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Acer-Virginianum

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USAGE S.

L'Erable (n°. 1.) qui porte fes fleurs en grappes & qui a de grandes feuilles, a été fort à la mode pour faire des avenues & des falles dans les Parcs; mais on l'a prefque abandonné, parce qu'il fe dépouille de très-bonne heure, & que ses feuilles font prefque toujours dévorées par les infectes. Ceux (n°. 2 & 4.) ont les mêmes défauts; & tout leur mérite confifte dans la couleur de leurs feuilles.

Le n°. 3 fe diftingue du n°. 1. parce que fes feuilles font plus minces, & qu'elles ne font point blanches en-deffous: cet arbre a prefque les mêmes défauts que le n°. 1. Ses fleurs viennent par bouquets.

Tous ces arbres ont l'avantage de pouffer leurs feuilles dès le commencement du printemps. Les no. 7 & 8 ont les feuilles plus petites, & des fleurs raffemblées en petits bouquets: (les fleurs hermaphrodites font au fommet du bouquet.) Ces arbres forment d'affez belles paliffades qui réuffiffent dans les endroits où le Charme ne fait que languir.

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Le n°. 9 porte fes fleurs en petits bouquets, qui font compo-. fés de fleurs mâles & de fleurs hermaphrodites : les dernieres fe trouvent ordinairement au milieu du bouquet: il conferve prefque tout l'hyver fes feuilles qui font petites & épaiffes; néanmoins il convient mieux dans les bofquets d'automne que dans ceux d'hyver.

Le n°. 5, qui nous eft venu de Canada & que l'on appelle Plaine, porte fes fleurs en petits bouquets autour des branches: c'est un très-bel arbre; fes grandes feuilles deviennent en automne d'un rouge fort éclatant: le bois de cet arbre eft quelquefois ondé. On nous a envoyé de l'Ifle Royale des femences d'un Erable qu'on affure avoir plus particuliérement cette derniere propriété.

Nous avons encore un arbre qui n'eft qu'une variété de l'efpece précédente (n°. 5,) mais dont les feuilles deviennent moins. rouges en automne. C'eft peut-être l'individu femelle; car quelques Canadiens Botaniftes affurent que dans cette efpece il y a des arbres mâles & d'autres femelles. Nous en avons qui donnent des fleurs mâles (a). Au milieu des pétales qui forment la fleur, l'on apperçoit plufieurs fleurons (cd) qui ne renferment que des étamines (e), & qui font par conféquent ftériles: peutêtre les fleurs des autres font-elles hermaphrodites; c'est ce que nous n'avons pu encore vérifier.

Le n°. 6, qu'on nomme en Canada, Erable rouge, & qui eft à Trianon, differe peu du n°. 5, suivant la description que nous a envoyé M. Gaultier, & les obfervations que nous avons faites fur l'arbre de Trianon; les échancrures du calyce, au nombre de cinq (g), ainsi que les pétales font d'un verd jaune, liféré de rouge vif; dans le difque on apperçoit cinq ou fix étamines affez longues (k), qui prennent naiffance de la base du piftil (i). On voit fortir de chaque bouton cinq ou fix fleurs portées fur d'affez longs pédicules (f).

Le n°. 10 eft un arbre très-fingulier par fes feuilles qui reffemblent à celles du frêne; mais il ne fait que languir dans les terreins fecs. Ses fleurs viennent en forme de grandes grappes,

Suivant les Mémoires que M. Gaultier m'a envoyé de Canada, toutes les efpeces d'Erable n'y donnent point la liqueur dont on fait un fucre; & par les defcriptions qu'il m'a envoyées des deux efpeces qui fourniffent abondamment cette liqueur, il paroît que l'Erable blanc reffemble beaucoup à l'efpece n°. 1: néanmoins M. Gaultier ajoute que le bois de cet arbre est fouvent très-veiné, au lieu que le nôtre eft prefque toujours blanc. L'autre espece d'Erable, qui donne une liqueur fucrée, eft le n°. 6, qu'on nomme Plaine en Canada: fon bois eft ordinairement très-veiné.

