Page images
PDF
EPUB
[graphic][merged small][merged small][merged small][merged small]

DE LA

SOCIÉTÉ DE GÉOGRAPHIE.

FÉVRIER 1863.

Mémoires, Notices, etc.

NOTICE

SUR LA VIE ET LES TRAVAUX DE M. JOMARD,

LUE LE 19 DÉCEMBRE A LA DEUXIÈME ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

DE LA SOCIÉTÉ DE GÉOGRAPHIE de 1862,

PAR M. DE LA ROQUETTE,

Vice-Président de la Commission centrale.

Messieurs,

Votre Commission centrale a cru devoir me confier la tâche honorable de payer, au nom de la Société de géographie, un dernier hommage à la mémoire de notre vénérable et regretté confrère M. Jomard.

Je vous remercie, Messieurs, de ce choix; je comprends la pensée qui l'a dicté; vous vous êtes souvenus que je suis aujourd'hui, depuis la mort de l'homme éminent qui laisse un si grand vide dans nos rangs, votre doyen et le seul survivant, toujours fidèle, de vos membres fondateurs.

V. FÉVRIER. 1.

6

Edme-François Jomard, ancien ingénieur géographe, ancien membre de la commission d'Égypte, l'un des fondateurs de l'Enseignement Mutuel en France, de la Société pour l'Instruction élémentaire et l'organisateur de la première école modèle, membre de la Société d'Encouragement pour l'industrie nationale, de la Commission des Antiquaires de France, de la Société d' Acclimatation, de la Société d'Ethnographie, etc., de l'Académie des Inscriptions et belles-lettres, directeur de la mission égyptienne en France, etc., etc., Conservateur du Département des cartes et documents géographiques à la Bibliothèque Impériale, appartenant à presque toutes les Sociétés géographiques et Académies des deux mondes, était président honoraire de notre Société qui le comptait au nombre de ses principaux membres fondateurs; il était aussi bey d'Égypte et commandeur de la Légion d'honneur.

Quatorzième enfant d'un négociant de Lyon, qui s'était établi à Versailles pour y faire le commerce des soieries, et qui vint mourir à Paris dans sa soixante-dixhuitième année, Jomard naquit dans la seconde de ces villes le 17 novembre 1777. Entré dès l'âge de huit ans au collège de Versailles, il ne tarda pas à s'y faire distinguer par son application, par une intelligence précoce et par des succès multipliés. Au mois d'octobre 1789, sa famille étant venue résider à Paris, le jeune lauréat continua au collége Mazarin ses études dans les classes supérieures, quoiqu'il eût à peine douze ans, et figura presque toujours en première ligne parmi ses condisciples. Chose remarquable! on le vit, bien des années après, au lieu même, où il avait obtenu tant

de couronnes d'écolier, recevoir l'insigne honneur de présider les cinq académies de l'Institut.

Les études de Jomard achevées, il s'agissait de lui choisir une carrière à suivre ; c'était l'objet de la sollicitude de sa bonne mère qui ne cessait de parler des qualités de ce fils dont elle était fière. Un jour qu'elle se rendait à Versailles, elle exprima, pendant toute la route, ses inquiétudes sur l'avenir de son cher enfant. Au moment de descendre de voiture, un des voyageurs qu'elle ne connaissait pas, et qui n'avait point parų prendre part à la conversation, lui dit, en lui remettant son adresse : « Eh bien !... madame..., envoyez-moi votre fils demain..., nous verrons....» Jomard s'empresse de se rendre à cette invitation, et M. Perronet, c'était l'inconnu, après l'avoir longtemps interrogé, le fit admettre à l'École des Ponts et Chaussées, où il remplissait les fonctions d'examinateur. Jomard passa trois ans plus tard (1795) à l'École Polytechnique, qui se formait en ce moment, et l'année suivante il entra à l'école d'Application de géographie et du cadastre, dirigée à cette époque par le célèbre Prony. Jomard avait achevé ses cours de logique et de mathématiques avant de quitter le collége Mazarin et s'occupait depuis, dans ses moments de loisir, d'histoire naturelle et de géographie, tout en suivant exactement les cours de l'École des Ponts et Chaussées et même ceux de l'École Polytechnique.

Lorsque en 1798 (an VI) le gouvernement français eut résolu d'envoyer une expédition en Égypte, le général Bonaparte, auquel le commandement en avait été confié, ayant fait décider que l'armée serait accom

pagnée d'une commission composée de l'élite des savants français, de topographes, d'artistes et même de littérateurs, pour explorer et décrire sous tous les aspects l'antique domaine des Pharaons, Jomard, qui n'avait encore que vingt et un ans, fut admis à en faire partie en qualité d'ingénieur géographe. Dès que sa nomination fut connue, il employa tous les instants qui précédèrent son départ à l'étude des auteurs anciens et modernes qui avaient écrit sur ce pays célèbre, et à la lecture des voyageurs qui en avaient donné la description. Peu de jours après avoir mis le pied sur le sol égyptien (1er juillet 1798) (13 messidor an VI), et lorsque Alexandrie fut tombée au pouvoir des Français, le jeune ingénieur concourut au levé du grand plan topographique de cette ville et de ses environs, et à autres travaux de même nature dirigés par le colonel Jacotin. Ce qu'il avait vu et décrit dans la basse et la moyenne Égypte lui donnait l'espoir de faire une plus ample récolte dans la haute, représentée comme renfermant des antiquités bien autrement importantes. Aussi fut-il désagréablement affecté, lorsqu'il apprit que par un ordre du jour du 28 juin 1799 (10 messidor an VII), consigné depuis dans la correspondance du général en chef, le corps des ingénieurs géographes qui appartenait à la Commission des sciences et arts, et qui devait se rendre dans la haute Égypte, afin d'en explorer les monuments, allait être détaché de cette Commission pour faire partie de l'état-major de l'armée. A cette nouvelle, Jomard n'hésite pas un instant; il se rend à l'état-major général dirigé par Alexandre Berthier, et où se trouvait en ce moment Bonaparte.

« PreviousContinue »