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Un seul coup-d'œil jeté sur la Table suivante et sur celle qui accompagnait la Description du Musée Royal des Antiques de 1820, montrera que celle-ci est beaucoup plus considérable, et par le nombre des artistes et par les détails. Pour établir la première, j'avais eu recours à PLINE, à PAUSANIAS, et aux ouvrages de JUNIUS (1), de WINC

(1) François JUNIUS ou DUJON, originaire de Bourges, né en 1589 à Heidelberg; mort en 1678. Il fut pendant trente ans secrétaire du Cte. d'Arundel. Son ouvrage, De Picturá Veterum, etc., a été publié à Amsterdam, 1637, in-40.; à Rotterdam, 1694, in-fol. Le savant Junius dans ce Traité, qui, bien que la critique y ait peu de part, a été d'une si grande utilité à ceux qui sont venus après lui, ne s'est pas borné à tirer des auteurs tous les passages qui ont rapport à la peinture, il a fait beaucoup plus que ne promettait son titre : il a cherché à reproduire tout ce qui concerne les arts du dessin proprement dits, la peinture, la plastique, la statuaire, la sculpture, la gravure sur pierres fines, l'architecture, ainsi que la ciselure et la damasquinure, branches des arts fort en honneur chez les anciens. Mais ne se contentant pas de traiter ces sujets si féconds, et qui lui auraient fourni une nomenclature très-considérable de personnages et de choses et une immense quantité de faits, Junius s'est encore occupé de tout ce qui se rattache indirectement aux arts. Dans ce vaste cadre sont entrés tous les métiers qui, employant les métaux, les pierres, les bois, les couleurs et toutes sortes de substances, se rapprochent par quelques points de leurs opérations de celles des arts qui ont la forme et la couleur pour objet. Plus de soixante métiers sont nommés dans le catalogue des artistes ou artisans (artifices) de Junius. On y trouve des teinturiers, des tisserands, des badigeonneurs ou ceux qui ravalaient les murs, des cordonniers, des facteurs d'instrumens de musique, des arpenteurs, des colleurs de livres, et même des topiari, jardiniers dont le talent consistait à tailler les arbres, tels que les ifs, les buis, et à leur faire prendre grossièrement les formes de personnages, d'animaux et de toute sorte d'objets. Junius accorde aussi des articles aux diverses contrées, aux villes qui ont aimé ou pratiqué les arts, qui leur fournissaient leurs matériaux ou auxquelles on devait quelques inventions. Ainsi, les tapis d'Alexandrie sont rangés à leur place alphabétique, de même que les chaussures et les vêtemens de diverses contrées, et même les frondes de l'Acarnanie. Le genre de ses recherches lui a fait admettre dans son catalogue une foule de divinités, de héros, de rois et d'autres personnages mythologiques, historiques, de peuples, de villes, qui n'ont avec

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KELMANN, de STOSCH, de BRACCI, de MILIZIA, et de quelques autres écrivains. M'étant borné à indiquer les principaux auteurs où les artistes se trouvent cités, ce n'étaient qu'une simple nomenclature et une indication des siècles où ces artistes avaient vécu. Plusieurs ouvrages sur le même sujet parurent depuis 1820, et entre autres ceux de MM. SILLIG, THIERSCH, MEYER, WELCKER, OSANN, De KOEHLER, et ils me servirent à refondre et à améliorer mon travail. En 1829, pour me débarrasser de mon manuscrit, que les corrections, les ratures, les surcharges, rendaient presque illisible, je le fis imprimer. Mais comptant n'en faire usage que pour demander des conseils, je ne tirai cette Table qu'à 100 exemplaires (1). Y ayant trouvé des

les arts, et même les métiers, que des rapports si éloignés, que M. Jules Sillig a pu, en toute conscience, les élaguer de sa Liste (Catalogus Artificum, etc. Dresdæ et Lipsie, 1827). On ne saurait trop regretter de ne pas trouver parmi les artistes: Apollon, Arachné, Attalus, qui inventa les dés; Aurus, qui trouva l'or, les habitans du Caucase; Capanée, inventeur de l'échelle; le roi Malleus (marteau), auquel on doit la trompette; Mercure, Osiris, Pallas, Pan, Pilumnus, qui le premier fuma la terre; Proserpine, le patriarche Saruch, le premier qui fit des statues, et Caïn, et Tubalcain, et Vulcain, et tant d'autres qu'il serait trop long et très-inutile de nommer. Aussi M. Sillig, usant des droits d'une critique éclairée, et discutant avec sévérité les manuscrits de Pline et d'autres auteurs, a-t-il eu raison de refuser à cinq ou six cents noms le droit d'entrée dans son ouvrage; mais il en a ajouté un grand nombre échappés à Junius, ou qui n'ont été découverts que depuis lui. D'après le relevé que j'ai fait du livre de M. Sillig, il contient: ARCHITECTES, 107, dont quelques-uns furent sculpteurs; PLASTICIENS ou MODELEURS (PLASTE, FICTORES), 6; STATUAIRES, dont environ une trentaine furent aussi sculpteurs en marbre et ciseleurs, 206; SCULPTEURS, dont plusieurs exercèrent la statuaire ou la sculpture des statues en bronze, 96; GRAVEURS EN PIERRES FINES (SCALPTORES), 93; CISELEURS (CELATORES), 30; PEINTRES, dont un très-petit nombre furent aussi sculpteurs, 215; MOSAÏQUISTES (TESSELARII) et ARTISTES sans désignation précise, 10. Total 766,

