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La fierté annoncée par l'extérieure est tellement un' défaut, que les petits qui louent bassement les grands de ee défaut, sont obligés de l'adoucir, ou plutôt de le relever par une épithète, cette noble fierté. Elle n'est pas simplement la vanité, qui consiste se faire valoir par les petites choses; elle n'est pas la présomption, qui se croit capable des grandes; elle n'est pas le dédain, qui ajoute encore le mépris des autres à l'air de la grande opinion de soi-même; mais elle s'allie intimement avec tous ces défauts.

On s'est servi de ce mot dans les romans et dans les vers, surtout dans les opéras, pour exprimer la sévérité de la pudeur; on y rencontre partout vaine fierté, rigoureuse fierté.

Les poëtes ont eu peut-être plus de raison qu'ils ne pensaient. La fierté d'une femme n'est pas simplement la pudeur sévère, l'amour du devoir, mais le haut prix que son amour-propre met à sa beauté.

On a dit quelquefois, la fierté du pinceau, pour signifier des touches libres et hardies...

FIÈVRE.

Ce n'est pas en qualité de médecin, mais de malade, que je veux dire un mot de la fièvre. Il faut quelquefois parler de ses ennemis: celui-là m'a attaqué pendant plus de vingt ans. Fréron n'a jamais été plus acharné.

Je demande pardon à Sydenham, qui définit la fièvre un effort de la nature qui travaille de tout son pouvoir à chasser la matière peccante. On pourrait définir ainsi la petite-vérole, la rougeole, la diarrhée, les vomissements, les éruptions de la peau et vingt autres maladies. Mais si ce médecin définissait mal, il agissait bien. Il guérissait, parce qu'il avait de l'expérience, et qu'il savait attendre.

Boerhaave, dans ses Aphorismes, dit : « La contradic

» tion plus fréquente, et la résistance augmentée vers les » vaisseaux capillaires, donnent une idée absolue de toute » fièvre aiguë. »

C'est un grand maître qui parle; mais il commence par avouer que la nature de la fièvre est très cachée.

Il ne nous dit point quel est ce principe secret qui se développe à des heures réglées dans des fièvres intermittentes; quel est ce poison interne qui se renouvelle après un jour de relâche; où est ce foyer qui s'éteint et se rallume à des moments marqués. Il semble que toutes les causes soient faites pour être ignorées.

On sait à peu près qu'on aura la fièvre après des excès, ou dans l'intempérie des saisons. On sait que le quinquina pris à propos la guérira; c'est bien assez; on ignore le comment. J'ai lu quelque part ces petits vers, qui me paraissent d'une plaisanterie assez philosophique:

Dieu mûrit à Moka, dans le golfe arabique,
Ce café nécessaire aux pays des frimas:
Il met la fièvre en nos climats,

Et le remède en Amérique.

Tout animal qui ne meurt pas de mort subite périt par la fièvre. Cette fièvre paraît l'effet inévitable des liqueurs qui composent le sang, ou ce qui tient lieu de sang. C'est pourquoi les métaux, les minéraux, les marbres durent si long-temps, et les hommes si peu. La structure de tout animal prouve aux physiciens qu'il a dû de tout temps jouir d'une très courte vie. Les théologiens ont eu ou ont étalé d'autres sentiments. Ce n'est pas à nous d'examiner cette question. Les physiciens, les médecins ont raison in sensu humano; et les théologiens ont raison in sensu divino. Il est dit au Deuteronome (Ch. XXVIII, v. 22), que « si les Juifs n'obser» vent pas la loi, ils tomberont dans la pauvreté, ils » souffriront le froid et le chaud et ils auront la fièvre. » Il n'y a jamais eu que le Deuteronome et le Médecin

malgré lui qui aient menacé les gens de leur donner la fièvre.

Il paraît impossible que la fièvre ne soit pas un accident naturel à un corps animé, dans lequel circulent tant de liqueurs, comme il est impossible que ce corps animé ne soit point écrasé par la chute d'un rocher.

