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cultivé aux dépens de l'état. Créé dictateur, il enveloppa les ennemis, les défit, et conduisit à Rome leur général et les autres officiers chargés de fers. On lui décerna le triomphe, et il ne tint qu'à lui de se voir aussi riche qu'il était illustre. On lui offrit des terres, des esclaves, des bestiaux; il les refusa constamment, et se démit de la dictature au bout de 16 jours pour aller reprendre sa charrue. Elu une seconde fois dictateur, à l'âge de 80 ans, il triompha des Prénestins, et abdiqua 21 jours après. Ainsi vécut ce Romain, aussi grand quand ses mains victorieuses ne dédaignaient pas de tracer un sillon, que lorsqu'il dirigeait les rênes du gouvernement, et qu'il triomphait des ennemis de la république. Un historien a dit élégamment: Gaudet tellus laureato vomere, et triumphali aratore. [Cincinnatus avait été riche, mais ayant payé une grosse amende pour son fils, il fut obligé d'aller habiter une chaumière au-delà du Tibre, où il cultivait le peu d'arpents de terre qui lui restaient.]

CINEAS. Voyez CYNEAS. CINNA (Lucius - Cornelius), consul romain, l'an 87 avant J.-C., ayant voulu rappeler Marius malgré les oppositions d'Octavius son collègue, partisan de Sylla, se vit obligé de sortir de Rome, et fut dépouillé par le sénat de la dignité consulaire. Retiré chez les alliés, il lève promptement une armée de 30 légions, vient assiéger Rome, accompagné de Marius, de Carbon et de Sertorius, qui commandaient chacun un corps d'armée. La famine et les désertions ayant obligé le sénat à capituler avec lui, il entre dans Rome en

triomphateur, assemble le peuple à la hâte, fait prononcer l'arrêt du rappel de Marius. Des ruisseaux de sang coulèrent bientôt dans Rome. Les satellites du vainqueur égorgèrent sans pitié tous ceux qui venaient le saluer, et auxquels il ne rendait pas le salut : c'était le signal du carnage. Les plus illustres sénateurs furent les victimes de sa rage. Octavius son collègue eut la tête tranchée. Ce barbare fut tué 3 ans après, l'an 85 avant J.-C., par un centurion de son armée. Il avait, dit un homme d'esprit, toutes les passions qui font aspirer à la tyrannie, et aucun des talents qui peuvent y conduire. [Ce monstre républicain avait été quatre fois revêtu de la toge consulaire.]

CINNA (Сneïus-Cornelius) devait le jour à une petite-fille du grand Pompée. Il fut convaincu d'une conspiration contre Auguste, qui lui pardonna à la prière de l'impératrice Livie. L'empereur le fit venir dans sa chambre, lui rappela les obligations qu'il lui avait, et, après quelques reproches sur son ingratitude, le pria d'être de ses amis, et lui donna même le consulat, qu'il exerça l'année suivante, vers la 36o du règne d'Auguste. Cette générosité toucha si fort Cinna, qu'il fut depuis un des sujets les plus zélés de ce prince. Il lui laissa ses biens en mourant, selon Dion. Voltaire doute beaucoup de la clémence d'Auguste envers Cinna. Tacite ni Suétone ne disent rien de cette aventure. Le dernier parle de toutes les conspirations faites contre Auguste aurait-il passé sous silence la plus célèbre? La singularité d'un consulat donné à Cinna pour prix de la plus

noire perfidie n'aurait pas échappé à tous les historiens contemporains. Dion Cassius n'en parle qu'après Sénèque, et ce morceau de Sénèque ressemble plus à une déclamation qu'à une vérité historique. De plus, Sénèque met la scène en Gaule, et Dion à Rome. Cette conspiration, réelle ou supposée, a fourni au grand Corneille le sujet de l'un et peut-être du premier de ses chefs-d'œuvre tragiques.

CINNA (Caïus-Helvius), poète latin, vivait dans le temps des triumvirs. Il avait composé un poème en vers hexamètres, intitulé Smyrna, dans lequel il décrivait l'amour incestueux de Mirrha. Servius et Priscien nous en ont conservé quelques vers, insérés dans le Corpus poetarum de Maittaire. [Le P. Briet, dans son livre de Acute dicta veterum poetarum latinorum, attribue à Cinna cinq épigrammes qui ne sont guère connues.]

