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chaud dénaturent l'air lorsqu'ils sont ras semblés dans le même endroit. L'eau tient en dissolution un plus grand nombre de substances que l'air; et parmi ces substances il s'en trouve beaucoup qui deviennent nuisibles aux poissons; leur vertu délétère agit le plus souvent, dans ces animaux, sur les organes de la respiration; ce qui a plus rarement lieu dans les animaux qui vivent dans l'air. La Nature a cependant doué les poissons d'une force assez grande pour sister à quelques-uns des changemens que l'eau peut éprouver; ils passent, par exemple, librement des eaux salées dans les eaux douces, ou de celles-ci dans les eaux salées. On sait combien est grand le nombre des saumons, des aloses, des lamproies, etc., qui abandonnent chaque année la mer pour remonter les rivières; les carpes au contraire quittent souvent les rivières pour gagner les eaux de la mer. Si l'on fait attention à la différence qu'il doit y avoir pour un poisson, de respirer de l'eau douce ou de l'eau salée, on aura une idée de la force dont nous avons dit qu'ils étoient doués pour résister aux changemens que l'eau peut éprouver; force qui, dans cette circonstance, est au dessus de celle qu'on

observe dans les autres animaux qui ne supporteroient pas un changement aussi grand et aussi subit dans l'air. Ceci peut servir à rendre raison de l'organisation moins parfaite que présentent les parties destinées à la respiration des poissons, structure qui les met à l'abri de la trop grande influence que les dégénérations multipliées de ce fluide auroient sur leurs organes:

Les poissons que j'ai mis dans de l'eau distillée y ont vécu; ils ont, à la vérité, donné d'abord des signes de mal-aise; mais, après avoir nagé quelque tems, ils n'ont plus paru souffrir als avoient probablement déterminé, par leur mouvement, l'eau à s'unir à la portion d'air nécessaire à la respiration. Cependant un petit poisson enfermé dans un flacon bouché, qui contenoit une pinte d'eau distillée, y a vécu plus de trente heures. Le sirop de violette, versé en petite quantité sur de l'eau distillée où étoient des poissons vivans, n'a donné d'abord aucun signe de changement de couleur, it a seulement un peu verdi dans la suite, ce qui peut être attribué à la partie alkalescente de la mucosité dont le corps des poissons est enduit, et qui se mêle toujours à l'eau: ils y ont très-bien vécu. Une goutte

il

d'acide arsénical jetée dans une assez grande quantité d'eau, où j'avois mis un poisson vigoureux, a suffi pour le faire mourir dans le moment. Sa gueule étoit fermée, et les opercules des ouïes ramenés sur le corps. Un autre poisson a vécu six minutes dans du suc de citron; les ouvertures des ouïes étoient fermées quand il est mort: L'eau, légèrement acidulée au moyen de l'air fixe, a fait mourir dans quelques minutes un poisson vigoureux; sa gueule et l'ouverture de ses ouïes étoient très-béantes; ceux que j'ai plongés dans de l'eau de chaux, ont, au bout de quelques minutes, rejeté par les ouvertures des ouïes une sanie assez abondante; ils ont donné quelques signes de vie après cette évacuation, et sont morts bientôt après. On sait que la chaux est employée à prendre les poissons dans les étangs, et les anguilles dans les ruisseaux où il y a peu d'eau, et où il suffit de jeter quelques pierres de chaux pour les faire mourir. Les pêcheurs emploient plusieurs autres moyens analogues pour prendre, s'il est permis de s'exprimer ainsi, les poissons par la respiration. Dans les Indes on emploie à cet usage le suc de plusieurs plantes. Dans nos provinces méridionales on se sert, pour

le même objet, du suc d'une espèce de thytimale (euphorbia characias, L.) qui croît abondamment dans les lieux incultes; on en coupe les tiges en plusieurs morceaux, qu'il suffit de jeter sur l'eau pour faire mourir un grand nombre de poissons. On sait que ce suc laiteux peut être répandu sur une grande surface.

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OBSERVATIONS

SUR LES ÉTANG S

APRÈS avoir donné et rassemblé toutes les observations les plus propres à faire connoître la nature des poissons, et avant d'entrer dans les détails relatifs à chaque espèce, je vais les considérer un moment sous un de leurs nombreux rapports avec l'économie publique; c'est-à-dire, examiner leur réunion dans les amas d'eau connus sous le nom d'étangs.

Très-multipliés en Allemagne et dans plusieurs autres contrées du nord de l'Europe, les étangs ont presque tous disparu, de nos jours même, du sol de la France, quoiqu'ils y fussent en assez grand nombre. A l'époque où chacun se crut appelé à la réforme des abus, qui, pour le malheur des sociétés humaines, sont inséparables des grandes administrations, les étangs furent présentés comme une source de contagion, comme un obstacle aux progrès de l'agriculture, comme un principe de destruction

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