Page images
PDF
EPUB

lens du jeune poëte, lui obtint la Sans partager l'opinion trop favoreprésentation de sa première pièce, rable de M. Wistanley à l'égard de ce intitulée Every man in his humour poëte, on ne peut cependant lui re(chaque homme agit suivant son hu- fuser le mérite d'avoir le premier meur), qui obtint un grand succès. donné au théâtre anglais des pièces Depuis cette époque, entraîné par régulières, qui, débarrassées de ce une fécondité qui n'est pas toujours mélange d'obscénités et d'inconveheureuse dans ses résultats, il donna,nances qui fourmillent dans les oupendant long-temps, neuf comédies vrages indigestes de ses prédéceschaque année. Une qu'il composa de seurs, offrent le véritable tableau de concert avec Chapman et Marston, la vie humaine, et où il peut justemanqua interrompre à jamais sa car-ment prendre pour devise: Castigat rière dramatique et l'envoyer au ridendo mores. Son dialogue est pilori : c'était une satire sanglante naturel et animé; ses sujets bien contre les Ecossais. Cependant, lors- choisis; ses scènes ne manquent pas que Jacques I monta sur le trône de verve comique. Il n'est pas aussi d'Angleterre, il fut chargé de l'ins-heureux dans le choix des caractères; pection des fêtes qu'on préparait les événemens ne sont pas assez pour le passage du nouveau mo- amenés, et souvent, cherchant à trop narque. Il s'en acquitta si bien qu'on s'approcher de la nature, il parvient le nomma inspecteur général des à la défigurer. Jonson s'efforça, en fêtes publiques, emploi qu'il con- plusieurs de ses pièces, d'imiter Lope serva durant le règne de Jacques et de Vega, son contemporain, et qui celui de l'infortuné Charles Ier. remplissait alors l'Europe de sa reAyant repris ses études, il fut gra- nommée; mais les huit comédies dué en 1619 maître ès arts à l'uni-régulières du poëte espagnol sont versité d'Oxford. En 1621, et après très-supérieures à tout ce que Jonson la mort de Samuel Daniel, il reçut le a fait de mieux; celui-ci n'avait en titre de poëte lauréat, avec l'appoin- outre ni sa fécondité, ni sa verve, ni tement de 100 marcs par an, qui, la variété de ses talens poétiques. par la bonté de Charles I, s'éleva, Mais quel que soit le mérite de ces en 1630, à la somme de 100 livres deux auteurs, l'art dramatique était sterling. Cependant, et malgré cette encore dans son enfance; Molière somme assez considérable dans ces n'avait pas encore paru. Walley a temps-là, et le produit de ses pièces, donné une édition de tous les ouJonson, né dissipateur, vécut touvrages de Jonson, contenant des jours presque dans la misère, d'où le retira souvent la munificence de Charles Ia. Il conserva une amitié constante pour son premier protecteur, Shakespeare, auquel il survécut de vingt-un ans, Jonson étant mort en 1637. Il fut enseveli avec une grande pompe à l'abbaye de Westminster, où on lui éleva un tombeau sur lequel on grava cette inscription courte, mais expressive :

O rare Ben. Jonson!

:

poëmes, des comédies, des poésies
lyriques, etc.; le tout, avec des
notes et des additions, imprimés
avec ce titre Jonson's Works,
| Londres, 1716-1756, 7 vol. in-8.
JOUBERT (Barthélemy-Cathe-
rine), général français, naquit à
Pont-de-Vaux en Bresse le 14 avril
1769. Destiné au barreau, il partagea
en 1789 les principes révolution-
naires, et s'enrôla comme simple gre-
nadier. Son dévouement pour la cause

[ocr errors]