CINNAMUS (Jean), historien grec du XIIe siècle, accompagna l'empereur Manuel Comnene dans la plupart de ses voyages. Il écrivit l'Histoire de ce prince en 6 livres. Le premier contient la vie de Jean Comnène, et les cinq autres celle de Manuel. C'est un des meilleurs historiens grecs modernes; mais, malgré son mérite, il n'est nullement comparable à Xénophon, ni à aucun des historiens anciens. Son style est noble et pur, les faits sont bien détaillés et choisis avec goût. Il ne s'accorde pas toujours avec Nicétas son contemporain. Celui-ci dit que les Grecs firent toutes sortes de

trahisons aux Latins; et Cinnamus assure que les Latins commirent des cruautés horribles contre les Grecs. Ils pourraient

bien avoir raison tous les deux. Du Cange a donné une édition de Cinnamus, in-f., 1670, imprimée au Louvre, en grec et en latin, avec de savantes observations, et quelques autres traités.

CINQ-ARBRES (Jean), Quinquarboreus, natif d'Aurillac, nommé professeur royal en langue hébraïque et syriaque en 1554, avait beaucoup de piété, et y joignait beaucoup d'érudition. Il mourut l'an 1587, après avoir laissé : 1o une Grammaire hébraïque, imprimée plusieurs fois, et dont la meilleure édition est de 1609, in- 4°; 2o la Traduction de plusieurs ouvrages d'Avicenne, médecin arabe.

CINQ-MARS (Henri-Coiffier de Ruzé, marquis de), second fils d'Antoine Coiffier, marquis d'Effiat, maréchal de France, surintendant des finances, naquit en 1620. Il fut redevable de sa fortune au cardinal de Richelieu, intime ami de son père. Il fut fait capitaine aux gardes, puis grand-maître de la garderobe du roi en 1637, et, deux ans après, grand-écuyer de France. Son esprit était agréable, et sa figure séduisante. Le cardinal de Richelieu, qui voulait se servir de lui pour connaître les pensées les plus secrètes de Louis XIII, lui apprit le moyen de captiver le cœur de ce prince. Il parvint à la plus haute faveur; mais l'ambition étouffa bientôt en lui la reconnaissance qu'il devait au ministre et au roi il haïssait intérieurement le cardinal, parce qu'il prétendait le maîtriser; il n'aimait guère plus le monarque, parce que son humeur sombre gênait le goût qu'il avait pour les plaisirs. Je suis bien malheudisait-il à ses amis, de vivre avec un homme qui m'en

reux,

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nuie depuis le matin jusqu'au soir. Cependant Cinq-Mars, par l'espérance de supplanter le ministre et de gouverner l'état, dissimula ses dégoûts. Tandis qu'il tâchait de cultiver le penchant extrême que Louis XIII avait pour lui, il excitait Gaston, duc d'Orléans, à la révolte, et attirait le duc de Bouillon dans son parti. Ces princes envoyèrent un émissaire en Espagne, et firent un traité pour ouvrir la France aux ennemis. Le roi étant allé en personne, en 1642, conquérir le Roussillon, Cinq-Mars le suivit, et fut plus que jamais dans ses bonnes grâces. Louis XIII lui parlait souvent de la peine qu'il ressentait d'être dominé par un ministre impérieux. Cinq-Mars profitait de ces confidences pour l'aigrir encore davantage contre le cardinal. Richelieu, dangereusement malade à Tarascon, ne doutait plus de sa disgrâce; mais son bonheur voulut qu'il les découvrît le traité conclu factieux avec l'Espagne. Il en donna avis au roi. L'imprudent Cinq-Mars fut arrêté à Narbonne et conduit à Lyon. On instruisit son procès; il fallait des preuves nouvelles pour le condamner: le faible Gaston les fournit pour

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acheter sa propre grâce. Cinq

Mars eut la tête tranchée le 12 septembre 1642, n'étant que dans la 22o année de son âge.

