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mandre, le cygne percé d'une flèche, pour ne mentionner que ceux-là, nous rappellent, dans l'ornementation des admirables châteaux de la Loire, que Louis XII, François Ier et Claude de France y avaient leurs résidences. Faut-il ajouter encore que les souverains d'une de nos anciennes provinces s'intitulaient dauphins et que ce titre a ensuite été protocolairement attribué aux héritiers présomptifs de nos rois?

Fenimore Cooper et Gustave Aimard nous montrent également, dans leurs romans, les guerriers des tribus indiennes se parant de noms d'animaux, tradition souvent continuée par nos modernes apaches. De même, certains corps de troupe se réclament de noms d'animaux pour se désigner; sans parler du dragon officiellement identifié avec son aïeul mythologique, le zouave a pris le titre de chacal et le soldat des troupes coloniales s'appelle marsouin ou bigor (bigorneau), suivant qu'il appartient à l'infanterie ou qu'il sert le canon.

Les ornements du costume militaire et des armes, les enseignes des combattants, l'art héraldique enfin, qui, dans une bonne partie de ses conceptions, résume les tendances en question, peuvent également être invoqués. C'est ainsi qu'à Vérone, les Scaliger empruntaient au chien leur prénom et portaient en même temps une tête de chien en guise de cimier sur leur casque tels Can Grande et Can Signorio. Il n'y a plus à s'étonner, dès lors, de voir le lion, l'aigle, l'éléphant, le dragon, émailler les décorations et imposer leurs noms à divers ordres. Ici du moins, nos frères inférieurs reçoivent un traitement d'hon

neur; il est vrai que l'homme n'en fait généralement bénéficier que ceux que leur force lui rend respectables. Vais-je maintenant vous parler des chimères ainsi que de ces êtres fabuleux issus de notre imagination, centaures, faunes, sphynx, sirènes et autres hybrides, aborder l'étude du culte des animaux, celle des présages, des métamorphoses, de la métempsychose? Quelle série, et que de menaces pour la patience des auditeurs! Purgon n'était pas plus effrayant, lorsqu'il agitait devant le Malade imaginaire le spectre de toutes les pepsies.

Mieux vaut en rester là et je n'abuserai pas davantage de votre attention; vous estimerez peut-être que le but que je me proposais est atteint. J'espère en effet vous avoir montré que du contact des animaux et des hommes a surgi, au figuré, une véritable ménagerie humaine; que les noms des bêtes, en s'appliquant à l'homme, ont pris de nouvelles acceptions; qu'il s'est créé des locutions dont notre vocabulaire s'est par suite enrichi. A côté de tant d'autres services qu'ils nous rendent, ces pauvres animaux exercent donc aussi leur action dans le domaine réservé de la pensée et de la langue : voilà une dette de plus, à laquelle leur tyran ne satisfera probablement pas plus qu'aux précédentes.

LA

LUTTE DE L'HOMME

CONTRE LE MILIEU EXTÉRIEUR

PAR

Le D' Ed. IMBEAUX

INGENIEUR EN CHEF DES PONTS ET CHAUSSÉES

L'homme étant, au point de vue physiologique, un animal à sang chaud, et à température sensiblement constante (37°), plongé dans l'air qu'il respire, il doit souvent subir de la part de ce milieu des injures plus ou moins graves pour sa santé, injures provenant de ce que les conditions atmosphériques, suivant les différents points du globe et suivant les saisons, s'écartent plus ou moins, dans un sens ou dans l'autre, de l'optimum qui convient le mieux à notre organisme. Celui-ci, ayant à lutter contre les écarts ou défectuosités de l'ambiance, y réussit dans une certaine mesure en réagissant par ses moyens propres, qu'on peut appeler moyens de défense naturels ou intrinsèques; mais il nous faut bien souvent recourir en outre à des moyens artificiels ou extrinsèques, seuls capables de

reculer, et de beaucoup, les limites de notre résistance. Ce sont ces moyens, mis par l'art et la science à la disposition de l'homme, que je vais rapidement passer en revue, en considérant non seulement ce qu'ils sont aujourd'hui, mais aussi et surtout ce qu'ils me paraîtraient devoir être dans l'avenir.

L'atmosphère est à considérer en ce qui regarde la santé de l'homme comme milieu respiratoire, milieu thermique et milieu lumineux : la respiration dépend elle-même de la pression barométrique, notamment de la tension des différents gaz de l'air, y compris la vapeur d'eau, ainsi que de la pureté (absence de corps étrangers de l'atmosphère. J'aurai donc à examiner la lutte de l'homme contre :

1o Le défaut ou l'excès de pression, ou de teneur en oxygène;

2o Le défaut ou l'excès d'humidité;

3o, 4o et 5o Les défectuosités de la température, de la ventilation et de la luminosité, principalement dans les habitations;

6o Les autres impuretés de l'atmosphère (brouillards, fumées, poussières, odeurs, gaz toxiques).

1o DÉFAUT OU EXCÈS DE PRESSION ATMOSPHÉRIQUE

En un même lieu, les variations barométriques sont trop faibles pour influencer directement la santé humaine (elles peuvent l'influencer indirectement en produisant les changements de temps, pluies, refroidissements, etc., etc.); il n'en est pas de même si l'on se meut en altitude ou en profondeur.

SÉRIE VI, t. VI, 1908

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a) Défaut de pression. Quand on monte, soit en grimpant sur les montagnes, soit en s'élevant dans l'air par les procédés de l'aviation, procédés qui demain seront peut-être employés couramment, on subit une dépression qui augmente avec la hauteur, suivant une loi que la formule de Laplace représente, au moins approximativement. Sans nous arrêter à cette loi, il nous suffira de dire qu'à 3.500 mètres la pression est réduite aux deux tiers de 760 millimètres de mercure, qu'à 5.540 mètres elle est de un demi, à 11.000 mètres de un quart et à 18.400 mètres de un dixième seulement. La tension de l'oxygène diminue dans la même proportion, et la tension des gaz du sang cherche à se mettre en équilibre avec leur tension dans l'air ambiant. Or le centre respiratoire de l'homme, situé comme on sait dans le bulbe, n'est pas très sensible aux variations de la tension de l'oxygène dans le sang qui l'irrigue, et ce n'est que lorsque cette tension diminue de plus d'un tiers, soit aux environs de 3.000 à 3.500 mètres au-dessus du niveau de la mer, qu'il réagit par des troubles sérieux : ces troubles, résultant du manque d'oxygène, constituent le mal de montagne. Ce mal n'est donc à craindre des ascensionnistes et des aéronautes que dans les hautes régions encore est-il bien atténué si l'on y arrive lentement et graduellement. Il se fait alors un acclimatement assez prompt par augmentation de la capacité respiratoire : cette sorte de réglage naturel, proportionnellement à la tension de l'oxygène, a pour mécanisme principal l'accroissement du nombre des globules rouges. Ainsi, Viault trouve sur lui-même que son sang qui, à Bor

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