans tout ce que ... (1) TYPOGRAPHUS LECTORI. - Novum Testamentum in forma quam vocant minorem vulgaturi eam secuti sumus editionem quæ nostris e typis prodierat. Eumdem igitur textum repræsentavimus; eadem capitibus singulis præiximus argumenta. Par adhibita est diligentia, ut nullis, quoad fieri posset, mendis fœdaretur librorum utilissimus et excellentissimus. Ideo duplex a nobis suscepta est editio ut cuique christiano liceret novum sibi comparare Testamentum, quod esset forma commodiori, quodque modico væniret pretio. Si enim hoc utrumque præstandum est a Typographo qui libros manibus omnium terendos typis mandat, maxime cum novum Testamentum in lucem dare aggreditur. fesons, nous avons pour objet le plus grand bien des études. Nous désirons que ce que nous offrons aujourd'hui à la jeunesse lui soit aussi profitable que notre zèle est pur. >>> Les auteurs qui lui confiaient leurs ouvrages avaient pour lui la plus grande estime, on en jugera par la phrase qui termine la préface des diverses éditions des Principes généraux et particuliers de la langue française de M. de Wailly : « Mon ouvrage étant contrefait dans plusieurs villes de province, ces éditions remplies de fautes et imparfaites m'ont attiré des reproches de plusieurs professeurs; j'avertis que je n'avouerai d'autre édition que celle imprimée à Paris sous mes yeux; il sera aisé de la reconnaître à la signature de l'imprimeur. Barbou Plusieurs éditeurs, et des plus importants, s'adressaient à lui pour l'impression de leurs ouvrages; la belle édition de la Henriade de Voltaire sortie, en 1770, de chez la veuve Duchesne, Saillant, Desaint, Panckoucke et Nyon (2 vol. in-8) porte à la fin de la seconde partie (verso de la 3o page de la table), dans un encadrement formé d'attributs des sciences et des arts : De l'Imprimerie En donnant les titres de plus de deux cents ouvrages imprimés par Joseph-Gérard Barbou pendant les trente ans de son exercice, nous ne prétendons pas les donner tous, mais seulement une partie. L'on se rend bien compte des lacunes qu'une pareille liste doit présenter lorsque l'on parcourt la liste de tous les ouvrages parus pendant une seule année. Ainsi la Bibliographie parisienne pour l'année 1770 (1) nous donne les titres de trente-cinq ouvrages de Barbou, alors que dans nos recherches nous n'en avons trouvé que huit. La Bibliographie parisienne donne sur chacun des ouvrages les appréciations des journaux. Voici ce que nous relevons au sujet du (1) Paris, Denos, 1770, in-8°, Justin de 1770, le seul de la Collection des auteurs latins qui parut cette même année : « Ce Justin forme le cinquantième volume de la magnifique Collection des auteurs latins et il est exécuté comme tous les autres : nous ne pouvons le louer davantage ». (Journal des savants, mars 1770, p. 562). << Cette belle édition, faite sur celle de Fischerus à Leipsick lui est supérieure par les corrections de quelques fautes et par l'insertion de plusieurs leçons excellentes. L'auteur recommandable à plus d'un titre a fait disparaître presque toutes les difficultés qui embarrassaient dans le texte de Justin ». (Journ. hist. de Verdun, 1770, t. 107, p. 92). << Rien n'est désiré pour la critique du texte. Quant à la partie typographique, ce livre aussi soigné que tous ceux qui sortent des mains de l'imprimeur, est encore décoré d'une estampe gravée sur le dessin de M. Gravelot ». (Affiches-Annonces, 1770, janvier n° 5). Les catalogues placés à la fin de plusieurs ouvrages de JosephGérard Barbou auraient pu nous permettre de suivre l'accroissement de sa librairie; mais ces catalogues sont souvent écourtés et ne contiennent que les titres des ouvrages les plus en faveur. On doit cependant une mention à celui qui suit les poésies du P. Sanadon de 1754. Il comprend les sept divisions suivantes: Ouvrages du P. Jouvency; - Ouvrages du P. de La Rue; Collection des poètes latins édités par A.-U. Coustelier; - Traductions; tionnaires; Livres à l'usage des classes et des pensions; Poètes et orateurs de la Société de Jésus. Dic C'est sous la direction de Joseph-Gérard que la librairie Barbou atteignit son apogée. C'était même la librairie à la mode en 1762. On lit, en effet, dans l'ouvrage de M. Henri Bouchot (1): « Quand les fermiers généraux, ces grands financiers amateurs du siècle dernier, imaginèrent de faire une édition à leurs frais des Contes de La Fontaine, ils jetèrent naturellement les yeux sur les artistes les plus préparés à illustrer les inimitables fantaisies du grand poète, Eisen et Choffard. Le premier eut dans sa tâche la composition des sujets hors texte; Choffard, la décoration générale. On s'adjoignit Ficquet pour le portrait du