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rent tant de maux sur l'église de Paris. FARET (JACQUES), sieur de SAINTPRIVAT, embrassa de bonne heure la religion réformée pour laquelle il montra un grand zèle dans les circonstances même les plus difficiles. Il testa en 1576. Nous ignorons si sa première femme, Sibylle de Frilli, nièce de l'évêque d'Apt, mourut avant sa conversion; mais le tils qu'elle lui donna, nommé PIERRE, professa certainement le protestantisme, ainsi que son frère THEOPHILE, né d'un second mariage contracté par Jacques Faret avec Hippolyte Grimaldi.

Pierre Faret, sieur de Saint-Privat, lieutenant du sénéchal de Beaucaire et de Nismes, assista, en 1613, à l'assemblée de Lunel, et fut député par le BasLanguedoc, l'année suivante, au Synodenational de Tonneins, puis en 1615, à l'Assemblée politique de Grenoble. Lorsque cette assemblée prit la résolution de se transporter à Nismes, c'est lui qui fut chargé avec Araugour d'en informer le roi, et c'est encore lui qui, accompagné de Bonencontre et de Primerose, alla expliquer aux Nismois, convoqués en assemblée générale sous la présidence du lieutenant criminel Daniel Calvière, les raisons qui avaient déterminé les députés des églises à se retirer dans leurs murs. Bientôt après, l'assemblée l'envoya à Montpellier, avec Rouvray, Briquemault et La Milletière, pour inviter les magistrats de cette ville à s'opposer à la publication de la déclaration du roi et de l'arrêt du parlement de Toulouse rendus contre Condé (Fonds de Brienne, N° 223). Après la conclusion de la paix, il fut porté sur la liste des commissaires qui devaient faire exécuter dans les provinces l'édit de pacification, fonctions qu'il fut appelé de nouveau, en 1623, à remplir dans le Languedoc et le pays de Foix. Saint-Privat mourut vers ce temps, laissant deux fils de Sara Gueri, qu'il avait épousée en 4590: 4° HENRI, Conseiller du roi, gentilhomme de la chambre, sénéchal de Beaucaire et de Nismes, par provisions du 49 janv. 1639, et 2° CHARLES, sieur de Saint-Privat, qui testa en 1636. Ce

dernier avait pris pour femme, en 1619, Jeanne Launé qui lui donna cinq fils. Nous ne connaissons aucune particularité de la vie des deux premiers, qui se nommaient TROPHYME et HECTOR. BALTHASAR, le troisième, servit dans l'ile de Candie avec le grade de mestre-decamp. Le quatrième, appelé ALEXANDRE, sieur de Fournés, marquis de SaintPrivat, finit misérablement ses jours à la Croix du Trahoir, sous l'accusation vraie ou supposée de faux monnayage. Il avait épousé, en 4652, Isabeau Du PuyMontbrun, qui était morte bientôt après l'avoir rendu père d'une fille dont il avait confié l'éducation à Madame de Fournés, sa grand'mère. Les soins de cette dame furent magnifiquement récompensés, en sorte qu'à l'âge de 20 ans, Melle de Saint-Privat passait, au rapport de Me Du Noyer, pour la merveille de son temps. Les biens de son père, confisqués au profit du roi, ayant été donnés à son oncle CHARLES de Faret, sieur de Montfrin, la jeune fille, par une répugnance bien naturelle, ne voulut point demeurer avec un homme qui s'était enrichi des dépouilles de son frère, et, sur sa demande, Montbrun alla la chercher pour l'emmener dans son château; mais à peine arrivée, elle tomba malade et mourut en proie à de grandes douleurs. L'autopsie prouva qu'elle avait été empoisonnée, par qui? Montbrun et Montfrin s'accusèrent réciproquement de ce crime effroyable, et furent tous deux mis en prison. Après un long procès porté devant toutes les juridictions, l'affaire fut renvoyée au sénéchal de Nismes qui mit les parties hors de cause et de procès.

