Page images
PDF
EPUB
[ocr errors]

Deux-Siciles de Henri Swinburne, pendant les années 1777, 1778, 1779, 1780, traduit de l'anglais. Paris, 1785, in-8°, ouvrage qui réunit l'agrément à l'utilité, et que madame Robert Keralio a heureusement traduit; 5° Histoire d'Elisabeth, reine d'Angleterre, tirée des écrits originaux anglais, actes, titres et autres pièces manuscrites qui n'ont pas encore paru, 1786, 1787, 1788, 5 vol. in-8°. L'Histoire d'Elisabeth, fruit de dix années d'études, de recherches, de patience et d'un talent mûri par la réflexion, est une production très-remarquable et qui manquait à notre littérature, car nous étions privés de l'histoire et de la vie de cette princesse, si célèbre dans les annales de l'Angleterre; l'auteur a fait précéder cet important travail d'un discours préliminaire, où l'on trouve les connaissances d'un jurisconsulte distingué, et des vues politiques que ne désavouerait pas un homme d'état supérieur. Le sty. le de madame Robert Keralio est sage, égal, facile; mais parfois un peu sec, et trop généralement didactique. 6° Voyage en Hollande et dans le midi de l'Allemagne, sur les deux rives du Rhin, dans l'été de 1806, traduit de l'anglais, 1809, 2 vol. in-8°; 7o Amelia et Caroline, ou l'Amour et l'Amitié, 5 vol. in-12, 1808; 8° l'Étranger en Irlande, ou Voyage dans les parties méridionales et occidentales de cette ile, pendant l'année 1805, traduit de l'anglais de John Carr, 2 vol. in-8°, 1809; 9° Aiphonse et Mathilde, ou la Famille espagnole, 1809, 4 volumes in-12; 10° Elémens de construction, anglais - français, 1810, in-8°; 11°

Rose et Albert, ou le Tombeau d'Emma, 1810, 3 vol. in-12; 12° Fables de Dodley, en anglais, in12, 1810. Madame Robert Keralio avait le projet d'élever à la gloire des dames françaises qui ont cultivé les lettres, un monument digne en effet de sa noble destination: c'était le Tableau de l'état des lettres dans les Gaules. Elle a publié 14 vol. de cet ouvrage, qui devait en avoir environ 40, sous le titre de Collection des meilleurs ouvrages français composés par des femmes, 1786, 1787, 1789. Les volumes VII, VIII et IX qui étaient préparés, n'ont pas été imprimés, et l'ouvrage a été abandonné. Si cette tentative eût réussi, l'auteur eût rendu le même hommage au mérite des dames étrangères. Madame Robert Keralio a été admise à l'académie d'Arras et · à la société patriotique bretonne. KERATRY(AUGUSTE-HILARION), né à Rennes, le 28 octobre 1769. Ovide veut qu'on attende la mort d'un homme pour le proclamer heureux; il n'en est pas ainsi de la qualification d'homme tueux on peut la donner à tel homme qui n'a pas encore fourni sa carrière, sans crainte que la dernière moitié de sa vie démente le témoignage honorable de l'autre moitié. La source du bonheur est pour ainsi dire hors de notre domaine, et la main qui la dirige peut à chaque instant lui donner un autre cours; mais la source de la vertu est en nous-même, et n'a rien à craindre des causes extérieures, indépendantes de notre volonté. Ainsi donc, la plus rare des célébrités, celle d'une vie sans tache, peut être justement

