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1, 21; Deut., iv, 17; Job, xxxix, 13; Zach., v, 9, etc.; mais aile a aussi dans plusieurs passages un sens particulier. Les Hébreux donnaient métaphoriquement le nom d'aile à tout re qui avait avec elle quelque trait de ressemblance: 1o au bord d'un vêtement, I Sam., XXIV, 5, 12; Num., xv, 38; Deut., xxii, 12; Jer., 11, 34; Agg., II, 12; au bord d'une couverture de lit, Deut., XXIII, 1 (Vulgate, XXII, 30);

(hébreu, xvin), 11; cm (crv), 3, pour peindre sa vitesse. Cf. Ps. cxxxvIII (CXXXIX), 9; Osee, IV, 19. L'emploi du mot << ailes » dans la prophétie d'Isaïe sur l'Égypte et l'Éthiopie, XVIII, 1, est obscur : les uns y voient les voiles des barques qui voguent rapidement sur le Nil; d'autres, les ombres des montagnes; d'autres encore, une espèce de mouche ou d'insecte ailé. Malachie, IV, 2, compare à des ailes les rayons vivifiants du soleil de justice (le Messie).

6o Le sens le plus intéressant du mot «< ailes » dans l'Écriture est celui de « protection, de tutelle ». Les écrivains

sacrés aiment à comparer Dieu, par une similitude semblable à celle qu'emploie Notre-Seigneur lui-même, Matth., XXIII, 37; Luc., XIII, 34, à un oiseau étendant ses ailes pour y mettre à l'abri ses petits, qui courent s'y cacher et s'y réfugier. Ruth, II, 12; Ps. xvi (XVII), 8; xxxv (xxxvi), 8; LVI (LVII), 2; LX (LXI), 5; LXII (LXIII), 8; XC (XCI), 4; Mal., IV, 2 (111, 20). Il est curieux de remarquer que les Égyptiens (fig. 65), les Assyriens (fig. 66; cf. fig. 37, col. 235) et les Phéniciens (fig. 67), représentaient la divinité avec

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forts et les plus puissants de la création, les ailes figurent l'aigle, le roi des airs, associé au taureau, roi des animaux domestiques, au lion, roi des bêtes sauvages, et à l'homme, qui commande à toutes les créatures. Voir CHÉRUBIN. Dans les visions de Daniel, VII, 4, le lion à ailes d'aigle rappelle les lions ailés androcéphales, si communs dans la sculpture chaldéo-assyrienne (fig. 69), et est une image très juste du roi de Babylone, fort comme un lion, cf. Jer., IV, 7; XLIX, 19; L, 17, 44, et rapide comme un aigle

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Lion ailé. Sculpture assyrienne, British Museum.

des ailes éployées qui devaient avoir un sens symbolique, entre autres celui de protection, comme on l'admet pour le disque solaire ailé des Égyptiens, qu'on plaçait au-dessus des portes des temples afin de montrer qu'on y était sous la garde et la protection divine (fig. 68).

7. Enfin le mot « aile » est employé avec une signification symbolique spéciale dans les visions des prophètes et dans l'Apocalypse. Is., vi, 2; Ezech., 1, 6, 8, 9, 11, 23, 24, 25; III, 13; x, 5, 8, 12, 16, 19, 21; xr, 22; Dan., VII, 4, 6; Zach., v, 9; Apoc., Iv, 8; 1x, 9; XII, 14. Les Séraphins d'Isaïe, vi, 2, ont six ailes, dont le prophète lui-même nous explique l'usage: « avec deux ils couvraient leur face,» afin de ne point voir la majesté de Dieu; « avec deux ils couvraient leur corps, » afin qu'il ne pût pas être vu, comme le dit le Targum de Jonathan, « et avec deux ils volaient. » Voir SERAPHIN.-Dans les Chérubins d'Ézéchiel, qui réunissent les formes symboliques des animaux les plus