FARGUE. Trois capitaines de ce nom furent compris par le parlementde Bordeaux dans son fameux arrêt du 6 avril 1569 (Voy. II, p. 415). L'un des trois, appelé Jean, s'est surtout fait connaître par son courage et son habileté comme homme de guerre, sous le nom de LA MOTHE-PUJOLS OU La MothePujol (1). D'Aubigné, qui l'appelle ici

(1) La Motte-Pujols était apparemment de la famille Fargue d'Orthez qui professait en

La Mothe-Pujaud, nous apprend qu'il escorta Jeanne d'Albret à La Rochelle à la tête d'une compagnie de cavalerie, en 1568, et que, l'année suivante, il combattit à La Roche-Abeille, sous les yeux de Coligny, qui le chargea de défendre Châtellerault avec La Loue. Vers le même temps, nous le voyons prendre part à l'expédition de Montgommery dans le Béarn et punir d'un coup de poignard la trahison de Bassillon; puis on nous le montre combattant à Moncontour et après la perte de la bataille, détaché avec les restes de sa cornette à Saint-Jean-d'Angély pour seconder Piles dans la défense de cette place importante. Nous avons parlé ailleurs (Voy. III, p. 493) des services signalés qu'il rendit durant le siége de cette place (4). Quelque temps après, nous le retrouvons à la tête de l'arrière-garde de la division de l'armée huguenotte qui pénétra dans le Vivarais par Bagnols. Attaquée par la garnison du bourg Saint-Andéol, cette arrière-garde fut défaite complétement et perdit tous ses bagages.

En 4572, La Motte-Pujols se trouvait dans le Midi. Lorsque les Protestants reprirent les armes après la SaintBarthélemy, les Vicomtes lui confièrent le

gouvernement de Caussade. Menacé par les Catholiques, La Motte-Pujols se håta de rassembler 600 arquebusiers et se prépara à recevoir vigoureusement l'armée ennemie, qui comptait 48,000 hommes. Après avoir emporté Terride et avoir fait pendre à une fenêtre le làche capitaine Fargue qui s'était rendu aux premières volées de canon, quoique la place fût forte et bien munie, l'amiral de Villars se présenta devant Caussade, pensant en avoir aussi bon marché. Mais lit-on dans les Mémoires de Charles IX, il n'y gagna que des coups. Harassée, décimée par les fréquentes

core le protestantisme en 1683 (Arch. gén. Tr. 235).

(1) Les dates sont si difficiles à concilier, que nous serions porté à croire qu'il y eut deux capitaines du nom de La Mothe-Pujols, que les historiens n'ont pas distingués.

sorties de la garnison, tenue comme assiégée dans son camp par le vicomte de Gourdon qui harcelait ses derrières, exposée à toutes les rigueurs d'un rude hiver, l'armée catholique dut battre honteusement en retraite au bout de trois semaines. La Motte-Pujols ne jouit pas longtemps de la gloire qu'il venait d'acquérir. Il fut, peu de temps après, tué par un de ses soldats, » lequel par inadvertance et hastiveté le perça d'un coup d'harquebuse. » Il venait à peine d'échapper à une tentative d'assassinat, essayée par le jeune vicomte de Gourdon, son ennemi.

FARGUES (JACQUES DE), riche apothicaire d'une des meilleures familles de Montpellier. Fargues était suspect, parce que son fils s'était montré zélé protestant dans les premières guerres; aussi était-il soumis à une surveillance inquiète. Le 4 mars 4569, la police ayant découvert chez lui de la poudre et des armes, on le jeta en prison avec toute sa famille. Le même jour, la populace pilla sa maison et y mit le feu; puis, à la lueur de l'incendie, elle courut à l'Hôtel-de-Ville, contraignit le juge-mage et les consuls à condamner Fargues à mort, se le fit livrer et le pendit. Les descendants de ce malheureux vieillard se réfugièrent à Londres à la révocation; ils y forment aujourd'hui une nombreuse famille.

FAUBOURNET DE MONTFERRAND, ancienne famille du Périgord, dont une branche, celle de SAINT-ORSE, a professé la religion protestante jusqu'à la révocation de l'édit de Nantes.

