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indifféremment les engrais, ils sont relatifs à la nature de la terre végétale; on doit donc s'appliquer d'abord à connoître ses variétés et les moyens de déterminer ses parties constituantes.

Quoique la végétation dépende essentiellement de l'eau, de la chaleur, de l'air et de la lumière (1), cependant la nature du sol où elle a lieu influe; si après l'humus les terreins offrent des roches solides, les racines ne peuvent que taller, les arbres n'y prennent point leurs forces et sont d'une vie plus courte.

Je pense qu'on doit diviser les terres végétales ou propres à la végétation,

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Tous les végétaux ne sont pas propres à former l'humus ou terre végétale; la plante dont le tissu est herbacé et juteux, se flétrit, se résout en pâte et moisit; tandis que celles dont le tissu est plus solide, telles que les feuilles des arbres, commencent par jaunir, ensuite elles brunissent, et s'échauffent si elles sont entassées un peu humides; elles finissent par se déformer. Pendant cette altération elles ne répandent point d'odeur, quoique l'huile et la partie extractive de la plante se décomposent. Après le laps de six mois, ces feuilles offrent un nouveau mixte pulvérulent, encore entremêlé de débris de végétaux, ainsi se forme le terreau, humus levis.

C'est dans les marais qui avoisinent les grandes villes, où l'industrie stimulée par l'intérêt force la nature à fournir des prémices, que , que les maragers obtiennent à bon compte des fourneaux en formant des couches. C'est, comme on sait, de la li

(1) Les plantes qui croissent sans l'accès de la lumière, s'étiolent, perdent leurs formes, et prennent une couleur d'un blanc-jaunâtre. La chicorée sauvage qu'on fait végéter dans le sable humide à la cave, en est un exemple.

tière ou paille peu altérée qu'ils déposent en parallélipipèdes de quatre pieds de large sur trois de hauteur, et sur une longueur indéterminée. Ils les couvrent de huit pouces de terreau qu'ils. arrosent; il s'excite une forte chaleur; lorsqu'elle est en partie tombée, on sème sous cloche; une douce chaleur tempère le froid de la nuit, ajoute à celle du jour; c'est ainsi qu'on accélère la végétation.

Au bout de six mois la litière se trouve convertie en terreau.. Le temps aidé de l'eau, de la chaleur et de l'air, détruit les restes du tissu végétal; il en résulte une terre brune-foncée plus compacte que le terreau: tel est l'humus.

Dans la terrification les principes des végétaux éprouvent des modifications bien sensibles, puisqu'on ne retrouve plus dans l'humus ni l'huile, ni l'acide, ni l'alkali, ni les terres qui composoient les végétaux. Ces principes se sont modifiés et combinés de manière à offrir de nouveaux composés qu'on extrait de l'humus en le lavant. En effet, on en retire essentiellement de l'argile et du quartz, vérité que j'ai démontrée. C'est au fer des végétaux que l'humus doit sa couleur brune, on peut en séparer ce métal à l'aide du barreau aimanté; mais il faut pour cet effet que l'humus ait été calciné. Becher a fait connoître que les végétaux contiennent une petite portion d'or que l'on peut extraire de la terre végétale. Schéele a démontré que la manganèse faisoit partie des végétaux. Darcet y a trouvé de la magnésie; ils contiennent aussi une terre congénère de celle des os.

Veut-on s'assurer de la nature et de la proportion des terres qui composent l'humus, il faut en prendre une quantité déterminée, la dessécher et la peser; il faut ensuite la délayer dans de l'eau distillée, l'agiter et laisser précipiter le sable, qu'on lave jusqu'à ce qu'il soit devenu blanc; on pèse l'argile desséchée ainsi que le sable.

On s'assure de la pureté de l'argile en versant dessus de l'acide nitreux; l'effervescence y décèle la présence de la terre calcaire ; on détermine les quantités respectives de l'une et de Pautre en lavant le résidu, le desséchant et le pesant; ce qui reste est de l'argile pure.

On détermine ensuite la nature des sels que l'eau des lotions de la terre végétale peut contenir; si elle a dissous de la sélénite, elle précipite la dissolution de terre pesante; si elle contient du sel marin, elle décompose le nitre lunaire, et il se forme de l'argent corné.

L'évaporation de cette eau fait connoître la quantité de nitre

ou salpêtre que contient la terre végétale; celles des parties méridionales de l'Espagne en contiennent beaucoup plus que celles de France.

Enfin s'il y a quelque matière extractive dans l'humus, elle se trouve dans l'eau, et s'obtient par l'évaporation. Ce moyen d'analyse peut être employé pour toutes les espèces de terre.

Le terreau et l'humus se détériorent par le concours simultané de l'eau et de l'air; souvent l'eau entraîne l'argile, et il ne reste plus que la partie quartzeuse.

L'argile extraite des lotions du terreau, est d'un brun-noirâtre, a beaucoup de gluten, et ressemble à la terre d'ombre.

En supposant que le terreau, que l'humus ne s'altèrent pas, ils ne seroient pas propres à servir de suite à la culture de la même semence céréale, parce qu'il se sépare de ces plantes une fèce qui leur est nuisible, et qui l'est aussi le plus souvent aux plantes qui les avoisinent; l'avoine souffre beaucoup du serratula arvensis, la carotte de la grande consoude.

