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Ce mouvement agrandit l'univers à nos yeux: il nous donne pour mesurer les distances des corps célestes, une base immense, le diamètre de l'orbe terrestre. C'est par son moyen, que l'on a exactement déterminé les dimensions des orbes planétaires. Ainsi le mouvement de la terre, qui par les illusions dont il est la cause, a pendant long-temps, retardé la connaissance des mouvemens réels des planètes, nous les a fait connaître ensuite avec plus de précision, que si nous eussions été placés au foyer de ces mouvemens. Cependant, la parallaxe annuelle des étoiles, ou l'angle sous lequel on verrait de leur centre, le diamètre de l'orbe terrestre, est insensible et ne s'élève pas à six secondes, même relativement aux étoiles qui par leur vif éclat, semblent être le plus près de la terre; elles en sont donc au moins deux cent mille fois plus éloignées que le soleil. Une aussi prodigieuse distance jointe à leur vive clarté, nous prouve évidemment qu'elles n'empruntent point, comme les planètes et les satellites, leur lumière, du soleil ; mais qu'elles brillent de leur propre lumière; ensorte qu'elles sont autant de soleils répandus dans l'immensité de l'espace, et qui semblables au nôtre, peuvent être les foyers d'autant de systèmes planétaires. Il suffit en effet, de nous placer sur le plus voisin de ces astres, pour ne voir le soleil, que comme un astre lumineux dont le diamètre apparent serait audessous d'un trentième de seconde.

Il résulte de l'immense distance des étoiles, que leurs mouvemens en ascension droite et en déclinaison, ne sont que des apparences produites par le mouvement de l'axe de rotation de la terre. Mais quelques étoiles paraissent avoir des mouvemens propres, et il est vraisemblable qu'elles sont toutes en mouvement, ainsi que le soleil qui transporte avec lui dans l'espace, le système entier des planètes, et des comètes, de même que chaque planète entraîne ses satellites dans son mouvement autour du soleil,

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CHAPITRE III.

Des apparences dues au mouvement de la Terre.

u point de vue où la comparaison des phénomènes célestes vient de nous placer, considérons les astres, et montrons la parfaite identité de leurs apparences, avec celles que l'on observe. Soit que le ciel tourne autour de l'axe du monde, soit que la terre tourne sur elle-même, en sens contraire du mouvement apparent du ciel immobile; il est clair que tous les astres se présenteront à nous de la même manière. Il n'y a de différence, qu'en ce que dans le premier cas, ils viendraient se placer successivement au-dessus des divers méridiens terrestres qui, dans le second cas, vont se placer audessous d'eux.

Le mouvement de la terre étant commun à tous les corps situés à sa surface, et aux fluides qui les recouvrent; leurs mouvemens relatifs sont les mêmes que si la terre était immobile. Ainsi, dans un vaisseau transporté d'un mouvement uniforme, tout se meut comme s'il était en repos : un projectile lancé verticalement de bas en haut, retombe au point d'où il était parti: il paraît sur le vaisseau, décrire une verticale; mais vu du rivage, il se meut obliquement à l'horizon et décrit une courbe parabolique. Cependant, la vîtesse réelle due à la rotation de la terre, étant un peu moindre au pied, qu'au sommet d'une tour élevée; si de ce sommet, on abandonne un corps à sa pesanteur, on conçoit qu'en vertu de l'excès de sa vitesse réelle de rotation sur celle du pied de la tour, il ne doit pas tomber exactement au point où le fil à plomb qui part du sommet de la tour, va rencontrer la surface de la terre, mais un peu à l'est de ce point. L'analyse fait voir qu'en effet, son écart de ce point, n'a lieu que

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vers l'est, qu'il est proportionnel à la racine carrée du cube de la hauteur de la tour, et au cosinus de la latitude, et qu'à l'équateur, il est de 21mi-,952 pour cent mètres de hauteur. On peut donc par des expériences très-précises sur la chûte des corps, rendre sensible, le mouvement de rotation de la terre. Celles que l'on a déjà faites dans cette vue, en Allemagne et en Italie, s'accordent assez bien avec les résultats précédens; mais ces expériences qui exigent des attentions très-délicates, ont besoin d'être répétées avec plus d'exactitude encore. La rotation de la terre se manifeste à sa surface, principalement par les effets de la force centrifuge qui aplatit le sphéroïde terrestre aux pôles, et diminue la pesanteur à l'équateur, deux phénomènes que les mesures du pendule et des degrés des méridiens,

nous ont fait connaître.

