Nous avons exposé les vues de l'auteur avec d'autant plus de confiance que les états statistiques des établissements de bienfaisance publiés le 15 janvier dernier, par le Moniteur français, nous apprennent qu'elles ont déjà été réalisées dans trois Monts-de-Piété. Leur mise à exécution serait bien plus facile en Belgique, maintenant surtout, que l'émission des bons du trésor portant 4 1/2 p. % d'intérêt, permet de placer au fur et à mesure les fonds déposés : la différence d'un demi p. % qui existerait entre l'intérêt à recevoir et l'intérêt à payer, dédommagerait le Mont-de-Piété et lui assurerait des bénéfices notables, dès que les opérations acquérraient quelqu'importance. Ces bénéfices formeraient un fonds de réserve destiné à couvrir les pertes qui pourraient résulter des opérations, ils serviraient aussi à payer l'accroissement des charges de l'établissement, et tourneraient, en définitif, à l'avantage des emprunteurs, en facilitant la réduction des intérêts qu'ils paient pour les gages. Et qu'on ne croie pas que les déposants pourraient souvent profiter directement de l'intérêt alloué pour les bons du trésor mis à leur portée par coupons de cent francs; l'ouvrier laborieux ne peut faire que de minimes épargnes, et s'il devait attendre qu'elles s'élevassent à la somme nécessaire pour acheter un bon, il succomberait mille fois à la tentation de dépenser ses petites économies : les classes aisées ne se figurent point les jouissances ou les privations que quelques francs peuvent procurer à des hommes qui en ont si peu et qui les gagnent si difficilement. Un autre avantage de la combinaison proposée, serait de populariser les caisses d'épargne dans les classes inférieures qui accordent une confiance illimitée au Montde-Piété, tandis que, à raison sans doute des fréquents changements de régime dans notre pays, elles se tiennent en méfiance contre les institutions émanées de plus haut. Aussi les caisses d'épargne de la banque, malgré les garanties incontestables qu'elles offraient, étaient-elles moins fréquentées par l'ouvrier économe que par le capitaliste qui y versait ses fonds, en attendant un emploi plus avantageux. Quant au taux de l'intérêt, ce n'est pas son élévation qui multiplie les petits versements: M. Salverte a remarqué que celui qui porte son argent à la caisse d'épargne ne s'occupe guère de l'intérêt, il veut avant tout mettre une petite somme en réserve pour les plus pressants besoins. La preuve en est, dit-il, qu'un quart au moins des fonds déposés est tout à fait variable et sert en général à payer les petits loyers. On sait d'ailleurs que l'intérêt de 4 p. % excède de beaucoup celui accordé en Ecosse où les caisses d'épargne ne paient que 2 p. % d'intérêt, et en Angleterre où elles ne paient que 3, 80, d'où le gouvernement retient encore 38 centimes pour payer les dépenses. Du reste, nous voudrions que l'établissement payât comme le faisait la banque, 4 p. % d'intérêt pour toutes les sommes qui n'excéderaient pas deux mille francs et que cet intérêt se réduisit graduellement à 3 et à 2 p. % pour les sommes plus élevées, attendu qu'il s'agit uniquement ici, de favoriser les classes inférieures et non les capitalistes qui ont tant d'autres moyens de placer leurs fonds. En soumettant ces idées à nos lecteurs, notre but est d'appeler leurs méditations et celle de l'autorité, sur un objet qui touche de si près aux améliorations sociales réclamées de toutes parts. Notice &Sar Everard 'Serclaes. Il y a dans notre histoire, si palpitante d'intérêt, si bigarrée de faits divers, certains grands noms qu'un dévouement héroïque, un courage à toute épreuve, une fermeté de fer ont entourés d'une auréole de gloire, dont le silence et la coupable indifférence des écrivains ont seuls dérobé l'éclat aux yeux de la postérité. Chez les Romains et les Grecs le moindre exploit militaire, l'action de celui qui défendait bravement sa patrie, était scrupuleusement enregistrée et entretenait dans la nation cette grandeur d'ame, cette conscience de soi, qui donne la véritable dignité aux peuples. Les noms de Codrus, d'Harmodius