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SOMMAIRE.

1. Caractères d'imprimerie; procédés employés pour la gravure et la fonte des caractères; artistes célèbres. - II. Gravure sur bois appliquée à la typographie. - III. Typographie musicale; impression topographique. — IV. Composition typographique; mise en pages. Procédés mécaniques appliqués à la composition.-V. Correction typographique. — VI. Presses, divers systèmes; tirage; photographie; télégraphie électrique. - VII. Encre; impressions en couleurs. VIII. Stéréotypie; procédés analogues. IX. Ouvriers typographes.

1. Les caractères d'imprimerie sont mobiles et représentent séparément toutes les lettres de l'alphabet, ainsi que les signes de ponctuation, chiffres, etc.

Avant l'invention des caractères mobiles, on se servait pour imprimer de types gravés en relief sur des planches de bois, procédé lent et coûteux, puisqu'il obligeait de graver une à une toutes les lettres d'un livre, sans que ces caractères pussent servir à aucun autre ouvrage. Aussi ce procédé n'était-il guère employé que pour les livres de peu d'étendue et d'un usage très-répandu, tels que les specula, les donats, etc.;

quant aux autres livres, on continua à les demander à l'industrie des copistes, jusqu'au moment où Gutenberg eut trouvé le moyen de composer toutes les pages d'un livre avec des caractères mobiles pouvant servir successivement à l'impression d'un grand nombre d'ouvrages.

Les premiers essais furent nécessairement fort imparfaits. Les caractères, taillés en bois, étaient presque toujours inégaux, manquaient de netteté et formaient quelquefois d'une seule pièce des syllabes et des mots entiers. Ces formes de lettres et de mots étaient liées entre elles avec de la ficelle, moyen tout à fait insuffisant pour les tenir serrées convenablement.

Lorsqu'on voulut employer le plomb, le cuivre ou même l'argent, la difficulté ne parut pas moins grande. On perdit d'abord beaucoup de temps à scier, limer, polir, équarrir et réduire à une égale hauteur les petites pièces de métal sur lesquelles chaque lettre devait être gravée. Les inventeurs. imaginèrent alors de fondre le métal selon les proportions désirées de manière à ce qu'il ne restât plus que la lettre à graver. Enfin, ils cherchèrent le moyen de fondre l'œil même de la lettre avec ce corps, par une seule opération, consistant à couler le métal dans des moules qui contiendraient chaque lettre gravée en creux. Le mécanisme de l'imprimerie était dès lors inventé.

Quand on songe aux difficultés de toute nature qu'il fallut surmonter avant d'arriver à fondre les caractères dans des proportions assez exactes pour pouvoir les employer à la composition des livres, on ne s'étonne plus du temps, des peines et des sommes énormes qui furent prodigués par Gutenberg et ses associés pour mener à bonne fin leur entreprise.

Cette invention, comme nous l'avons déjà dit ailleurs, fut

perfectionnée en 1452 par Pierre Schoeffer, devenu l'associé de Faust et de Gutenberg, après le retour de celui-ci à Mayence. Schoeffer grava le type de chaque caractère sur un poinçon d'acier, auquel il donna ensuite par la trempe une assez grande dureté pour pouvoir tirer une empreinte de la lettre sur une matière solide, capable de résister à l'action d'une chaleur prolongée. Le cuivre lui parut remplir ces dernières conditions; il enfonça dans une lame de ce métal, à l'aide d'un marteau, son poinçon d'acier, dont il obtint ainsi une empreinte parfaite en creux; il n'eut plus alors qu'à chercher les moyens d'y couler du plomb, de manière à en faire ressortir un relief en tout semblable au poinçon dont il s'était servi,

C'est ce qu'il obtint aisément, en montant sur l'empreinte faite dans le cuivre un moule propre à donner à chaque lettre une épaisseur convenable et en prenant toutes les précautions nécessaires pour que les caractères fussent parfaitement d'aplomb et de même hauteur à la surface de la lettre.