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qui fond sur sa proie les ailes éployées. Jer., XLIX, Lam., Iv, 19; Ezech., xvII, 3-7, 12; cf. Hab., 1, 8. Le léopard à quatre ailes d'oiseau, Dan., vII, 6, figure Alexandre le Grand et la rapidité des conquêtes macédoniennes. Zacharie nous montre, v, 9, une femme placée dans un épha ou amphore soulevée dans les airs par deux autres femmes qui ont des ailes de cigogne (Vulgate : de milan). Les ailes qui leur sont données nous expliquent comment elles peuvent voler; leurs ailes sont celles de la cigogne, parce que cet oiseau les a grandes et fortes, et que les femmes de la vision ont un poids très lourd à porter. · Les six ailes des quatre animaux mystérieux dans l'Apocalypse, IV, 8, rappellent celles des Séraphins d'Isaïe et celles des Chérubins d'Ézéchiel. Les ailes des sauterelles symboliques, Ix, 9, leur sont naturellement attribuées comme aux sauterelles réelles; Joel, II, 5, avait déjà comparé, comme le fait ici saint Jean, le bruit que font les armées de ces

insectes à celui des chars de guerre. La femme qui symbolise l'Église, XII, 14, a deux ailes d'un grand aigle pour échapper à son persécuteur et s'enfuir dans le désert où elle est à l'abri de sa rage. L'art chrétien, s'inspirant de ces visions des prophètes, représente les anges avec deux ailes, pour exprimer la rapidité avec laquelle ces messagers célestes exécutent les ordres de Dieu. C'est sans doute une raison esthétique qui ne leur fait donner que deux ailes, quoique les Séraphins et les Chérubins en eussent davantage. F. VIGOUROUX.

1. AÏN, hébreu : p3, ‘ayin, mot qui signifie « source ». Il entre dans la composition d'un certain nombre de noms de lieux tirant leur dénomination des eaux qui y prenaient naissance. Rarement le mot « Aïn » est employé tout court, comme Jos., XIX, 7; xx1, 16 (et xv, 32, où la Vulgate écrit Aen, au lieu d'Aïn), pour désigner une ville de Siméon; comme Num., xxxiv, 11 (Vulgate: fontem Daphnim, le mot « Daplinim » est ajouté au texte original), pour désigner une localité de la Palestine septentrionale (une source du Jourdain ou une autre source célèbre, d'après divers commentateurs); comme probablement Ænnon, Aivov, Joa., III, 23, qui semble être un adjectif, ray, 'ênôn, dérivé de 'ayin, et signifier << un lieu abondant en sources ». Ordinairement le mot 'ayin est suivi d'un autre qui le complète et le précise. Comme l'orthographe de notre Vulgate a altéré la forme primitive, nous donnons ici l'énumération des noms géographiques qui commencent par 'ayin, en les faisant suivre de la transcription adoptée par notre Bible latine : 1o 'Ên Gedî ('ayin devient 'ên, parce qu'il est à l'état construit), dans le désert de Juda; Engaddi. 2o 'Ên-gannim, ville de Juda; Ængannim. — 3o 'Ên-gannim, ville d'Issachar; Engannim. 4o Ên Dôr, ville de Manassé; Endor. — 5o ‘En Ḥaddáh, ville d'Issachar; Enhadda. — 6o ‘En Ḥâşôr, ville de Nephthali; Enhasor. 7. 'Ên Hărôd, près du mont Gelboé (peut-être un simple nom de source, non de localité); fontem Harad. — 80 'En Mišpát, la même ville que Cadès; fontem Misphat. — 9o 'Ên Eglaïm, ville au nord de la mer Morte; Engallim. 100 ́Ên Šéméš, sur la limite des tribus de Juda et de Benjamin; Fons Solis, Ensemes. Voir aussi Enaim. - Outre ces noms de lieux, quelques sources ont aussi un nom propre dans l'Ancien Testament: 10 En Rôgel, près de Jérusalem; Fons Rogel. 20 'En Tannim, également près de Jérusalem; Fons Draconis.- 3o1Ên Tapúaḥ, fontaine de la ville de Taphua; Fons Taphuæ, etc. - Voir, à leur place respective, selon l'orthographe de la Vulgate, chacun de ces noms propres.