(1) Voici l'AVERTISSEMENT que, par précaution, j'avais mis à la tête de ma Table des Artistes imprimée à Toulouse en 1829, in-8°. de 85 pages: « Il ne me semble pas hors de propos de prévenir les personnes instruites entre les mains de qui pourra tomber cette Table alphabétique, ou qui voudraient bien l'accepter, que ce n'est pas proprement un ouvrage, mais une simple ébauche, un essai que je n'ai fait imprimer que pour me débarrasser de mon

fautes typographiques et d'autres espèces qui m'avaient échappé malgré mes soins, je n'en donnai que quelques exemplaires, en avertissant de ne pas s'y fier et en indiquant les corrections à faire. C'étaient un essai et une édition à supprimer, et c'est ce que j'ai fait. Des mémoires, des critiques sur les artistes de l'antiquité avaient été publiés depuis, je devais en profiter, et c'est aussi ce qui a eu lieu pour les tables suivantes.

Bien que je ne sois pas toujours de l'opinion de M. Sillig sur quelques époques des artistes anciens, ses discussions chronologiques, pleines de sagacité, m'ont été trèsutiles, et je me plais à reconnaître tout ce que je dois à son excellent Catalogue. J'ai aussi de véritables obligations aux Epoques des Beaux-Arts chez les Grecs (en allemand), par M. Frédéric THIERSCH, professeur de Munich; aux Eginetica de M. C. MÜLLER, professeur de Berlin; à l'Histoire de l'Art de M. MEYER (en allemand), et à des Dissertations que MM. HIRT d'Heidelberg, SCHORN de Stuttgard, NOEHDEN, OSANN, DE KOEHLER, BOETTIGER, ont insérées dans les recueils publiés par ce dernier savant sous les titres d'Amalthea et d'Archéologie et Beaux-Arts (en allemand). Celui que M. Wr WELCKER, professeur de Bonn, et l'un des hommes les meilleurs à connaître sous tous les rapports, avait commencé à donner sous le titre de Zeitschrift, écrit périodique sur les arts et la littérature des anciens, m'a prêté plus d'une fois son secours. Je me suis aussi servi des additions qu'il a faites au Catalogue de M. Sillig, d'après plusieurs Recueils d'inscriptions, et qu'il avait tirées, en grande partie, ainsi que je l'ai fait depuis lui, du grand et superbe ouvrage (Corpus Inscriptionum græcarum) où M. BOECKH et M. C. Otfried MÜLLER ont été chargés, par le roi de Prusse et par l'académie de Berlin, de réunir en un seul corps toutes les inscriptions grecques qui existent. Ce trésor et la Sylloge, etc., de M. Osann m'ont fourni un assez bon nombre d'artistes anciens à

manuscrit, et le remplacer par plusieurs copies. Aussi ne l'ai-je tiré qu'à cent exemplaires, qui ne seront pas mis en vente et qui ne sont destinés qu'à des personnes aux connaissances et à l'obligeance desquelles j'aurai recours, pour que, m'aidant de leurs conseils, elles me facilitent, par leurs observations, les moyens de donner à mon travail toute la perfection dont il est susceptible.