bonhomme, Ficquet dont la spécialité en ce genre était éblouissante de finesse et d'esprit; Diderot fit une courte introduction; on confia la composition à un imprimeur de premier ordre et on le mit en vente chez Barbou ». Joseph-Gérard mourut vers 1790. (1) Henri Boucuor, Le Livre, p. 209 (Paris, Quantin 1886, in-8). BARBOU Frères (1790-1796) Après la mort de Joseph-Gérard, la maison fut dirigée par ses neveux : les trois fils de Léonard Barbou de Monimes (Joseph-Hugues, Martial et Martial-Rémy) et l'un des fils de Martial Barbou des Courières (Henri-Joseph Barbou des Places). Ce dernier et JosephHugues étaient les filleuls de Joseph-Gérard. C'est Joseph-Hugues qui semble avoir eu la part prépondérante dans la direction. Depuis la mort de son père, en 1782, il était devenu le chef de la famille. Comme tel il était entré en possession du Livre de raison. Il semble qu'il ait fait de courts séjours à Limoges, car le Livre ne porte que deux mentions de sa main. Dans la première, il inscrit la mort de son père (10 juin 1782) et mentionne qu'il est son héritier universel, à la charge d'acquitter la légitime de ses cing frères et sœurs (22,000 livres pour chacun); il signe: «Barbou de Monimes fils aîné, garde du corps Compagnie de Villeroy ». En 1786, il indique le mariage de sa troisième sœur et la même année, l'entrée au service de ses jeunes frères Martial et MartialRémy, en qualité de gardes du corps dans la Compagnie de Luxembourg. Le catalogue de Hugues Barbou de 1807, que M. Paul Delalain a en l'obligeance de nous communiquer. permet de savoir le nombre et le genre d'ouvrages publiés par les frères Barbou pendant cette période si sombre de notre histoire, de 1790 à 1796. Comme les titres sont accompagnés de leur date de publication et du prix de vente, il nous a été facile d'en relever une trentaine, ce sont presque tous des auteurs latins ou des traductions de ces auteurs; la plupart des rééditions. Parmi les ouvrages de la Collection d'auteurs latins, il réédita Virgile el Sénèque (1790); Sarbievius (1791); Catulle (1792); Ovide, Eutrope et Tacite (1793). Mais les gravures et les caractères de ces éditions sont fatigués et celles-ci sont généralement moins estimés que les premières. Au moment de l'effervescence politique, alors que l'on prenait pour modèle la République romaine, les œuvres de Cicéron, étaient souvent citées et le grand orateur romain jouissait d'une grande faveur. C'est pour cela qu'à la suite d'une traduction de Cicéron de 1795, les frères Barbou indiquaient les titres de leurs autres traductions de cet auteur. Il y en a douze, à la suite desquelles se trouvent d'autres auteurs latins avec la traduction en regard. Eu 1796, plusieurs circonstances vinrent rompre l'association des frères Barbou. Peut-être Martial et Martial-Rémy émigrèrent-ils et s'engagèrent-ils dans l'armée de Condé? On n'entend plus parler d'eux à partir de cette date. Henri-Joseph Barbou des Places épousa à Paris, en 1796, Mt Rosalie Ardant de Meilhards, sa cousine, et il dut se retirer des affaires, car à partir de 1797, le nom de Hugues Barbou est seul sur les titres d'ouvrages. Joseph-Hugues BARBOU (1797-1808) Joseph-Hugues, ou tout simplement Hugues, dut être, à ses débuts, très gêné par la situation politique. Les affaires en librairie, comme dans les autres industries, étaient à peu près nulles. Pendant les trois années de 1797 à 1799, il n'édita que deux ouvrages. En revanche, de 1800 à 1808, la reprise des affaires s'accentua d'années en années (quatre titres en 1800 et vingt en 1806), et l'on peut évaluer à une centaine les nouveautés ou les rééditions sorties des presses de Hugues pendant huit ans. Mais de même que ses devanciers, Hugues Barbou ne se départ pas un instant de la ligne de conduite qu'il s'est tracée. Il ne publie que des ouvrages classiques, les latins principalement, et des ouvrages de piété. Dès le Concordat, il réimprime toute l'ancienne série des catéchismes, évangiles, imitations de J.-C., maximes, vies de saints, etc. A la liste des classiques latins, il ajoute les excellents ouvrages de Lhomond, tant de fois réimprimés depuis. Hugues fait aussi quelques tentatives du côté des classiques français. On remarque dans le catalogue de 1807 des ouvrages de Fénelon, Bouflers, Fléchier, Montesquieu, Voltaire, etc. Hugues publia en 1807 une Notice des auteurs latins de la collection des Barbou. Nous avons reproduit plus haut le préambule de cette Notice. Les ouvrages sont présentés au public d'une façon très engageante, sans forcer l'éloge. On trouvera ces notices à la suite de chacun des titres, dans le catalogue. De la Collection des auteurs latins, il ne réédita que le Salluste |