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en lettres d'or, et ornés de magnifiques miniatures. Les autres bibliothèques royales de Paris possèdent également beaucoup de richesses de ce genre. Il est aussi plusieurs bibliothèques départementales, telles que celle de Lyon, qui en renferment une grande quantité. La bibliothèque départementale de la Meuse, placée à Verdun, en a quelques-uns assez précieux, provenant du célèbre Nicolas Psaume, évêque de cette ville. Nous avons encore en France certains cabinets de curieux qui en contiennent beaucoup d'importans, tant par leur rareté que par leur exécution.

Outre les pertes que la bibliothèque du roi a faites en manuscrits, lors de la seconde invasion, on doit regretter ceux qu'un affreux incendie a dévorés à l'abbaye de SaintGermain-des-Prés. Cet ancien monastère en possédait plusieurs de la plus haute antiquité et de la plus belle exécution, entre autres un psautier écrit sur vélin psautier écrit sur vélin pourpre, en lettres d'or, et que l'on prétendait avoir été donné à saint Germain par l'empereur Justin. Malgré cette perte irréparable, la France est encore probablement le pays le plus riche en manuscrits.

L'Italie, contrée de l'Europe où l'éclipse de barbarie, occasionée par les sauvages conquérans du Nord, a le moins duré, et où le flambeau des sciences et des arts jetait encore quelques faibles étincelles, lorsque presque toute la terre, si l'on en excepte l'empire d'Orient, était enveloppée des plus épaisses ténèbres, l'Italie rivalise avec la France et n'est guère moins riche qu'elle en manuscrits précieux. C'est surtout la fameuse bibliothèque du Vatican, objet de la prédilection des papes, que les savans et les curieux admirent le plus par les trésors de ce genre qu'elle renferme, et dont le nombre s'est accru jusqu'à quarante mille. Elle a possédé à la fois quarantesix copies de Virgile, dont la plus ancienne, que l'on prétend avoir été exécutée par l'ordre et sous le règne d'Alexandre Sévère, a été pendant quelque temps en la possession de la bibliothèque du roi, ainsi qu'un beau Térence de la même époque, orné, de même que le Virgile, d'excellentes minia

tures. Cette bibliothèque renferme pareillement un manuscrit des actes des apôtres, en lettres d'or, donné par une reine de Chypre au pape Alexandre VI.

Florence s'est vue enrichie par les Médicis, protecteurs des lettres, d'uné foule de manuscrits grecs et orientaux. Cosme de Médicis envoya le savant Jean Lascaris dans le Levant pour soustraire à l'ignorance des Turcs ceux qu'il pourrait ramasser. Son fils Laurent suivit son exemple, et envoya une ambassade à Bajazet pour le prier de favoriser les recherches des manuscrits qu'il faisait faire dans toute la Grèce. Ce prince disait qu'il ne trouvait de bonheur que dans sa bibliothèque, et qu'il la préférait à toutes les richesses du monde. Florence se flatte d'avoir l'évangile de saint Jean, écrit de la main de cet évangéliste; ce qui prouve du moins la très-haute antiquité de ce manuscrit. On y trouve encore un Virgile sur vélin, qui passe pour l'un des plus anciens manuscrits de ce poète, et dont on fixe l'âge au règne de Valens ou de Théodose, à la fin du 4° siècle.

La cathédrale de Sienne est riche en manuscrits ornés de miniatures d'une grande délicatesse. On y admire surtout les initiales de plusieurs livres de plain-chant, qui sont d'un fini précieux, et dont l'or et les couleurs ont conservé tout leur éclat primitif.

Venise, célèbre par son commerce, ne le fut pas moins par son goût pour les lettres. Sa belle bibliothèque de SaintMarc est très-renommée, et les manuscrits y sont très-nombreux. Padoue, renommée par son université, possède aussi de très-anciens et de très-précieux manuscrits. Naples est pareillement riche en manuscrits. C'est dans le château de Portici que l'on trouve ceux qui ont été exhumés des ruines d'Herculanum, de Pompéia et de Stabbia. La Sicile et la Sardaigne en possèdent aussi quelques-uns d'une haute antiquité. Turin, Gênes, Parme, Modène, Ferrare en offrent également un bon nombre et de très-anciens. La bibliothèque Ambroisienne de Milan en renferme quinze mille, parmi lesquels on distingue

cinq livres des Antiquités judaïqués de Josèphe, traduits en latin par Rufin, sur papyrus d'Egypte. Montfaucon croit ce manuscrit du 6 siècle, tandis que Mabillon le fait remonter jusqu'au temps même de Rufin.

Genève, cette ville dont la civilisation est portée à un si haut degré, et qui, proportion gardée, a produit plus de grands hommes qu'aucune autre ville de l'Europe, Genève possède une bibliothèque précieuse par ses manuscrits, parmi lesquels on remarque un Traité sur les lois du commerce, écrit en lettres maures, par Ibrahim Burhanadra, jurisconsulte de Médine; les Évangiles en grec, sur vélin, avec les initiales en or; un manuscrit de saint Athanase, sur lequel a été faite la première édition grecque de ce père de l'Église ; la confession de Cyrille Lucar, patriarche de Constantinople, écrite de sa propre main, etc.