Guillaume de Montferrand, seigneur du Maine et de Saint-Orse, fut le fondateur de cette branche. Il mourut le 44 mai 1624, ayant eu douze enfants de sa femme Louise de Fanlac, fille de Jean de Fanlac, sieur de Saint-Orse, et de Françoise de Lagut, qu'il avait épousée en 1574. 4' L'aîné, JEAN, sieur de Saint-Orse, né le 14 déc. 1575, se maria, en 4605, avec Marie de Felets, fille de Charles de Felets, sieur de Bersac, et d'Anne de Roffignac, et il en eut JEAN, né le 13 janv. 1606,

qui prit pour femme, en 1624, Jeanne d'Espeyruc, fille de Pierre d'Espeyruc, sieur de Genouilhac, et de Louise de Bouchiac. 2° JACQUES, sieur de Montferrand, né en 1577, baptisé, en 4580, dans le château de La Force par Jean Dupuy, mourut en 4620, sans alliance. 3o PIERRE, sieur de Peyrebrune, né le 18 avril 4579. — 4° ANTOINE, sieur de La Faye et de SaintOrse, né le 3 mai 1583, à qui le marquis de La Force confia, en 4624, le commandement de Clairac. C'était « un homme capable de servir, s'il ne se fût laissé gagner au bon vin de Clairac, comme il fit par la suite. » Cette ville n'avait point approuvé la prise d'armes des Huguenots; aussi avait-elle résolu d'ouvrir ses portes au roi; mais en apprenant le traitement fait à Bergerac, elle avait changé d'avis, en sorte que Louis XIII s'était vu forcé de l'assiéger. Sous la conduite de Lentillac l'aîné, les habitants disputèrent bravement les approches de la place et tuèrent beaucoup de monde à l'ennemi, sans réussir à empêcher l'établissement de trois batteries sur les hauteurs qui dominaient la ville. Le siége néanmoins aurait pu se prolonger longtemps, si Saint-Orse avait rempli ses devoirs, mais constamment ivre, il abandonna le soin de la défense à Sauvage, Auripech, Richomme et Boudou, qui, soit qu'ils fussent vendus, comme on l'a dit, soit qu'ils désespérassent de sauver Clairac, persuadèrent au peuple, après douze jours de siége, de se livrer à la discrétion du roi. Maître de la ville, Louis XIII, fit, pour l'exemple, pendre quelques-uns des habitants: le consul Denis, qu'on mena au supplice couvert de son chaperon; le procureur en la chambre de l'édit de Nérac Lafargue et son fils, qui était ministre; le médecin Le Poy, qui reçut sa grâce au pied de l'échafaud par l'intervention

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d'une personne de qualité », qui estimait ses talents, et plusieurs autres. De leur côté, les soldats, contre la volonté des chefs, on doit le dire, se livrèrent aux plus

coupables excès, pillant, violant, tuant, au mépris de la capitulation. SaintOrse, qui avait obtenu la vie sauve, se retira à Montauban, et fut chargé de défendre la corne de la porte de Villenouvelle. Plus tard, il servit sous Monpouillan au siége de Tonneins dont il signa la capitulation avec le sieur de Carcabanes. Il paraît qu'il n'intervint pas dans la guerre de 4622; mais il reprit les armes en 1628, et à la conclusion de la paix, il se rallia complétement au gouvernement. En 4630, il servit dans l'armée de Piémont, et fut nommé gouverneur du fort de Briqueras. En 4636, il fut employé dans le Périgord. U mourut, le 45 mai 1667, sans laisser d'enfants de sa femme Anne de La Porte, fille de Raimond de La Porte, sieur de Lusignac, et de Marguerite de Lambert. - 5 ARMAND, sieur de Bussac, né le 19 janv. 4590, fut tué, en 1622, à la défense du château de Montravel contre le duc d'Elbeuf. 6° RAPHAEL, qui suit. 7° JEAN, sieur de Fonlonge, né en 4595, épousa, en 1627, Jeanne d'Abzac, dame de Rossignol et de Limérac, et mourut en 4644. -8° JUDITH, femme de Magault Rousset, sieur de Chalvars. 9° ESTHER, alliée à Jean de Lern, sieur de La Borie. -40° JEANNE. -41° MARTHE. 42° NÉRÉE.

