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il n'en est pas moins vrai que ce malheureux petit être vit dans un état d'indigestion habituelle. Comment donc pourra-t-on reconnaître à quelles époques il convient de donner à téter ? C'est une chose facile, et je vais emprunter à DÉSESSARTZ, à ce médecin qui a si bien observé l'enfance, le tableau des signes de la faim dans le premier âge. Quand l'enfant a faim, dit-il, il a les yeux fixés sur sa nourrice, il la suit partout, et paraît chagrin quand elle s'éloigne ; il porte ses doigts à sa bouche et les suce, ou suce sa langue; la salive est sécrétée en abondance. En lui mettant le doigt dans la bouche, on sent qu'il le presse avidement; si on lui montre le sein, il témoigne de la joie; il saisit le mamelon et le presse de ses mains. Lorsqu'au contraire, il n'a pas faim, il prend le téton avec peine, et le quitte sans regret, et après en avoir tiré trop peu de lait pour apaiser sa faim, si elle eût été la cause de ses pleurs.» Telle est la règle qu'on doit suivre; elle est beaucoup plus sage que celle qui consiste à donner à téter à l'enfant à des heures fixes. Il est vrai que cette dernière peut paraître plus commode; mais un enfant bien portant réglera de lui-même l'heure de ses repas, parce que la faim ne se fera sentir chez lui que quand la digestion du

Education physique,

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repas précédent sera terminée. Il est des enfans qui tétent avec beaucoup d'avidité, et même jusqu'au point d'avoir de la toux, par le passage du lait dans les voies aériennes. Cette avidité pourrait tenir à ce qu'on les fait attendre trop long-temps: il faut, dans ce cas, rapprocher leurs repas; mais s'ils continuent, malgré cette précaution, il est bon de leur ôter de temps en temps le mamelon, ou de le presser légèrement afin de diminuer l'afflux du lait. C'est une pratique très-fâcheuse de leur frapper sur le dos, lorsqu'ils toussent, parce que par là on neutralise l'effort qu'ils font pour chasser le corps étranger qui les suffoque.

Malgré l'autorité d'HIPPOCRATE, il est certain que l'abstinence est utile aux enfans dont les affections sont, pour la plupart, inflammatoires, et qu'ils la supportent beaucoup mieux qu'on ne le croit communément: c'est pour cela qu'il est convenable de les y soumettre dès qu'ils sont malades ; la plus légère indisposition s'accompagne d'un trouble plus ou moins considérable des fonctions digestives; trouble qu'on ne peut qu'aggraver par l'ingestion de nouveaux alimens. Il est bon aussi d'en diminuer la proportion, quand l'enfant fait des dents; il est alors ordinairement atteint d'une diarrhée qui atteste

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l'irritation des premières voies. Cette évacuation qui entraîne du lait en grumeaux non physique. digérés, est connue sous le nom de germes de dents, et guérit parfaitement par un peu de diète.

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Tant que l'enfant n'a pas de dents, le lait de sa mère doit lui suffire, et même tout aliment solide ne peut que lui être pernicieux; parce que l'éruption des dents coïncide avec l'accroissement des forces digestives, et constitue un signe auquel on doit s'en rapporter pour changer le régime alimentaire. Cependant si l'on admet que la mère étant délicate, soit fatiguée (ce qui est fort rare) par la perte journalière qu'elle éprouve, il faudra bien suppléer au défaut du lait. Dès lors mille substances viennent s'offrir: la bouillie, les potages, le pain, et même la viande, sont employés par des mères imprudentes, qui s'applaudissent encore de ce que leur enfant, disent-elles, mange de tout, sans penser au tort, souvent irréparable, qu'elles font à sa santé. Quelques unes cependant ont le bon esprit de suppléer au lait qui leur manque, par le lait des animaux ; mais elles pèchent encore par la manière dont elles l'emploient. En effet, sous prétexte d'affaiblir ce liquide, qui est trop consistant, elles le coupent, non point avec de l'eau pure,

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ce qui serait rationnel, mais avec une décoction d'orge ou de gruau, c'est-à-dire qu'au lieu de l'atténuer, elles lui donnent une densité plus considérable : de plus, pour éviter les inconvéniens attachés au lait cru, qui, dit-on, donne des coliques, on se hâte de le faire bouillir, et par conséquent on le prive de cet arôme qui lui est propre, et de l'air qu'il contient et qui l'eût rendu plus facile à digérer. Lors donc que, par une cause quelconque, on sera obligé de nourrir un enfant avec du lait de vache, on aura soin de le couper avec de l'eau tiède, dont on diminuera petit à petit la proportion, afin d'imiter, autant que possible, la marche de la nature; au lieu de le faire boire avec un gobelet, on le donnera dans une petite fiole, garnie à l'extrémité d'une éponge fine taillée en forme de mamelon; car la succion n'est point une circonstance indifférente; comparable à la mastication, elle s'accompagne d'un afflux de salive d'autant plus nécessaire, que l'aliment employé est plus étranger aux organes de l'enfant.

Ce n'est point assez pour certaines femmes, asservies par les préjugés, d'avoir privé leurs enfans de l'aliment qui leur était destiné par la Providence, il faut encore qu'elles aillent farcir leur estomac délicat d'une colle essen

physique.

tiellement indigeste, qu'on appelle bouillie. Cette bouillie est claire, elle est légère, di- Education sent-elles; mais je leur demanderai à mon tour: avez-vous jamais vu la brebis remplir d'herbe même la plus tendre, la bouche de l'agneau naissant? C'est son lait seul qu'elle lui présente. Imitez son exemple, et si vous n'avez pas le courage de nourrir votre enfant, du moins ne l'empoisonnez pas. On m'objectera peut-être qu'on élève des milliers d'enfans avec de la bouillie, je couviendrai que beaucoup d'enfans parviennent à l'âge adulte, malgré le plus mauvais système d'éducation physique, et par le bénéfice de la nature; et d'ailleurs je pourrais citer des milliers d'enfans qui périssent au berceau, assurément par la faute de ceux qui les élè

vent.

On voit des mères, qui, par une tendresse aveugle, laissent téter leurs enfans jusqu'à l'âge de deux et trois ans. Quoique moins préjudiciable, et moins commun que le sevrage prématuré, cet abus doit être signalé, L'époque du sevrage ne peut guère être rigoureusement fixée ; cependant le terme moyen de l'allaitement est de douze à quinze mois on pourra toujours sévrer, sans danger, un enfant qui aura vingt ou vingt-deux dents, les chairs fermes, le visage coloré

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