Dans la révolution de la terre autour du soleil, son centre et tous les points de son axe de rotation étant mus avec des vitesses égales et parallèles, cet axe reste toujours parallèle à lui-même; en imprimant à chaque instant, aux corps célestes, et à toutes les parties de la terre, un mouvement égal et contraire à celui de son centre, ce point restera immobile, ainsi que l'axe de rotation; mais ce mouvement imprimé ne change point les apparences de celui du soleil; il ne fait que transporter à cet astre, en sens contraire, le mouvement réel de la terre; les apparences sont par conséquent les mêmes dans l'hypothèse de la terre en repos, et dans celle de son mouvement autour du soleil. Pour suivre plus particulièrement l'identité de ces apparences; imaginons un rayon mené du centre du soleil à celui de la terre: ce rayon est perpendiculaire au plan qui sépare l'hémisphère éclairé de la terre, de son hémisphère obscur le point dans lequel il traverse la terre, a le soleil verticalement au-dessus de lui, et tous les points du parallèle terrestre que ce rayon rencontre successivement en vertu du mouvement diurne, ont à midi, cet astre au zénith. Or, soit que le soleil se meuve autour de la terre, soit que la terre se meuve autour du soleil et sur elle-même, son axe de rotation conservant toujours une situation parallèle; il est visible que ce rayon trace la même courbe sur la surface de la terre: il coupe dans les deux cas, les mêmes parallèles terrestres, lorsque le soleil a la même

longitude apparente; cet astre s'élève donc également à midi sur l'horizon, et les jours sont d'une égale durée. Ainsi, les saisons et les jours sont les mêmes dans l'hypothèse du repos du soleil, et dans celle de son mouvement autour de la terre; et l'explication des saisons que nous avons donnée dans le livre précédent, s'applique également à la première hypothèse.

Les planètes se meuvent toutes dans le même sens autour du soleil, mais avec des vitesses différentes : les durées de leurs révolutions croissent dans un plus grand rapport, que leurs distances à cet astre: Jupiter, par exemple, emploie douze années, à peu près, à parcourir son orbe dont le rayon n'est qu'environ cinq fois plus grand que celui de l'orbe terrestre; sa vitesse réelle est donc moindre que celle de la terre. Cette diminution de vitesse dans les planètes, à mesure qu'elles sont plus distantes du soleil, a généralement lieu depuis Mercure, la plus voisine de cet astre, jusqu'à Uranus, la plus éloignée; et il résulte des lois que nous établirons bientôt, que les vitesses moyennes des planètes, sont réciproques aux racines carrées de leur moyenne distance au soleil.

Considérons une planète dont l'orbe est embrassé par celui de la terre, et suivons-la depuis sa conjonction supérieure jusqu'à sa conjonction inférieure. Son mouvement apparent ou géocentrique est le résultat de son mouvement réel combiné avec celui de la terre, transporté en sens contraire. Dans la conjonction supérieure, le mouvement réel de la planète est contraire à celui de la terre; son mouvement géocentrique est donc alors la somme de ces deux mouvemens, et il a la même direction que le mouvement géocentrique du soleil, qui résulte du mouvement de la terre, transporté en sens contraire à cet astre; ainsi le mouvement apparent de la planète est direct. Dans la conjonction inférieure, le mouvement de la planète a la même direction que celui de la terre, et comme il est plus grand, le mouvement géocentrique conserve la même direction qui, par conséquent est contraire au mouvement apparent du soleil; la planète est donc alors rétrograde. On conçoit facilement que dans le passage du mouvement direct au mouvement rétrograde, elle doit paraître sans mouvement ou stationnaire, et que cela doit

avoir lieu entre la plus grande élongation et la conjonction inférieure, quand le mouvement géocentrique de la planète, résultant de son mouvement réel et de celui de la terre, appliqué en sens contraire, est dirigé suivant le rayon visuel de la planète. Ces phénomènes sont entièrement conformes aux mouvemens observés de Mercure et de Vénus.

Le mouvement des planètes dont les orbes embrassent l'orbe terrestre, a la même direction dans leurs oppositions, que le mouvement de la terre; mais il est plus petit, et en se composant avec ce dernier mouvement transporté en sens contraire, il prend une direction opposée à sa direction primitive; le mouvement géocentrique de ces planètes est donc alors rétrograde : il est direct dans leurs conjonctions, ainsi que les mouvemens de Mercure et de Vénus dans leurs conjonctions supérieures.

En transportant en sens contraire, aux étoiles, le mouvement de la terre; elles doivent paraître décrire, chaque année, une circonférence égale et parallèle à l'orbe terrestre, et dont le diamètre soutend dans le ciel, un angle égal à celui sous lequel on verrait de leur centre, le diamètre de cet orbe. Ce mouvement apparent a beaucoup de rapport avec celui qui résulte de la combinaison des mouvemens de la terre et de la lumière, et par lequel les étoiles nous semblent décrire annuellement une circonférence parallèle à l'écliptique, dont le diamètre soutend un arc de 125"; mais il en diffère en ce que les astres ont la même position que le soleil, sur la première circonférence, au lieu que sur la seconde, ils sont moins avancés que lui, de cent degrés. C'est par là que l'on peut distinguer ces deux mouvemens, et que l'on s'est assuré que le premier est au moins extrêmement petit; l'immense distance où nous sommes des étoiles, rendant presque insensible, l'angle que soutend le diamètre de l'orbe terrestre, vu de cette distance.

L'axe du monde n'étant que le prolongement de l'axe de rotation de la terre, on doit rapporter à ce dernier axe, le mouvement des pôles de l'équateur céleste, indiqué par les phénomènes de la précession et de la nutation, exposés dans le chapitre XIII du premier livre. Ainsi, en même temps que la terre se meut sur ellemême et autour du soleil, son axe de rotation se meut très-lentement

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