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2. AIN (hébreu: 'Ayin; Septante: "Hv, I Par., Iv, 32; Vulgate : Aen, Jos., xv, 32; 1 Par., IV, 32; Ain, Jos., xix, 7; XXI, 16), ville méridionale de la tribu de Juda, Jos., xv, 32; attribuée plus tard à celle de Siméon, Jos., XIX, 7; I Par., Iv, 32; et donnée aux enfants d'Aaron, Jos., xxi, 16 (dans la liste des villes lévitiques, I Par., vi, 59, on trouve Asan au lieu de ‘Ayin ). Le texte original du second livre d'Esdras, XI, 29, joint Aïn à Rimmon, qui, dans tous les autres passages (excepté Jos., XXI, 16), suit immédiatement, deux fois même sans le vav conjonctif, Jos., XIX, 7; I Par., Iv, 32; il en forme ainsi un mot composé, 'Ên-Rimmôn. Les Septante ont fait de même dans d'autres endroits en traduisant: 'Epwude, Jos., xv, 32; 'Epɛμμàv, Jos., xix, 7, contraction évidente de 'En-Rimmôn. D'ailleurs ce mot 'Aîn, à l'état construit 'En, est souvent uni à d'autres noms, et indique quelque fontaine remarquable, située dans le lieu ainsi déterminé ou dans le voisinage, par exemple, Engaddi, Jos., xv, 62; Engannim, Jos., xix, 21; Endor, Jos., XVII, 11, etc. Cette union des deux mots a fait supposer à certains auteurs que les deux localités étaient si rapprochées l'une de l'autre, qu'elles ont fini, dans la suite des temps, par n'en plus former qu'une seule. Quoi qu'il en soit, nous pouvons approximativement déterminer la position d'Aïn d'après celle de Rimmon, qu'on identifie généra

lement avec Khirbet Oumm er- Roumámin, à trois heures au nord de Bersabée, sur la route de Beit-Djibrin (Éleuthéropolis).

C'est donc dans les environs de l'ancienne Rimmon qu'il faut chercher Aïn. Or, suivant quelques critiques, l'emplacement en serait marqué par un puits antique, très fréquenté des Bédouins, et situé à une demi-heure au sud de la ville actuelle. Robinson avait d'abord cru la retrouver bien plus à l'est, dans les ruines de Ghuwein (Rhoueïn ech-Charkiéh ou Rhouein er-Rharbiéh), dont le nom est un diminutif correspondant à l'hébreu ‘Aîn. Biblical Researches in Palestine, 1re édit., 1841, t. 11, p. 625, note 2. Mais plus tard, 2o édit., 1856, t. 11, p. 204, note 1, il identifie ces ruines avec Anim de Juda, Jos., xv, 50, tout en reconnaissant que le nom arabe correspond mieux à l'hébreu ‘Aîn; et, en effet, la première lettre aïn, étant remplacée par le ghaïn (r grasseyé), comme dans Gaża (hébreu: 'Azza; arabe: Ghazzéh ou Rhazzéh), les autres sont semblables. M. Victor Guérin avoue qu'il est permis de choisir, pour l'identification de Rhoueïn, entre ces trois villes: Aroër, Aïn et Anim, bien que sa préférence se porte sur la première. Description de la Palestine, Judée, t. I, p. 193. Il nous est difficile cependant de voir comme lui une corruption de l'hébreu 'Aro'êr dans la dénomination arabe de Rhoueïn. Nous croyons en somme que, si cette dernière localité ne marque pas l'emplacement certain d'Aïn, il faut le chercher non loin de là, dans certaines limites indiquées d'un côté par Rimmon (Khirbet Oumm er·- Roumâmin), et les villes sacerdotales de Jéther (Khirbet 'Attir) et Esthemo (Semou'a). Jos., xxi, 14. Voir ANIM. A. LEGENDRE.

3. AIN (hébreu : lâ'âyin, avec la préposition et l'article; Septante naŋyάç, « aux sources; » Vulgate : contra fontem Daphnim), endroit mentionné par Moïse, Num., XXXIV, 11, comme formant une des limites orientales de la Terre Sainte. Plusieurs anciens manuscrits de la Vulgate omettent le mot Daphnim, qui n'est sans doute qu'une glose empruntée aux commentaires de saint Jérôme. Le saint docteur, en effet, identifiant Rebla, Num., xxxiv, 11, avec Antioche de Syrie, en conclut que « la fontaine » indiquée ici est celle de Daphné, dans le célèbre bois sacré qui était aux portes de la grande cité. Comment. in Ezech., t. xxv, col. 478. Ce qui était donné comme une simple explication aura été plus tard interpolé dans le texte par quelque copiste. Cf. C. Vercellone, Variæ lectiones Vulgatæ latina, Rome, 1860, t. 1, p. 475. D'ailleurs l'identification proposée par saint Jérôme est absolument inadmissible, car les frontières de la Terre Sainte ne se sont jamais étendues si loin.

