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agit avec plus d'activité et plus d'ordre; les chefs combattant pour la même cause, ayant un intérêt commun, marchant au même but, réunirent leurs forces dispersées, et formèrent sur la rive droite de la Sèvre (qui prend sa source audessus de Saint- Maixent, et se jete dans l'Océan au-dessous de Marens), la grande-armée vendéenne, où l'on remarqua les chefs qui avaient le plus de mérite, et qui acquirent le plus de réputation. Cependant cette grande armée ne fut point encore confiée à la direction d'un chef unique; Bonchamp, qui combattait souvent avec elle, ne recevait d'ordres de personne, et la seule influence qu'il y exerçât, n'était due qu'à ses connaissances militaires et à la prudence de ses conseils, que l'on suivait souvent, bien que ses collègues l'accusassent de montrer quelquefois de la tiédeur, c'est-à-dire, d'opposer le talent et la sagesse à une exaltation insensée, qui rend presque toujours les hommes injustes et féroces. Bonchamp était aussi malheureux que brave. Il prenait rarement part à une action sans être blessé. Dès le commencement de la guerre, il le fut grièvement, et les opérations militaires souffrirent beaucoup des absences forcées d'un chef aussi distingué. Pendant l'une d'elles, les autres chefs attaquèrent Fontenay; cette tentative échoua, et fut renouvelée huit jours après. A cette seconde attaque, Bonchamp fut un des premiers qui entrèrent dans la ville; il y reçut encore une blessure dangereuse, ce qui l'empêcha de concourir à la prise de Saumur et d'Angers.

L'armée vendéenne tenta d'entrer à Nantes; elle fut repoussée, et Bonchamp eut le coude fracassé; il fut de nouveau hors d'état de combattre pendant quelque temps. Dans cet intervalle, d'Elbée se fit élire généralissime, au très grand mécontentement des hommes raisonnables qui auraient désiré voir cette place remplie par Bonchamp: celui-ci en apprit la nouvelle sans regret; il parut seulement fâché qu'on eût choisi pour chef celui des généraux qui passait pour avoir le moins de capacité. Le gouvernement républicain sentant la nécessité de faire un effort décisif, pour soumettre la Vendée, y envoya, vers septembre 1793, une armée nombreuse, commandée par des officiers éprouvés. Bientôt le Bas-Poitou fut envahi, et les débris de l'armée de Charette, qui venait d'être complétement battue, arrivèrent dans le plus grand désordre sur les bords de la Sèvre, obligés d'implorer le secours de la grandearmée vendéenne. Cette défaite compromettait le salut de la cause: il n'y eut qu'une opinion sur le parti qui restait à prendre; ce fut de rassembler toutes les forces et de les opposer à l'intrépide garnison de Mayence, qui, par des prodiges de valeur, soutenait la gloire immortelle qu'elle s'était acquise sur le Rhin pendant un siége mémorable. Les Vendéens firent les plus grands efforts, et se maintinrent durant quelques heures devant ces redoutables soldats: Bonchamp, encore souffrant de sa dernière blessure, et le bras en écharpe, arriva avec sa division, et décida la victoire en faveur des

insurgés; mais ils ne la durent qu'à leur grand nombre, et à la lassitude des républicains, qui, quoique entourés de toutes parts, et dans un pays couvert et presque sauvage, opérèrent cependant leur retraite avec succès. La victoire ne fut pas aussi complète queles Vendéens l'avaient cru d'abord, et cependant elle exalta l'imagination de quelques chefs, et fit changer les plans. On résolut de réunir toutes les forces, et de les diriger contre la garnison de Mayence, afin de l'arrêter dans sa retraite. Bonchamp n'étant point instruit assez à temps de ce dessein, attaqua les républicains et ne leur fit éprouver qu'une légère perte. C'est à ces causes, sans dou te, que l'on doit attribuer la mésintelligence qui ne tarda pas à éclater parmi les chefs royalistes. Charette voulut isoler ses opérations, et il sépara de la grandearmée le corps qu'il commandait, au moment où la Vendée se trouvait assaillie sur tous les points. Châtillon, considéré comme le foyer de l'insurrection, fut successivement pris par les républicains, et repris par les royalistes. La garnison de Mayence, plus forte par la jonction de quelques autres troupes, s'avançait du côté de Mortagne; Lescure lui livra bataille à Tremblaye, avant l'arrivée de l'armée d'Anjou, commandée par Bonchamp. Victime de son imprudence, Lescure fut blessé à mort, et vit la défaite de tout le corps qui était sous ses ordres. Profitant habilement de la mésintelligence qui régnait parmi les insurgés, et des succès qu'ils venaient d'obtenir, les républi

