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peintre célèbre, surtout dans le genre des animaux, était contemporain d'Aristophane, qui plaisante peu charitablement sur sa pauvreté dans sa pièce de Plutus. Quelqu'un, dit Elien, ayant demandé à Pauson de lui peindre un cheval se roulant par terre, cet artiste le peignit courant. Celui qui avait fait le marché pour le tableau, trouva fort mauvais que le peintre n'en cût pas rempli la condition. Tournez le tableau, lui dit Pauson, et le cheval qui court vous paraîtra se vautrer. Lucien et Plutarque en avaient fait mention avant Élien. Telle était l'ambiguïté des discours de Socrate, que l'on compare à Pauson, qu'il fallait les retourner pour en découvrir le véritable sens. Socrate, pour ne point indisposer contre lui ceux avec qui il conversait, leur tenait des propos énigmatiques et susceptibles d'une double interprétation.

49. Alter Hercules. Un autre Hercule. Zénodote et Elien ne sont pas d'accord sur l'origine de ce proverbe. Suivant le premier, la force prodigieuse de Briarée, géant fils du Ciel et de la Terre, qui s'empara des trésors renfermés dans le temple de Delphes, donna lieu à lui appliquer ce surnom. Selon Élien, Milon de Crotone, athlète fameux par la force de son corps, rencontra un jour le berger Titorme. La grande taille de ce berger donna à Milon l'envie de se mesurer avec lui. Titorme, après l'avoir assuré qu'il n'était pas extrêmement fort, quitta ses habits, descendit dans le fleuve Evenus, prit une pierre d'une grosseur énorme qu'il attira à lui, la repoussa deux à trois fois, puis il la leva jusqu'à ses genoux, la mit sur ses épaules, la

porta l'espace d'environ huit pas, et la jeta par terre. Milon put à peine la rouler. Le berger, pour second essai de sa force, alla se placer au milieu de son troupeau, prit par un pied un très-gros taureau sauvage, et le retint malgré les efforts que l'animal faisait pour s'échapper: un autre taureau s'étant approché, Titorme de l'autre main le retint de même par un pied; alors Milon, levant les mains au ciel 0 Jupiter! dit-il, n'est-ce pas un second Hercule que vous nous avez donné? De là, dit-on, est né le proverbe. Plutarque lui donne une autre origine, et l'attribue aux victoires de Thésée, compagnon d'Hercule.

50. Amer comme du mouron. Suivant Théophraste, l'amertume de cette plante l'avait fait passer en proverbe.

51. Imiter les Éoliens. User de ruses, soit dans les actions, soit dans les paroles. Les Éoliens passaient pour de grands fourbes.

52. Les Grecs disaient proverbialement : Principium dimidium totius; et les Latins: Dimidium facti qui benè cepit, habet; d'où les Français ont fait le proverbe Heureux commencement est la moitié de l'œuvre.

53. Il dit tout ce qui lui vient sur la langue. C'était, comme nous l'apprend Erasme, un proverbe tiré d'Eschyle, ancien Grec et poète tragique.

54. Riche comme Callias; en français, Riche comme un puits. Ce proverbe vient, en effet, de ce que, dans les temps de guerre, on y cache ordinairement ce qu'on a de plus précieux. Voici ce qui a rapport à Callias. Aristide, resté seul à Marathon avec sa

tribu pour garder les prisonniers et le butin, ne trompa pas la bonne opinion qu'on avait de lui. L'or et l'argent étant répandus çà et là dans le camp, toutes les tentes et les galères qu'on avait prises étant pleines d'effets magnifiques et de toutes sortes de meubles et de richesses, Aristide non-seulement ne fut pas tenté d'y toucher, mais il défendit que personne n'y portât la main. Malgré ses ordres, il y en eut plusieurs qui trouvèrent moyen de s'enrichir à son insu, entre autres Callias, qui était porte-drapeau. Un des Barbares l'ayant rencontré dans un lieu écarté, et l'ayant pris vraisemblablement pour quelque roi, à cause de ses longs cheveux et du bandeau dont sa tête était ceinte, se prosterna devant lui, et, lui ayant pris la main, il lui découvrit une grande quantité d'or qu'on avait enterrée dans un puits. Mais Callias se montra en cette occasion le plus injuste et le plus cruel des hommes, car, ne se contentant pas d'emporter tout l'or, il tua sur-le-champ le malheureux qui le lui avait indiqué, afin qu'il ne le déclarât pas à d'autres. De là vient, dit-on, que les poètes comiques appelèrent les descendans de ce Callias laccoplutes, comme qui dirait riches du puits, en plaisantant sur le lieu d'où leur auteur avait tiré toutes ses richesses. C'est peut-être de cette métaphore qu'est dérivée cette autre expression familière : C'est un puits de science.

