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EXPOSITION DU SYSTÈME DU MONDE.

d'observer leur position, n'a pas permis de reconnaître l'ellipticité de leurs orbites, et encore moins, les inégalités de leurs mouvemens. Cependant, l'ellipticité de l'orbite du sixième satellite est sensible.

Prenons ici pour unité, le demi-diamètre d'Uranus, supposé de 6", vu de la moyenne distance de la planète au soleil : les distances moyennes des satellites à son centre, et les durées de leurs révolutions sidérales sont d'après les observations d'Herschell:

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Ces durées, à l'exception de la seconde et de la quatrième, ont été conclues des plus grandes élongations observées, et de la loi suivant laquelle les carrés des temps des révolutions des satellites, sont comme les cubes de leurs moyennes distances au centre de la planète, loi que les observations confirment à l'égard du second et du quatrième satellite, les seuls qui soient bien connus; ensorte qu'elle doit être regardée comme une loi générale du mouvement d'un système de corps qui circulent autour d'un foyer commun.

Maintenant, quelles sont les forces principales qui retiennent les planètes, les satellites et les comètes, dans leurs orbes respectifs? quelles forces particulières troublent leurs mouvemens elliptiques? quelle cause fait rétrograder les équinoxes, et mouvoir les axes de rotation de la terre et de la lune ? par quelles forces enfin, les eaux de la mer sont-elles soulevées deux fois par jour ? la supposition d'un seul principe dont toutes ces lois dépendent, est digne de la simplicité et de la majesté de la nature. La généralité des lois que présentent les mouvemens célestes, semble en indiquer l'existence; déjà même, on entrevoit ce principe, dans les rapports de ces phénomènes avec la position respective des corps du système solaire. Mais pour l'en faire sortir avec évidence, il faut connaître les lois du mouvement de la matière.

LIVRE TROISIÈME.

DES LOIS DU MOUVEMENT.

At nunc per maría ac terras sublimaque cœli,
Multa modis multis, varia ratione moveri
Cernimus ante oculos.

LUCRET, lib. 1.

Au milieu de l'infinie variété des phénomènes qui se succèdent continuellement dans les cieux et sur la terre, on est parvenu à reconnaître le petit nombre de lois générales que la matière suit dans ses mouvemens. Tout leur obéit dans la nature; tout en dérive aussi nécessairement que le retour des saisons; et la courbe décrite par l'atôme léger que les vents semblent emporter au hasard, est réglée d'une manière aussi certaine, que les orbes planétaires. L'importance de ces lois dont nous dépendons sans cesse, aurait dû exciter la curiosité dans tous les temps; mais par une indifférence trop ordinaire à l'esprit humain, elles ont été ignorées jusqu'au commencement de l'avant-dernier siècle, époque à laquelle Galilée jeta les premiers fondemens de la science du mouvement, par ses belles découvertes sur la chute des corps. Les géomètres marchant sur les traces de ce grand homme, ont enfin réduit la mécanique entière, à des formules générales qui ne laissent plus à desirer que la perfection de l'analyse.

CHAPITRE PREMIER.

Des forces, de leur composition et de l'équilibre d'un point

matériel.

UN corps nous paraît en mouvement, lorsqu'il change de situation par rapport à un système de corps que nous jugeons en repos. Ainsi dans un vaisseau mu d'une manière uniforme, les corps nous semblent se mouvoir, lorsqu'ils répondent successivement à ses diverses parties. Ce mouvement n'est que relatif; car le vaisseau se meut sur la surface de la mer qui tourne autour de l'axe de la terre dont le centre se meut autour du soleil qui lui-même est emporté dans l'espace, avec la terre et les planètes. Pour concevoir un terme à ces mouvemens, et pour arriver enfin à des points fixes d'où l'on puisse compter le mouvement absolu des corps; on imagine un espace sans bornes, immobile et pénétrable à la matière. C'est aux parties de cet espace réel ou idéal, que nous rapportons par la pensée, la position des corps; et nous les concevons en mouvement, lorsqu'ils répondent successivement à divers lieux de cet espace.

