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Les côtés et étant ainsi déterminés, GIRARD imagine un nouveau quadrangle sphérique dans lequel il les substitue aux côtés donnés

et achève la solution sur ce nouveau quadrangle.

Pour cela il dit que l'opération qui reste à faire n'est en rien dissemblable à l'opération du 3e cas des triangles plans, ou l'on cerche les 2 angles incogueus sans mener de perpendiculaire », c'est-à-dire, sans décomposer le triangle donné en deux triangles rectangles.

Il est donc clair, que partant de la proportion

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il l'a par application des théorèmes du 5o livre des Éléments d'EUCLIDE, d'abord écrite sous la forme

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après quoi, en opérant sur chacun des deux membres, la transformation qu'il a exécutée dans le cas similaire des triangles rectilignes, il a obtenu la proportion des quatre tangentes

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Cette belle généralisation de la formule de THOMAS FINK est restée classique et se lit encore dans tous les manuels de trigonométrie sphérique élémentaire.

Voici maintenant le texte de GIRARD. Sa lecture, me semble-t-il, ne peut plus guère présenter de difficulté.

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Quant au quadrangle spher. que le Sieur STEVIN dit n'avoir peu resoudre, en la fin du troisiesme livre de la Cosmogr. des triang. spher. en voicy la solution: la figure n'a qu'un angle incogneu, et iceluy comprins de deux lignes cogneües :

"Soit menée une diagonale de l'angle incogneu.

"Les angles opposites sont egaux ou non. Si egaux la diagonale divise l'angle du milieu (que j'appelleray ainsi par distinction) en deux telles parties que leurs sinus seront en mesme raison que les sinus des costez opposites donnez.

"Mais si les angles sont inegaux, je substitueray un costé en la place d'un des costez donnez; voire de celuy que je mettrai au premier lieu en l'operation ceste reigle de trois : le sinus d'un costé cogneu me donne le sinus de l'angle opposite; combien le sinus de l'autre angle? Viendra le sinus d'un costé, que je substitue au lieu du susdit. Alors comme devant, l'angle du milieu sera divisé en deux angles par la diagonale. dont les sinus sont en mesme raison que les sinus des costez opposites qui les soustiennent. Or leur invention n'est en rien dissemblable à l'operation du troisiesme cas des triang. plans, où l'on cerche les 2 angles incogneus sans mener de perpendic. ».

Ici finit à proprement parler le Précis de Trigonometrie.

« Et pour remplir les pages qui, autrement seroyent vuides, je mettray les choses suivantes ».

Aucun titre ne pouvait être mieux choisi pour la collection de próblèmes que forment ces choses ». Nul ordre n'y règne. L'auteur n'a pas même pris la peine d'employer un algorithme unique dans l'écriture des équations. Ce qui est loin de vouloir dire, pourtant, que les exercices proposés sont peu dignes d'attention. On en jugera par les exemples que j'en extrais.

Le premier pourrait servir d'Introduction à deux bons articles sur la formule de SNELLIUS, attribuée souvent à tort à OZANAM (1), publiés jadis dans le présent recueil. L'un est des plumes de BROCARD et MANSION (2), l'autre de celle de M. LE PAIGE (3).

GIRARD vient de donner une table d'arcs de cercle dont la longueur est calculée en fonction du rayon. « L'usage de ces Tables est fort frequent, dit-il, aussi elles sont propres à pratiquer ce tres-beau probleme de l'invention de Monsiur W. SNELLIUS descrit en l'appendice de sa Cyclometrie (4), probleme 5, et icy reduit selon nostre stile; qui est

(1) Fait l'objet d'un petit traité publié en 1699 sous le titre de Nouvelle trigonometrie où l'on trouve le moyen de calculer toutes sortes de triangles rectilignes sans les tables des sinus et aussi par les tables des sinus avec une application de la trigonométrie à la mesure des lignes droites accessibles et inaccessibles par M. OZANAM, professeur de mathématiques.