Quant à la fonte même du caractère, c'est-à-dire à l'introduction dans le moule du métal en fusion, on ne connaît exactement ni le métal employé ni les procédés en usage dans les premiers temps de l'imprimerie. Aujourd'hui, on se sert d'un alliage de plomb, d'antimoine et d'étain; quant à l'opération même, qui ne laisse pas que de demander une certaine habileté, on y procède de la manière suivante :

L'ouvrier tient de la main gauche un moule formé de deux pièces en équerre, coulant l'une sur l'autre, de manière à se rapprocher à volonté pour donner les différentes épaisseurs aux tiges des lettres.

La matrice est placée, à la partie inférieure du moule, entre deux registres qui la maintiennent de chaque côté, tandis

qu'un ressort la retient appliquée devant l'ouverture, et fixe la hauteur des lettres.

Placé devant un creuset, l'ouvrier y puise le métal en fusion avec une petite cuiller de fer en contenant juste la quantité nécessaire pour remplir le vide. Il coule ce métal avec célérité par l'ouverture du jet, placée à la partie supérieure du moule, en même temps qu'il élève son bras gauche avec force pour accélérer, par un mouvement brusque, la chute du métal jusqu'à la partie inférieure qu'elle doit atteindre pour prendre, dans le creux de la matrice, l'empreinte de la lettre.

De ce mouvement brusque d'ascension du bras gauche, au moment où le métal en fusion touche les parois du moule, dépend le succès de l'opération; car si la matière était coulée simplement par son contact avec le fer, elle serait immédiatement figée à la superficie du moule ou ne donnerait que des produits imparfaits sans aucune netteté.

Ce travail demande de la part de l'ouvrier une grande habitude, pour saisir justement la force d'impulsion à donner au moule au moment où il applique la cuiller à l'orifice du jet. Tous ces mouvements exigent une grande célérité, puisqu'un ouvrier doit fondre, en moyenne, trois mille lettres par jour.

Le caractère des premières éditions typographiques ressemble à l'écriture du temps, qui est une sorte de demi-gothique. En 1471, le gothique pur était employé à Strasbourg. L'Allemagne, dit M. Philarète Chasles, avait imité avec scrupule les pointes et les angles aigus de ce caractère gothique, qui semble avoir introduit dans l'écriture les caprices de l'architecture ogivale.

Le caractère gothique s'est perpétué jusqu'à nos jours en Allemagne, soit dans les manuscrits, soit dans les livres im

primés; cependant l'écriture et l'impression en lettres romaines y sont maintenant fort usitées.

Les premiers typographes allemands avaient adopté dans leurs impressions l'écriture nationale, il en fut de même de ceux qui portèrent l'imprimerie dans les pays étrangers. Ainsi Sweynheym et Pannartz qui, sortis des ateliers de Mayence, allèrent s'établir à Rome et introduisirent l'art typographique en Italie, employèrent le caractère romain. Leur exemple fut suivi par la plupart des autres imprimeurs de cette contrée, notamment par Jean et Vindelin de Spire, premiers imprimeurs de Venise. Nicolas Jenson, Français d'origine, qui bientôt aussi alla s'établir dans la même ville comme imprimeur, graveur et fondeur, détermina la forme et les proportions du caractère romain, tant majuscule que minuscule, tel qu'il existe encore aujourd'hui, à quelques modifications près, dans les imprimeries.

Géring et ses associés à Paris se servirent d'un seul caractère de gros-romain pour tous les ouvrages qu'ils imprimèrent en Sorbonne. Après qu'ils se furent établis rue Saint-Jacques, ils employèrent plusieurs sortes de caractères, dont quelques-uns ressemblent à une écriture à la main; sans être gothiques, ils se rapprochent de ceux des éditions de Mayence faites par Pierre Schoeffer; mais les ouvrages qu'il imprima seul, en 1478, sont en beaux caractères romains, et peuvent même rivaliser avec les impressions vénitiennes alors trèsrenommées.

Gunther Zainer, premier imprimeur d'Augsbourg, et plusieurs autres typographes d'Allemagne, employèrent aussi le caractère romain; mais, par un retour bizarre, le gothique non-seulement prévalut en Allemagne où il est encore en usage, mais il s'introduisit en Italie, en France, en Espagne,

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