et de Léonidas; de Cincinnatus, de Coriolan et de Camille sont parvenus jusqu'à nous; et cependant chez nous à peine connait-on le dévouement des trois cent Franchimontois; les Breydel et les De Coninck, les Huldenberg et les Borluut. C'est vraiment une honte à nous de laisser ainsi ensevelies dans l'oubli ces célébrités dont tout autre peuple se montrerait fier et orgueilleux. Parmi ces hommes à qui une patrie reconnaissante eût décerné des couronnes civiques, ou élevé des colonnes, nous mettrons en première ligne Everard t'Serclaes. Issu d'une famille illustre par ses alliances et son ancienneté, Everard t'Serclaes était né à Bruxelles vers 1315. Il tirait son origine = de la famille des Sleeuws, qui, ainsi qu'on le sait, était une des sept familles patriciennes de Bruxelles. Nicolas Sleeuws ayant commencé une souche à part, elle prit le nom de t'Sheren-claes ou t'Serclaes, c'est-à-dire Souche de Messire Nicolas (Gramaye, Bruxelles, p. 22. Haræus, Ann. ducum Brab., p. 333., Antverpiæ 1623. M. S. généalogique appartenant à M. De Roover, à Bruxelles ). Il était fils d'Everard t'Serclaes et de Barbe Van Ursel. Uni en premières noces à Béatrix Van Eessene, il épousa, après la mort de celle-ci, Elisabeth Van der Meeren. Il eut de son premier mariage cinq enfans, 1.o Everard, qui fut maître d'hôtel et favori du duc Jean IV; il fut décapité à Bruxelles par le peuple en 1421.-2.o Wenceslas, qui mourut en 1422, en allant combattre en Bohême les sectaires de Jean Huss. 3. Laurette mariée au seigneur d'Assche; Jean IV la fit dame-d'honneur de l'infortunée Jacqueline de Bavière, duchesse de Brabant. — 4.o Jean. — 5.o Jeanne. (M. S. généalogique, cité · Dyntherus, Chron. Brabant. M. S. ( exempl. en 5 vol.) t. III. p. 1606. t. IV. 2927 Seqq. 2985. Divæus Rer. Brabant. p. 231 - Nobiliaire des Pays-Bas, II. 24 Seqq. Malines. 1779 ). Son frère Jean t'Serclaes d'abord chanoine de S.te Gudule, devint en 1378 évêque de Cambray et comte du Cambrésis (Gramaye Cameracum p. 9 — Carpentier, Hist. de Cambray - Nobiliaire etc. ibid). Everard 'Serclaes est le premier de cette famille que nous voyons avec le nom de Patricius, vers 1337 (Gramaye, Bruxelles p. 22). Il était seigneur, de Wambeeck, Bodenghem et Ternath (1). Le château de Cruykenbourg, (1) Villages voisins situés à 1 1/2 lieue de Bruxelles. petite seigneurie enclavée dans le territoire de Ternath, fut rebâti par lui et augmenté d'une riche chapelle. La partie ancienne de ce château semble s'être conservée jusqu'à nos jours; des tourelles, de larges fossés, d'épaisses murailles paraissent attester son antique importance. (Gramaye, ibid. p. 18. Le Roy, théâtre profane du Brab. p. 25). Le nom d'Everard t'Serclaes a surtout acquis sa célé– brité par l'expulsion des Flamands de la ville de Bruxelles. Tous les auteurs sont d'accord sur les causes de la guerre qui éclata en 1356 entre la Flandre et le Brabant. Meyer, Divæus, Butkens, Oudegherst nous apprennent que Louis-de-Mâle se voyant éventuellement dépouillé de la succession au duché de Brabant, en conçut un profond ressentiment contre Wenceslas et Jeanne. Cependant, comme ses prétentions à cette succession ne se trouvaient fondées sur aucun droit, il se contenta d'exiger du Duc, son beau-frère, la dot assignée à Marguerite sa femme, qui consistait en une pension annuelle de 10,000 florins de Florence. Wenceslas eut la déloyauté de refuser au Comte l'exécution des engagements pris entre eux. Outré de tant d'indélicatesse et de si peu de bonne foi, Louis devint plus exigeant et réclama le paiement de 86,500 réaux d'or que lui devait encore le défunt Duc Jean III, pour la cession qu'il avait faite à ce dernier de la ville de Malines, en 1346. Une entrevue des deux princes à Malines ne fit qu'aigrir la querelle. Wenceslas se moqua ouvertement des menaces du Comte et s'en revint à Maestricht, pendant que Louis-de-Mâle, de retour à Gand, y préparait toutes ses dispositions et armait la jeunesse flamande pour marcher contre le Brabant. Le Duc, venu d'abord à Maestricht afin de régler avec l'empereur Charles IV la soumission de ses états, y de |