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de temps en temps été abaiffé ou foulevé par des tremblemens de terre, & que c'est à cette caufe qu'on doit attribuer divers changemens remarquables dans la face de notre Globe, fur-tout cette multitude immenfe de coquillages foffiles qu'on y trouve, jufques au fein des plus hautes montagnes (8).

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Cette idée de Strabon, ou fi l'on veut de Xanthus, fi fimple & fi facile à justifier par des faits, n'ayant été que préfentée, fans développement & fans preuves, plutôt comme une conjecture hazardée, que comme l'ébauche d'un système déduit de phénomènes avérés, étoit tombée & demeurée dans l'oubli, quand fur la fin du fiècle dernier le célèbre Jean Ray' la fit revivre. Il avança, mais comme une hypothèse de fa façon, que peutêtre les eaux dont la terre avoit été originairement couverte, ne fe retirérent ,, que peu-à-peu;que le deffechement com„mença tout à l'entour des lieux, où Adam avec tous les animaux avoient été placés, qu'il ne s'etendit que fucceffivement & par degrés, qu'il s'écoula beaucoup de temps avant que les ,, eaux fe trouvaffent renfermées dans leur lits; que pendant tout ce tempslà, les coquillages nourris en abondance dans la mer, étoient de tous côtés ré

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(8) Strab. pag. 85. &c.

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pandus avec elle, & que quand le fond en fut foulevé (par les tremblemens de terre, qui felon le Philofophe ,, Anglois accompagnèrent le déluge & formèrent les montagnes), des couches entières de ces coquillages durent être élevées avec lui &c. (9).

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L'Abbé Moro a adopté, du moins en partie, l'hypothèse de Ray. C'est dans un Ouvrage publié à Venife, il y a vingt & trois ans. Selon lui la terre & fes montagnes font forties de deffous les eaux; elles ne contenoient originairement ni couches ni foffiles organifés, mais les feux fouterreins, les volcans, les tremblemens de terre, en rompant & en foulevant avec violence la furface de notre Globe, élevèrent pêle-mêle des matières, qui fucceffivement & ainfi par couches, ont formé fous les eaux de nouvelles montagnes & de nouveaux lits de pierres, de terres, de fables, de métaux & de minéraux en divers lieux, où en même temps ces éruptions ont entraîné des plantes & des animaux marins de tout genre, qui s'y font entaffés par bancs & par lits, jusqu'à ce que de nouvelles fecouffes ont élevé le tout au deffus de la furface de la mer (10). De(9) Ray Three phyfico-theological difcours &c. 28. Edit. Lond. 1693. 8.

(10) Ant. Laz. Moro De Croftacei & degli altari marini corpiche fi trovano fu monti. c. 12. & 29 part. 2.

Depuis l'Abbé Moro, M. de Buffon, dont le génie & l'éloquence embelliffent tous les fujets qu'il traite, a donné à cette hypothese une différente tournure. En fuppofant que notre Globe, très long temps comme enfeveli fous les eaux de la mer, y a pris fon arrangement, fes montagnes, fes couches horizontales & parallèles avec tous les foffiles qu'on y trouve, il conjecture que les montagnes doivent leur origine, non à la violence des tremblemens de terre, & à l'action des feux fouterreins, mais à celle des flots de la mer. Ces hautes montagnes qui dans l'ancien continent forment de longues chaînes d'occident en orient, & dans le nouveau continent du nord au fud, il les regarde comme des fédimens dépofés à la longue, & accumulés peu à peu par le flux & reflux de la mer; mais il attribue aux mouvemens particuliers des vents, des courans & des autres agitations irrégulières de la mer, les autres montagnes dont la pofition eft fi diverfifiée. Que fi l'on demande comment il eft arrivé que notre terre, qui de temps immémorial est un continent fec, ferme, éloigné des mers ayant été autrefois un fond de mer, foit actuellement fupérieure à toutes les eaux & en demeure fi diftinctement féparée, l'illuftre Académicien ne fe borne pas à répondre, que les faits étant certains la manière dont ils font arrivés peut demeu

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rer inconnue fans préjudicier au jugement que nous devons en porter; il va plus loin: il conjecture que la chose a pu fe faire 10. par l'affaiffement de quelques vaftes cavernes où la mer s'étant comme précipitée, a laiffe à découvert la plus grande partie des terres qu'elle occupoit autrefois. 2°. parce que rompant les digues naturelles qui la retenoient, elle a inondé des terres qui étoient plus baffes que fon niveau (11).

C'eft auffi à peu près de la forte qu'un célèbre Académicien de Gottingue M. Sam. Chrift. Hollman a expliqué l'origine des montagnes, & rendu raifon des foffiles organifes qui fe trouvent prefque partout fous nos pas (12). Perfuadé que notre Globe a fait un très long féjour fous les eaux, mais ne croyant pas avec Ray & Moro que ce foit en élevant fa furface, que les feux & les tremblemens fouterreins ont élevé les montagnes au deffus du niveau de la mer, il pense au contraire avec M. de Buffon, que c'eft en ouvrant à la mer des gouffres immenfes par l'affaiffement des cavernes fouterreines, que les tremblemens l'ont abaiffée, ce qui a laiffé à fec dans une élévation pus ou moins

(10) Hift. Nat. T. I.

(11) Comment. Gotting. an. 1753. & Sylloge Comment. indeab anno 1756.

moins grandes les terreins & les monta gnes qu'on voit au deflus de fon niveau. Voilà donc ces Savans d'accord fur 'divers articles. Ils conviennent, que la terre avec fes couches eft fortie des eaux, que ces couches fucceffivement formées étoient molles & pénétrables dans leur origine, & qu'elles ne fe font durcies qu'à la longue. Enfin que tous les corps marins & organifés qu'on y trouve, font effectivement ce qu'ils paroiffent être; & y ont été portés & arrangés comme tout le refte. Mais voici ce dont nos habiles Naturalistes ne conviennent pas. Ils difputent 10. fur la manière dont cette partie du fond de la mer que nous habitons, a été laiffée à fec & plus ou moins élevée. 2o. Sur la manière dont les montagnes, les collines, & les vallées fe font formées; deux queftions dont on ne fauroit définir l'une, fans que l'autre par cela même fe trouve éclaircie.

Ces Cavernes qui felon MM. de Buffon & Hollmann auroient en partie englouti la Mer, ne paroiffent pas admiffibles à notre Auteur. Outre qu'il contcfte le fait d'un abaiffement remarquable de la mer, qu'un judicieux Obfervateur croit au contraire plus élevée qu'elle ne l'étoit anciennement, du moins en quelques endroits (13), outre cela, quelles immenfes cavernes que cel

(12) Voyez Donuti Effai de l'hift. nat. de la Mer Adriat. pag. II. &c.

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