supérieur, un homme assez entêté de ces sortes d'ouvrages pour y sacrifier pendant vingt ans, argent et soins de toute nature, même lorsque de pénibles circonstances en rendoient encore le produit presque nul. Il me sembla que ce grand enfant, qui se nomme le public, seroit très disposé à se laisser amuser avec des images, et qu'il accueilleroit fort gracieusement les livres dans lesquels on les lui présenteroit belles, soignées, et nombreuses; je m'occupai donc à donner à ce genre d'ornement un crédit, une popularité qui lui manquoient encore. Je cherchai à faire devenir les gravures une denrée de première nécessité pour les consommateurs de livres, et à forcer pour ainsi dire les suffrages des personnes les plus indifférentes pour ce superflu, cette exubérance du luxe typographique. Plusieurs de nos dessinateurs du premier rang, MM. Le Barbier l'aîné, Perrin, Peyron, Prud'hon, d'autres encore, mais surtout et pendant beaucoup d'années l'inimitable Moreau le jeune, me secondèrent merveilleusement dans cette longue et pénible entreprise. La plupart des graveurs distingués de cette ville n'ont pas moins de droit à une honorable mention. Recevant de moi des dessins d'un mérite supérieur, convenablement indemnisés pour leur travail, et animés par l'ardeur avec laquelle ils m'ont toujours vu cherchant à arriver au mieux possible, ils m'ont servi avec une supériorité que le public a su apprécier, et dont les nombreux témoignages de tous côtés répandus, sont le plus beau titre à leur réputation.

Sans doute je suis libraire, et en ce sens, c'est dans la vue d'une lucrative spéculation que j'ai fait imprimer

ces livres, exécuter ces dessins, ces gravures. Il est pourtant bien vrai que s'il n'y avoit eu en librairie que des livres tout-à-fait communs à fabriquer, si le commerce de ce pays n'avoit comporté que ce genre de manufacture typographique, j'aurois cherché d'autres moyens pour acquérir ou conserver une honorable aisance, et jamais je ne me serois fait libraire. C'est cette manière de voir qui m'a conduit à la fabrication presque exclusive des livres de littérature, et non pas à celle des ouvrages de jurisprudence, de médecine, etc., dans lesquels, passé l'exactitude qui y est de nécessité rigoureuse, tous autres soins d'exécution sont peine souvent perdue, et de laquelle le lecteur n'a souci ni cure.

Tous les dessins qui se trouvent dans cette Bibliothéque n'ont pas été exécutés pour moi, et à mes frais; il en est un assez grand nombre que j'ai achetés : et dans cette sorte d'acquisition je me suis presque exclusivement restreint à ceux qui pouvoient contribuer à l'ornement de quelque livre, parce que c'étoit en cela qu'ils m'étoient le plus agréable, et aussi parce qu'il ne me convenoit point de faire une collection indéfinie de dessins en tous genres.

ANT. AUG. RENOUARD.

Alü quidem equos amant, alii aves, alii feras; mihi verò à puerulo mirum acquirendi et possidendi libros insedit desiderium. (JUL. Imp.)

CATALOGUE

DE

MES LIVRES.

THÉOLOGIE.

ÉCRITURE SAINTE.

BIBLIA hebraica, cum punctis. Parisiis, Robertus Stephanus, 1544, 8 vol. in-16. réglés, mar. r.

* Très bel exemplaire, de première et ancienne reliure.

On sait que cette édition belle et rare, est plus correcte que l'in-4. donné en 1539-44, par le même imprimeur. L'une et l'autre ne contiennent que XXII livres, les seuls que reconnoissent les Hébreux.

* Rien ne seroit d'une plus fastidieuse monotonie que l'éternelle répétition des mots bel exemplaire, très bel exemplaire, qualifications que méritent à peu près tous les volumes de cette collection. Quarante années de persévérance à n'y admettre rien de mauvais, à remplacer continuellement de beaux exemplaires par d'autres plus beaux encore, ont épuré ce choix de livres de telle sorte que, soit dans les éditions du quinzième siècle, soit dans celles des Alde, des Elzevier, dans les classiques dits Variorum, et autres livres anciens et rares, on réussi à n'avoir rien que de beau; et même souvent on a eu le bonheur de rencontrer le plus bel exemplaire qu'il soit possible d'espérer. Quant aux livres modernes, presque tous ont été choisis en feuilles, sur plusieurs.

Versions grecques.

Sacrae Scriptvrae veteris, novaeqve Omnia, graece. Venetiis, in Aedib. Aldi et Andreae Soceri, 1518, mense febrvario, in-fol. mar. antiqué.

Eadem. Venetiis, in Aedib. Aldi et Andreae Soceri, 1518, un tome en 2 vol. in-fol. Ch. magna,

mar. bl. dent. Première et belle édition, aussi rare que recherchée.

C'est depuis quelques années seulement, que l'on a constaté l'existence d'exemplaires en grand papier de cette Bible. Ils sont aussi rares, et bien plus précieux encore que les Strabon, Pausanias, d'éditions aldines, etc. imprimés aussi sur grand papier, vers les mêmes temps.

Psalterium Davidis, gr. lat. ex recens. Joannis (Crastoni,) Placentini. Impressum Mediolani, 1481, die xx septembris, in-fol. mar. r. dent.

Première et rare édition en grec et latin. La première édition en grec seul, non moins rare, est de Venise, 1486, petit in-4.

Psalterium graecum, cura Justini Decadyi. Venetiis, Aldus Manutius, (1496,) in-4. mar. bl. dent. réglé en rouge.

Pour ce rare volume comme pour beaucoup d'autres éditions aldines, on a cru devoir no pas répéter ici des détails qui se trouvent dans les Annales des Alde, et qui auroient inutilement grossi ce Catalogue.

Psalmorvm liber, graece. Antverpiae, ex officina Christophori Plantini, 1584, in-24. v. f. ancien, avec fermoirs. Sur un feuillet est la signature de Chardon de La Rochette.

* Pour les livres ornés de petites lignes rouges, et qu'on a l'habitude de désigner par ces deux mots, entiers ou abrégés, lavé réglé, l. r., on n'employera point le mot lavé, afin d'éviter la désagréable équivoque résultant de l'usage assez moderne, et souvent nuisible, de laver et nettoyer les vieux livres. Pour cette première fois on a mis réglé en rouge, et dorénavant on se bornera au seul mot réglé, ou même à la seule lettre r.