des républicains lui donna un avan-demoiselle de Montholon, fille de cement rapide, et, après avoir servi l'ambassadeur Semonville. Dans la cinq aps en différentes armées, sanglante bataille de Novi, s'étant parvint au grade de général de divi-mis en avant pour enfoncer l'ension. Il accompagna Buonaparte dans nemi, il fut atteint d'une balle, et sa première campagne d'Italie, et il mourut quelques momens après. Moeut une grande part à la victoire de reau, qui était venu pour l'aider Millesimo. Joubert s'empara de Cera de ses conseils, dirigea la retraite et du camp retranché qui défendait dans cette journée funeste pour les cette ville, battit l'ennemi à Monte Français. Il était alors dans sa 30* laldo, et contribua a la victoire de | année. Joubert avait de l'instruction, Rivoli. Il se distingua encore davan- de la bravoure, et il aurait mérité de tage dans la campagne du Tyrol. Le bien plus justes éloges de la postérité, sort des armes l'avait conduit avec s'il avait servi une meilleure cause. sa division au milieu d'un pays mon- JOURDAN (Jean-Baptiste), né tagueux, où se trouvait entouré à Marseille vers 1740, est aupar l'armée ennemie. Cependant i teur d'une comédie intitulée l'Ecole força tous les passages, battit en des Prudes (1753), et des ouvrages plusieurs rencontres les Autrichiens, suivans: 1 Le Guerrier philosophe, et opéra sa jonction avec l'armée la Haye (Paris), 1744, in-12. II de Buonaparte qui le croyait mort Histoire d'Aristomène, général ou prisonnier. Quelque temps après des Messéniens, avec quelques réil fut envoyé en Hollande, où en des flexions sur la tragédie de ce nom, circonstances assez difficiles il montra | Paris, 1749, in-12. Ill Histoire de assez de prudence et de modération. Pyrrhus, roi d'Epire, AmsterBuonaparte étant parti pour l'E-dam, 1749, 2 vol. in-12. IV Abrogypte, Joubert le remplaça dans le come et Anthia, roman traduit du commandement de l'armée d'Italie; grec, etc. Il est mort vers 1793. il pénétra bientôt dans le Piémont, et JOURDAN ( Mathieu ), un des s'empara de Turiu. L'Italie avait beau- plus lâches scélérats qu'ait enfanté la coup a souffrir d'une armée victo- | révolution, naquit a Saint - Just , rieuse qui se livrait aux désordres de près le Puy, en 1749. Digne de vétoute espèce. Ou assure que Joubert géter dans la classe la plus obscure, chercha à la réformer et à lui interdire c'est à ses crimes qu'il doit son hor-. les déprédations qui la déshono-rible réputation. Après avoir été raient. Ne pouvant y parvenir, il boucher pendant quelques années s'adressa au directoire, qui n'eut pas contraint de fuir les poursuites de la égard à ses justes demandes. Il se justice, il se fit contrebandier sur retira alors dans sou pays natal, apres les frontières de la Savoie. Quelques avoir demandé sa démission, Les disputes qu'il eut avec ses camarades événemens qui suivirent la journée de métier le déterminèrent à s'enrôler du 30 prairial (19 juin 1799) le dans le régiment d'Auvergne. It dérappelèrent à la tête de l'armée d'I-serta, et se plaça sur un vaisseau martalie pour s'opposer aux Russes, chand qui fut pris par les corsaires commandés par le fameux Suwarow, tunisiens. Emmené esclave à Maroc, qui, en peu de temps, avait repris c'est là, comme il le disait lui-mêLoutes les conquêtes de Buonaparte. me, qu'il apprit le métier de bourJoubert venait alors d'épouser ma-reau; et comme il était assez con