La nature de cette modification singulière en vertu de laquelle un corps est transporté d'un lieu dans un autre, est et sera toujours inconnue. Elle a été désignée sous le nom de force: on ne peut déterminer que ses effets et la loi de son action.

L'effet d'une force agissant sur un point matériel, est de le mettre en mouvement, si rien ne s'y oppose. La direction de la force, est la droite qu'elle tend à lui faire décrire. Il est visible que si deux forces agissent dans le même sens, elles s'ajoutent l'une à l'autre ; et que si elles agissent en sens contraire, le point ne se meut qu'en vertu de leur différence, ensorte qu'il resterait en repos, si elles étaient égales.

Si les directions de deux forces font entre elles un angle quelconque, leur résultante prendra une direction moyenne. On démontre par la seule géométrie, que si, à partir du point de concours des forces, on prend sur leurs directions, des droites pour les représenter; si l'on forme ensuite sur ces droites, un parallélogramme; sa diagonale représente pour la direction et la quantité, leur résultante.

On peut, à deux forces composantes, substituer leur résultante; et réciproquement on peut, à une force quelconque, en substituer deux autres dont elle serait la résultante; on peut donc décomposer une force, en deux autres parallèles à deux axes perpendiculaires entre eux et situés dans un plan qui passe par sa direction. Il suffit pour cela, de mener par la première extrémité de la droite qui représente cette force, deux lignes parallèles à ces axes, et de former sur ces lignes, un rectangle dont cette droite soit la diagonale. Les deux côtés du rectangle représenteront les forces dans lesquelles la proposée peut se décomposer parallèlement aux axes.

Si la force est inclinée à un plan donné de position; en prenant sur sa direction, à partir du point où elle rencontre le plan, une ligne pour la représenter; la perpendiculaire abaissée de l'extrémité de cette ligne sur le plan, sera la force primitive décomposée perpendiculairement à ce plan. La droite qui menée dans le plan, joint la force et la perpendiculaire, sera cette force décomposée parallèlement au plan. Cette seconde force partielle peut elle-même, se décomposer en deux autres parallèles à deux axes situés dans le plan et perpendiculaires l'un à l'autre. Ainsi toute force peut être décomposée en trois autres parallèles à trois axes perpendiculaires

entre eux.

De là naît un moyen simple d'avoir la résultante d'un nombre quelconque de forces qui agissent sur un point matériel; car en décomposant chacune d'elles en trois autres parallèles à trois axes donnés de position, et perpendiculaires entre eux; il est clair que toutes les forces parallèles au même axe, se réduisent à une seule, égale à la somme de celles qui agissent dans un sens, moins la somme de celles qui agissent en sens contraire. Ainsi le point sera sollicité par trois forces perpendiculaires entre elles ; et si l'on prend sur chacune de leurs directions, à partir du point de concours, trois

droites pour les représenter; si l'on forme ensuite sur ces droites, un parallelipipède rectangle; la diagonale de ce solide représentera pour la quantité et pour la direction, la résultante de toutes les forces qui agissent sur le point.

Quels que soient le nombre, la grandeur et la direction de ces forces; si l'on fait varier infiniment peu d'une manière quelconque, la position du point; le produit de la résultante, par la quantité dont le point s'avance suivant sa direction, est égal à la somme des produits de chaque force par la quantité correspondante. La quantité dont le point s'avance suivant la direction d'une force, est la projection de la droite qui joint les deux positions du point, sur la direction de la force : cette quantité doit être prise négativement, si le point s'avance en sens contraire de cette direction.

Dans l'état d'équilibre, la résultante de toutes les forces est nulle, si le point est libre. S'il ne l'est pas, la résultante doit être perpendiculaire à la surface ou à la courbe sur laquelle il est assujéti; et alors en changeant infiniment peu la position du point, le produit de la résultante par la quantité dont il s'avance suivant sa direction, est nul; ce produit est donc généralement nul, soit que l'on suppose le point libre, soit qu'on l'imagine assujéti sur une courbe ou sur une surface. Ainsi dans tous les cas, lorsque l'équilibre a lieu, la somme des produits de chaque force par la quantité dont le point s'avance suivant sa direction, en changeant infiniment peu de position, est nulle; et l'équilibre subsiste, si cette condition est remplie.

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