Plusieurs autres villes de la Suisse, telles que Bâle, Berne, Saint-Gall et Zurich possèdent pareillement des manuscrits précieux. On voit à Bâle un psautier grec écrit sur parchemin pourpre, dont les majuscules sont en argent et les rubriques en lettres d'or, ainsi qu'un nouveau Testament en lettres d'or. C'est dans cette bibliothèque que Camérarius trouva le manuscrit de Thucydide, qu'il fit imprimer pour la première fois. La bibliothèque de Saint-Gall contient des manuscrits en caractères irlandais, écossais et anglo-saxons : ils datent du temps des premiers fondateurs de son établissement, qui étaient originaires d'Irlande. On en voit aussi en ancienne langue allemande du 9° siècle. Celle de Zurich possède les ouvrages de son pasteur Zuingle, les Psaumes en grec. écrits sur vélin violet, avec les lettres en argent et les initiales en or, le manuscrit original de Quintilien, sur lequel fut faite la première édition des œuvres de ce célèbre rhéteur, et un grand nombre de lettres de l'infortunée Jeanne Gray au savant Bullinger.

En Espagne il existe de nombreux manuscrits dans la bibliothèque de l'Escurial. On y distingue les évangiles sur vélin, en lettres d'or, un long rouleau en parchemin, con

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tenant les œuvres de saint Basile en grec; une foule de manuscrits arabes, et particulièrement l'original du Traité de saint Augustin sur le baptême, pris dans la bibliothèque de MuleyCydam, roi de Fez et de Maroc. Les bibliothèques du Portugal renferment quelques manuscrits, dont les plus précieux sont relatifs à l'histoire naturelle des Indes et à celle du pays.

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L'Angleterre, dont l'ambition littéraire est un peu plus noble, mais n'est pas moins vaste que l'ambition politique, a mis à contribution tout l'univers pour enrichir ses bibliothèques de nombreux manuscrits. Son Musée britannique de Londres offre le Codex Alexandrinus, monument calligraphique que l'on croit du 4° siècle, écrit en lettres majuscules grecques. On y voit aussi l'original de la grande charte que l'on a placé sous verre, et un grand nombre de lettres autographes des rois d'Angleterre, réunies en un volume in-fol. La bibliothèque d'Oxford est depuis long-temps célèbre par le grand nombre de manuscrits qu'elle renferme. Celle de Buckingham a acquis depuis peu d'années un manuscrit in-fol. composé par les anciens sophis de Perse, couvert d'une étoffe d'or, et qui a coûté 1500 livres sterlings, c'est-à-dire plus de 30,000 francs de notre monnaie. La célèbre bibliothèque Cotonienne, malgré l'incendie qui devora, en 1731, la plupart de ses manuscrits, en contient encore de très-précieux, et entre autres l'Harmonia evangelica, manuscrit remarquable par sa beauté, et sur lequel l'ancien roi Athelstan ordonna que ses successeurs prêteraient serment à leur avénement au trône. C'est un recueil d'évangiles dont les premiers feuillets de chacun sont écrits en lettres d'or capitales, et ceux de saint Matthieu teints en pourpre. Cette bibliothèque possède encore les livres de la Genèse, écrits en beaux caractères grecs majuscules, et les actes des apôtres en majuscules grecques. La bibliothèque particulière du roi d'Angleterre a également des manuscrits très-précieux. On y voit une très-belle copie grecque de la version des Septante, écrite par une femme nommée Thécla.

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L'Allemagne est aussi une contrée de l'Europe riche en manuscrits. La bibliothèque impériale de Vienne en contient douze mille. On y voit un calendrier mexicain avec figures; un Tite-Live du cinquième siècle; un petit alcoran, sur vélin, pris à un Turc par le prince Eugène ; le premier livre de Moïse sur parchemin pourpre, avec des majuscules en or; les Evangiles de saint Marc et de saint Luc, en lettres d'or et d'argent; les livres de la Genèse, écrits en beaux caractères grecs majuscules dans le 4° siècle et ornés de miniatures; un Dioscoride grec, avec les figures peintes des animaux et des plantes ; un psautier en lettres d'or, écrit par un Franc nommé Dagulf, offert par Charlemagne au pape Andrien Ier en 772, etc. A Francfort sur le Mein la bibliothèque de la collégiale de Saint-Barthélémy possède un receuil d'homélies, parfaitement écrites sur parchemin, par la pécheresse Guda, qui a mis son portrait dans l'une des lettres capitales, avec cette inscription: Guda peccatrix mulier scripsit et pinxit. Celle de Fulde offre un manuscrit des quatre évangélistes, écrit par saint Boniface, avec les portraits des évangélistes. La bibliothèque de Dresde compte cinq mille manuscrits, dans lesquels on distingue le liber de re militari, sur vélin, orné de belles miniatures, et donné par Mathias Corvin, roi de Hongrie. Il existe dans celle de Leipsick un calendrier en caractères runiques et le Monotessáron, c'est-à-dire, la concordance des quatre évangiles, composée par ordre de Louis, fils de Charlemagne, et qui a été en la possession de Luther. Celle de Wolfenbutel renferme deux mille manuscrits hébraïques, grecs et latins. Dans la bibliothèque de Buttner, à lena, on voit un beau manuscrit persan du Jardin des Roses, et un recueil de poésies turques, sur papier de plusieurs couleurs, trouvés l'un et l'autre, lors de la levée du siége de Vienne, en 1683, dans la tente du grand-visir. La collégiale de Quedlinbourg possède deux manuscrits avec lettres d'or, dont l'un a été exécuté par une religieuse dans le 12° siècle. La bibliothèque de Gotha renferme un beau missel avec

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