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MESSIEURS,

>> Un temps lucide semble préparer une nouvelle » existence à nos travaux. Quels favorables auspi»ces ! quel jour plus marquant aurait-on pu choi» sir pour nous rouvrir le temple des Muses, que » celui de la fête du Grand-Corneille, notre compa»triote? Jour à jamais mémorable où la Cité, » lors de notre rétablissement se réjouit avec >> enthousiasme d'avoir donné à la France ce suc»cesseur des plus grands Poëtes de l'antiquité, mo» dèle inimitable qu'admirent toutes les nations et » qu'aucune n'a égalé.

» C'est avoir investi ma vieillesse du souvenir d'une » jouissance et d'une satisfaction bien douces, que » d'avoir eu l'honneur de présider l'Académie à ɛa glorieuse réinstallation. Il n'y aurait, pour moi, d'égal à cette satisfaction que celle de suivre plus » long-temps les impulsions de mon zèle dans les » fonctions de Directeur de cette savante Compagnie

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dont j'ai toujours reçu des témoignages de senti»ments bien chers à mon cœur. Mais l'extrême dé»licatesse d'une santé vacillante que l'âge infirme » encore, et l'étendue du travail que j'ai entrepris, "ne me permettant pas d'assister, comme je le dé» sirerais, habituellement aux séances de l'Acadé» mie, je suis obligé de l'inviter à faire un choix » plus propre à réactiver cette belle fonction,

dont j'étais honoré lors de l'interruption de nos

» travaux, et qu'à notre renaissance, un nouvéau » choix m'a confiée.

» Ce ne peut être qu'avec un bien grand regret » que je me prive d'un avantage plus conforme à » mon inclination qu'à mes facultés. Je désire vive»ment que mon respectable Collègue, également » nommé provisoirement Secrétaire, veuille bien con»tinuer un exercice de ses talents, qui, si long>> temps, ont fait honneur à notre Académie, å » cette Académie dont les connaissances et les dé»cisions ayant mérité l'hommage de notre ancien » Gouvernement, ne peuvent manquer d'inspirer » une semblable disposition au Gouvernement sage qui s'occupe de restituer ces antiques ressorts que, » durant quatorze siècles, la lime de l'expérience » avait portés à un dégré de perfection qui était » l'objet de l'admiration et de la jalousie des autres » nations.

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» Bien que forcé, Messieurs, de voir céder mon » zèle à mon impuissance, je me reprocherais cependant d'abandonner le poste dont vous m'avez honoré, si, au même titre, je ne continuais pas » de concourir à une nomination de nos membres, déjà si bien accueillie: nomination dont le complément, d'après l'article III de l'arrêté de M. le » Préfet et la lettre du Ministre de l'Intérieur, ap"partient aux anciens membres de l'Académie.

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» Permettez donc, Messieurs, avant que de pro» céder à la formation du bureau, que je propose

» de nous occuper des places de titulaires à remplir, » et de pourvoir aux moyens de connaître le nom »bre des membres que nous aurons à nommer » pour compléter celui des Académiciens-associés »tant regnicoles qu'étrangers.

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= M. Gosseaume ayant succédé à M. l'abbé Lallemant dans la place de Directeur, témoigna ainsi sa reconnaissance à la compagnie :

» Je m'efforcerais vainement d'exprimer ici combien je suis sensible aux témoignages d'estime et de confiance que vous venez de me donner.

» Mon respect profond pour vos décisions seul a pu me faire accepter un fardeau supérieur à mes forces; et si l'espoir de m'investir de vos talents et de vos lumières ne venait balancer ma juste défiance, je n'hésiterais pas à m'éloigner d'une place que d'autres occuperaient plus utilement que moi. Mais avec la certitude de trouver en tout temps chez vous, Messieurs, cette bonté tutélaire, cette cordialité franche, cette communication facile qui vous distinguent, quels dangers aurais-je à redouter? J'opposerai à des problêmes embarrassants vos connaissances profondes, à des questions insolites votre maturité et votre expérience, aux difficultés de tous les genres votre sagesse et votre perspicacité.

» Je ne vois pas, sans un plaisir secret, que la carrière m'ait été ouverte par un littérateur distingué, qui sait, allier aux vertus austères toutes les graces

sociales (a); puissé-je en la quittant ne l'avoir pas déparée aux yeux de mon successeur (b) dont

le goût épuré et les conceptions faciles illustreront toutes les places auxquelles il sera appelé. Quand votre indulgence, Messieurs, me décerne l'honneur de vous présider, le mérite lui assigne la première place; le mien sera d'avoir été son précurseur.

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Que de ressources précieuses ne promettent pas les hommes éclairés que vous avez investis de vos pouvoirs! Ici l'hommage rendu à ses triomphes anciens a réintégré l'ami des beaux arts (c) dans la possession de les faire briller à vos yeux. Là une étude approfondie des secrets de la nature, et l'art de les présenter avec éloquence et précision, font asseoir un de nos nouveaux collègues à la place du savant et modeste d'Ambourney (d).

» Une sage économie appelle toutes les ressources de l'abondance dans les mains du dépositaire que vous avez choisi (e).

» Enfin, si les trésors littéraires que l'Académie a possédés, existent encore pour la plupart, et si elle peut nourrir l'espoir de les recouvrer quelque jour,

(a) M. l'abbé Lallemant.

(b) M. Beugnot.

(c) M. Haillet de Couronne, secrétaire de l'Académie, pour la partie des belles-lettres.

(d) M. Vitalis, secrétaire pour la partie des sciences.

(e) M. Mésaize, trésorier.

chacun désigne avec sensibilité la bienveillance studieuse (f) qui nous les a conservés.

» Recevez l'hommage de ma reconnaissance, dignes promoteurs des beaux arts, qui avez fructueusement travaille à rassembler les membres de notre Société dispersée, et lui avez obtenu la sanction d'un Gouvernement sage et ami de tout ce qui est bon, de tout ce qui est juste.

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Recevez l'hommage de mon admiration, hommes distingués de tous les ordres, qui réunissez ici la physique et la morale, les abstractions mathématiques et les fleurs de l'éloquence et de la poësie; la science de l'administration, de l'agriculture et du commerce; les arts utiles et ceux d'agrément! Par vos soins et par votre influence, l'Académie des sciences, des belles lettres et des arts de Rouen va reprendre ses travaux, étendre ses relations et briller d'une pure lumière. Qu'il est flatteur pour moi Messieurs, de prédire vos succès et de vous montrer les palmes que vous devez cueillir ! Mais je n'oublierai pas que Ja pierre qui aiguise l'acier est impuissante pour couper elle-même, et je placerai toujours, à côté du sentiment de ma faiblesse, la conscience de vos forces, l'honneur qui tient à votre estime, et le souvenir de vos bontés.

(ƒ) M. Gourdin, bibliothécaire,

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