Le n°. 11 nous eft venu de Canada: c'eft un très-bel arbre, fes feuilles font d'un beau verd; elles font découpées en trois très-profondément. Ses fleurs viennent au fommet des tiges, & elles font difpofées en grappes.

Nous avons encore plufieurs variétés de cette efpece, dont les feuilles font plus grandes, & dont les trois découpures font

accompagnées de quelques autres plus petites; mais l'on en diftingue toujours trois principales.

Notre efpece (no. 5,) qui nous eft venue auffi de Canada, reffemble beaucoup à la defcription que M. Gaultier donne de l'Erable-Plaine de Canada (n°. 6.) Ces arbres font encore trop jeunes ici pour avoir pu nous affurer fi leur bois eft ondé comme celui des Erables-Plaines dont parle M. Gaultier.

Quoi qu'il en foit, on diftingue en Canada la liqueur fucrée qui découle de ces deux arbres. Celle de l'Erable blanc, s'appelle Sucre d'Erable, & celle de l'Erable rouge ou Plaine, s'appelle Sucre de Plaine.

La liqueur de ces deux Erables eft, au fortir de l'arbre; claire & limpide comme l'eau la mieux filtrée; elle eft trèsfraîche, & elle laiffe dans la bouche un petit goût fucré fort agréable. L'eau d'Erable eft plus fucrée que celle du Plaine, mais le sucre de Plaine eft plus agréable que celui d'Erable. L'une & l'autre efpece d'eau eft fort faine; & on ne remarque point qu'elle ait jamais incommodé ceux qui en ont bu, même après des exercices violents & étant tout en fueur : elle paffe très-promptement par les urines. Cette eau étant concentrée par l'évaporation donne un fucre gras & rouffâtre, qui eft d'une faveur affez agréable.

On tire la liqueur d'Erable en faifant des incifions aux deux efpeces d'Erable dont on vient de parler; ces incifions fe font ordinairement ovales (1), & l'on fait enforte, non-feulement que le grand diametre foit à-peu-près perpendiculaire à la direction du tronc, mais auffi qu'une des extrêmités de l'ovale foit plus baffe que l'autre, afin que la feve puiffe s'y rassembler. On fiche au-deffous de la plaie une lame de couteau, ou une mince regle de bois, qui reçoit la feve & la conduit dans un vafe que l'on place au pied de l'arbre.

Si l'on n'emportoit que l'écorce fans entamer le bois, on n'obtiendroit pas une feule goutte de liqueur, il faut donc que la plaie pénetre dans le bois à la profondeur d'un, de deux ou de trois pouces; parce que ce font les fibres ligneufes, & non pas les fibres corticales, qui fourniffent la liqueur fucrée. M. Gaultier remarque expreffément que dans le temps que la liqueur coule, le liber eft alors très-fec & fort adhérent au bois,

&

& que cette liqueur ceffe de couler lorfque les arbres entrent en feve, lorfque leurs écorces fe détachent du bois, & enfin quand l'arbre commence à ouvrir fes boutons.

On peut faire les entailles dont on vient de parler, depuis le mois de Novembre, temps où les Erables font dépouillés de leurs feuilles, jusqu'à la mi-Mai, qui eft la faifon où les boutons commencent à s'ouvrir; mais les plaies ne fourniront de feve que dans le temps des dégels: s'il a gelé même assez fort pendant la nuit, la feve pourra couler le lendemain ; mais on n'obtiendra rien fi l'ardeur du foleil n'eft pas fupérieure à la force de la gelée. De ce principe il fuit:

4°. Qu'une plaie faite du côté du Midi donnera de l'eau, pendant que celle qu'on aura faite au même arbre du côté du Nord n'en donnera pas.

