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cette Bibliothéque Françoife, lefquels je mettray expressément en avant pour respondre à plusieurs qui parlent avec assez peu de respect des autheurs, en les calomniant le plus fouvent en chofes toutes fauffes.

Voicy doncques ce que j'ay à dire touchant ceux qui diront que je me fuis fervy des efcrits d'autruy pour mettre en mon livre: j'advoue que M. le Préfident Fauchet a fait imprimer depuis quelques années en çà un Catalogue des anciens Poëtes François, duquel le nombre eft de cent vingt & Sept, & ne veux pas nier d'autre cofté que Jean de Noftredame Provençal, homme docte, (lequel eft frere de Michel de Noftredame, dit Noftradamus, tant renommé

je

par les Aftrologues, &c.) n'aye fait imprimer un fien livre des anciens Poëtes Provençaux, lequel contient les noms de foixante & feize Poëtes. Ce que j'ay desjà advoué en ce mien œuvre de la Bibliothéque Françoise, lorsque j'ay fait mention dudit Jean de Noftredame, & encore n'aypas voulu celer comment je me suis aydé du livre dudit fieur Claude Fauchet, car en plufieurs endroits de mon livre je mets ces deux lettres C. F. après que j'ay parlé de ceux qu'il a alléguez, & cela fignifie le nom dudit fieur Préfident. Mais il confeffe en fon livre en avoir efté secouru de la plus grande partie par M. de Roiffy, Meffire Henri de Mesmes, duquel j'ay veu le livre escrit à la main fur parchemin, avec les Chanfons en musique desdits an ciens Poëtes. Ce que j'allégue, afin de monstrer que fi les

uns

uns ont eu fecours de livres par aucuns, l'on les a aussi bien peu voir comme eux, & toutesfois je n'en veux demeurer ingrat, mais recognoître ceux desquels je me seray servy ou aydé.

Quant aux autres autheurs desquels je fay mention en mon œuvre, je je les ay veuz ou leuz, & les ay encore pardevers moy pour la plus grande partie, fans que je les je les aye empruntez, car je diray bien celà que je n'en ay oncques deu à aucun Libraire, & fi j'en ay achepté pour plus de dix mille livres depuis quinze ou seize ans que j'ay commencé à aymer les lettres. Et ce qui eft le plus à admirer en cecy, touchant une fi curieuse recherche, c'eft que j'ay efté dix ans & plus, abfent de la Ville de Paris, fçavoir eft, depuis l'an 1 571 jusques en l'an 1 582. Ce que j'ay bien voulu dire, pour monstrer que fi j'eusse fait ma demeure ordinaire en icelle Ville, que j'eusse bien un plus grand nombre de livres que je n'ay pas, & eusse peu recueillir plus d'autheurs pour les employer en ce Catalogue. Mais avant que passer plus avant fur autre propos, je diray que ceux qui voudront juger de ma façon d'escrire, & qui voudront prendre garde, fi j'ay bien parlé en noftre langue, & ufé de façons ordinaires aux bons historiens, que ce n'est pas icy que je l'aye peu monftrer. Car qui auroit entendu combien j'ay esté preffé en cet ouvrage, il admireroit peult-estre celà plus que toute autre chose dont il aye ouy parler. Et à fin que j'en laiffe quelque chose par escrit, non à autre intention