Je ne l'ai pas vu. Je donne le titre d'après l'article de M. BROCARD, qui suit.

(2) La Trigonométrie réduite à une seule formule d'après J. OZANAM, professeur de Mathématiques, par BROCARD, M, t. IX, 1889, pp. 161-164.

Ce premier article eut dans le même volume deux suites, par PAUL MANSION. Sur la formule d'OZANAM (pp. 181-183) et Encore la formule d'OZANAM (pp. 265-268).

(3) La formule d'OZANAM cst due à W. SNELLIUS. Extrait d'une lettre de M. LE PAIGE à M. MANSION, M, t. X, 1890, pp. 34-36.

(4) WILLEBRORDI SNELLII R. F. Cyclometricus... Lugduni Batavorum, Ex officina Elzeviriana, 1621, pp. 95-97. (Bibl. Roy. de Belg.).

pour trouver les angles d'un triangle rectangle, les costez donnez, sans se servir des Tables de sinus. Lequel est tel.

"Soit H hypotenuse, B base et P perpend. pour le moindre costé ; lequel n'estant environ plus de la moitié de B, on pourra cognoistre

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l'angle jusques à minute. Car, tant plus petit est P à raison de B, tant plus precisement se trouvera l'angle.

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Donc, soit R le raid de 10000000 ou davantage. Alors

3PR 2H+B 2H + B

-]

3PR

H2 + B

sera la mesure de l'angle opposite à P, lequel se deffinira par ceste Table susdite. Or, par ceste invention on peut cognoistre un angle jusques à secondes, tierces et qartes, voire davantage si l'on veut. Ce qui ne se peut faire par les Tables des sinus communes.

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» Mais j'aimerois mieux me servir du premier, car l'autre ne se met en œuvre que quand P à B est d'une raison fort petite. Le moyen est (1)

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Suit l'application de ces formules à un exemple numérique.

J'ai choisi un second exemple de préférence à d'autres parce que CHASLES a jadis appelé sur lui l'attention (2). En voici l'énoncé.

«Si un quadrangle est inscrit au cercle, on peut changer tellement la disposition des costez, qu'on trouvera 3 sortes de diagonales, le solide desquelles divisé par le double du diametre du cercle, le quotient sera la superfice dudit quadrangle ».

(1) GIRARD écrit par erreur 5PHI, faute signalée par M. LE PAIGE, dans l'article cité.

(2) Aperçu historique, pp. 440 et 546.

Soient a, b, c, d, les côtés d'un quadrilatère abcd. GIRARD commence par dire, que si abcd est inscriptible à un cercle de rayon R, en donnant une autre disposition aux côtés, on sait former deux nouveaux quadrilatères acbd, adbe inscriptibles au même cercle; et que les trois quadrilatères ont, deux à deux, une même diagonale. C'est bien ainsi que CHASLES le comprend. La proposition est d'ailleurs intuitive pour peu qu'on prenne la peine de dessiner la figure. Soient di, de, ds, les trois diagonales.

GIRARD suppose implicitement que ces trois quadrilatères ont la même surface, ce qui au premier moment pouvait, peut-être paraître moins clair à ses lecteurs; car cédant de nouveau à un défaut de méthode déjà signalé, il ne donne que plus loin la formule qui exprime la surface d'un quadrilatère inscriptible en fonction des côtés.

s = √(pa) (p—b)(p — c)(p—d),

(1)

(formule qui rend elle aussi intuitive l'égalité des surfaces des trois quadrilatères):

«La racine du produict des 4 differences de chacun costé et du demicircuit d'un quadrangle dans le cercle, sera pour la superfice d'iceluy ». Reste la dernière partie du théorème, qui peut se formuler :

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BRAHMAGUPTA, vieil algébriste indien du vir° siècle de notre ère, avait donné la formule (1). Il avait donné aussi

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Mais GIRARD ne connaissait pas l'Algèbre de BRAHMAGUPTA et ne pouvait la connaître; car elle ne fut communiquée aux Géomètres de l'Occident que deux siècles plus tard, en 1817 (1). Admettons néanmoins,

(1) H. TH. COLEBROOKE. Algebra with Arithmetik and Mensuration from the Sanscrit of BRAHMAGUPTA and BRASKARA. London, 1817.