L'emplacement d'Aïn est d'autant plus difficile à fixer, que les noms qui précèdent, 7. 9, 10, présentent euxmêmes une assez grande obscurité. Cet endroit semble appelé dans le texte à déterminer la position de Rébla, qui se trouvait « à l'orient ». Mais s'agit-il bien ici de la ville identifiée avec une localité du même nom, Ribléh, située sur la rive orientale de l'Oronte, à une certaine distance au-dessus de Homs? Cf. Robinson, Biblical Researches in Palestine, Londres, 1856, t. III, p. 542-546; J. L. Porter, Five years in Damascus, Londres, 1855, t. II, p. 335-336. S'il en était ainsi, Ain serait, suivant plusieurs auteurs, Aïn el-Asi, une des principales sources de l'Oronte, à quatre ou cinq lieues au sud-ouest de Ribléh. Cette hypothèse, il faut le dire, soulève plusieurs objections. Et d'abord, la situation de Ribléh ne paraît guère s'accorder avec l'ensemble des limites décrites Num., XXXIV, 9-11: c'est porter bien haut le territoire des neuf tribus et demie qui se partagèrent l'occident de la Terre Promise. Num., XXXIV, 13. Et puis, quoique l'auteur sacré trace à grands traits cette délimitation orientale, il y a une fameuse lacune de ce point au lac de Cénéreth ou de Génésareth, qui vient immédiatement après. Enfin la distance d'Ain el-Asi à Ribléh, et la direction, qui est plutôt

celle du nord-est que celle de l'est, ajoutent bien quelque chose à la difficulté. Aussi certains critiques, frappés de voir l'article devant Riblah, hâribláh, croient ici à une leçon défectueuse, et prétendent qu'on peut lire: Har Belah; ce qui semble confirmé par la version des Septante : ἀπὸ Σεπφαμαρ Βηλά, pour ἀπὸ Σεπφάμ, « de Sepham, ap Bηλá, « à la montagne de Bel. » Cette montagne serait alors le Har-Baal-Hermon, dont parle le livre des Juges, III, 3, c'est-à-dire le pic de l'Hermon, qui mieux que tout autre point formait une marque naturelle de frontière. Cf. Trochon, La Sainte Bible, les Nombres et le Deutéronome, 1гe part., Paris, 1887, p. 194. Dans ce cas, Aïn indiquerait une des sources du Jourdain. A. LEGENDRE.

AÎNESSE (DROIT D'). Le mot « aîné » ou «< premierné » s'entend, dans l'Écriture, dans deux sens différents. Tantôt il signifie le premier enfant d'une femme, sans qu'on se demande d'ailleurs si le père de cet enfant en a eu d'autres avant lui; ce « premier-né » est l'objet de prescriptions particulières, qui concernent surtout sa consécration à Dieu et son rachat; tantôt ce mot signifie le premier enfant mâle qui naît à un homme, quand même ce ne serait pas le premier enfant de sa femme, qu'il peut avoir épousée en secondes noces; que s'il a plusieurs femmes, comme cela était permis chez les Hébreux, c'est le premier enfant qui lui naît, quand même ce serait de sa seconde ou troisième femme. C'est ce « premier-né > seul qui jouit du droit d'aînesse, et qui fait l'objet du présent article. Pour tout ce qui concerne le premier-né dans l'autre sens de ce mot, voir PREMIER-NÉ. L'existence du droit d'aînesse chez les Hébreux est constatée par l'histoire de Jacob et d'Ésaü. Gen., xxv, 31-34; xxvii, 36. Ce droit est appelé mišpat habbekôráh, « droit de la primogéniture, » Deut., xxi, 17, ou simplement, par ellipse, bekôrâh, « primogéniture, aînesse. » Gen., xxv, 31, 34 (Septante: τà лpwtotóxia; Vulgate : primogenita).

