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telles que la lumière; il paraît même que toutes les forces dont l'action se fait apercevoir à des distances sensibles, suivent cette loi: on a reconnu depuis peu, que les attractions et les répulsions électriques et magnétiques décroissent en raison du carré des distances, ensorte que toutes ces forces ne s'affaiblissent en se propageant, que parce qu'elles s'étendent comme la lumière; leurs quantités étant les mêmes sur les diverses surfaces sphériques que l'on peut imaginer autour de leurs foyers. Une propriété remarquable de cette loi de la nature, est que si les dimensions de tous les corps de cet univers, leurs distances mutuelles et leurs vîtesses, venaient à augmenter ou à diminuer proportionnellement; ils décriraient des courbes entièrement semblables à celles qu'ils décrivent, et leurs apparences seraient exactement les mêmes; car les forces qui les animent, étant le résultat d'attractions proportionnelles aux masses divisées par le carré des distances, elles augmenteraient ou diminueraient proportionnellement aux dimensions du nouvel univers. On voit en même temps, que cette propriété ne peut appartenir qu'à la loi de la nature. Ainsi, les apparences des mouvemens de l'univers sont indépendantes de ses dimensions absolues, comme elles le sont, du mouvement absolu qu'il peut avoir dans l'espace; et nous ne pouvons observer et connaître que des rapports. Cette loi donne aux sphères, la propriété de s'attirer mutuellement, comme si leurs masses étaient réunies à leurs centres. Elle termine encore les orbes et les figures des corps célestes, par , par des lignes et des surfaces du second ordre, du moins en négligeant leurs perturbations, et en les supposant fluides. Nous n'avons aucun moyen pour mesurer la durée de la propagation de la pesanteur; parce que l'attraction du soleil ayant une fois atteint les planètes, cet astre continue d'agir sur elles, comme si sa force attractive se communiquait dans un instant, aux extrémités du système planétaire; on ne peut donc pas savoir en combien de temps elle se transmet à la terre; de même qu'il eût été impossible, sans les éclipses des satellites de Jupiter, et sans l'aberration, de reconnaître le mouvement successif de la lumière. Il n'en est pas ainsi de la petite différence qui peut exister dans l'action de la pesanteur sur les corps, suivant la direction et la

grandeur de leur vîtesse. Le calcul m'a fait voir qu'il en résulte une accélération dans les moyens mouvemens des planètes autour du soleil, et des satellites autour de leurs planètes. J'avais imaginé ce moyen d'expliquer l'équation séculaire de la lune, lorsque je croyais avec tous les Géomètres, qu'elle était inexplicable dans les hypothèses admises sur l'action de la pesanteur. Je trouvais que si elle provenait de cette cause, il fallait supposer à la lune, pour la soustraire entièrement à sa pesanteur vers la terre, une vitesse vers le centre de cette planète, au moins sept millions de fois plus grande que celle de la lumière. La vraie cause de l'équation séculaire de la lune, étant aujourd'hui, bien connue; nous sommes certains que l'activité de la pesanteur est beaucoup plus grande encore. Cette force agit donc avec une vîtesse que nous pouvons considérer comme infinie; et nous devons en conclure que l'attraction du soleil se communique dans un instant presque indivisible, aux extrémités du système solaire.

Existe-t-il entre les corps célestes, d'autres forces que leur attraction mutuelle ? nous l'ignorons; mais nous pouvons du moins affirmer que leur effet est insensible. Nous pouvons assurer également, que tous ces corps n'éprouvent qu'une résistance jusqu'à présent insensible, de la part des fluides qu'ils traversent, tels que la lumière, les queues des comètes et la lumière zodiacale. La masse du soleil doit s'affaiblir sans cesse par l'émission continuelle de ses rayons. Mais, soit à cause de l'extrême ténuité de la lumière, soit parce que cet astre répare la perte qu'il éprouve, par des moyens jusqu'ici inconnus; il est certain que depuis deux mille ans, sa substance n'a pas diminué d'un deux-millionième.

La nature nous offre dans les phénomènes électriques et magnétiques, des forces répulsives qui suivent la même loi, que la pesanteur universelle. Coulomb a fait voir par des expériences très-délicates, que les points animés de deux électricités semblables se repoussent en raison inverse du carré de la distance, et qu'ils s'attirent suivant la même loi, lorsque les électricités sont contraires. En concevant les électricités opposées, comme deux fluides différens, parfaitement mobiles dans les corps conducteurs, et contenus par les surfaces des corps non conducteurs; en supposant ensuite que les molécules d'un même fluide se repoussent mutuellement et

