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dangers. Les agitations révolutionnaires ont sensiblement diminué lors du renouvellement des pouvoirs constitués, au cours et à la suite de Germinal an V, c'est-à-dire en l'an 1797. De sorte qu'à partir du mois de mai jusqu'en septembre, une plus grandeliberté m'a été concédée et j'ai profité de cette latitude pour me rendre quatre fois, à Bruges et pour faire visite aux curės des paroisses voisines.

Quand éclata, à Paris, la terrible journée du 18 fructidor ou 8 septembre, quand le Directoire, victorieux du Corps législatif, renouvela ses édits de proscription contre les émigrés et cela sous peine d'exécution militaire; anxieux et opprimé par la crainte, je n'osai plus longtemps séjourner chez Pierre Dickx et je me décidai à me présenter au domicile de M. Lebecke, curé de Heyst, paroisse et hameau pêcheur entre l'Ecluse et Blankenberghe, pour gagner de là, au besoin, la Hollande ou l'Angleterre. Comme mes angoisses redoublaient de jour en jour, je réglai le tout pour m'embarquer, le 1er octobre, à sept heures du soir, sur un bateau pêcheur, qui devait m'amener à Flessingue. Je comptai avoir pour compagnon de voyage le P. Célestin, religieux et procureur de SaintLaurent que j'avais trouvé au presbytère de M. le curé de Heyst (1), mais il n'était pas muni de passeport.

(1) Jean Lebeke, né à Rousselaere, fut nommé curé de Heyst en 1796. Il fut désigné après le Concordat à la cure d'Oostnieuwkerke, où il mourut en 1807.- Quant au Père Célestin, c'était un Carme déchaussé de la maison St-Laurent à Steenvoorde. En 1771, le P. Prieur s'appelait Léonard Leynaert. A cette époque le personnel du couvent comprenait huit pères et quatre frères.- Heyst compte aujourd'hui près de 2100 habitants. La villégiature a complètement exproprié les anciennes maisons de pêcheurs qui occupaient, il y a peu d'années, le bourrelet dunier. C'est une gracieuse station balnéaire. Sa digue, large de 20 mètres, a plus d'un kilomètre et demi d'étendue. On y trouve un kursaal

Grâces à Dieu, toutes ces dispositions et toutes ces mesures furent inutiles. Il était sept heures et nos préparatifs n'étaient pas encore terminés, par suite du retard de Pierre Dickx à qui j'avais besoin de parler. Or, les hommes de l'équipage refusaient de nous prendre à bord à une heure plus tardive et déclaraient ne pouvoir le faire les jours suivants.

Ce concours de circonstances imprévues fut certainement ménagé par une disposition providentielle, car dépourvus de passeport et débarqués nuitamment sur une côte habitée par des réformés, nous n'eussions pas été accueillis avec faveur. Ainsi donc, après cet heureux contre-temps, on fixa le départ pour le jeudi suivant 5 octobre, et nous résolùmes de nous diriger vers l'Ecluse et de nous embarquer là, le 7 octobre, pour Rotterdam. Dans ce but, nous nous munîmes de passeports près la municipalité et le commissaire de Westcappel. Pierre Dalle fut prié instamment de vouloir bien se charger du transport de nos bagages et il accéda volontiers à nos désirs. Un chariot nous ramena donc, le 5 octobre, à sa maison où nous recontrâmes, à l'heure du repas, Dickx et sa femme, qui y avaient été invités à l'occasion de l'arrivée de MM. les curés d'Oostkerke et de Damme.

Ces messieurs, considérant les dangers auxquels nous nous exposions, les fatigues d'un voyage sur mer, le fardeau de nos ans, les moyens d'existence en pays étrangers, etc... nous conseillèrent d'attendre encore quelque temps et de rester, en secret, dans la maison

et plusieurs hôtels. Heyst n'a point de havre. Le mouvement des bateaux de pêche qui abordent à la côte, les occupations variées des pêcheurs autour de leurs barques et de leurs filets constituent l'une des principales attractions de cette plage.

de Pierre Dalle, qui nous offrit une chambre sur voûte (Zyne voute kamer) avec une affectueuse bienveillance. C'est dans cette retraite que nous sommes restés en attendant les événements.

M. Blanckaert à

Bruges. Gracieuse

hospitalité dans la

famille Derycker, à Bruges. Nouvelles

angoisses

visites domiciliaries.

1798. Le 5 janvier 1798, je quittai, pour jouir d'un peu plus de commodité, la maison de Pierre Dalle, où je laissai le révérend père et j'allai habiter celle de Pierre Dickx. Là, à la nouvelle que l'on recommençait les visites domiciliaires pour découvrir les prêtres provoquées par des français, je n'osai prolonger mon séjour. Donc, le 5 février, je me retirai à Bruges, chez Pierre Derycker, maître charpentier, sur le Steenhouwers Dyk, où j'habitaidix mois, au milieu des plus cruelles angoisses, car les poursuites et les visites à domicile se multipliaient alors, et l'on recherchait sans relâche, non seulement les prêtres français, mais aussi ceux des villes du pays.

En ces tristes jours, je dormai souvent, la nuit, dissimulé derrière une armoire, mais la grâce de Dieu. m'a toujours protégé. Dans mon asile, j'ai joui de la meilleure hospitalité. Derycker et sa famille m'ont rendu de grands services; toujours, ils m'ont entouré de la plus affectueuse tendresse.

N. B. Ici se termine le manuscrit du sieur maître Blanckaert. Tombé malade, ce digne prêtre entra à l'hôpital Saint-Jean, de Bruges, où il s'est endormi paisiblement dans le Seigneur le 19 mai 1799.

LA

GARDE NATIONALE

DE DUNKERQUE

A PARIS, EN JUIN 1848

PAR

M. H. LEMATTRE

Plusieurs de nos concitoyens qui faisaient partie du détachement des gardes nationaux de Dunkerque envoyés à Paris pour lutter contre l'insurrection, ont bien voulu nous fournir des renseignements inédits sur le concours des volontaires dunkerquois dans la répression des désordres qui ensanglantèrent Paris pendant les journées des 23, 24, 25 et 26 juin 1848.

Quelques jours auparavant des rumeurs alarmantes étaient colportées dans toute la France, faisant présager une nouvelle tourmente révolutionnaire.

La presse locale poussait un cri d'alarme et conseillait l'envoi immédiat d'un corps de volontaires dunkerquois pour combattre l'insurrection naissante, mais des difficultés matérielles s'opposaient à la prompte réalisation de ce désir.

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