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Nouvelles et communications.

ARRIVÉE DES CAPITAINES SPEKE ET GRANT A KHARTOUM, LEURS DÉCOUVERTES, LEUR RETOUR A LONdres.

Les capitaines Speke et Grant, dont les dernières nouvelles reçues en Angleterre étaient datées de Bagweh (1), 30 septembre 1861, sont heureusement arrivés à Khartoum. En quittant Kazéh, ils ont successivement visité les royaumes de Karagwé, d'Uganda, d'Ungoro, où ils ont trouvé une certaine civilisation indigène relative, et qui sont situés à l'ouest et au nordouest du lac N'yanza. Le capitaine Speke, dont la route contourne la rive occidentale de N'yanza, a pu s'assurer que l'extrémité septentrionale de ce lac coïncidait presque avec l'Équateur; son étendue n'est pas moindre de 150 milles anglais en longueur et en largeur; mais il ne paraît pas avoir une grande profondeur. De ce lac s'échappe au nord un grand cours d'eau que d'autres petits bras, sortis également du lac, viennent grossir. Les voyageurs le suivirent jusqu'au 2° degré au nord de l'Équateur, alors qu'il faisait un grand détour vers l'ouest. Le laissant fuir dans cette direction, ils continuèrent leur route du sud au nord l'espace de 70 milles; ils retrouvèrent alors un nouveau grand cours d'eau qu'ils reconnurent plus tard être le fleuve

(1) Lieu situé au nord de Kazéh, entre les deux lacs de Tanganyika et de N'yanza, vers le 3o 28' de latitude sud.

Blanc qui passe à Gondokoro. Ils apprirent des indigènes que ce grand cours d'eau n'était autre que celui qui sortait du N'yanza et qu'ils avaient momentané – ment abandonné lors de son changement de direction vers l'ouest. Selon leurs informateurs, la branche sortie du N'yanza, après s'être infléchie vers l'ouest, se jette dans le lac Luta N'zigé par sa rive orientale, pour en ressortir par son extrémité septentrionale; à sa sortie, après un détour vers le nord-est, elle reprend sa direction générale sud-nord jusqu'à Gondokoro.

Le lac Luta N'zigé n'est pas le seul qui, au dire des indigènes, alimenterait, avec le N'yanza, le fleuve Blanc; à l'est de ce dernier, et communiquant avec lui, il y en aurait un autre que l'on croit être le Baringo. De ce nouveau lac s'échapperait une rivière nommée Asaa ou Asua qui viendrait tomber dans le fleuve Blanc en amont de Gondokoro.

Sur sa route, le capitaine Speke a reconnu le tamarinier, terme de l'expédition de Miani en 1860, et sur lequel ce Vénitien avait gravé son nom; il est situé un peu au-dessous du 4 degré de latitude. C'est à l'établissement de Bono, placé vers le 3° degré 30', que les explorateurs anglais ont retrouvé trace des Européens et traitants venus de Khartoum et ayant remonté le fleuve Blanc.

Arrivés le 15 février à Gondokoro, les capitaines Speke et Grant y rencontrèrent M. Baker qui se disposait à partir à leur recherche, et quelques jours après ils étaient rejoints par M. Pétherick que l'on croyait perdu.

Les géographes se féliciteront de cette nouvelle conquête de six degrés en latitude, du sud au nord, sur

l'inconnu, conquête que l'on doit à l'intrépidité et à l'habile persistance des capitaines anglais Speke et Grant. Si l'information relative au détour du fleuve qui sort du lac N'yanza pour aller trouver le lac Luta N'zigé se trouve confirmée, cet heureux voyage aura reculé, jusqu'au delà de l'Équateur, jusqu'au lac N'yanza, la poursuite et la recherche des sources du Nil, en admettant, toutefois, que le fleuve Blanc soit bien la branche mère du fleuve, et, en outre, que le Saubat ne soit pas la branche principale du fleuve Blanc.

