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neüil, lors qu'ils entrérent dans cette Abbaye. Il Y a cû un fecond Factum qui eft la fuite de celuici. Mais il n'a point été imprimé : fi on le peut déterrer, on ne manquera pas de le publier.

CHAPITRE II.

Quelle eft cette Terre de Siriade, où l'on voyoit encore du tems de Jofeph, comme cet Hiftorien l'affûre, la fameuse Colomne de Seth qui n'avoit point été endommagée par le Déluge. Ces Colomnes ont plus l'air d'une fable inventée par les Juifs ou par les Egyptiens, que d'une veritable Hiftoire. Ce Difcours & les deux autres qui fuivent ont été trouvez parmi les papiers de Monfieur Bigot de Rouen.

A queftion qu'on agite touchant cette Terre de Siriade, ou Jofeph témoigne qu'on voyoit encore de fon tems la fameufe Colomine des Enfans de Seth, eft plus curieufe, qu'elle n'eft utile pour l'intelligence de l'Ecriture. Comme il n'en est point fait mention dans les Livres facrez, bien des gens regardent ces prétendues Colomnes comme des fictions & des contes faits à plaifir. Commentum, dit Goropius*, fed tale tamen, ut nemo fudæorum mihi per

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Gorop. Hierogliph. 1.1. p.11..

fuafurus fit. Elles ne paroiffent pas moins fabuleufes à Augustin Mascard que les Colomnes d'Hercule: Forfe non fono men favolofe le Colonne di Giuseppe, che quelle

d'Alcide.

Il eft vrai qu'Euftathe ancien Ecrivain Ecclefiaftique parle b de la prétendue Colomne de Seth, comme s'il l'avoit vûë, lors qu'il dit, que de fon tems elle étoit encore dreffée dans la Terre de Siriade. Mais fans qu'il foit neceffaire d'examiner prefentement, qui eft l'Auteur du Livre attribué à Euftathe Evêque d'Antioche, cet Ecrivain n'a fait autre chofe, que copier les paroles de Jofeph. Je remarquerai qu'il a lû dans cet Hiftorien la Terre de Seiriad, Engiad,& non pas Σvgiáda, Syriada, comme il y a dans les éditions, communes de Jofeph. On lit dans la nouvelle édition d'Angleterre Egiada, & conformément à cette leçon dans la verfion barbare d'Epiphane qui y eft jointe, in terra Siriada. Le fçavant Monfieur Bernard a mis auffi dans fa note, in Siriade tellure, & il accuse Gelenius & les autres Traducteurs de Jofeph, de s'être fort éloignez de la verité dans leurs Verfions de cet Hiftorien.

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Mais de quelque maniere qu'on life cet a Mafc. trat.1. dell' arte hift. p.12. Euftach in hexam. p.47.

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endroit de Jofeph, il fera toûjours trèsdifficile de trouver cette Terre de Siriade, dont on ne voit rien dans l'Onomafticon, ou Dictionnaire Grec des Livres de la Terre fainte, publié en Grec par Eufebe, ni dans la Traduction Latine que Saint Jerôme en a faite avec plufieurs additions. Le Jesuite Bonfrerius, qui a donné le premier au public cet Ouvrage en Grec fur un Manufcrit peu correct de la Bibliotheque du Roi, avec un docte fupplément de fa façon, marque un lieu nommé Seirath, dont il eft parlé dans l'Hiftoire des Juges *, où on lit qu'Aod tua Eglon Roi des Moabites, & qu'ayant paffé les Pefilim, comme il y a dans le texte Hebreu, il fe fauva à Seirath. Les Septante ont tourné le mot Hebreu par à avel, qui fignifie τὰ γλυπτά, felon Ifaac Voffius la Colomne de pierre que les Juifs attribuoient à Seth. Si cette interprétation du mot Grec ral, que Marsham femble approuver, étoit certaine, il y auroit quelque apparence, que les Juifs Hellenistes auroient fabriqué leurs Colomnes de Seth fur ce paffage, fans qu'il fut neceffaire de dire, qu'elles fubfiftoient avant la Verfion des Septante. Mais il me paroit plus vrai-semblable, que ces anciens Interpretes Grecs n'ont enten* Judic. c.3. v.26.

da autre chose par à yaʊalà que des Idoγλυπλὰ les, ou comme il y a dans la Verfion de Saint Jerôme, le lieu où les Idoles étoient placées, locum Idolorum: car c'eft le fens que ces Interpretes donnent en d'autres endroits au mot Hebreu Pefilim, que l'Auteur de la Verhon Syriaque a confervé entier fans le traduire, auffi bien que l'Arabe qui a été fait fur le Syriaque. On lit fort impertinemment dans l'Exemplaire Arabe, fort impertinemment dans les deux Bibles polyglottes Phaleftin, & dans la traduction Latine de Gabriel Sionite Palaftinam. Il eft furprenant que les Anglois qui ont fait réimprimer la Bible Polyglotte de Monfieur le Jay, n'ayent corrigé ces fortes: d'erreurs qui y font très-frequentes.

de

Pour revenir aux Colomnes de Seth,. comme il paroit plus de fubtilité, que folidité dans la reflexion d'Ifaac Voffius, il faut en chercher l'origine ailleurs. Ne fe pourroit-il point faire, que les Juifs auroient fabriqué ces Colomnes fur celles. des Egyptiens, defquelles il eft parlé dans un Livre de Manethon intitulé, de l'Interpretation des Livres facrez de Mercure fecond? Si nous en croyons cet Auteur Egyptien, qui a écrit en Grec, Mercure II. avoit tiré fes Livres des Infcriptions que Mercure I. avoit écrites en la langue

facrée de fon pays, & qui étoient placées dans la Terre de Siriade. Voilà une Terre de Siriade chez les Egyptiens auffi bien que chez les Juifs: mais il n'eft pas facile de la trouver. Jofeph Scaliger a dans fes notes fur la Chronique d'Eufebe ne s'infcrit point en faux contre cette Terre de Siriade en Egypte mais il avoue de bonne foi, qu'elle lui eft inconnue, que nobis ignota eft, dit-il, querant ftudiofi.

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Les anciens Geographes & entre autres Eftienne parlent à la verité d'un Fleuve nommé Siris dans la Lybie: mais ils ne marquent aucune Ville de ce nom. Denis & Euftathe font auffi mention du Fleuve Siris, qu'on croit être le Nil, qui est ainsi appellé par les Ethiopiens, & qui eft le Sihor des Hebreux. Mais ils ne difent pas un mot de cette Terre Siriadique de Manethon. Monfieur Huet Evêque d'Avranches, qui trouve b dans l'Ethiopie une Nation appellée Sérés & le Fleuve Ser qui fait une Ifle nommée Serie dans la Mer rouge, & de plus une Ville nommée Serés dans le voifinage d'Egypte, ne peut croire, que Seth ou fes Enfans ayent penetré jufque dans l'Ethiopie, parce qu'il n'est pas croyable, qu'aucun des premiers Hom

a Scalig. not.. in Chr. Eufeb. p.408. b D. Huet ·Dem. evang. prop.4. 1.2..n.14. p.48. art.1.

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