I. En quoi consistait le droit d'aînesse. Le droit d'aînesse comprenait plusieurs privilèges ou droits spéciaux: 1o Le droit d'avoir deux parts dans l'héritage paternel. Un texte célèbre du Deuteronome contient en abrégé tout ce que nous avons à dire sur ce point : « Si un homme, ayant deux femmes, aime l'une d'elles et dédaigne l'autre, et que, ces deux femmes ayant eu des enfants de lui, le fils de celle qu'il dédaigne soit le premierné, lorsqu'il voudra partager son héritage entre ses enfants, il ne pourra pas déclarer premier-né le fils de celle qu'il aime; mais il devra reconnaître comme tel celui qui l'est réellement, et il lui donnera une double part dans tous les biens qui se trouveront chez lui, parce qu'il est le premier fruit de sa force, et qu'ainsi le droit d'aînesse lui appartient. » Deut., xxi, 15-17. Tel est le texte unique, dans la Bible, qui parle explicitement de la double part appartenant à l'aîné; mais, on le voit, Moïse ne crée pas ce droit; il le suppose, au contraire, en pleine vigueur. Toute la tradition juive est unanime sur ce point. Mischna, traité Bekôrôt, vIII, 9, édit. Surenhusius, part. v, p. 185; voir les commentaires de Bartenora et de Maimonide sur ce passage, ibidem. Cette double part est appelée pî šenayîm, littéralement « part de deux ». Les rabbins ont soin de nous dire comment on la déterminait; on divisait l'héritage en autant de parts, plus une, qu'il y avait d'enfants aptes à succéder; chaque enfant avait une part, et l'aîné en avait deux. D'après le texte cité du Deuteronome, la double part était prise « sur les biens qui se trouvaient chez le père au moment de sa mort »; les rabbins ont interprété strictement ces paroles: ainsi l'aîné n'avait pas de droit spécial sur les biens maternels, ni sur les biens qui pouvaient accroître la succession du père après la mort de celui-ci et avant la division, par exemple, les biens du grand-père; il n'avait sur ces biens qu'une seule part, comme ses frères; quant aux créances recouvrées après la mort du père, il y a controverse entre les interprètes sur la question de savoir si le droit spécial de l'aîné s'exer

çait sur elles. Bartenora, à l'endroit cité de la Mischna; Selden, De successionibus ad leges Hebræorum, Francfort-sur-l'Oder, 1673, p. 25-26. D'autre part, s'il s'agissait d'immeubles, on faisait en sorte que les deux parts de l'aîné fussent, non pas séparées, mais continues, afin qu'elles eussent plus de valeur. Selden, loc. cit. La « double part » est restée célèbre dans tout l'Ancien et même dans le Nouveau Testament; elle fut même employée dans un sens métaphorique, pour signifier « une part abondante »>. Ainsi Élisée demande à Élie une double part, pi šenayim, de son esprit. IV Reg., 11, 9. Saint Paul veut qu'on accorde aux ministres bien méritants une double part des honoraires, dɩñèñç t‹μñe. I Tim., v, 17.

