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nomination de commissaire peut s'entendre de personnes qui auraient été commises, par exception, et pour un cas particulier, à l'exécution des deux coupables, ce qui peut naturellement se supposer dans un temps où l'œuvre de bourreau n'avait rien de déshonorant; et en effet, on ne dit point que les fonctions de Borel fussent alors considérées; comme une charge honteuse, ou une flétrissure pénale attachée au fief de Bellencombre. Au reste, on donne ici l'argument puisé dans l'observation de Chorier pour ce qu'il vaut, et chacun est libre d'en tirer la conséquence qu'il lui plaira.

Sauval, dans ses Antiquités de Paris (1), dit que les religieux de Saint-Martin doivent tous les ans, à l'exécuteur, cinq pains et cinq bouteilles de vin, pour les exécutions qu'il fait sur leurs terres; que les religieux de Sainte-Geneviève lui payaient cinq sous tous les ans, le jour de la fête, à cause qu'il ne prend pas le droit de havée, qui est une poignée de chaque denrée sur leurs terres.

Ce droit dont parle Sauval, qu'on appelle communément havage, havagium, vieux mot, signifie le droit qu'on a de prendre sur les grains, dans les marchés, autant qu'on en peut prendre dans la main.

Le bourreau de Paris avait un droit de havage dans les marchés; et à cause de l'infamie de son métier, on ne le laissait prendre qu'avec un cuiller de ferblanc, qui servait de mesure. Ce droit a été supprimé.

(1) T. 11, p. 457.

Celui de Pontoise avait la même faculté; mais, par accommodement, elle fut transmise à l'hôpital-général de cette ville (1).

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Le roi est le seul en France qui ait des exécuteurs en titre d'office. Autrefois, les seigneurs qui avaient haute justice n'avaient cependant point de bourreau: lorsqu'il se présentait quelque exécution à faire dans une justice seigneuriale, ou même dans une justice royale pour laquelle il n'y avait point d'exécuteur, on faisait venir celui de la ville la plus voisine (2)..

Ces offices, dit Loiseau, sont les seuls auxquels il n'y a aucun honneur attaché : ce qu'il attribue à ce que l'office de bourreau, quoique très-nécessaire, est contre nature. Cette fonction est même regardée comme infâme; c'est pourquoi, quand les lettres du bourreau sont scellées, on les jette sous la table. (Édit. C. L.)

(1) Voyez les Amén. littér.

(2) Pendant la révolution, le bourreau de Paris fut admis au grade d'officier dans les armées. Le représentant du peuple Lequinio, en mission à Rochefort, voulant honorer le bourreau de cette ville, l'embrassa dans la société populaire, le fit dîner avec lui et ses collègues Guesno et Topsent, fit prendre aux membres de la société populaire l'engagement de le seconder dans ses exécutions, et proposa à la Convention nationale de lui décerner le titre de vengeur national.

Un décret du même temps, qui interdit le nom de bourreau, y substitua celui d'exécuteur des jugemens criminels.

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DU ROYAUME

DE LA BASOCHE (1).

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LE 2 juillet de l'année 1448, la communauté des clercs des procureurs du parlement de Paris, connue sous le nom de la basoche, fit donner, dès le matin, par ses timballes, trompettes, hautbois et bassons, à ses officiers, les aubades ordinaires qu'elle leur fait donner tous les ans en leurs demeures particulières, pour les rassembler, et les avertir de se rendre en corps au palais, où ils vinrent ensuite faire donner de pareilles aubades au Parlement, à la Cour des aides, et aux Requêtes de l'hôtel, comme ils ont coutume de les donner tous les ans à peu près dans ce même temps, lorsqu'ils se disposent à partir pour aller faire couper dans la forêt de Bondi, le mai qu'ils font élever devant le perron de la cour du palais.

Ils se promenèrent dans la ville, suivant leur usage, pendant plusieurs jours, tous à cheval, marchant deux à deux, au nombre de vingt-cinq ou trente, avec un étendard à leurs armes. Depuis quelques années, ils ont l'attention d'avoir tous, pour cette cavalcade, des

(1) Extr. dés Variétés historiques, ou Recherches d'un savant (RECUEIL), 1752, t. 3, avec des additions, par l'Edit. C. L.

habits rouges uniformes, avec des cocardes blanches, ce qui donne à leur troupe un air guerrier.

Ils partirent de Paris en cet équipage le dimanche 6, de grand matin, avec leurs timballes et trompettes, pour aller dans la forêt de Bondi faire marquer l'arbre

destiné à servir de mai. Ils en revinrent le même jour au soir, et le mai fut élevé devant le grand perron de la cour du palais, le mercredi suivant 9, avec les fanfares accoutumées.

On prétend que le nom de basoche vient d'un mot grec qui signifie discours plaisant et goguenard. Quoiqu'il en soit, cette communauté de la basoche, qui porte le titre de royaume, commença à se former dès que le parlement fut rendu sédentaire à Paris. Les procureurs, qui étaient d'abord en petit nombre, obtinrent du parlement, en 1303, la permission de prendre des jeunes gens pour leur servir d'aides, lesquels furent nommés clercs, parce qu'alors il n'y avait presque que les ecclésiastiques qui eussent la connaissance des lettres, et que tous les gens de pratique s'en servaient pour faire écrire leurs actes.

Comme il survenait souvent des différends entre ces jeunes clercs de procureurs, qui étaient portés devant les juges ordinaires, et détournaient les clercs de leurs occupations, Philippe-le-Bel, de l'avis et conseil de son parlement, établit la juridiction de la basoche, dont il ordonna que le chef porterait le titre de roi, et connaîtrait en dernier ressort avec ses officiers, sous le titre et autorité de royaume de la basoche, de tous les différends qui naîtraient entre les

clercs, et règlerait leur discipline. Il donna aussi à la basoche le pouvoir d'établir des juridictions basochiales inférieures dans les siéges royaux du parlement de Paris, à condition que les prévôts de ces juridictions rendraient foi et hommage aux lois de la basoche, et obéiraient à ses mandemens, et que l'appel de leurs jugemens serait porté devant lui où son chancelier.

Cette juridiction a été confirmée par plusieurs arrêts du parlement de Paris; et il y a encore en plusieurs endroits de ces prévôts basochiaux, comme au Châtelet de Paris: au présidial d'Angers, il porte le titre de prince de la basoche, comme ils l'avaient

tous anciennement.

Philippe-le-Bel ordonna aussi que le roi de la basoche ferait faire tous les ans à Paris la montre de tous les clercs du palais, et de ses suppôts et sujets. Cette montre se faisait en forme de carrousel, sur les mandemens du roi de la basoche, envoyés à ses princes et sujets, avec ordre de se trouver à Paris, sous peine de grosses amendes, en plusieurs bandes et compagnies, sous les habits et livrées du capitaine, dont chacun avait un modèle; ce qui attirait un si gránd concours, et fit enfin tant de bruit, que François Ier manda à son parlement qu'il se rendrait à Paris un certain jour pour voir cette cérémonie.

Le roi de la basoche en ayant eu avis, fit demander par son avocat-général à la cour, qu'il lui plût de vaquer les deux jours suivans, ce qui fut ainsi ordonné par arrêt du 25 juin 1540. La montre se fit au jour

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