ver

acquise à celui qui est loin encore du terme qui met le sceau à tous les autres genres de réputation. C'est avec cette sécurité de l'avenir que nous allons parler de M. Kératry, certains que les biographes futurs ne trouveront rien à réformer à notre jugement. I méritait d'avoir pour père un honnête homme, courageusement dévoué aux intérêts de sa province; c'était le patriotisme d'une époque, où le gouvernement absolu ne permettait guère à ce sentiment d'étendre plus loin ses limites : l'exil dont il fut frappé deux fois ne fit qu'ajouter à l'estime que lui portaient ses compatriotes, et lui méritèrent l'honneur d'être porté au fauteuil de président de la noblesse aux états de Bretagne. Cette remarque qui nous fournit l'occasion de dire que M. Auguste Kératry est issu d'une famille noble, est un trait de plus à ajouter à l'éloge d'un homme que n'attei gnit aucun des préjugés de la classe privilégiée à laquelle il appartenait. Après avoir commencé ses études à Quimper, il quitta le collége dirigé par M. Le Coz, respectable ecclésiastique, nort archevêque de Besançon, pour terminer ses études à Rennes, sa ville natale. Auguste Kératry remporta le prix d'honneur en rhétorique, où il avait pour professeur le savant M. Germé, actuellement recteur honoraire de l'université de Rennes. M. Kératry, que ses droits héréditaires et sa position sociale appelaient au parlement de Bretagne, devint élève en droit, et eut pour camarade le général Moreau, alors prévôt de cette école (1787-1788). Pendant ces

deux années, M. Kératry dirigea ses études, tour-à-tour sérieuses et littéraires, d'après les principes qui motivaient en France une réforme politique. En 1789, il vint habiter un bien rural qu'il possédait dans le Finistère, et c'est de là qu'il adressa à l'assemblée constituante une pétition en faveur du partage égal dans les familles nobles; disposition légale, à l'adoption de laquelle il n'était point personnellement intéressé, bien que dernier né de sa famille, attendu que ses droits héréditaires étaient dès-lors fixés par la mort de son père. Vers cette époque, il fit plusieurs voyages à Paris, où il se livra plus particulièrement à la société de quelques hommes de lettres estimables, tels que Bernardin de Saint-Pierre, Legouvé, l'abbé de Vauxèles, etc. Rentré dans ses foyers lorsque la révolution, tombée entre les mains des arnachistes, achevait de se dénaturer, il fut un moment arrêté par ordre de l'affreux Carrier, qui venait d'arriver dans ce département, et sauvé par quelques amis de collége. Un mois après la mort du roi, il retourna dans le Finistère, où, sur un ordre du comité de surveillance, il subit une détention de 4 mois. Les habitans de la commune rurale où il avait son domicile, le réclamèrent avec tant d'instance, qu'il fut enfin rendu à la liberté. Depuis cette époque, M. Kératry, satisfait des différentes fonctions municipales qu'il exerça dans cette même.commune, où l'attachement qu'on lui porte est un véritable culte, se livra sans réserve aux études philosophiques et littéraires, aux

[ocr errors]

quelles il espérait consacrer sa vie, lorsque les suffrages honorables des habitans du Finistère l'appelèrent, en 1818, à la chambre des députés. Une nouvelle carrière s'ouvrait devant lui; il y entr d'un pas ferme, en homme attaché à la révolution, dont il a constamment blâmé les excès, mais dont il espérait contribuer à faire triompher les principes. Cette marche dut lui concilier d'autant plus d'estime et de considération, qu'elle l'éloignait davantage des faveurs du pouvoir et des emplois publics. A peine honoré du titre de député, avant l'ouverture de la session, il combattit avec autant de force que d'éloquence, dans le Journal Général, l'opinion émise à la chambre des pairs par M. Barthélemy, et par laquelle on préludait à la destruction de la loi des élections. La manière dont il soutint à la tribune cette même loi du 5 février, dans la session de 1818, et dont il défendit avec M. RoyerCollard la nouvelle loi sur la liberté de la presse, désigna sa place dans la chambre sur ce qu'on appelait alors le banc des doctrinaires. Dans la session suivante, cette loi du 5 février fut entièrement détruite. Cette mesure qu'on peut appeler désastreuse, à laquelle les doctrinaires n'étaient étrangers que d'intention, rallia M. Kératry au parti de l'opposition. On sait quel courage et quel talent déployèrent plusieurs membres du côté gauche de la chambre, dans les discussions mémorables auxquelles donna lieu la nouvelle loi des élections que l'on parvint à substituer à celle du 5 février. M. Kératry parla le dix-septième