20 La dignité sacerdotale. Avant la loi de Moïse, qui réserva à la tribu de Lévi les fonctions sacerdotales, ces fonctions, en règle générale, appartenaient aux aînés des familles ; c'était là une de leurs prérogatives. Quelques auteurs ont nié ce fait, comme Vitringa, Observationes sacræ, Iéna, 1723, II, п; Leclerc, In Gen., xxv, 31, Amsterdam, 1710, p. 198-199; Spencer, De legibus Hebræorum ritualibus, la Haye, 1686, I, vi, p. 115-117; Goerée, La république des Hébreux, Amsterdam, 1713, traduction de Basnage, t. III, p. 1-6. Rosenmüller semble avoir varié sur ce point: In Gen., XLIX, 3, et In Exod., XIII, 2, il est favorable à l'opinion affirmative; au contraire, In Gen., xxv, 31, et In Exod., XIX, 22, il est plutôt favorable à l'opinion contraire. Nous regardons comme beaucoup plus probable l'opinion qui reconnaît aux aînés la prérogative dont il s'agit. Sans doute aucun texte scripturaire, clair et formel, ne la prouve directement. Mais: 1o elle est fondée sur deux textes de l'Exode, combinés avec l'interprétation qu'en donnent les plus antiques versions. Dans Exod., XIX, 22, 24, et par conséquent avant la loi mosaïque, il est question de prêtres, kôhanîm, tout à fait distincts de la masse du peuple. Qui sont ces prêtres? Le texte sacré nous le dit un peu plus loin, Exod., XXIV, 5 : « Et il [Moïse] envoya des jeunes gens, ne‘arîm, d'entre les enfants d'Israël, et ils offrirent des holocaustes, et ils immolèrent des victimes pacifiques. » Voilà bien les prêtres exerçant les fonctions de sacrificateurs. Or les plus antiques versions ou paraphrases traduisent «< jeunes gens » par « premiers-nés d'Israël ». Ainsi traduisent le Targum d'Onkelos, du per siècle, le Targum du pseudo-Jonathan, le Targum de Jérusalem, la version arabe de Saadia, la traduction persane du Pentateuque. — 2o Cette opinion est fondée sur la tradition juive, qui sur ce point est unanime et constante. La Mischna est formelle: dans le traité Zebarîm, XIV, 4, édit. Surenhusius, part. v, p. 58, elle enseigne « qu'avant que le tabernacle fùt construit, l'oblation des sacrifices était faite par les premiers-nés; mais qu'après la construction du tabernacle, les fonctions du culte furent réservées aux lévites. » C'est encore ce qu'on lit dans le Bereschit Rabba, f. 71 a. Aussi les commentateurs juifs n'hésitent pas dans leur enseignement sur ce point. Raschi (ou Jarchi), In Exod., XXIV, 5; Aben-Ezra, au même endroit; Bechai, In Gen., XLIX, 3; Bartenora et Maimonide dans leurs commentaires sur la Mischna, à l'endroit cité du traité Zebarim, soutiennent, sans aucune mention de controverse, la dignité sacerdotale des premiers-nés, et présentent leur sentiment comme une tradition constante dans leur nation. Au XVIIe siècle, le rabbin Manassès a résumé de nouveau cette tradition dans son Conciliator, Amsterdam, 1633, In Exod., q. 29, — 3o A la tradition juive se joint la tradition chrétienne. Un nouvel argument a confirmé dans leur opinion les interprètes chrétiens. Saint Paul, Heb., xu, 16, appelle Ésau un profane, ẞébŋλos, pour avoir vendu son droit d'aînesse. Ce mot signifie violateur ou profanateur d'une chose sacrée. Or le droit d'aînesse ne pouvait être sacré que parce qu'il renfermait la prérogative du sacerdoce; sans cela Ésaŭ aurait été un prodigue, un imprudent, mais pas un sacrilège. Saint Jérôme reconnaît cette prérogative aux premiers-nés des Hébreux, et donne son interprétation comme reposant sur la tradition juive, Epist. LXXIII ad Evangelium, t. xxII, col. 680;