Je n'ai pas vu cette traduction, mais dans son Aperçu historique CHASLES lui a consacré une étude, qui est l'une des meilleures que l'historien français ait donnée en cet immortel ouvrage (pp. 220-247).

Un détail bibliographique y a parfois embarrassé. CHASLES dit que dans son commentaire sur la première proposition du livre De problematibus miscellaneis de LUDOLPHE VAN CEULEN, SNELLIUS S'attribue la découverte de la formule qui exprime la surface du quadrilatère inscriptible en fonction des côtés. Il ne s'agit pas là d'un ouvrage séparé, mais du Lib. IV de ses Fondamenta arithmetica et geometrica Lugduni Batavorum, apud Instum a Colster et Jacobum Marci.

....

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qu'indépendamment de BRAHMAGUPTA, il disposait de (3) - ce qui est possible, sans être cependant prouvé, je me hâte de le dire il était assez maître du calcul algébrique pour établir (2) comme suit :

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Le numérateur de (3) lui suggérait l'idée d'appliquer aux trois quadrilatères inscriptibles, le théorème du rectangle des diagonales qui se lisait dans l'Almageste de PTOLEMÉE, et de multiplier membre à membre les résultats obtenus. D'où

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Il suffisait ensuite de remplacer le numérateur de (3) par sa valeur tirée de (4), de résoudre le résultat obtenu par rapport au radical qu'il contenait et d'en porter la valeur dans (1).

En 1626. pareil calcul n'eut fait aucune difficulté à DESCARTES. Il n'était pas davantage au-dessus des moyens de GIRARD.

Terminons, ce trop long article en transcrivant un dernier énoncé.

Si au quadrangle inscrit au cercle est menée une seule diagonale, alors comme 2 fois le diam. à la diagonale, ainsi le rectangle de chaque deux costez non séparez, à la superfice dudit quadrang. » (1).

En d'autres termes, soient de nouveau a, b, c, d, les côtés consécutifs d'un quadrilatère inscriptible; di, de, ses diagonales; s sa surface; R le rayon du cercle circonscrit

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GIRARD oublie de remarquer qu'une simple division lui eut donné l'important rapport des diagonales en fonction des côtés.

La découverte de ce rapport étant souvent erronément attribuée à PTOLEMÉE, PAUL TANNERY fit un jour observer dans l'Intermédiaire des Mathématiciens (2) qu'elle devait être postérieure à VIETE. Il donnait la raison de son opinion, mais ne put préciser davantage la date.

En attendant qu'on nous ait appris le nom de celui qui le premier énonça explicitement la formule classique du rapport, nous dirons qu'elle n'est qu'un corollaire immédiat du théorème d'ALBERT GIRARD.

(1) GIRARD établissait probablement la formule, comme le fait encore par exemple BLANCHET, dans la dernière proposition du livre III de ses Elements. En effet, le De Triangulis de REGIO MONTE était entre toutes les mains, et dans la prop. XXIV du liv. II, l'auteur résolvait le problème suivant: Trouver le rayon du cercle circonscrit à un triangle dont on connaît les trois côtés ». Doctissimi viri et mathematicarum eximii professoris IOANNIS DE REGIO MONTE de Triangulis omnimodis libri quinque.... Norimbergae, in aedibus Io. Petri. Anno Christi M.D.XXXIII, p. 56 (Bibl. Roy. de Belg.).

(2) I. M. t. VII, 1900, p. 323, rép. à la quest. 1719.

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