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des médecins en appréhendent. Loin de là; car, au lieu de l'arrêter, ce moyen en assura vraisemblablement la durée normale, en dissipant une fluxion morbide, qui, par ses progrès violens, aurait bientôt, et de toute nécessité, suspendu la fluxion sur l'utérus, et en conséquence l'écoulement de sang qui en provenait.

Les convulsions d'épilepsie, la tendance à la paralysie, l'insensibilité profonde, dépendaient primitivement, dans cette observation, de l'affection trachéopulmonaire. Il en est de ces accidens comme du délire dans les pneumonies; seulement la congestion y est plus passive, le sang n'est point alors travaillé par une sorte de stimulation inflammatoire, il n'y a pas encore de travail de désorganisation fortement établi; et ces diverses circonstances sont autant de chances heureuses.

Observation d'empoisonnement par l'huile empyreumatique; par le docteur Duret, médecin à Nuits.

Une femme de la campagne, veuve, âgée d'environ trente ans, veut s'empoisonner, et cherche à se procurer de l'arsenic, qui lui est refusé; à défaut de cette substance, elle exécute son projet dans la nuit du 3 au 4 septembre 1828 au moyen d'huile empyreu matique du commerce, conservée chez elle depuis long-temps pour les maladies cutanées du bétail, et

en avale I once 6 gros, quantité qu'il a été possible de connaître au juste en calculant ce qui manquait dans la fiole jusqu'au niveau d'une ligne circulaire brune, indice du contenu de cette fiole avant l'empoisonnement.

Personne n'a été témoin des accidens qui ont succédé à l'ingestion de cette huile, mais ils ont cependant été facilement appréciables par les traces qu'ils ont laissés : il y a eu des vomissemens multipliés, dont la couleur brune et l'odeur ont fait reconnaître la matière; la malade a bu sans doute une grande quantité d'eau; enfin, vaincue par l'atrocité des douleurs, elle a terminé cette scène de souffrances en se jetant dans un puits, où elle a été trouvée le lendemain matin. Le cadavre, à la sortie du puits, exhalait l'odeur fétide de l'huile, dont quelques parties s'écoulaient de la bouche par la position déclive du corps.

A l'ouverture du corps, mes recherches, particulièrement dirigées sur les organes digestifs, m'ont fait constater les lésions suivantes.

Les lèvres sont pâles ainsi que la membrane palatine et la face supérieure de la langue, qui est racornie, dure, mince sur les bords, qui sont comme frangés et ondulés; les papilles sont prononcées, saillantes; le voile du palais, le pharynx et l'œsophage offrent la même couleur et le même racornissement.

L'estomac est plein de liquides, sa surface externe est rosée, parcourue de nombreuses veines distendues par un sang noir; dans beaucoup de points les parois des veines n'ont pu résister à cette distension,

et leur rupture a donné lieu à de petits épanchemens sanguins circonscrits qui donnent à l'estomac un aspect marbré de taches noires sur un fond rose. Les liquides contenus sont recueillis dans un vase; ce n'est que de l'eau, des débris d'alimens, une quantité notable d'huile empyreumatique et du sang provenant de la rupture de quelques vaisseaux.

La membrane muqueuse est d'un rouge vif pointillé, elle est épaissie, les rides sont très-prononcées ; on n'y remarque nulles traces d'érosion, mais seulement une surface déprimée, lisse, ovale, moins rouge, large d'environ six lignes, et qui paraît être la cicatrice d'une ancienne ulcération. Les intestins grêles sont également enflammés, mais à un moindre degré que l'estomac.

Les autres lésions observées dans le cerveau, 1es poumons, le cœur et les gros vaisseaux se rattachent à l'asphyxie par submersion, et deviennent étrangères au but de cette note.

D'après les désordres reconnus dans les organes digestifs, l'huile empyreumatique a agi comme poison âcre et irritant. Aurait-elle agi comme poison corrosif? La chose est possible, mais un autre genre de mort ne lui a pas laissé le temps de développer tous ses effets; elle n'a produit par son passage rapide dans les premières voies que le racornissement, et son séjour dans l'estomac a amené une forte congestion sanguine et une vive inflammation qui serait allée toujours croissant et aurait promptement amené la

mort.

Les exemples d'empoisonnement par l'huile empyreumatique sont tellemeut rares qu'il n'en est pas question dans la Toxicologie de M. le professeur Orfila; et en effet un poison aussi fétide ne sera jamais l'arme cachée du crime. La seule observation analogue, un empoisonnement par l'huile animale de Dippel, consigné dans le Dictionnaire des sciences médicales, t. 21, p. 605, est le résultat d'une méprise, comme celui-ci l'est d'une ferme volonté qui n'avait pas d'autres moyens d'exécution. J'ai donc cru devoir en conserver le souvenir, d'autant plus que, dans sa manière d'agir, l'huile empyreumatique brune du commerce paraît grandement différer de l'huile animale de Dippel, qui n'est que le même produit suffisamment rectifié.

Dans le cas dont je rappelle le souvenir, et qui a été observé par notre célèbre maître, le professeur Chaussier, une cuillerée à bouche fut prise, et le malade périt à l'instant: l'ouverture du corps ne laissa découvrir aucune sorte de lésion.

Je suis loin de suspecter l'exactitude d'une observation due au savant professeur que la science vient de perdre, mais comme dans le cas que je rapporte la mort est loin d'être survenue à l'instant, et surtout sans lésions cadavériques, bien que le poison ait été ingéré à dose au moins quadruple, il est donc force d'admettre dans l'huile de Dippel une action léthifère incomparablement plus rapide et plus puissante que celle de la simple huile empyreumatique, action stupéfiante du système nerveux, dont elle épuise subite

ment l'excitabilité, causant ainsi la mort par la brusque suspension des fonctions cérébrales, avant que le poison ait eu le temps de produire sur les organes avec lesquels il a été mis en contact les altérations de tissu qui devaient résulter de ses qualités âcres. Cette action de l'huile de Dippel serait alors à peu près semblable à celle de l'huile empyreumatique de tabac, qui, selon les expériences de MM. Brodie et Macartney, consignées dans l'ouvrage cité de M. Orfila, tue en quelques minutes les animaux sur la langue desquels on l'applique à la dose de deux ou trois gouttes.

Les effets comparatifs de ces trois poisons, qui ne sont au fond que la même huile plus ou moins mélangée ou débarrassée de substances qui lui sont étrangères, mériteraient d'être examinés de nouveau et soumis à des expériences.

De l'Orthomorphie par rapport à l'espèce humaine, ou Recherches anatomico-pathologiques sur les causes, les moyens de prévenir, ceux de guérir les principales difformités, et sur les véritables fondemens de l'art. appelé orthopédique; par J. Delpech, conseillerchirurgien ordinaire du Roi, professeur de chirurgie clinique à la Faculté de Montpellier, etc. Paris, 1829; 2 vol. in-8°, avec atlas grand in-4°.

De toutes les branches de la médecine, celle qui a pour objet l'étude et le traitement des difformités dont les diverses parties de notre organisation peuvent être

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