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Quæst. Hebraicæ in Gen., XXVI, 15, t. xxш, col. 980, et aussi dans l'opuscule De benedictionibus Jacob patriarchæ, qui a été sinon écrit par saint Jérôme, au moins extrait littéralement de ses écrits, t. XXIII, col. 1309. Saint Jérôme a été suivi par la foule des commentateurs chrétiens et des auteurs qui ont écrit sur l'état de la religion chez les Juifs: Bertramus, De republica Hebræorum, Leyde, 1641, p. 28-29; Menochius, De rep. Heb., Paris, 1648, II, v, 1; V, IX, 5; Buddeus, Historia Veteris Testamenţi, Halle, 1744, t. 1, p. 246, 311 et suiv.; Jahn, Archæologia biblica, § 164; Selden, De successionibus ad leges Hebræorum, Francfort-sur-l'Oder, 1673, p. 22-23, 100-101; Cajetanus, In Exod., xix, 22, et In Heb., XII, 16; Cornelius a Lapide, In Gen., xxv, 31; In Exod., XXIV, 5, et In Hebr., xII, 16; Delrio, quoique avec un peu d'hésitation, In Gen., xxv, 31 ; Ugolini, Sacerdotium hebraicum, I, dans son Thesaurus antiquitatum sacrarum, Venise, 1752, t. xm, p. 136-141; Saubert, De sacerdotibus Hebræorum, ́I, 1, dans Ugolini, Thesaurus, t. XII, p. 1-2; Krumbholtz, Sacerdotium hebraicum, I, dans Ugolini, Thesaurus, p. 83; Heidegger, Historia Patriarcharum, Zurich, 1729, t. 1, Exerc. 1, p. 16; S. Thomas, 1a 2o, q. 103, art. 1, ad 3. Ces auteurs ont été précédés ou suivis par beaucoup d'autres; voir Critici sacri, Amsterdam, 1698, t. I, In Exod., XIX, 22, et xxiv, 5, et t. VII, In Hebr., XII, 16. On le voit, la tradition juive et la tradition chrétienne sont, sur le point qui nous occupe, assez unanimes et assez fondées pour que nous puissions négliger les quelques contradicteurs que nous avons signalés, sans toutefois prétendre que le sentiment que nous soutenons soit tout à fait certain. Du reste nous affirmons seulement la règle générale, et nous admettons volontiers que, soit par une intervention particulière de la Providence, soit par une disposition spéciale de l'autorité publique, il y ait eu avant la loi d'autres prêtres que les premiers-nés, comme, par exemple, Abel et Moïse, qu'on reconnaît assez généralement avoir exercé les fonctions du sacerdoce. Signalons en passant les opinions de plusieurs rationalistes contemporains, qui prétendent non seulement que les premiers-nés n'étaient pas prêtres à l'exclusion des autres, mais que même, chez les Israélites, jusqu'à la fin des Juges, chacun éta't prêtre comme et quand il voulait, en sorte qu'il n'y avait sous ce rapport aucune distinction chez eux entre les « laïques » et les prêtres ou lévites. Wellhausen, Prolegomena zur Geschichte Israels, p. 149-150; Kuenen, The Religion of Israël, passim; Rob. Smith, The Old Testament in the Jewish Church, p. 435 et suiv. Comme cette erreur repose sur la non authenticité du Pentateuque, ce n'est pas le lieu de la réfuter ici. Voir F. Vigouroux, Les Livres Saints et la critique rationaliste, 3o édit., t. ..., p. 157-166.

3o Une certaine autorité quasi-paternelle sur les frères puînés. Tant que le père de famille était en vie, cette autorité du premier-né n'avait que peu d'exercice; elle consistait dans une espèce de surveillance sur ses frères, dans une certaine direction imprimée à leur conduite sous l'autorité du père. C'est ce que nous voyons en action dans la famille de Jacob, où Ruben, le premier-né, dirige ses frères, leur donne des conseils, les réprimande, prend le premier la parole, assume les responsabilités, etc. Gen., XXXVII, 21-22, 30; XLII, 22, 37. L'aîné a du reste partout la première place, par exemple, à table, Gen., XLIII, 33, et dans les généalogies, I Par., II, 1, etc. A la mort du père, l'aîné a droit, de sa part, à une bénédiction spéciale, qui lui est exclusivement propre, et qui assure et confirme ses privilèges. Dès que le père est mort, c'est le premierné qui devient le chef de la famille, et ses frères sont soumis à son autorité, ceux surtout qui continuent à habiter ́dans la maison paternelle. Voilà pourquoi, dans les tables généalogiques du premier livre des Paralipomènes, le premier-né est souvent appelé le chef, ro'š, princeps, de la maison; et l'auteur de ce livre signale comme un fait 'extraordinaire qu'un père ait établi « chef » un de ses enfants qui n'était pas le premier-né. I Par., XXVI, 10.