2°. Qu'un arbre qui eft à l'abri du vent froid & à l'expofition du soleil donnera de la liqueur, pendant que celui qui fera à couvert du soleil, ou expofé au vent, n'en donnera pas.

3°. Que par un petit dégel, il n'y a que les couches ligneufes les plus extérieures qui donnent de la liqueur; & que toutes en donnent lorfque le dégel eft plus général.

4°. Que les grands dégels arrivant rarement dans les mois de Décembre, de Janvier & de Février, on ne peut efpérer de retirer beaucoup de liqueur, que depuis la mi-Mars jusqu'à la mi-Mai. Mais dans les circonftances favorables la liqueur coule fi abondamment, qu'elle forme un filet gros comme un tuyau de plume, & qu'elle remplit une pinte mefure de Paris, dans l'espace d'un quart - d'heure.

5°. On voit dans les Mémoires de l'Académie Royale des Sciences, année 1730, que M. Sarrazin, l'un de fes Correfpondants, penfoit qu'il étoit important que la neige fondit au pied des Erables pour obtenir beaucoup de liqueur : felon les Obfervations de M. Gaultier, il paroît qu'effectivement la récolte eft abondante lorfque la neige fond; mais il ajoute que ce n'eft que parce qu'alors l'air eft affez doux pour occafionner un grand dégel.

6°. Les entailles faites en automne fourniffent de la liqueur pendant l'hyver, toutes les fois qu'il arrive des dégels; mais cependant plus ou moins, fuivant les circonftances que nous Tome I.

E

venons de rapporter : ces fources tariffent entierement lorsque les boutons font épanouis; & comme dans l'année suivante ces plaies ne donnent plus rien, il en faut faire d'autres.

7°. M. Gaultier a remarqué que fi l'on fait deux plaies à un arbre fçavoir, une au haut de la tige & l'autre au bas, celle-ci donne plus de feve que l'autre. Il affure encore qu'on ne s'apperçoit point qu'un arbre foit épuisé par l'eau qu'il fournit, si l'on fe contente de ne faire qu'une feule entaille à chaque arbre; mais fi l'on en fait quatre ou cinq dans la vue d'avoir une grande quantité de liqueur, alors les arbres dépériffent, & les années fuivantes ils donnent beaucoup moins de liqueur.

8°. Les vieux Erables donnent moins de liqueur que les jeunes, mais elle est plus fucrée.

9°. M. Gaultier prouve par de fort bonnes expériences, que la liqueur coule toujours par le haut de la plaie, & jamais par le bas de l'entaille.

10°. Afin de ménager les arbres, on a coutume de ne faire les entailles que depuis la fin du mois de Mars jufqu'au commencement de Mai; parce que c'eft dans cette faifon que les circonftances font plus favorables pour que la liqueur coule abondamment; mais il eft bon d'être averti que la liqueur qui coule en Mai, a fouvent un goût d'herbe qui eft désagréable: les Canadiens difent alors qu'elle a un goût de feve.

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Après avoir ramaffé une quantité de fucre d'Erable, par exemple, 200 pintes, on le met dans des chaudieres de cuivre ou de fer, pour en évaporer l'humidité par l'action du feu; on enleve l'écume quand il s'en forme; & lorfque la liqueur commence à s'épaiffir, on a foin de la remuer continuellement avec une fpatule de bois pour empêcher qu'elle ne brûle, & pour accélérer l'évaporation. Auffi-tôt que cette liqueur a acquis la confiftance d'un firop épais, on la verfe dans des moules de terre ou d'écorce de bouleau: alors en fe refroidiffant le firop fe durcit, & ainfi l'on a des pains ou des tablettes d'un fucre roux & prefque tranfparent qui eft affez agréable, fi l'on a fu attraper le degré de cuiffon convenable; car le fucre d'Erable trop cuit a un goût de mélaffe ou de gros firop de fucre, qui eft peu gracieux.

Deux cens pintes de cette liqueur fucrée produifent ordinai rement dix livres de fucre.

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