Page images
PDF
EPUB

Diletta Nutrix, infanam te Dii fecerunt,
Faydit, ton Livre eft mal fenfé.

Les Dieux t'on fait naître infenfé.

Dixi.

CHAPITRE

XLL

Remarques critiques fur le Libelle de Mr. Faydit contre le P. Mallebranche, Impof tures & calomnies de cet Ecrivain dans

fon Livre intitulé, Remarques fur Virgile & fur Homere &c. Sa doctrine eft impie & Mahometane, fur ce qui regarde les volonter particulieres de Dieu. Reflexions fur l'ancienne Philofophie des Caldéens, qui a paffé aux autres Nations, & qui a été renouvellée par Spinofa. Sentiment des anciens Philofophes fur la Spiritualité. Ce difcours vient d'un P. de l'Oratoire de Paris, qui eft ami du Pere Mallebranche. Bonus non læditur malis fermonibus.

Lefficace et pure, felon Mr. Faydic A Theologie de Virgile fur la grace eft fi pure,

qu'on y trouve tout le Systême de Saint Au guftin.,, Ce qui releve infiniment, dit-il*, la Theologie de Virgile au deffus de plu fieurs Theologiens de nôtre fiécle, & au * Remarq. p.9.9.

moins au deffus des Arminiens, des Sociniens, des Pelagiens, & des Spinofistes, c'eft qu'en mille endroits il reconnoit, >> que Dieu agit fur les coeurs avec une puiffance & efficace abfoluë.

Cela veut dire pour parler nettement que ceux qui ne reconnoiffent point le fatum ou destin des Payens avec Virgile, font tous Arminiens, Sociniens, Pelagiens, & Spinofiftes. Car cette puiffance & efficacité abfoluë que Mr. Faydit donne à Dieu lorfqu'il agit fur les coeurs, ne differe point du fatum reconnu par les Payens. Cet hom me prétend trouver dans Virgile & dans Homere tout le Syftême de Saint Auguf tin fur la grace; mais difons plûtôt le Syf tême des anciens Gnoftiques & des Manichéens, & celui de Mahometans. Le Pere Mallebranche felon lui eft un Spinosiste impie, qui ruine dans fes ouvrages la Providence de Dieu; au lieu que felon la Theologie de Virgile, rien ne fe fait fans un ordre exprès de Dieu, & fans une Providence fpeciale & une volonté particulie re: Non fine confilie & manifefto mumine Divam. Mais cette doctrine impie qu'il at tribue à Virgile & à Saint Auguftin, a été combatuë les Saints Peres dès les premiers commencemens du Chriftianifme, contre d'anciens Heretiques appellez Gnof

par

tiques, qui avoient plûtôt tiré d'Hefiode leurs erreurs, que de l'Ecriture fainte.

Mr. Faydit a fi grande peur, qu'on n'entende pas affez cette volonté particuliere & immediate de Dieu, qui eft felon lui dans Virgile , que fans s'en appercevoir tout fon difcours tend à l'impieté & à un blafpheme évident contre la bonté & la fagette de Dieu. Tout fon deffein est de faire voir, que Virgile eft meilleur Philofophe & meilleur Théologien que le Pere Mallebranche & les Sociniens, qui croyent que Dieu comme Agent univerfel, agit par des voyes fimples & uniformes, & ne veulent point entendre parler de ses volontez particulieres. Voici la preuve qu'il produit tirée de Virgile, pour mettre dans une plus grande évidence cette volonté particulière, Horrefco referens :

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

Vous êtes toute puiffante, ô Junon!

dit une Furie à cette Déeffe *, vous n'a» vez qu'à parler. Voulez-vous que j'infpire au Roi Latinus & à fes fujets de l'horreur pour les Troïens? Je vas remremplir de fureur & de haine tous les peuples de fes Etats: je vas auffi altúmer dans leur cœur l'amour de la guerre. Voulez-vous au contraire, que je leur inspire des fentimens de paix & d'amour * Rem. p.92.

כל

[ocr errors]

,, les uns envers les autres ? je le ferai : car » il vous eft aifé, grande Déeffe, & à moi. auffi vôtre moyen, par de tourner les cœurs comme nous voulons, & de leur. faire prendre le penchant qu'il nous plait.

ככ

[ocr errors]

Les Pelagiens ont autrefois eû la hardieffe de reprocher à Saint Auguftin, que fon Systême fur la Prédestination & fur la Grace, faifoit revivre la doctrine des Manichéens. Nôtre Auteur qui fait profeffion d'être Augustinien, fait ici le parallele de ce Pere & de Virgile. Il compare par une impieté fans exemple, la volonté efficace de Dieu avec les actions d'une Furie infernale. Il ofe representer une Furie fortie de l'abîme comme executrice des volontez particulieres & abfoluës.

[ocr errors]

כי

Il prétend appuyer cette penfée fur la conformité qui eft là-deffus entre Homere & les Ecrivains facrez. Une fi grande con» formité de sentimens, dit-il, entre le plus grand & le plus fçavant des Poëtes Grecs d'une & les Ecrivains canoniques part, de la Sainte Ecriture de l'autre, eft un 5 grand préjugé qu'Homere avoit eû quel5 que connoiffance de la doctrine & des Ouvrages de ces derniers, ou que tout au moins il reftoit parmi les Grecs des veftiges de l'ancienne tradition venue

[ocr errors]
[ocr errors]

وو

[ocr errors]
[ocr errors]

des anciens Patriarches & Prophetes du » Peuple de Dieu. Il eft certain au moins, », que ce Poëte a vécu long-tems après. ,, Moyfe, Job, & David, qui font les Ecri», vains facrez les plus formels fur la doctrine des volontez particulieres de Dieu.

[ocr errors]

Un Chrêtien peut-il foutenir, que ces. volontez particulieres & abfoluës, qui font le fatum des Poëtes & de quelques Philofophes Payens,ont leur fondement dans les Livres canoniques de l'Ecriture? Homere a-t'il pris de Moyfe, ou de quelque autre Ecrivain canonique cette chaîne fatale qui le Dieu & les hommes, le ciel & la terre trouve-t'on dans l'Ecriture, que les volontez particulieres de Dieu ne font autre chofe que la Nature, & un enchaînement de tous les êtres ? Cette Philofophie Payenne eft à la verité très ancienne, & je crois mê me avant Moyfe: il me femble qu'elle vient originairement des Caldéens: ces influen ces ou découlemens appellez par le Grecs. arijji emanans inceffamment des corps. celeftes felon cette ancienne Philofophie, s'infinüient dans toutes les parties de l'Univers. Les anciens appelloient apjoms cet. efprit celefte qui rempliffoit felon eux touLes choses.

C'eft de cette ancienne Philofophie qui des Caldéens a paffé aux Grecs, & de ceux

« PreviousContinue »