CINUS ou CINO, jurisconsulte de Pistoie, d'une famille noble, du nom de Sinibaldi, naquit dans cette ville en 1270. Après avoir rempli plusieurs emplois dans la magistrature, les querelles des Blancs et des Noirs l'obligèrent de quitter son pays. Il se réfugia chez un ami dont il voulait épouser la fille (Selvaggia, qu'il célèbre dans ses vers,

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mais elle mourut très jeune enIl voyagea en Italie, et était à Paris en 1312. Deux ans après, il retourna en Italie, et se fixa à Bologne. On a de lui: 1o des Commentaires sur le Code et sur une partie du Digeste; 2° quelPoésies italiennes. Crescimbeni dit qu'il est le plus doux et le plus agréable poète qui ait fleuri avant Pétrarque. Il est regardé par les Italiens comme le premier qui ait su donner de la grâce à la poésie lyrique. Ils lisent encore ses vers, dont le Recueil a été imprimé à Rome en 1559, et à Venise, en 1589. Il mourut à Bologne en 1336, avec la réputation d'un homme savant.

CINYRAS, roi de Chypre, et père d'Adonis, par sa fille Myrrha, est compté parmi les anciens devins. Il était si opulent, que les richesses qu'il possédait ont donné lieu au proverbe Cinyro opes. Son royaume fut ruiné par les Grecs, auxquels il ne voulut

pas

fournir les vivres qu'il leur avait promis pour le siége de Troie. On lui attribue la fondation de Paphos et de Smyrne, ainsi l'invention des tuiles, que du marteau, des tenailles, du levier et de l'enclume. Ses descendants furent successivement

grands-prêtres du temple de Vénus à Paphos.

CIOFANO (Hercule ), de Sulmone en Italie, commenta savamment et avec élégance, dans le XVIe siècle; les Métamorphoses d'Ovide son compatriote, Francfort, 1661, in-fol., et donna une description de sa ville natale, sous ce titre Antiquissimæ et nobilissimæ urbis Sulmonis descriptio, Aquilée, 1578, in-8°.

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+CIOLEK ou VITELLIO, thématicien et physicien polonais du xe siècle. Il fut le pre

mier qui fît connaître à l'Europe la science de l'optique, d'après un opticien arabe nommé AlHazen. Parmi ses productions, qui ne furent publiées que bien plus tard, après sa mort, nous citerons les suivantes : 1o Vitellionis perspective libri decem,, Nuremberg, 1533, in-folio; 20 Vitellionis mathematici doctissimi de optica, id est, de natura, ratione et projectione radiorum, visus, luminum, colorum atque formarum, quam vulgo perspectivam vocant, libri decem, Nuremberg, 1551; 3° Optica thesaurus Al Hazeni Arabis, libri septem, nunc primum editi. Ejusdem liber de crepusculis et nubium ascensionibus. Ejusdem Vitellionis Thuringo-Poloni, libri decem, à Fr. Risnero, Bâle, 1572; 4° sur la physiologie, sur l'ordre des étres, sur les conclusions élémentaires, sur la science des mouvements célestes. - Il y a d'autres hommes distingués du même nom, comme-C1OLEK (Stanislas), nommé aussi V1TELLIO, évêque de Posnanie, un des poètes les plus distingués de son temps. On croit qu'il est le premier qui écrivit des satyres, car l'histoire de la littérature polonaise ne fait pas mention que quelqu'un ait écrit avant lui en ce genre de poésie. Stanislas Ciolek mourut en 1438. CIOLEK (Érasme), nommé aussi et plus connu sous le nom de VITELLIUS, né à Cracovie dans le xve siècle, d'une famille obscure. Protégé pour ses talents par le grand - duc de Lithuanie, Alexandre obtint, en 1491, à Cracovie, le grade de docteur ès lettres, puis fut créé chanoine,et enfin évêque de Plotyk. Il fut envoyé en 1518, par Sigismond Ier, roi de Po

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logne, à la cour de Rome, à l'effet de concilier les différends qui s'élevaient entre Sigismond et Maximilien, archiduc d'Autriche, et pour prévenir la mésintelligence des Turcs contre la chrétienté. N'ayant pas réussi dans ses démarches, il ne put obtenir la barette de cardinal, et mourut à Rome en 1522. -CIOLEK (Jacques), ou VITELLIUS. On connaît de lui les ou

vrages suivants : 1o Epinicion Uladislai IV; 2° Lachrymæ in funere Gregorii Bradouyxi, Cracoviæ, 1617; 3° Hermes Trismegistus; 4. Eternis manibus Jacob Janidlovii, Cracoviæ, 1600.