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Raphaël, sieur de La Serve, né en 4592, servit, en 1622, sous le marquis de La Force, au siége de Montravel, où il fut fait prisonnier. Comme capitaine au régiment de Tonneins, il fit la campagne de Lorraine en 4633. Il mourut le 21 sept. 1660, et fut enseveli dans l'église de Saint-Orse aux tombeaux de ses prédécesseurs. Il avait été marié deux fois, en 1638, avec Susanne de Hautefort, fille de Marc de Hautefort, sieur de Vaudré, et d'Anne de Roue, et en 4652, avec Jeanne d'Eymery, dame de La Vergne, veuve de Léonat Donat, sieur de La Vergne. De ces deux mariages naquirent: 1 ANTOINE, qui suit; — 2o JEAN, capitaine dans le régiment du Dauphin, mort dans le pays de Liége, à 32 ans ;

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Antoine, sieur de Saint-Orse et de Montferrand, né en 1639, capitaine dans le régiment de Bouillon, mourut, en 1674, à Maëstricht des suites de ses blessures. Il avait épousé, en 1661, Jeanne de Fanlac, fille d'Elie de Fanlac, sieur de La Salle, et de Jeanne de La Ramière, qui lui avait donné neuf enfants, lesquels paraissent s'être convertis à la révocation.

FAUCHE-BOREL (Louis), habile agent des Bourbons dans tous les complots ourdis par les Royalistes contre la République et l'Empire. Nous raconterons les événements de sa vie le plus brièvement possible, car son nom appartient à l'histoire comtemporaine, et le genre de célébrité qu'il s'est acquis n'est pas de ceux qui nous portent à oublier les exigences de notre plan. Fauche-Borel naquit à Neuchâtel, le 12 avril 4762, d'une famille de Protestants français réfugiés. Son éducation parait avoir été très-négligée. A l'époque de la Révolution, il exerçait dans sa ville natale l'état d'imprimeur, pour ne pas dire le métier: depuis longtemps l'art de la typographie en était tombé à ce degré d'avilissement. On raconte que ses rapports avec la famille royale commencèrent à propos d'un pamphlet contre la reine qui lui avait été confié pour l'impression et dont il donna communication à cette malheureuse princesse. Quelques paroles de reconnaissance l'attachèrent à tout jamais à la cause de la royauté:lant il en coûte peu aux souverains pour se faire aimer et servir! Les sauvages barbaries que le parti démagogique exerca contre Louis XVI et sa famille ne firent qu'accroître son dévouement qu'il poussa jusqu'au fanatisme. Tous les émigrés, réfugiés à Neuchâtel, étaient accueillis par lui avec empressement; il les aidait de sa bourse, il mettait ses presses à leur service, il se compromettait pour eux. En 1793, il fut banni

pour six mois de sa patrie parce qu'il avait publié le testament de Louis XVI. Les dangers et les persécutions n'étaient pas faits pour le corriger; il finit même par renoncer à son établissement typographique pour se livrer tout entier aux agitations de la vie de conspirateur. Le comte de Montgaillard, agent secret des Bourbons, comprit quel homme précieux c'était; il s'ouvrit à lui et n'eut pas de peine à lui persuader de lui servir d'instrument pour corrompre le général Pichegru. Comme la démarche était périlleuse, il était bon d'en dissimuler les dangers sous la grandeur du salaire : on lui promit, en cas de succès, un million de récompense, la direction de l'Imprimerie royale et le cordon de S. Michel. Fauche-Borel topa à toutes ces grandeurs inespérées; sans hésiter, il joua sa vie contre la probité de Pichegru. Ce dernier perdit la partie. Le pacte signé à Altkirch, où se trouvait le quartier-général, Borel alla s'établir à Strasbourg pour suivre cette affaire et attendre l'événement. Cependant ses démarches ayant paru suspectes, il fut arrêté (nov. 1795), et quant à Pichegru, on le rappela. Le succès de l'entreprise était donc bien compromis; mais Borel était homme à ressources, il ne désespéra pas. Remis en liberté, faute de preuves suffisantes, il ne tarda pas à renouer les fils du complot. Lorsque i ichegru eut été nommé président du conseil des Cinq-cents, l'occasion lui parut favorable et il se rendit à Paris. Le 48 fructidor renversa ses projets. Sa correspondance avec Pichegru, saisie dans les équipages du général autrichien, servit de prétexte au Directoire pour justifier son coup d'état. La maxime salus populi sera éternellement à l'usage de tous les partis pour légitimer leur ambition et égarer l'opinion publique. Il semblerait cependant, si le bien-être du peuple dépend de la loi, que son salut ne peut dépendre que du respect de cette loi? En faisant violence aux principes, le Directoire rouvrit les portes à l'arbitraire. Fauche-Borel réussit à se soustraire aux recherches de la police, et dès le lende