cains se dirigèrent sur Chollet. Bonchamp sentit tout le danger de la position de la grande-armée, qu'une bataille pouvait anéantir. I jugea prudent de se ménager une ressource au-delà de la Loire, et de profiter, en même temps, de l'avis qui venait de lui parvenir qu'un soulèvement général allait avoir lieu en Bretagne, où d'ailleurs il avait personnellement de l'influence. Cette sage proposition, d'abord combattue vivement par quelques chefs poitevins, qui ne voulaient pas quitter la Vendée, fut cependant adoptée à la fin; on s'assura du passage de la Loire; mais on avait perdu du temps et fait des dispositions insuffisantes. Le 17 octobre 1793, les armées en vinrent aux mains devant Chollet. Les républicains combattirent avec leur courage ordinaire, et jamais les Vendéens n'avaient montré tant de valeur et d'acharnement. D'Elbée était déjà blessé à mort, quand Bonchamp reçut dans la poitrine une balle qui le renversa. Les royalistes alors abandonnant le champ de bataille, ne songèrent plus qu'à effectuer le passage de la Loire, que les républicains, affaiblis par de grandes pertes, ne cherchèrent point à empêcher. Pendant ce temps, Bonchamp éprouvait une lente agonie; il expira, après vingtquatre heures de souffrances, au moment où on l'enlevait de la barque qui avait traversé le fleuve pour le transporter à terre. C'est une opinion assez généralement reçue, que cet illustre chef, avant de mourir, avait demandé la grâce de 5.000 républicains conduits au bord de la Loire, où l'on devait

les fusiller, lorsque les débris de l'armée vendéenne allaient passer cette rivière. Les biographies précédentes rapportent le même fait; mais l'une d'elles adoptant moins légèrement cette opinion, fait remarquer que du moment qu'il fut frappé jusqu'à sa mort, Bonchamp demeura sans connais sance, ou dans un état d'agonie. Elles ajoutent que c'est à l'humanité de presque tous les autres généraux vendéens que les cinq mille prisonniers républicains durent la vie. Quelques mois après, disent les mêmes auteurs, pour sauver Ma de Bonchamp, qui était prisonnière à Nantes, et qui avait été condamnée à mort par une commission militaire, plusieurs de ces généraux attestèrent qu'elle avait engagé son mari à user de son pouvoir pour faire rendre la liberté aux prisonniers. La convention nationale adopta ce moyen. Elle accorda un sursis à cette dame; plus tard, sur la proposition de M. Pons de Verdun, le jugement de la commission militaire fut définitivement annulé. Nous n'émettons aucune opinion sur le fait attribué à Bonchamp; mais que les cinq mille prisonniers doivent la vie à ce chef ou aux autres généraux vendéens, on reconnaît des Français à un trait si généreux: il y en avait donc dans les deux partis!

BONCOMPAGNI (IGNACE), d'une famille originaire de Bologne, descendait d'un fils naturel de Grégoire XIII. Ce fut, dit-on, à la considération dont jouissait son père, alors prince de Piombino, qu'il dut le chapeau de cardinal, après avoir néanmoins par

à

couru tous les degrés de la hiérarchie ecclésiastique. Il était jeune encore, quand il parut à Bologne avec le titre de vicelégat d'abord, et celui de légat qu'il prit bientôt après. Son premier soin dans cette ville fut d'opérer un grand nombre de réformes, et de détruire les priviléges, double mesure qui lui fit beaucoup d'ennemis. Joseph II, passant à Bologne, fut charmé de rencontrer un homme dont l'esprit philosophique et réformateur avait tant de rapport avec le sien; et dès que ce prince fut à Rome, il en parla si avantageusement à Pie VI, que S. S. n' n'hésita pas le nommer secrétaire-d'état. On accuse le cardinal Boncompagni d'avoir montré dans cet emploi un caractère dominateur; mais au fait, il se conduisit à Rome comme il l'avait fait à Bologne, cherchant et saisissant toutes les occasions d'abaisser l'orgueil des grands. Peut-être, comme Joseph II, mit-il trop de précipitation dans l'exécution de ses projets de réforme. Ce motif, joint au goût un peu vif qu'il avait pour les plaisirs, diminua singulièrement la faveur dont il jouissait dans l'esprit du pape; il acheva de perdre son crédit en se brouillant avec le cardinal Ruffo. Alors, sous prétexte de sa mauvaise santé, il se démit de l'emploi de secrétaire-d'état. S'étant rendu, en 1790, aux bains de Lucques, il y mourut, dans le mois d'août, à l'âge de 47 ans. Ses nombreux ennemis attribuent cette mort prématurée aux excès auxquels il s'était livré. Ils prétendent aussi que la nouvelle de la perte de ce

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