Brugmans, dans une dissertation sur le lolium raygrass,im-* primée en 1785, a prouvé que les plantes se débarrassoient des sucs impurs par déjections comme les animaux (1). Ce physicien ayant mis du raygrass dans un vase transparent plein d'eau, vit chaque jour à l'extrémité des racines, une gouttelette d'une matière visqueuse, qui s'étoit séparée pendant la nuit ; il la détachoit, et le lendemain il en trouvoit une autre.

Si les déjections d'une même espèce de plantes nuisent aux plantes de la même famille, elles servent d'engrais à d'autres ; par exemple, un champ fatigué de rapporter du trèfle, étant ensemencé de froment, en donne une abondante récolte.

La jachère (2), et sur-tout les nouvelles surfaces qu'on fait présenter à la terre par le labour, atténuent et détruisent ces déjections.

Lorsque le cultivateur rempote les plantes, change leur terre, il les débarrasse de leurs déjections; ce soin annuel concourt à leur vitalité.

L'air, la chaleur, la lumière et l'eau doivent être considérés comme les véritables causes de la végétation; la terre ne doit être regardée que comme un auxiliaire propre à retenir l'eau à

(1) Plantas animalium more, cacare primus exploravit vir indefessus Brug manus. Humboldt dans ses aphorismes.

(2) La jachère est une oisiveté périodique de la terre, nuisible à la société.

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la manière d'une éponge; mais cette terre doit être assez meuble pour permettre aux fibres délicates des racines de se développer, de s'étendre et de croître, propriété qu'ont le terreau, l'humus, la terre de bruyère, la poudrette et le limon du Nil.

Si la terre est trop arénacée, l'eau s'écoule, s'évapore trop promptement; les racines se dessèchent, la plante se fane, languit et meurt.

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La terre n'introduit rien de sa substance dans les végétaux, ce qui est prouvé par une expérience de Vanhelmont. Il mit dans une caisse cent livres de terre, il y planta un saule pesant 50 livres ; il couvrit la caisse avec une plaque d'étain, il arrosa la terre avec de l'eau pure: au bout de cinq ans l'arbre pesoit 169 livres 3 onces; la terre n'avoit perdu que 2 onces.

Si la terre végétale est trop argileuse, elle retient l'eau à sa surface. Se dessèche-t-elle ? le collet et les fibres de la jeune plante sont comprimés, la circulation de sa sève est interrompue, la plante languit et meurt.

L'humus, ou terre végétale, friable, d'un brun-noirâtre, ne se trouve que dans les endroits qui ont été longtemps couverts de bois; encore n'y a-t-elle que peu d'épaisseur. Rudbeck dit que l'humus a ordinairement six pouces d'épaisseur dans les endroits qui n'ont point été habités depuis le déluge, et qui ont

été couverts de bois.

La terre des champs que l'on cultive, varie singulièrement par les proportions d'argile, de quartz ou de terre calcaire qu'elle contient; elle est formée des débris des trois règnes: aussi n'a-telle pas une couleur noirâtre comme le terreau et l'humus.

On nomme terre franche, celle qui est sans pierres ni gravois ; elle se paîtrit aisément et tient aux doigts. On la nomme landı dans le Blésois; elle est si tenace qu'on l'emploie pour bâtir, elle tient lieu de mortier.

La terre meuble est légère et en poussière. Les jardiniers l'appellent miette.

On nomme terre forte, celle qui contenant trop d'argile, ne peut devenir propre à la végétation.

On nomme terre grouette, celle qui est pierreuse, et qu'on passe à la claie pour l'améliorer.

La terre végéto-animale qui résulte de l'altération des matières stercorales des hommes, est nommée poudrette, pulvis stercoreus, humus vegeto-animalis.

L'expérience de tous les temps et de tous les pays a fait connoître que les matières stercorales des hommes, après avoir été

desséchées, se convertissoient en une espèce de terreau inodore qu'on peut employer en nature, ou comme engrais. Cette terre vegéto-animale est aussi employee depuis un temps immémorial

à la Chine.

C'est dans les voieries des grandes villes qu'on prépare la poudrette, en exposant la gadoue sur un espace pave en pente douce, afin que la matière fluide puisse s'écouler La matière fécale s'échauffe, se dessèche et brunit; on la divise avec la herse pour lui faire présenter de nouvelles surfaces; on achève la dessication en la mettant sous des hangards où elle s'échauffe encore, ensuite on la divise au moulin d'où elle sort sous forme d'une matière pulvérulente, brune, inodore, ayant la couleur et l'apparence du tabac rapé; c'est dans cet état qu'elle porte le nom de poudrette et de poudre végétative inodore de Bridet. L'analyse m'a fait connoître qu'elle contenoit par quintal :

Terreau végétal...

16 liv.

Matière animale élaborée par la putréfaction... 16
Sels vitriolique et marin à base calcaire....

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Des hommes justement célèbres de diverses compagnies savantes, ont suivi l'emploi de la poudrette, et en ont rendu un compte intéressant, comme engrais; effet qui me paroît devoir être principalement attribué au sixième de inatière animale élaborée qu'elle contient.

La poudrette peut être substituée avec avantage à la terre de bruyère pour les semences et la culture des plantes délicates.

Le Nil dépose sur les terres d'Egypte un limon d'un brunnoirâtre, lequel joint à l'eau qui pénètre les terres, les fertilise. Dès que le Nil est rentré dans son lit, on sème le blé sur le limon, on y passe la herse en novembre, et au printemps suivant on fait la récolte.

Le docteur Shaw a reconnu que l'eau du Nil étoit chargée d'un cent vingtième de limon; aussi le lit de ce fleuve augmente-t-il tous les jours. Ce limon a encombré de sept pieds la base de

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