Cf. Michaelis, Mosaisches Recht, § 84, t. I, p. 110. Cette soumission des frères à leur aîné est exprimée d'une manière frappante par ces paroles d'Isaac à celui qu'il croyait son premier-né, et qu'il bénissait comme tel : « Sois le maître (gebir) de tes frères, et que les enfants de ta mère s'abaissent profondément devant toi. » Gen., xXVII, 29. Cf. xxv, 23. Voilà pourquoi Jacob, sur son lit de mort, disait à Ruben, qu'il déclarait déchu de son droit d'aînesse : « Ruben, toi, mon premier-né, et le premier fruit de ma force, tu étais le premier par la dignité, le premier par la puissance, » etc. Rosenmüller, In Gen., XLIX, 3. Cf. Menochius, De republica Hebræorum, V, ix, 5, p. 480; Heidegger, Historia Patriarcharum, t. 1, Exerc. 1, p. 15-16; Jahn, Archæologia biblica, § 164, dans Migne, Cursus completus Scripturæ Sacræ, t. II, col. 926

Les trois privilèges que nous venons de signaler étaient généraux, c'est-à-dire appartenaient à tous les aînés; dans certains cas, ils avaient des privilèges spéciaux très importants. Ainsi le roi avait pour successeur son fils aîné, II Par., XXI, 3; Cf. Schickard, Jus regium Hebræorum, Leipzig, 1674, p. 444-445, à moins qu'une circonstance exceptionnelle ne donnât lieu à une disposition différente, comme il est arrivé à Salomon, qui succéda à David, quoiqu'il ne fût pas son fils aîné, III Reg., 1; c'était le fils aîné du grand prêtre qui le remplaçait dans ses fonctions, Boldich, Pontifex maximus Hebræorum, dans Ugolini, Thesaurus,

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XII, p. 127. Il en était de même de toutes les autres fonctions ou dignités; après la mort du père, c'était le fils aîné qui en était revêtu. Maimonide, Halach. Melakim, I, vii, traduction de Leydekker, Rotterdam, 1699, p. 9. Signalons le privilège par excellence chez les Hébreux : c'était l'aîné qui, dans la race royale de David, descendant de Juda, succédait à son père dans la promesse d'être ancêtre du Messie; cf. Heidegger, Historia Patriarcharum, t. II, Exerc. XII, p. 233. Voilà pourquoi les Hébreux ont employé le mot << premier-né », pour signifier une dignité éminente, ou simplement le superlatif. Jésus-Christ est appelé « le premier-né de toutes les créatures », parce que, par sa divinité, il est supérieur à toutes, Col., 1, 15; une maladie terrible est appelée le « premier-né de la mort », Job, XVIII, 13. Cf. Is., XIV, 30; Gesenius, Thesaurus, p. 207. II. Raisons, translation, charges et autres particularités du droit d'ainesse. 1° Raisons. Il y en a deux principales ; la première nous est donnée par le texte sacré, Deut., xxi, 17: « Parce qu'il est le premier fruit de sa force [de la force du père], à lui revient le droit d'aînesse. » C'est la même expression que nous avons vue, Gen., XLIX, 3: « Ruben, toi, le premier fruit de ma force. » Le premier-né est donc la première manifestation et comme les prémices de la force virile du père; et c'est pourquoi, chez ce peuple surtout, et à une époque où les prémices de chaque chose revêtaient un caractère joyeux et sacré, le père aimait beaucoup plus tendrement son aîné que ses autres enfants, le regardait comme un autre lui-même, et voulait se survivre en lui le plus complètement possible après sa mort. Une seconde raison, c'est le maintien des grandes familles dans leur dignité et leur opulence; les patriarches israélites eurent bientôt remarqué que la division à l'infini et l'émiettement des propriétés sont l'amoindrissement progressif, et bientôt la ruine des familles; pour écarter ce malheur, ils établirent le droit d'aînesse restreint que nous avons exposé, et que Moïse n'eut qu'à maintenir dans son code. Tout le monde sait qu'en Angleterre et dans plusieurs autres nations, la principale cause de la conservation des grandes familles, c'est le droit d'aînesse absolu; les propriétés se transmettent intactes, indivisibles, et ainsi assurent aux chefs de famille une puissance qui ne peut que s'accroître. P. Viollet, Précis de l'histoire du droit français, Paris, 1886, p. 225, 723. Quelques auteurs ajoutent une troisième raison: les aînés étaient les types de JésusChrist, qui est le « premier-né » par excellence. Ps. LXXXVIII (héb. LXXXIX), 28; Heb., 1, 6. Jésus-Christ a toutes les prérogatives que nous avons signalées; il a le sacerdoce,

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