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ajouter à ceux de ma première Table, mais peu de sculpteurs et de peintres à celle de 1829. Une classe cependant s'est vue beaucoup augmentée, et je la donne aussi complète qu'il m'a été possible de me la procurer, c'est celle des peintres dont les noms se trouvent sur les vases de terre ornés de peintures (1), dont les fouilles faites dans le territoire de l'ancienne Vulci, ceux de Canino et de Tarquinii (aujourd'hui Corneto), par le prince de Canino et MM. Candelori, Campanari, Feoli, ont produit, depuis quelques années, une si grande quantité. Ces nouvelles mines archéologiques ont enrichi de plusieurs noms la nomenclature des peintres et des potiers étrusques ou de l'ancien style grec, qui jusqu'alors étaient très-peu nombreux. Ces artistes sont d'autant plus intéressans qu'ils appartiennent à des temps assez anciens. Ce n'est pas qu'on soit autorisé, d'après les suppositions de M. le prince de Canino sur Vetulonia (Vithlon), capitale des Volscii, à les faire remonter avec lui vers les temps anté-homériques ni même à la fondation de Rome. Les noms de personnages grecs très-connus, le caractère de l'écriture et de l'orthographe que présentent ces vases, et que nous offrent quelques inscriptions de dates certaines m'ont toujours fait penser que l'on ne pouvait pas leur assigner une si haute antiquité; et je me trouve pleinement confirmé dans cette opinion par celle de mon ami M. Millingen, qui ne croit pas que les plus anciennes inscriptions de ces vases dépassent le milieu ou tout au plus le commencement du VIe siècle avant J.-C. Les inscriptions athéniennes, ou marbres de Nointel du Musée Royal, Nos. 122 et 122 bis, fournissent quelques noms pareils à ceux de plusieurs de ces peintres des vases, avec une écri

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(1) Les archéologues ne sont pas encore d'accord sur la dénomination à adopter pour désigner cette branche de la peinture antique. M. Quatremère de Quincy l'appelle KERAMO ou CÉRAMOGRAPHIE, qu'il tire de xipupos, vase, tuile, brique. D'autres, et parmi eux MM. Bottiger, Vermiglioli et Fréd. Creuzer, préfèrent l'expression d'OSTRACOGRAPHIE, mot composé d'öspaxo, qui signifie aussi vase, tuile, brique. Le peu de différence du sens de ces mots nouveaux et le choix que l'on peut en faire doivent sembler d'une petite importance; mais CÉRAMOGRAPHIE, qui d'ailleurs rappelle le Céramique, les tuileries d'Athènes, me paraît plus agréable qu'OSTRACOGRAPHIE. Voyez Fr. Creuzer, Alt-Athenaïsches Gefass. Leipsic et Darmstadt, p. 48-51.

ture à peu près semblable, et l'on n'y trouve de même I que comme aspiration et non comme voyelle, le = et le y sont aussi séparés en deux sons et exprimés par ×Σ et par E. Ces inscriptions sont, comme l'on sait, de la 88.1 olympiade, 457 avant J.-C. : la plupart des plus anciens peintres de vases ne doivent pas remonter beaucoup au-delà, et ils sont probablement moins anciens que la troisième de nos belles inscriptions Choiseul, No. 597 (voy. mon Musée de Sculpture antique et moderne, v. 2, pl. xi, xii, xIII des inscriptions), où l'on ne trouve l'H employé que comme signe numérique, et où, du reste, cette lettre n'est pas admise même comme aspiration.

Pour tout ce qui a rapport aux peintres des vases, je ne pouvais avoir de meilleur guide que le savant et intéressant rapport sur les vases de Vulci, inséré par M. Gerhard dans le 3o. vol. de l'Institut de Correspondance archéologique. C'est cet ouvrage que j'ai suivi, après avoir eu d'abord recours au Catalogue du prince de Canino. Autant qu'il m'a été possible, j'ai donné les noms de ces anciens peintres avec les caractères archaïques qu'on leur voit sur les vases, et que j'ai eu le soin de faire graver. Mais cependant les mêmes lettres, et peut-être de la même époque, présentent souvent des variétés qui ne tiennent qu'à la main de l'ouvrier qui les traçait ou avec négligence ou ne sachant pas mieux écrire. Devrait-on tant s'arrêter à ces minuties, et s'en servir à établir des règles de paléographie et d'orthographe? Ne serait-il pas mieux de ne regarder ces prétendues variétés que comme de véritables fautes? Je pourrais indiquer, dans une église de village peu éloigné de Paris, une superbe inscription sépulcrale, très-longue, de vingt-cinq lignes, en français avec quelques mots en latin, très-bien gravée et dorée, sur marbre noir, où, malgré ces recherches de travail, il y a quinze fautes, presque toutes grossières, telles que REQUIES CAT IN PACE. Et qui sait si un jour ce monument, devenu précieux, ne servira pas à prouver que c'était ainsi qu'en 1773 on écrivait le français et le latin aux environs de Paris, et à Paris même, où le travail du marbre peut faire croire que cette inscription a été gravée? Aussi ai-je cru pouvoir me dispenser de faire graver des poinçons pour des lettres d'une forme singulière, mais qui ne se présentent que très-rarement dans les inscriptions des vases.

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