sur cette grande question politique, où tout semblait avoir été dit, et le discours qu'il prononça dans cette circonstance mérita d'être recueilli avec ceux des grands orateurs qui l'avaient précédé à la tribune. Le coup le plus funeste venait d'être porté aux espérances des patriotes par l'établissement des lois exceptionnelles. Le député du Finistère, à qui la censure ne permettait plus de s'exprimer librement dans les feuilles publiques, composa successivement trois brochures politiques dont le même mois vit épuiser plusieurs éditions. La première avait pour titre : Documens historiques, elle parut au mois d'août 1820. Dans la seconde, la France telle qu'on l'a faite, l'auteur présentait un tableau fidèle des envahissemens successifs de l'aristocratie dans toutes les branches du pouvoir. La troisième, écrite en société avec le vertueux, le célèbre Lanjuinais, pair de France, était destinée à combattre le projet de la loi des municipalités, déjà présenté à la chambre par le ministère, et dont le rapport venait d'être fait avec des amendemens aggravans au nom d'une commission spéciale. On peut affirmer que c'est au zèle de ces deux citoyens bretons, et à leur association patriotique, que l'on doit l'abandon, ou du moins l'ajournement d'un projet qui tendait à la destruction de l'une des plus importantes garanties sociales. Ce dernier écrit a paru au commencement de 1821. Depuis cette époque, M. Kératry, convaincu de l'inutilité de ses efforts dans une chambre dont la majorité n'était plus que l'organe du mi

nistère, n'a parlé que rarement à la tribune, et seulement pour y prouver à ses commettans qu'il n'avait point quitté le poste des libertés publiques. C'est ainsi qu'il a pris la peine de démontrer par une véritable description médicale, que le prétendu cordon sanitaire des Pyrénées n'était qu'une mesure hostile, prise contre les Espagnols; qu'il a cru devoir réclamer de l'humanité de la chambre, un dégrèvement des droits sur le sel, impôt si onéreux pour la classe indigente; qu'il s'est élevé avec une éloquente indignation contre l'odieux privilége des jeux de hasard et de la loterie, dont la plupart des gouvernemens de l'Europe se sont fait une honteuse res source. Enfin, dans la session de 1822, à l'occasion du dernier budget du ministre des relations extérieures, M. Kératry a courageusement attaqué le système de civilisation rétrograde, suivi par la diplomatie actuelle de l'Europe. Nous aurons achevé d'esquisser la vie politique de cet honorable député du Finistère, en disant qu'il est depuis 14 ans membre du conseil-général de son département; que M. Mangin, procureur-général à Poitiers, a jugé à propos de le faire figurer dans un de ses réquisitoires, avec trois de ses plus illustres collègues, comme membre désigné d'un prétendu gouvernement provisoire, auquel le succès de la conspiration de Saumur aurait donné naissance; enfin, que M. Kératry n'a pas seule ment réclamé judiciairement, mais qu'il s'est associé à la plainte portée par M. Benjamin Constant au tribunal de l'opinion publique,

[ocr errors]

