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COMPTE RENDU

DE L'EXERCICE 1907-1908

PAR

LE LIEUTENANT-COLONEL LE JOINDRE

SECRÉTAIRE ANNUEL

MESSIEURS,

En vous présentant le compte rendu de vos travaux, celui auquel vous avez bien voulu confier les fonctions de secrétaire annuel a tout d'abord pour devoir de vous entretenir des confrères que vous avez perdus pendant l'exercice écoulé, ainsi que des nouveaux collaborateurs appelés à combler les vides creusés dans vos rangs. Le cadre de son rapport est forcément étroit juste tribut de regrets aux premiers, souhaits confraternels de bienvenue aux seconds, brève énumération des travaux des uns et des autres, c'est à cela que se borne sa mission, et il n'y aurait pas lieu de l'étendre.

N'avez-vous pas, en effet, pour compléter le résumé que vous présente votre secrétaire, les rapports détaillés et compétents qui vous ont fait accueillir les candidatures, les études insérées ensuite dans les Mémoires de votre Compagnie, enfin, s'il s'agit des

membres disparus, les notices qui leur ont été consacrées ou les discours prononcés en leur honneur?

A la place d'esquisses rapides, vous pouvez ainsi obtenir, à l'aide de ces documents, des portraits poussés plus à fond. Le compte rendu annuel n'en aura pas moins rempli un objet utile, celui de vous donner des repères, de situer les figures dans le temps et de montrer comment elles se groupent pendant la période considérée.

Au cours du dernier exercice, l'Académie a perdu : un membre honoraire, M. Druon, qui avait passé dans cette classe à la fin de 1907; un membre titulaire, M. Schlagdenhauffen; huit associés-correspondants nationaux, MM. Jalabert, Eugène Lefebvre, tous deux anciens titulaires, Pêtre, l'abbé Poirine, Henri Lefebvre, Léopold Quintard, Émile Gebhart et Alexandre de Metz-Noblat; enfin un associé-correspondant étranger, M. le comte van der Straten-Ponthoz.

Vos choix se sont portés sur MM. Perdrizet et Arth, déjà associés-correspondants, pour remplir les deux vacances de titulaires. Vous avez, en outre, élu comme associés-correspondants nationaux MM. Armand Simonin, André Hallays, Georges Harmand, l'abbé Ingold, Louis Schaudel, Gaston May et Charles Sadoul.

Sur l'ensemble de l'Académie, il y a donc une réduction de quatre associés-correspondants: la diminution qui vous avait été signalée en 1907 n'a fait que s'aggraver.

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M. HENRI DRUON, proviseur honoraire, agrégé des classes supérieures, docteur ès lettres, né le 12 mai 1819, était le doyen d'âge de vos titulaires; il en était en même temps un des plus anciens, puisqu'il avait été nommé d'emblée à ce titre le 5 août 1881. Il fut président de votre Compagnie en 1889.

Bien que sa santé eût résisté aux atteintes de l'âge, celle-ci n'en exigeait pas moins certains ménagements, et l'assiduité à vos séances, surtout dans la mauvaise saison, n'était pas sans danger pour M. Druon; aussi vous avait-il renouvelé, en 1907, une demande de démission déjà formulée en 1900 et qu'il avait bien voulu, à cette époque, ajourner sur vos instances. Cette fois, il vous fallut céder, mais vous tiptes justement à décerner à votre vénéré confrère le titre de membre honoraire. Vous aviez d'ailleurs l'assurance qu'il resterait associé à vos travaux, qu'il conserverait, en particulier, la présidence de la commission des prix de vertu, tâche à laquelle il avait donné, depuis bien des années, son dévouement; il la continua, en effet, jusqu'à sa dernière heure, préparant encore, sur son lit de douleur, les dossiers des humbles, mais vaillants candidats dont il avait l'intention de défendre la cause.

La carrière de M. Druon a été tout entière consacrée à l'enseignement public. A sa sortie de l'École normale supérieure, en 1842, il débuta comme professeur de troisième au collège royal de Strasbourg; plus tard, nous le trouvons censeur au lycée de Nancy, proviseur à Châteauroux et enfin à Poitiers. C'est là qu'il se décide à prendre une retraite anticipée, pour se fixer à Nancy, où l'attiraient ses affections de famille

ainsi que le charme de votre ville. Libre de toute tâche imposée, il pouvait se donner plus complètement au culte des lettres qui avait été une des plus douces occupations de sa vie active.

La bibliographie complète des œuvres qu'il laisse est considérable; publiées séparément ou insérées dans vos Mémoires, ainsi que dans d'autres recueils, dans le Correspondant notamment, où elles figurent d'habitude sans le nom de leur auteur, elles forment un ensemble aussi varié qu'important. Helléniste, latiniste passionné, critique pénétrant, ingénieux et délicat romancier, historien érudit, pédagogue éminent, il vit, à diverses reprises, l'Académie française lui décerner ses prix les plus recherchés. C'est ainsi que pour ses Études sur la vie et sur les œuvres de Synésius et la traduction complète des œuvres de ce grand évêque du quatrième siècle, il reçut, en 1879, le prix Langlois; l'Histoire de l'éducation des princes de la Maison des Bourbons de France lui valut, en 1898, l'un des prix Bordin; enfin, un prix Montyon fut attribué, en 1907, à son ouvrage sur Fénelon, archevêque de Cambrai.

Comme vous le voyez, la verdeur de sa belle intelligence était restée intacte; les glaces de la vieillesse n'avaient pas davantage refroidi la chaleur de son cœur, ni affaibli sa pitié pour les pauvres et les déshérités dont il continua toujours à soulager les misères. La sérénité de sa fin fut admirable; soutenu par la foi catholique qui avait été le guide indéfectible de toute sa vie, elle fut, comme l'a dit le poète, le « soir d'un beau jour ». M. Druon est mort le 3 mars 1908..

C'est également en pleine possession de ses facultés, voyant venir la mort avec un calme plein de courage, que le Dr FRÉDÉRIC SCHLAGDENHAUFFEN s'est éteint, le 16 juillet 1907, après une courte maladie; peu de temps auparavant, il assistait encore à une de nos séances où nous étions heureux de l'entourer de notre respectueuse sympathie.

Né à Strasbourg en 1830, M. Schlagdenhauffen avait été reçu pharmacien de classe en 1855; il avait ensuite conquis les diplômes de docteur ès sciences physiques et de docteur en médecine. Professeur agrégé à l'École de pharmacie, puis à celle de médecine de Strasbourg, il se trouvait dans cette ville lors de la guerre de 1870. Ses connaissances professionnelles éminentes et son dévouement patriotique, qui ne leur cédait en rien, ne trouvèrent que trop vite leur emploi sur la terre d'Alsace, théâtre de nos premières défaites; sa belle conduite aux ambulances, pendant le siège de Strasbourg, lui valut même une proposition pour la Légion d'honneur. Après les funestes événements qui nous arrachèrent une partie de notre territoire, le professeur, qui avait repris son enseignement aux écoles libres de pharmacie et de médecine de Strasbourg et l'avait continué jusqu'à la date fatale de l'option 1er octobre 1872 quitta sa chère ville natale pour se fixer à Nancy, où il vint successivement occuper une chaire de notre Faculté et diriger l'École supérieure de pharmacie. Il remplit ces dernières fonctions du 15 octobre 1886 au 1er novembre 1900; l'honorariat fut alors le couronnement de cette belle carrière, rehaussée d'ailleurs par d'autres distinctions,

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