attirent les molécules de l'autre fluide suivant la loi des attractions célestes; on peut leur appliquer les formules relatives à ces attractions. C'est ainsi que je suis parvenu à démontrer que le fluide électrique dans un corps conducteur doit, pour l'équilibre, se porter en entier à la surface où il forme une couche extrêmement mince contenue par l'air qui l'enveloppe. Sa répulsion est nulle dans son intérieur; mais à sa surface extérieure, elle est à chaque point, proportionnelle à l'épaisseur de la couche : la pression qu'un de ses points extérieurs éprouve, et en vertu de laquelle il tend à s'échapper, est proportionnelle au carré de cette épaisseur. Sur un ellipsoïde quelconque, les deux surfaces extérieure et intérieure de la couche, sont semblables et concentriques à la surface de l'ellipsoïde: si l'ellipsoïde est de révolution et alongé, la tendance du fluide à s'échapper aux pôles, est à sa tendance à s'échapper à l'équateur, dans le rapport du carré du grand axe au carré du petit axe; ce qui donne une explication mathématique du pouvoir des pointes. Mais la distribution des fluides électriques sur un corps de figure quelconque, ou sur plusieurs corps en présence les uns des autres, est un problème d'une extrême difficulté, qui peut donner lieu à des recherches analytiques très-curieuses; car la solution de ces questions difficiles, a l'avantage de perfectionner à-la-fois la physique et l'analyse. Déjà Poisson, par une analyse fort ingénieuse, est parvenu à déterminer la loi suivant laquelle l'électricité se répand à la surface de deux sphères en présence l'une de l'autre. L'accord de ses résultats avec les expériences de Coulomb, confirme la justesse du principe qui leur sert de base. On doit au reste considérer toutes ces forces, comme des concepts mathématiques propres à les soumettre au calcul, et non comme des qualités inhérentes aux molécules électriques. Il est possible qu'elles soient des résultantes d'autres forces analogues aux affinités qui ne sont sensibles par elles-mêmes, qu'extrêmement près du contact, mais dont l'action, au moyen de fluides intermédiaires, est transmise à des distances sensibles, et en raison inverse du carré de ces distances. Les attractions des petits corps qui nagent à la surface des liquides, nous fourniront dans le chapitre suivant, un exemple remarquable de ces transmissions.

CHAPITRE XVIII.

De l'attraction moléculaire.

L'ATTR 'ATTRACTION disparaît entre les corps d'une grandeur peu considérable : elle reparaît dans leurs élémens sous une infinité de formes. La solidité, la cristallisation, la réfraction de la lumière, l'élévation et l'abaissement des liquides dans les espaces capillaires, et généralement toutes les combinaisons chimiques sont le résultat de forces dont la connaissance est un des principaux objets de l'étude de la nature. Ainsi la matière est soumise à l'empire de diverses forces attractives: l'une d'elles s'étendant indéfiniment dans l'espace, régit les mouvemens de la terre et des corps célestes : tout ce qui tient à la constitution intime des substances qui les composent, dépend principalement des autres forces dont l'action n'est sensible qu'à des distances imperceptibles. Il est presque impossible par cette raison, de connaître les lois de leur variation avec la distance; heureusement, la propriété de n'être sensibles qu'extrêmement près du contact, suffit pour soumettre à l'analyse, un grand nombre de phénomènes intéressans qui en dépendent. Je vais ici présenter succinctement les principaux résultats de cette analyse, et par là compléter la théorie mathématique de toutes les forces attractives de la nature.

On a vu dans le premier livre, qu'un rayon lumineux, en passant du vide dans un milieu transparent, s'infléchit de manière que le sinus d'incidence est au sinus de réfraction, en raison constante. Cette loi fondamentale de la dioptrique est le résultat de l'action du milieu sur la lumière, en supposant que cette action n'est sensible qu'à des distances imperceptibles. Concevons, en

:

effet, le milieu terminé par une surface plane il est visible qu'une molécule de lumière, avant de la traverser, est attirée semblablement de tous les côtés de la perpendiculaire à cette surface; puisqu'à une distance sensible de la molécule, il y a de tous les côtés, le même nombre de molécules attirantes; la résultante de leurs actions est donc dirigée suivant cette perpendiculaire. Après avoir pénétré dans le milieu, la molécule de lumière continue d'être attirée suivant une perpendiculaire à la surface; et si l'on imagine le milieu partagé en tranches parallèles à cette surface, et d'une épaisseur infiniment petite; on verra que l'attraction des tranches supérieures à la molécule attirée, étant détruite par l'attraction d'un nombre égal de tranches inférieures, la molécule de lumière est précisément attirée, comme elle l'était à la même distance de la surface, avant de la traverser; l'attraction qu'elle éprouve, est donc insensible, lorsqu'elle a pénétré sensiblement dans le milieu diaphane, et son mouvement devient alors uniforme et rectiligne. Maintenant, il résulte du principe de la conservation des forces vives, exposé dans le troisième livre, que le carré de la vitesse primitive de la molécule de lumière, décomposée perpendiculairement à la surface du milieu, est augmenté d'une quantité toujours la même, quelle que soit cette vîtesse. Parallèlement à cette surface, la vitesse n'est point altérée par l'action du milieu; l'accroissement du carré de la vitesse entière, et par conséquent celui de cette vitesse elle-même, sont donc indépendans de la direction primitive du rayon lumineux. Or le rapport de la vitesse parallèle à la surface, à la vitesse primitive, forme le sinus d'incidence; son rapport à la vîtesse dans le milieu, est le sinus de réfraction; ces deux sinus sont donc réciproquement comme les vitesses de la lumière avant et après son entrée dans le milieu, et par conséquent, ils sont en raison constante. La différence de leurs carrés, divisée par le carré du sinus de réfraction, et multipliée par le carré de la vitesse de la lumière dans le vide, exprime l'action du milieu sur le rayon : en la divisant par la densité spécifique de ce milieu, on a son pouvoir réfringent.

Une surface courbe qui termine un milieu diaphane, peut être confondue avec le plan tangent au point où le rayon la traverse;

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