contre cette accusation. Après avoir suivi M. Kératry dans sa carrière administrative et politique, où nous remarquerons qu'il n'a jamais exercé de fonctions salariées, considérons - le comme homme de lettres, et rappelons ses titres principaux à cet autre genre de gloire. En 1791, il a publié un volume de Contes et d'Idylles à l'imitation de Gesner: L'abbé Aubert et La Harpe en ont rendu un compte très-avantageux dans les journaux du temps. Ses Inductions morales et philosophiques, dont nous ne saurions indiquer la date précise, portent l'empreinte d'un travail qui a quelque chose de natif, et dans lequel une imagination impatiente s'est néanmoins soumise à une marche régulière et systématique. Get ouvrage riche de pensées, fort de style, et brillant d'images, suffirait pour assigner à son auteur un rang distingué parmi les écrivains de cette époque. Dans le cours de l'an 8, il a successivement publié son Voyage de 24 heures; deux éditions en furent promptement épuisées. En l'an 10, ses Voisins dans l'Arcadie, qui ont obtenu non moins de succès. L'année suivante, son Habit mordoré, production dans le genre de Sterne, qui se fait remarquer par ce mélange de tristesse et de gaieté que les Anglais ont caractérisé sous le nom d'humour. En 1811, il publia un petit poëme en prose sous le titre de Ruth et Noëmi, sujet tiré de l'Ecriture sainte, et traité par l'auteur avec cette simplicité antique et religieuse qui convient à ce genre de composition. En 1815, M. Kėratry mit au jour un traité de

[ocr errors]

l'existence de Dieu et de l'immortalité de l'âme, dont on ne peut faire un plus grand éloge qu'en disant qu'il ajoute des preuves nouvelles à des vérités sur lesquelles repose l'édifice social. Dans le cours de ses travaux politiques, cet écrivain laborieux a cherché dans la culture des arts, ou du moins dans l'appréciation de leurs chefs-d'œuvre, des consolations contre l'inutilité de ses courageux efforts. Le compte qu'il a rendu, dans le Courrier français, du Salon de 1819, a fourni la matière de plusieurs lettres charmantes qui ont été réunies en un corps de volume par le libraire Maradan, éditeur de presque tous les ouvrages de M. Kératry. On doit encore à ses studieux loisirs un Traité sur les arts d'imitation, dans lequel se trouvent, peut-être, les pages les plus éloquentes qui aient été écrites sur ce sujet. Achevons de caractériser en quelques lignes le talent de M. Kératry. Contemplateur assidu de la nature, il se plaît à suivre, avec une imperturbable attention, la même série de faits et d'idées, jusqu'à ce que le fil en échappe à ses yeux; son esprit, nourri dans la solitude, s'est ainsi conservé quelque chose de propre et d'original qui manque trop souvent parmi nous, même aux écrivains les plus distingués. Nous devons ajouter qu'il en résulte, dans ses ouvrages philosophiques et littéraires, l'emploi souvent exagéré de formes, d'images et d'expressions trop directement empruntées à ses études physiques de la nature et des arts. M. Kératry travaille en ce moment à un com→ mentaire des Considérations sur

T. X.

le sublime, d'Emmanuel Kant. Au moment où nous terminons cet article, en novembre 1822 (la date est nécessaire à constater), M. Kératry vient d'être réélu à la chambre des députés par le même arrondissement du département du Finistère, qui l'avait nommé en 1818.

KERAUDREN (PIERRE-FRAN çors,) médecin en chef des armées navales, et membre de la légiond'honneur, est né à Brest, en 1769. Dès que ses études classiques furent achevées, il se livra spécialement à la médecine. Les cours qui se faisaient alors à Brest étaient très-estimés; il les suivit avec la plus grande assiduité, fit en peu de temps des progrès rapides, et se voua au service de la marine. Afin de pouvoir joindre utilement. la pratique à la théorie, il fit plusieurs campagnes, dans lesquelles il observa avec le plus grand soin les maladies qui règnent or dinairement sur les vaisseaux, et parvint à découvrir de nouveaux moyens de les combattre et même de les prévenir. Au retour de ses voyages, il obtint à Brest une chaire de médecine navale, à l'école de cette ville. M. Kéraudren, autcrisé à se rendre à Paris, vint accroître dans la capitale les connaissances déjà très-étendues qu'il possédait. Il reparut aux bords qui l'ont vu naître, avecle double titre de docteur et de médecin en chef de l'armée navale. Ce fut en cette dernière qualité qu'il fit un nouveau voyage, qui le mit à même d'adresser, à son retour, des mémoires au ministre de la marine, où, en rendant compte de ses découvertes, il indique les moyens

« PreviousContinue »