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DES

ÉVÈQUES FRANÇAIS

RÉSIDANT A LONDRES

QUI N'ONT PAS DONNÉ LEUR DÉMISSION

A LONDRES

de l'Imprimerie de Cox FILS et BAYLIS

Great Queen Street

Se trouve chez PROSPER FRÈRES, libraires, Wardour Street, au coin d'Oxford Street

Mai 1802

MÉMOIRE

DES

ÉVÈQUES FRANÇAIS

RÉSIDANT A LONDRES

QUI N'ONT PAS DONNÉ LEUR DÉMISSION

Un bref de N. S. P. le Pape Pie VII, donné à Rome à Sainte-Marie-Majeure, le 15 août 1801, et adressé aux archevêques et évêques de France en communion avec le siège apostolique, a été transmis aux évêques français réfugiés à Londres par Monsignor Erskine, chargé d'affaires du souverain pontife près du roi d'Angleterre. Il était accompagné d'une lettre de ce ministre. en date du 16 septembre suivant, et écrite en exécution d'un ordre exprès de Sa Sainteté. Ce bref, lu par chacun. des évêques avec une attention respectueuse, devenu dès ce moment l'objet unique de leurs réflexions particulières, fut bientôt celui d'un examen commun. Réunis avec les mêmes intentions, les mêmes désirs, les mêmes sentiments pour le bien de la religion, ils établirent entre eux une discussion aussi approfondie que pouvait le permettre

les bornes d'un délai court et fatal. Si tout ne fut pas dit, tous les aperçus furent présentés, du moins, sur une démarche aussi importante que celle qui leur était demandée, et sur le poids qu'ajoutait à cette demande le nom du pape et les motifs qui la lui dictaient. Quatorze ont cru ne pouvoir y accéder.

Pleins de respect pour la chaire de Pierre, d'amour pour la personne du digne pontife qui l'occupe, malgré l'avantage de pouvoir nous donner le mérite d'une déférence respectueuse et d'un sacrifice apparent, quoique mis à l'épreuve séduisante de l'espoir de nous rouvrir l'entrée d'une patrie toujours chère; cependant, nous avons préféré une douloureuse résistance. Certes, la plus forte conviction du devoir a pu seule faire pencher la balance vers cette pénible détermination. D'un côté, nous trouvions tout ce que les hommes chérissent le bien personnel, la satisfaction de complaire à une autorité respectée, l'espérance donnée de concourir à des résultats importants, et enfin, la gloire promise d'un dévouement méritoire; de l'autre, la défaveur d'une résistance facile à être mal interprétée, la continuation des travaux du plus pénible apostolat, la prolongation d'un exil qui fait peser sur nous les regrets accumulés de pasteurs, d'hommes et de Français, la nécessité de nous trouver un moment en contradiction apparente avec le chef que nous vénérons, la douleur de nous voir séparés dans la conduite de quelques-uns de nos confrères respectés et chéris, avec lesquels nous avons couru si longtemps la carrière honorable de l'infortune et avec lesquels nous espérions en atteindre le terme. Voilà l'alternative où nous nous trouvions ; et si la voix du devoir ne s'était pas

élevée au-dessus de celle des plus douces affections de l'homme, sans doute, un facile acquiescement, une résignation sans sacrifice réel, l'amour du repos auraient dicté notre réponse. Nous avons écarté toutes ces considérations, nous avons pesé, au poids du sanctuaire, nos obligations, nous avons cru devoir conserver le fardeau de l'épiscopat, mais enfin, nous n'avons pas accédé au désir exprimé du Saint-Père; cela seul nous impose l'obligation impérieuse de lui rendre compte de nos motifs. Fils respectueux et soumis, dans l'ordre de l'épiscopat, nous devons au pasteur des pasteurs l'exposé de nos principes, de nos sentiments; et cet exposé sera le témoignage le plus authentique de notre entier dévouement à cette Église-mère, à cette chaire du prince des apôtres où est assis le chef de l'épiscopat.

Une autre considération non moins puissante nous commande cet exposé. Nous avons à regretter de n'avoir pas vu partager notre opinion par quatre de nos confrères délibérant avec nous. Nous pouvons craindre que parmi ceux auxquels le bref sera parvenu dans leurs retraites isolées, plusieurs n'aient cédé à l'empressement d'un zèle toujours respectable dans son principe, et n'aient eu ni le temps de considérer la question sous tous ses rapports, ni les moyens d'y appeler les lumières de la discussion et des conseils. Nous n'ignorons même pas que, moins frappés que nous de la force impérative des raisons qui nous ont déterminés, plusieurs ont donné leur démission. Persuadés qu'ils ont suivi la voix de leur conscience dans toute sa pureté, comme nous avons suivi celle de la nôtre, nous sommes bien loin de penser même à jeter le moindre nuage sur leur démarche; mais nous regardons comme

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