55. Boire ou avoir bu de la mandragore. Ce proverbe s'appliquait à ceux à qui leur nonchalance et leur paresse avaient fait manquer une affaire et qui n'avaient point d'activité, parce que l'effet

de la mandragore est d'assoupir. Les anciens et quelques modernes crédules ont attribué à la mandragore des propriétés singulières et superstitieuses; mais ce sont des fables ridicules qui ne méritent aucune croyance. On vient aisément à bout de donner artificiellement aux racines de cette plante la forme du corps humain. Les charlatans cherchent à persuader au vulgaire et aux ignorans, que ces espèces de magots de bois, façonnés avec des roseaux ou des racines de bryone, sur lesquelles on a implanté des grains d'orge ou d'avoine pour imiter les poils ou la barbe de l'homme, sont des racines de mandragore qui, si l'on veut les en croire, ne croît que dans un canton inaccessible de la Chine.

56. Konμala avne, divitiæ vir. Expression proverbiale chez les Grecs. Sans les richesses, dit La Mothe-le-Vayer, l'homme n'est d'aucune considération dans la vie civile, le temps n'étant plus auquel on faisait estime des hommes tout nus comme était Ulysse, qui ne laissait pas, à ce que conte le bon Homère, d'être honoré et respecté par les Phéaciens en cet état-là; mais aujourd'hui :

Dat census honores,

Census amicitias, pauper ubique jacet.

L'argent, l'argent, sans lui tout est stérile;
La vertu sans argent est un meuble inutile.

57. Le dernier des Crotoniates était le premier des Grecs. Crotone, ville d'Italie, était célèbre par la bonté de son terroir et la douceur de son climat; les peuples qui l'habitaient s'étaient acquis, par

leur vie laborieuse et par leur énergie, une si grande réputation, qu'ils avaient donné lieu au proverbe; mais après un grand échec qu'ils avaient reçu dans un combat contre les Locriens, ils s'étaient abâtardis et étaient tombés dans la mollesse.

58. A demain les affaires. Voici le fait qui donna lieu à ce proverbe, qui a été fort en usage parmi les Grecs pour désigner qu'on remet au lendemain une affaire, bien que pressée. Lors de la conjuration des Thébains contre les Lacédémoniens, Archias, qui avait pris parti pour ces derniers, reçut d'un autre Archias, grand-pontife d'Athènes, avec lequel il était fort lié d'amitié, une lettre dans laquelle celui-ci lui donnait tous les détails circonstanciés de la conjuration dont Péiopidas était le chef, l'engageant de veiller à sa propre sûreté. Le courrier porteur de la lettre fut d'abord mené à Archias, qui, se trouvant à table, était déjà noyé dans le vin, et, en lui rendant ses dépêches, il lui dit : Seigneur, celui qui vous écrit ces lettres vous conjure de les lire sur-le-champ, parce qu'il y est question d'affaires très-importantes. Archias se mettant à rire : A demain les affaires, dit-il, et prenant les lettres, il les mit sous son chevet, et reprit la conversation qu'il avait commencée avec Philidas, qui était luimême un des conjurés. La conjuration éclate, et Archias est tué. Ce mot passa en proverbe, et était très-usité parmi les Grecs du temps de Plutarque.

59. Nihil ad Parmenonis suem. Ce n'est rien en comparaison du pourceau de Parmenon. Parmenon, dit Plutarque, imitait en perfection la voix pourceau, d'où est venu ce proverbe. Ce Par

du

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