forme à ses inclinatious sanguinaires, lieutenans, sanguinaire comme lui, il devint bientôt habile à couper les appelé Lescuyer. Le peuple, toujours têtes. Son esclavage fut assez long; attaché à son souverain légitime, et, de retour en F rance, à l'aide de voulant s'opposer aux mesures arbiquelques sommes que ses escroque-traires de Lescuyer, se souleva, et ries ou ses vols lui avaient procurées, celui ci périt dans l'émeute. Penil se fixa à Paris, où, sous le nom de dant ce temps, Jourdan avait inutilePetit, il ouvrit une boutique de mar-ment attaqué Carpentras, d'où il chand de vin. Dès le commencement s'était retiré avec une perte conside la révolution, Jourdan fut celui dérable. Furieux de cet échec, il qui, parmi les plus vils démago-retourna à Avignon, et vengea la gues, cria le plus fort contre le roi, mort de Lescuyer de la manière la la reine, les nobles, les prêtres et les plus féroce, 11 fit d'abord rassempropriétaires, c'est à-dire contre le bler dans le palais appelé la Glabon ordre et la religion. C'était un cière plus de soixante personnes, des hommes qu'il fallait aux mons- au nombre desquelles se irouvaient tres de la révolution; aussi on l'em-treize femmes, se rendit sur les lieux, plova tant qu'on put dans toutes les et les fit assommer à coups de barre émeutes et dans tous les massa de fer. Il tourua ensuite toute sa cres. Il signala d'abord sa cruauté enfureur contre les principaux habitans arrachant le coeur au malheureux qu'il immolait en s'enrichissant de Foulon et à son gendre l'intendant leurs dépouilles. Les prêtres étaient Berthier, victimes d'une populace surtout l'objet de sa haine et de ses effrénée qui applaudissait à ces af- persécutions. Nous ne citerons pas freux spectacles. (Voyez ces noms, tous ses crimes; la plume se refuse Supp.) Le 6 octobre 1789 il se trou-à les rappeler. Il suffira de dire vait parmi les factieux, et coupa la que le pillage, le meurtre, l'intête aux deux gardes du corps Descendie, suivaient toujours ses pas. et hutte et Varicourt, que plusieurs que les horreurs qu'il commit dans forcenés lui livrèrent, et dont le seul le Comtat furent telles, qu'elles crime était d'avoir rempli leur de- éveillèrent l'attention de l'assemblée voir. Les révolutionnaires ayant dé-nationale. Plusieurs membres, et terminé de s'emparer du Comtat notamment ceux du parti des girond'Avignon, ils y ayaient, afin d'y dins, s'étaient élevés contre les exciter une révolte, organisé une cruautés de Jourdan; mais leurs voix association de brigands qu'ils déco-avaient été étouffées par les démaraient du titre d'arinée de Vau-gogues de la montagne et les salacluse; le farouche Jourdan en fai-riés des tribunes. L'assemblée écousait partię. Ils avaient déjà pris Se-ta enfin les justes plaintes qui s'éMonteux, etc., et de leur pro-levaient contre Jourdan. Décrété pre autorité ils avaient fusillé leur d'accusation, il trouva le moyen de général Patrix, qui, peut-être moins se sauver; mais il était trop utile au scélérat qu'eux, avail, disaient-ils, parti des jacobins, pour qu'ils ne sauvé la vie à quelques prisonniers. fissent pas leurs efforts pour ob teJourdan le remplaça avec le titre de nir sa grâce. Compris en 1792 dans généralissime; il ordonna sur-le-l'amaistie générale qu'on accorda champ le siége de Carpentras, tan- à tous les assassins de la France, dis qu'il laissait à Avignon un de ses il reparut encore à Avignon, où on

nas,

l'envoya pour morigéner les habi-par ce même comité de salut public tans c'était le mot dérisoire du dont il avait si bien exécuté les ortemps, et qui signifiait en substance dres. Ce n'était pas la première fois piller, détruire et massacrer. Jour- que le comité vouait à la mort ses dan, investi de pouvoirs illimités, complices et ses bourreaux. Il fut s'abandonna à tous les excès dont il exécuté le 27 mai 1794: trente-deux était capable. Avignon fut inondé de jours après, Robespierre lui-même sang. Il n'oublia pas de comprendre le suivit à l'échafaud. La figure, la dans les persécutions qu'il exer- mine et la mise de Jourdan annonçait ceux qu'il soupçonnait n'avoir çaient l'atrocité de son âme. Ce tipas applaudi quelques mois aupara-gre affectait d'avoir toujours tachés vant à sa barbarie. De retour à Paris de sang ses habits, ses mains et sa il rendit compte de sa mission: la longue et épaisse barbe. Il avait montagne et les tribunes applaudi-un soin particulier de celle-ci, et rent, et on décréta que ce monstre, quand il pleuvait il la couvrait avec la honte de la société, avait bien son manteau, de peur que l'eau ne mérité de la patrie. Depuis ce mo- la décolât ou en effaçât ces taches ment il fut encore employé à tous dégoûtantes. Ses manières, son lanles massacres qui eurent lieu dans les gage, ses vices, étaient en tout conéglises et les prisons de la capitale. formes à la bassesse de sa condition, Il était le plus infatigable des bour- et à cette cruauté, jamais démentie reaux; ce qui le fit nommer Jourdan- qui était le premier caractère disCoupe-tête, surnom dont il se glori-tinctif de ce scélérat. fiait. Les bras nus et couverts de

JOVELLANOS ( don GaspardMelchior de ), savant espagnol, naquit à Gijon dans la Castille, en 1749. Il étudia dans l'université d'Alcala-de-Hénarès, et puis à Salamanque, et il était profondément instruit dans les lois, dans les langues savantes, l'histoire, l'antiquité, la littérature ancienne et moderne ; possédait l'anglais, le français et l'ita