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que pour me justifier à l'endroit de ceux qui ne demandent qu'à trouver à reprendre pour s'en prévaloir; j'ofe ray fouftenir qu'il ne fe trouvera point d'œuvre tel que ceftuy-cy qui aye efté imprimé de la façon, & en appelle tous les Imprimeurs & Libraires à tesmoings, & autres qui font versez en cet art; car je peux affeurer qu'il ne s'est paffé jour depuis le premier que j'ay mis cet œuvre fur la presse, qu'il ne m'ait esté de besoin de fournir aux Imprimeurs un cayer de copie, qui font douze pages d'escriture, ou bien (pour le mieux donner à entendre) trois feuilles de grand papier remplies de douze faces ou costez de minute efcrite de ma main, contenant chacune page plus de quarante lignes, & chacune ligne plus de douze fyllabes, pour fournir à deux compositeurs qui travailloient sur ce livre ; ce que je repete assez amplement, afin que cela me ferve contre ceux qui font plus prefts de calomnier que de bien dire, ou parler des autheurs à leur louange. J'adjousteray encores qu'il n'y a aucune copie de ce livre que celle qui est escrite de ma main, & laquelle j'ay expreffément retirée par devers moy pour m'en fervir de preuve quand il feroit de befoing de monftrer comme le tout s'est fait, mesmes jusques à là que d'avoir minuté la table & encores les faultes furvenues en l'impreffion de ce livre, qui font choses que les Autheurs font ordinairement faire par autruy. Mais j'ay tant de defir que tout ce que je fay foit felon ma volonté, que je ne m'en fie ou rapporte

qu'à moy-mefme. Et outre-plus je laissois à dire qu'il ne s'est passé jour que je n'aye veu quatre espreuves, qui sont les corrections des feuilles que l'on imprime. Et fi quelques-uns entrent en defcroyance de cecy, qu'ils s'enquierent comme le tout s'eft paffé: la chose eft récentement advenuë, & par conféquent plus prefte à en fçavoir la vé

rité.

Davantage il n'y a eu jour durant cette entreprise, que je n'aye esté visité par plufieurs hommes de marque, lefquels j'ay tellement entretenuz que ils n'euffent pas fçeu que je faisois imprimer mon livre, finon qu'ils voyoient en leur présence que l'on m'apportoit des efpreuves ou feuilles à corriger.

Or pour venir à parler d'autres choses, j'ay à vous fupplier de croire que je n'ay obmis aucun en ce Catalogue des Efcrivains François, duquel j'aye peu avoir cognoiffance: que s'il s'en trouve quelques-uns qui fe plaignent d'y en voir les uns compris en ce livre & les autres obmis, qu'ils fçachent que nous ne l'avons point fait expressément, ou bien comme étans poulfés & induits à celà pour quelque occasion: car tant s'en faut que je n'eusse bien voulu y comprendre ceux qui méritent beaucoup, que mesmes je ne doute pas qu'il n'y en ayt en ce livre qui sont de fi peu de valeur, & fi peu de recommandation, que je sçay bien que telle fois j'auray parlé d'un valet ou d'un homme encores plus vil & abject: mais en cela nous n'a

vons eu efgard que pour fatisfaire à noftre principal deffein, qui eftoit de nommer toutes fortes d'autheurs, tant doctes qu'ignorants, & la différence que nous avons faite entre ces deux fortes d'hommes eft telle, que nous loüions les fçavants (felon leur mérite) & quant aux autres, les paffons foubs filence, & nous ne disons chose d'eux qui soit à leur blasme ou def-avantage: car nous recitons feulement leurs œuvres & compofitions, nous réservant à en donner noftre jugement autre part.

nous

Je diray encores, que fi ce Catalogue n'eft remply de plufieurs autheurs qui ont compofé, que je n'ay pas telle cognoiffance de leurs efcrits comme je defirerois l'avoir, car j'en eusse fait mention: mais vous sçavez que si ce font livres non encores mis en lumiere, & lefquels font pardevers les autheurs d'iceux, je ne les ay peu comprendre en ce livre, n'eftant pas un Dæmon, mais bien homme comme les autres, & par conféquent qui n'a cognoisfance que des choses communes à tous autres qui entreprendroyent d'efcrire un tel fubject qu'eft cettuy-cy. Et avant que finir ce propos, je veux bien advertir ceux qui ne verront ici leurs efcrits tant imprimez qu'autrement, que fi je ne les ay nommez ou parlé d'eux, que ce fera pour la feconde édition de ce livre. Donques à fin qu'il ne tienne à mon devoir & à ma diligence qu'ils ne foyent compris en cet œuvre, je les advertis que s'ils defirent tant m'honorer, que de m'envoyer le Catalogue de leurs efcrits & com

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