main du coup d'état, il nouait déjà de nouvelles intrigues. A la faveur d'un faux passe-port, il passa en Angleterre, et de là il se rendit à Mittau pour remettre à Louis XVIII des lettres du directour Barras qu'il était parvenu à gagner. Son activité égalait son dévouement, mais il était mal secondé: les événements marchaient toujours plus vite que les trames qu'il ourdissait si laborieusement. Cette fois encore les conjurés avaient compté sans un homme qui, lui, n'avait pas l'habitude des voies tortueuses, et qui, quelque inaccessible que parût le but, y marchait résolument. Le 18 brumaire mit facilement à néant toutes les espérances des contre-révolutionnaires royalistes. Découragé par tant d'échecs, FaucheBorel voulut renoncer à la politique et reprendre son ancienne profession. Il se rendit dans cette intention en Angleterre. Cependant de nouvelles négociations, dont il fut chargé, ne tardèrent pas à le rappeler sur le continent. Il s'agissait de réconcilier Moreau avec Pichegru. Ses démarches, à ce qu'il paraît, eurent un plein succès: Moreau écouta ses propositions. La jalousie, comme l'ambition, est une mauvaisę conseillère. Toutefois le gouvernement avait l'œil sur ses menées. Arrêté à Paris, Borel fut jeté dans la prison du Temple où il passa trois années, sans qu'on pût lui arracher aucun aveu. A la fin, le gouvernement prussien dont il était sujet, obtint son élargissement. En 4804, il était à Berlin; ce fut lui qui imprima le Manifeste de Louis XVIII contre I'Empire. Sur la fin de 4805, Bonaparte le fit réclamer; mais prévenu à temps, il s'enfuit et se réfugia à Londres où il poursuivit le cours de ses machinations jusqu'à la chute de l'Empire. En 4807, il avait fait paraître dans cette ville deux Notices, l'une sur Moreau et l'autre sur Pichegru. Tant de dévouement méritait une récompense; mais la reconnaissance est rarement la vertu des rois. Une fois installé aux Tuileries, Louis XVIII pensa que son zélé serviteur devait se tenir pour très-satisfait. Il ne lui fut pas même permis de s'approcher une seule fois

du trône pour y déposer ses hommages; les courtisans, qui craignaient sans doute que la part du lion n'en diminuât, le tinrent constamment éloigné. Ce qu'il y avait de plus cruel dans sa situation, c'est que ses nombreux créanciers, pensant qu'il était arrivé au comble de la fortune, le harcelaient avec d'autant plus d'acharnement qu'ils le supposaient infidèle à ses engagements. Sa détresse était extrême; la tête du pauvre homme se perdait. Au milieu de ses angoisses, il put se croire, encore un moment, appelé à jouer un rôle. Le ministre prussien de Hardenberg l'emmena avec lui à Londres; il y resta jusqu'au départ des souverains alliés; puis, vers la fin de 4814, il se rendit au Congrès de Vienne, porteur des dépêches de l'ambassadeur de Prusse. Cependant les événements devançaient toujours les diplomates. Déjà Napoléon, guidé par son étoile, était rentré aux Tuileries. Louis XVIII tenait sa petite cour à Gand. Le roi de Prusse, alors à Vienne, chargea Borel d'une lettre pour ce prince. Mais le temps de sa faveur était passé; soupçonné d'intelligence avec l'ennemi, il fut arrêté et jeté en prison. Il fallut l'intervention de la Prusse pour le faire remettre en liberté. Dès que le sort de l'Empire fut décidé, Borel revint à Paris pour solliciter; mais cette fois encore il fut éconduit par les entours du roi. L'ingratitude aigrit son cœur; il résolut de mettre le public dans la confidence de ses griefs et publia un Précis historique des différentes missions dans lesquelles M. L. Fauche-Borel a été employé pour la cause de la monarchie, suivi de pièces justificatives, avec cette épigraphe : Pœnam pro munere, Paris, aux frais de l'auteur, 1815, in-8°. Loin de le servir, cette publication ne fit que lui attirer des tracasseries et des procès. Plusieurs personnages en faveur y étant traités avec peu d'égards, l'édition fut supprimée. Perlet, autre agent des Bourbons, qu'il y accusait de trahison, lui répondit en lui renvoyant l'accusation. De là, un procès en diffamation. De part et d'autre,

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