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LA publication de la première année de l'Annuaire de la Librairie, que l'on avoit annoncé devoir paroître beaucoup plutôt, a été différée jusqu'à la fin de l'an X. La cause de ce délai a tenu en partie à la nature de l'ouvrage même, qui, comme l'on pourra s'en convaincre au premier coup-d'œil, est disposé de manière à demander beaucoup de temps et une continuation de recherches pénibles, et sans lesquelles ce travail ne répondroit qu'imparfaitement au but

que l'on se propose : un autre motif de ce délai, et qui m'est personnel, c'est la constante activité que je me suis efforcé d'apporter, afin de donner à ce premier essai le degré de perfection que le Public est en droit d'attendre d'une telle entreprise. Ce délai a été occasionné enfin par ma position individuelle, qui ne m'a permis jusqu'à présent de consacrer à ce travail que les heures de loisir que me laisse le de mes occupations journalières.

genre

Je conçus la première idée de cet Annuaire au mois de Prairial de l'an IX; elle me parut assez intéressante, sous tous les rapports, pour pou

voir fixer l'attention du corps des Libraires de Paris. Je fis donc connoître mon projet par une Annonce, qui fut imprimée et distribuée à ces mêmes Libraires, et dont je me permets de rapporter ici une seconde fois la substance. Quoique la suite de cette Annonce n'eût pas répondu à mon attente, et que mon travail, par cela même, n'en fût devenu que plus pénible, j'ai cessé d'en être moins étonné, en pensant que, peut-être, j'avois dit trop peu de choses de mon entreprise pour donner une idée asscz claire du mode d'exécution que j'avois que j'avois adopté. D'après cela, si ce premier essai ne contient presque que la partie bibliographique de l'Annuaire que j'ai promis, on ne peut s'en prendre qu'au défaut d'autres matériaux que j'espérois recevoir, et que je ne puis me procurer d'une manière sûre et positive que par l'entremise immédiate des Libraires.

Conformément à l'Annonce, je n'avois promis, au lieu d'un Répertoire systématique de la littérature française de l'an IX, tel qu'il se trouve ici, qu'un Catalogue alphabétique des productions littéraires de cet espace de temps; mais en y réfléchissant plus mûrement, j'ai trouvé que la publication d'un Catalogue, disposé simplement par ordre alphabétique, ne seroit qu'un travail superficiel et de peu de mérite, qui pourroit bien, en quelque façon, être utile aux Libraires, mais

qui ne satisferoit nullement aux besoins de la littérature. Ces considérations m'ont donc déterminé à disposer d'une manière systématique la littérature de l'an IX.

Mon projet étoit d'abord d'employer, pour le classement des articles, celui des systèmes bibliographiques les plus usités en France; mais en examinant et en comparant les différens systèmes de cette espèce dont je pouvois avoir connoissance, je n'en ai pas trouvé un seul qui répondît parfaitement à mes vues. Je l'avoue franchement: c'est en vain que j'ai cherché dans la plupart un plan sagement raisonné ; j'ai trouvé au contraire dans plusieurs, après les recherches les plus exactes, que les Auteurs avoient perdu de vue plus d'une fois le principe qu'ils s'étoient proposé de suivre pour l'exécution de leur système, et que l'on y rencontre par conséquent des divisions qui permettent un autre plan de division que celui sur lequel le système doit être établi. J'ai remarqué en outre que plusieurs classes qui, d'après leur nature, devroient rester séparées, avoient été fondues en une seule ; et qu'au contraire, des divisions principales d'une seule classe, on en a formé des classes particulières. J'ai vu enfin que les divisions principales avec les sous-divisions et leurs parties, auxquelles chaque classe se rapporte, en analysant l'idée d'où elles sont émanées les unes

et les autres, et d'après laquelle elles doivent aussi nécessairement se disposer; j'ai vu, dis-je, que ces divisions ne présentoient pas toujours la clarté nécessaire et l'ordre des idées. Ce sont cependant des points essentiels ; et ce manque d'ordre et de clarté n'est jamais plus sensible et plus choquant que dans un système que l'on établit, et qui exige absolument, pour se soutenir, que chaque idée secondaire dérive naturellement de l'idée principale qui l'a formée, et puisse également se réduire sur cette idée première, sans jamais heurter des idées secondaires qui pourroient être communes à plusieurs idées principales, ou que l'on pourroit y rapporter par suite de leur analogie.

Il ne me seroit pas difficile de prouver rigoureusement ce que je viens de dire ici en général des défauts de la plupart des systèmes bibliographiques usités en France, si je ne craignois que cette discussion ne m'entraînât au-delà des bornes d'une simple Préface je me contenterai donc de remarquer que, vu l'augmentation des productions littéraires de tous les pays cultivés, augmentation énorme et qui s'étend presque d'une manière progressive, il devient chaque jour d'une nécessité indispensable de s'entendre au sujet d'un seul système bibliographique qui, calculé d'après la littérature de tous les pays plutôt que sur le besoin de la littérature de telle ou telle nation,

ainsi que cela est toujours arrivé jusqu'ici, puisse être adopté aussi universellement, et servir de fondement à tous les ouvrages bibliographiques disposés systématiquement, de quelque espèce qu'ils soient. Un tel système, d'après l'état actuel de la littérature, dont l'ensemble n'offre sans cela qu'un chaos informe, est certainement aussi nécessaire au Bibliographe, au Littérateur et à tout autre Savant, pour le guider dans ce labyrinthe, que le système des plantes de Linnée, pour me servir d'une comparaison, est devenu nécessaire au Botaniste pour faciliter ses progrès dans l'étude de cette science; car, sans un pareil secours pour la mémoire, et tel que peut seulement nous l'offrir un système connu et adopté universellement dans les ouvrages bibliographiques, il seroit dorénavant de toute impossibilité d'entretenir une connoissance habituelle de ce que la littérature actuelle de différentes nations a produit de mieux, et d'y recourir en cas de besoin.

Dans ces circonstances, nous devons donc singulièrement nous féliciter de ce que les Allemands, qui ont déja rendu des services si étendus à la littérature, en aient encore récemment rendu un nouveau par la solution du problème d'un système bibliographique qui puisse être généralement adopté. Cette raison me donne lieu de croire que

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