sang et de sueur, il se présentait ensuite à la barre de la convention pour rendre compte de ses exploits, et pour recueillir de nouveaux applau dissemens. Il se tenait parfois à la porte du comité dit de salut public, pour conduire aux différentes prisons les victimes qui périssaient ensuite dans les massacres, ou que l'on envoyait à l'échafaud. En les re-lien; et ses poésies le mirent au rang mettant au concierge, il lui disait des premiers poëtes espagnols de tout bas « Je t'amène du gibier à son temps. Quelques compositions >> raccourcir. » Il avait chaudement lyriques qu'il publia lui méritèrent servi Robespierre dans les terribles d'être reçu en 1770 à l'académie luttes où celui-ci sortit vainqueur espagnole; il avait alors 21 ans. Le des girondins, d'Hébert, de Danton ministre Floridablanca ayant su apet de tous ses adversaires; et il de-précier les talens de Jovellanos, vait en recueillir la juste récom- présenta à Charles III, qui le nompense. De nombreuses accusations ma son conseiller d'état, et lui confia vinrent de nouveau peser sur sa tête. les affaires les plus délicates. A la Dénoncé comme fédéraliste, comme mort de ce monarque le ministre ayant usurpé, à prix de sang, des biens ayant été renvoyé, Jovellanos parnationaux, et méconnu les autorités tágea de sa disgrâce, et ses ennemis publiques, il fut condamné à mort n'attendaient que le moment pour le

le

perdre tout-à-fait. Il est vrai qu'il avant même qu'on pût vérifier ces leur en fournit lui-même l'occasion, accusations. Jovellanos avait un ca

un

en proposant, pour subvenir aux ractère affable; il était lié avec les besoins de l'Espagne que l'alliance savans et les hommes de lettres les de sa voisine ruinait, d'imposer une plus distingués de la nation, tels que forte taxe au haut clergé. On exila Campomanès, Cabanillès, Yriarte, Jovellanos; mais sa proposition fut Moratin, Melendez, etc., et fut mise à exécution peu de temps après. en correspondance avec plusieurs Il fut rappelé en 1799, et remplaça académies de l'Europe. Dans le Llaguno dans le ministère de grace cours de sa vie on peut seulement et de justice ( de l'intérieur ). Jovel- l'accuser d'avoir été l'auteur d'une lanos voulait être chef indépendant mesure peu convenable à un homme du département qui lui avait été con- qui semblait attaché à la religion et fié, et cela ne s'arrangeait guère avec à ses ministres. Il a laissé : 1 Rele despotisme que le prince de la cueil de poésies, Madrid, 1780 Paix exerçait sur les autres ministres. in-8, où l'on trouve sa comédie el Ce favori fit de nouveau exiler Jo- Delinquente honrrado ( l'Honnête vellanos, après huit seuls mois qu'il Criminel), qui eut un succès méoccupait le ministère. On l'accusa rité, et traduite en français par l'abbé dans le temps d'avoir fait parvenir Meylar, vicaire général de Marseille. à Charles IV un mémoire où il dé-II Discours prononcé dans l'acavoilait la conduite assez équivo-démie des beaux-arts de Marseille que de son favori. Quoi qu'il en en 1781. Ce discours, écrit en soit, ce mémoire, ainsi que bien français, fut couronné par cette d'autres, ne produisit aucun effet même académie. On y remarque sur l'esprit du roi. Jovellanos fut parallèle assez piquant entre Gonrelégué à Palme dans l'île de Major- gora et Giordano; le premier, corque, et soigneusement gardé dans le rupteur du bon goût dans la poésie, Couvent des chartreux de cette ville. et le second dans la peinture. A l'invasion des Français en Es- L'Anglais Cumberland publia, d'apagne (1808), on lui rendit sa liber-près cet écrit, ses Réflexions sur té, et il fut élu un des membres de les artistes espagnols (Londres, la junte supréme. Deux ans après il refusa le ministère de l'intérieur que Joseph Napoléon lui avait fait offrir. Cependant ses liaisons avec le comte de Cabarrus ( voy. ce nom, Supplément), et la prédilection qu'il avait toujours montrée pour la France où il avait fait plusieurs voyages, le rendirent suspect aux yeux d'une nation indignement trahie par ce gouvernement même pour qui elle avait fait les plus grands sacrifices. On le désigna comme traître, en l'accusant de conserver des intelligences avec l'ennemi, et il périt en 1812 dans une émeute populaire,

[ocr errors]

1784 ). III Mémoire sur l'établis sement des monts-de-piété, Ma – drid, 1784, in -4. IV Réflexions sur la législation d'Espagne, ibid., 1784, morceau excellent qui prouve le talent de l'auteur, comme jurisconsulte. V Lettre adressée à Campomanès, sur le projet d'un trésor public, ibid., 1786. VI Informe sobre la ley agraria, ou Rapport sur l'économie rurale, ibid., 1795. C'est l'ouvrage qui a fait le plus d'honneur à Jovellanos. On lui doit aussi une tragédie, le Pélage, jouée à Madrid eu 1790, et qu'on cite comme une des meilleures que pos~

« PreviousContinue »