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pour les savans que pour les gens du monde, les amateurs des livres et les libraires que nous avons écrit.

Notre travail se compose de deux parties distinctes; la première est un Essai sur la bibliographie, dans lequel nous donnons les notions élémentaires qui doivent entrer dans la sphère de cet art; la seconde, et la principale, contient un Dictionnaire bibliographique, dans lequel les livres tant anciens que modernes sont indiqués avec leur prix, et des notes sur les principales éditions qui en ont été faites, ainsi que sur le mérite littéraire de la plupart. Nous avons adopté pour l'indication des prix des livres anciens un terme moyen, ou désigné ceux des ventes les plus célèbres qui se sont faites dans les derniers temps, et pour les livres nouveaux, les prix de libraire, lesquels ne se maintiennent pas long-temps lorsque l'ouvrage n'a pas de succès. Nous ferons remarquer que la désignation du prix des grandes ventes ne doit pas être tout-à-fait la boussole de l'amateur ou du libraire, parce que dans ces sortes. de ventes la belle condition des livres, la réputation de la bibliothèque à laquelle ils ont appartenu, la grande concurrence des amateurs occasionent souvent un surenchérissement qui n'a pas lieu dans les ventes ordinaires. Aussi avons-nous, autant que possible, mentionné pour un livre le prix de plusieurs ventes.

Si on nous reprochait d'avoir omis beaucoup d'ouvrages dans notre Dictionnaire, nous répondrions que, si nous avions voulu mentionner tous les livres qui surchargent la littérature, il nous aurait fallu une infinité de volumes; nous craignons même d'en avoir trop indiqués, surtout parmi ceux récemment publiés; car de tous les livres qui paraissent journellement, combien peu sont destinés à surnager sur le fleuve de l'oubli; combien est petit le nombre des bons ouvrages en comparaison des mauvais ! En général nous nous sommes attachés à désigner les plus importans, et nous ne nous sommes pas bornés seulement à apprécier

les livres rares; précieux ou de luxe; mais nous avons indiqué surtout ceux d'une utilité usuelle. Comme les ouvrages philosophiques et de haute politique sont aujourd'hui très-recherchés, nous avons mentionné avec un soin particulier ces sortes d'ouvrages, autrefois oubliés ou négligés par les bibliographes. Enfin nous avons tâché de renfermer dans un cadre étroit le plus de matières qu'il nous a été possible, et sous ce rapport nous osons espérer que notre travail remplira le but d'utilité que nous nous sommes proposé. Nous serons trop heureux s'il peut être profitable aux bibliophiles et aux libraires, auxquels il est destiné, et aider à propager le goût des livres, cette noble passion qui n'a jamais été plus commune qu'à l'époque actuelle, et qui prouve le haut degré de civilisation auquel nous sommes parvenus.

Nous croirions manquer à la reconnaissance si nous négligions de donner un témoignage public de notre gratitude aux personnes qui ont bien voulu nous être utiles dans la confection de notre ouvrage. Et parmi ces personnes auxquelles nous avons des obligations spéciales, nous nous empresserons de nommer le vénérable Nestor des bibliographes français, M. le chevalier Van-Praet, ce digne conservateur de la bibliothèque du Roi, qui en fait les honneurs avec tant de distinction, et dont on citera toujours avec éloge le zèle officieux pour les gens de lettres. Ce savant estimable s'est constamment empressé de nous obliger quand nous avons eu recours à lui. Nous n'avons pas moins d'obligations aussi au célèbre bibliographe M. Barbier, qui nous a toujours montré beaucoup de bienveillance en nous aidant de ses lumières et de ses conseils. Son Dictionnaire des anonymes et pseudonymes nous a été d'une trèsgrande utilité.

Des circonstances indépendantes de notre volonté ayant retardé de quelques mois la publication de notre ouvrage, nous avons cru devoir donner un supplément, concernant

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principalement les ouvrages qui ont paru dans cet intervalle. Comme il s'est glissé quelques fautes d'impression, nous avons eu soin de relever les plus essentielles, et nous prions très-instamment nos lecteurs de consulter l'Errata placé à la fin du Dictionnaire, sous le titre de Corrections et additions.

ESSAI ÉLÉMENTAIRE

SUR

LA BIBLIOGRAPHIE.

CHAPITRE PREMIER.

Definition de la Bibliographie, et des différentes connaissances qu'elle exige.

L'ETYMOLOGIE du mot Bibliographie vient du grec; il signifie description des livres. Or, pour faire cette description, il faut bien les connaître, et sous le rapport de leur mérite extrinsèque, et sous le rapport de leur mérite intrinsèque. Le mérite extrinsèque d'un livre s'estime d'après la beauté de son impression, celle de sa conservation et de sa reliure, la bonté ou l'ancienneté de son édition, etc. Le mérite intrinsèque consiste dans la bonté des choses qu'il renferme.

Certes il n'est pas de science qui embrasse plus d'objets que la bibliographie, et la masse des connaissances qui doivent entrer dans la sphère d'un bibliographe instruit est vraiment immense et ne peut être le partage que d'un petit nombre d'êtres privilégiés. D'abord celui qui veut s'élancer dans cette carrière, et la parcourir avec gloire, doit s'appliquer à l'étude des principales langues anciennes et modernes. Car on trouve des livres à peu près dans toutes les langues connues; et comment un bibliographe pourrait-il décrire ces livres s'il ignore la langue dans laquelle ils sont écrits. Toutefois il n'est pas nécessaire qu'il sache parler toutes ces langues; ce serait exiger une chose trop difficile, pour ne pas dire im

possible; il suffit seulement que parmi les langues anciennes, il ait une notion raisonnable du grec et du latin, et, parmi les langues vivantes, du français, de l'anglais, de l'allemand, de l'espagnol et de l'italien. Quant aux langues orientales et à certains idiômes du Nord, s'il n'est pas indispensable de les posséder, il est du moins essentiel d'en savoir assez pour traduire les titres des ouvrages écrits en ces différentes langues.

Après l'étude des langues celle de la géographie et de l'histoire est indispensable à un bibliographe; car celui qui n'aurait aucune connaissance géographique ne pourrait pas fixer le rang que doit occuper l'histoire topographique des différens pays; il ne pourrait pas faire un classement régulier de la multitude des voyages qui existent. Et s'il ne connaissait pas la chronologie et l'histoire, il ne pourrait pas placer non plus les livres historiques dans leur ordre chronologique. Cet ordre chronologique s'entend non de l'époque de l'impression d'un livre, mais de l'ordre des événemens qui y sont relatés. Ainsi dans l'histoire de France on place au 16° siècle, depuis le commencement du règne de Henri III jusqu'à la reddition de Paris sous Henri IV, les, innombrables pamphlets qui ont paru sur la ligue; et on place au 17° siècle, au commencement du règne de Louis XIV, sous la régence d'Anne d'Autriche, les Mazarinades, c'est-à-dire le recueil des nombreux écrits qui ont paru pour et contre le cardinal Mazarin. C'est en étudiant les annales des peuples qu'un bibliographe pourra aussi distinguer les différentes espèces d'histoires sacrées et profanes et les classer dans leur ordre naturel.

Un bibliographe doit avoir au moins des notions superficielles de théologie, des sciences morale et politique, de belles-lettres d'archéologie, etc., afin d'éviter la confusion dans le classement des livres qui traitent de ces diverses matières, et pour avoir aussi une idée de la valeur intrinsèque de ces sortes de livres. Mais pour bien connaître cette valeur intrinsèque, pour avoir une connaissance approfondie du

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