Dans l'état actuel de la question on ne peut pas encore dire, comme l'ont imprimé quelques journaux, que les sources du Nil soient découvertes; pas plus qu'on le dirait des sources du Rhône et du Rhin à leur sortie des lacs de Genève et de Constance. Nous ne savons rien de bien précis sur l'origine du Kitangulé, affluent de la rive occidentale du lac N'yanza; il reste à étudier les bassins du Luta N'zigé et du lac Baringo. Ce dernier, par son voisinage des pentes septentrionales et occidentales des massifs du Kénia et du Kilimandjaro, est, à notre avis, digne de la sérieuse attention des géographes et des explorateurs ; il y a déjà longtemps que le missionnaire Krapft l'a signalé à l'attention de tous.

Les capitaines Speke et Grant ont été brillamment reçus à Londres le lundi 22 juin, dans une séance extraordinaire tenue par la Société royale géographique, et les plus chauds applaudissements ont accueilli le rapport du capitaine Speke, auquel l'address de sir Roderick I. Murchison nous avait déjà préparé.

V. A. MALTE-BRUN.

Actes de la Société.

EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES.

Assemblée générale du 1er mai 1863.

PRÉSIDENCE DE M. LE CONTRE-AMIRAL BARON DE LA RONCIÈRE-LE-NOURY,

VICE-PRÉSIDENT.

La séance est ouverte à huit heures du soir.

M. le président transmet à l'assemblée les regrets de M. le comte de Persigny, ministre de l'intérieur, de n'avoir pu présider lui-même la réunion. Il présente ensuite, au nom et par mandat exprès de Son Excellence, les considérations qui pourraient justifier, dans la constitution de la Société, une réforme ayant pour objet de remplacer la présidence annuelle par une présidence à vie. Cette réforme, pense M. le ministre, en substituant un dévouement persévérant à un concours passager, produirait les meilleurs résultats sur les travaux de la Société et sur le développement de ses relations. M. le président s'associe pour son propre compte à cette opinion dont il a dû se faire l'interprète.

M. Vivien de Saint-Martin, vice-président de la Commission centrale, fait son rapport sur le grand prix destiné annuellement à la découverte la plus importante en géographie : il s'agit cette fois du prix de l'année 1860. M. le rapporteur, après avoir énuméré et apprécié les titres des divers voyageurs, fait con

naître que le suffrage de ses collègues s'est arrêté sur M. Henry Duveyrier, pour son exploration du Sahara, dans le pays des Touareg, pendant les années 1859, 1860 et 1861, en réservant toutefois l'attribution officielle jusqu'à la publication des observations du jeune, savant et courageux voyageur, dont une grave maladie a interrompu, pendant quelque temps, les travaux de rédaction, à son retour d'Afrique.

M. de la Roquette, président honoraire de la Société, a lu une notice sur John Brown, où sont retracés, avec une précision fidèle, les principaux événements d'une existence si utilement remplie au profit de la géographie.

M. C. Maunoir, a donné lecture d'une notice détaillée sur la Nouvelle-Zélande, les travaux des colons, leurs rapports avec les indigènes.

M. Jules Duval, secrétaire de la Société, a lu un mémoire sur les rapports de la géographie avec l'économie politique.

Enfin M. Ant. d'Abbadie a raconté quelques épisodes de son voyage sur la côte arabique et en Abyssinie.

L'Assemblée procède au renouvellement de son bureau pour l'année 1863-1864. Le dépouillement du scrutin donne les résultats suivants :

Président: S. Exc. M. le comte Walewski, ministre d'État. Vice-présidents: M. le vicomte Fleuriot de Langle, contre-amiral; M. Reinaud, membre de l'Institut. Scrutateurs: M. de Pongerville, membre de l'Institut. M. Sédillot, secrétaire du Collège de France. Secrétaire M. Édouard Charton.

La séance est levée à onze heures.

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