CIRAN (Saint), ou SIGIRAN, né dans le Berri, d'une famille illustre, ayant reçu à Tours une éducation convenable à sa naissance, parut à la cour, s'y fit estimer, et y exerça la charge d'échanson sous le roi Clotaire II. Sigelaie, son père, qui était évêque de Tours, ayant voulu le marier, Ciran, qui pratiquait les vertus d'un solitaire au milieu des grandeurs, refusa ce parti, rompit peu après tout commerce avec le monde, reçut la tonsure des mains de l'évêque Modegisile, qui avait succédé à son père, et fut élevé aux ordres sacrés. Nommé à la dignité d'archidiacre, il rendit de grands services au diocèse de Tours, corrigea les abus, et rétablit partout la discipline. Son zèle et ses vertus ne pouvaient manquer de lui attirer des désagréments. Legouverneur de la ville le fit mettre en prison, sous prétexte de folie; mais le ciel confondit ses ennemis, et son principal persécuteur périt misérablement. Il se démit ensuite de sa dignité, après avoir distribué le reste de son bien aux pauvres, et se retira dans le diocèse de

Bourges, sur les confins du Berri et de la Touraine, où il bâtit deux monastères, celui de Maubec, et celui de Lonreil, où il mourut vers l'an 657, après l'avoir gouverné plusieurs années. Sa Vie a été publiée par Mabillon avec des remarques.

CIRANI (Elisabeth ), fille célèbre par son talent pour la peinture, illustra l'école de Bologne sa patrie. Formée sur les tableaux des grands maîtres, elle avait de belles idées qu'elle rendait heureusement. Son coloris est frais et gracieux; mais sa manière n'est ni ferme ni décidée. Quoiqu'elle eût plus de talent pour les sujets simples ou tendres, elle choisissait de préférence les sujets terribles; mais elle manquait de force pour les exécuter.

CIRCÉ, fille du soleil et de la nymphe Persa, était savante dans l'art de composer des poisons. Elle se servit de ce secret dangereux contre le roi des Sarmates, son mari, qu'elle empoisonna pour régner seule. Devenue odieuse à ses sujets par ce crime, elle se sauva dans un lieu désert sur les côtes d'Italie, qui fut appelé à cause d'elle le promontoire Circéen. C'est dans cette retraite qu'elle reçut Ulysse. Voyez ce nom.

CIRILLO (Bernardin), se fit connaître sur la fin du xvIe siècle par une Histoire curieuse et peu commune, en italien, de la ville d'Aquila sa patrie, dans l'Abruzze. Elle fut imprimée à Rome en 1570, in-4°. Pour avoir un corps d'histoire complet de cette ville, des savants qu'elle a produits, et des calamités qu'elle a essuyées, on y joint ordinairement celle de Sauveur Massonio, auteur du même pays : ce der nier ouvrage fut imprimé à

Aquila en 1594, in-4°. Cirillo mourut à 75 ans le 15 juillet 1575, selon son épitaphe rapportée par le Toppi dans sa bibliothèque napolitaine. [Cirillo avait été secrétaire de la chambre royale de Naples, protonotaire apostolique, à Rome, archiprêtre de la Santa Casa (de Lorète), chanoine de Sainte-Marie-Majeure, et commandeur de l'hôpital de Sainte-Marie in Saxia.]

+CIRILLO (Dominique), né en 1734 à Grugno, dans la terre de Labour, au royaume de Naples, d'une famille noble, s'appliqua avec succès à l'étude de la médecine. Quoique jeune encore, il obtint au concours la chaire de botanique, restée vacante par la mort de Pedillo. Quelques années après, il vint en France à la suite de lady Walpole, où il connut Nollet, Buffon, d'Alembert, et s'attacha plus particulièrement à Diderot. Etant passé en Angleterre, il y suivit les leçons de Guillaume Hunter, et fut reçu membre de la société royale de cette ville. A son retour dans sa patrie, il fut nommé successivement professeur de médecine pratique et de médecine théorique. Il exerçait sa profession avec une noblesse et un désintéressement rares. Appelé sans cesse dans le palais des riches, il n'en volait pas avec moins de zèle dans la chaumière du pauvre; il se montrait partout un véritable ami de l'humanité; mais les Français étant entrés à Naples le 23 janvier 1799, et y ayant proclamé une constitution républicaine, il fut nommé représentant du peuple. Cirillo abandonnant la profession qui avait fait sa gloire, accepta cet emploi, passa à la commission législative, dont il fut bientôt

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