Le sang fait la vie. C'est lui qui fournit à chaque viscère, à chaque membre, à la peau, à l'extrémité des poils et des ongles, les liqueurs, les humeurs qui leur sont propres.

Ce sang, par lequel l'animal est en vie, est formé par le chyle. Ce chyle est envoyé de la mère à l'enfant dans la grossesse. Le lait de la nourrice produit ce même chyle, dès que l'enfant est né. Plus il se nourrit ensuite de différents aliments, plus ce chyle est sujet à s'aigrir. Lui seul formant le sang, et ce sang étant composé de tant d'humeurs différentes si sujettes à se corrompre; ce sang circulant dans tout le corps humain plus de cinq cent cinquante fois en vingt-quatre heures avec la rapidité d'un torrent, il est étonnant qu'un homme n'ait pas plus souvent la fièvre; il est étonnant qu'il vive. A chaque articulation, à chaque glande, à chaque passage, il y a un danger de mort ; mais aussi, il y a autant de secours que de dangers. Presque toute membrane s'élargit et se resserre selon le besoin. Toutes les veines ont des écluses qui s'ouvrent et qui se ferment; qui donnent passage au sang, et qui s'opposent à un retour par lequel la machine serait détruite. Le sang gonflé dans tous ses canaux s'épure de lui-même : c'est un fleuve qui entraîne mille immondices; il s'en décharge par la transpiration, par les sueurs, par toutes les sécrétions, par toutes les évacuations. La fièvre est elle-même un secours; elle est une guérison, quand elle ne tue pas.

L'homme, par sa raison, accélère la cure, avec des amers et surtout du régime. Il prévient le retour des ac®ès. Cette raison est un aviron avec lequel il pent courir

quelque temps la mer de ce monde, quand la maladie ne l'engloutit pas.

On demande comment la nature a pu abandonner les animaux, son ouvrage, à tant d'horribles maladies dont la fièvre est presque toujours la compagne? Comment et pourquoi tant de désordre avec tant d'ordre; la destruction partout à côté de la formation? Cette difficulté me donne souvent la fièvre; mais je vous prie de lire les Lettres de Memmius (1). Peut-être vous soupçonnerez alors que l'incompréhensible artisan des mondes, des anides végétaux, ayant tout fait pour le mieux, n'a pu faire mieux.

maux,

FIGURE.

Si on veut s'instruire, il faut lire attentivement tous les articles du grand Dictionnaire de l'Encyclopédie, au mot Figure.

Figure de la terre par M. d'Alembert; ouvrage aussi clair que profond, et dans lequel on trouve tout ce qu'on peut savoir sur cette matière.

Figure de rhétorique par César du Marsais; instruction qui apprend à penser et à écrire, et qui fait regretter, comme bien d'autres articles, que les jeunes gens ne soient pas à portée de lire commodément des choses si utiles. Ces trésors cachés dans un dictionnaire de vingt-deux volumes in-folio, d'un prix excessif, devraient être entre les mains de tous les étudiants, pour trente

sous.

Figure humaine, par rapport à la peinture et à la sculpture; excellente leçon donnée par M. Vatelet à

tous les artistes.

Figure, en physiologie; article très ingénieux, par M. d'Abbés de Caberoles.

Figure, en arithmétique et en algèbre, par M. Mallet. (1) Philosophie, tome I.

Figure, en logique, en métaphysique en belles-lettres, par M. le chevalier de Jaucour, homme au-dessus des philosophes de l'antiquité, en ce qu'il a préféré la retraite, la vraie philosophie, le travail infatigable, à tous les avantages que pouvait lui procurer sa naissance, dans un pays où l'on préfère cet avantage à tout le reste, excepté à l'argent.

Figure, ou forme de la terre.

Comment Platon, Aristote, Ératosthènes, Possidonius, et tous les géomètres de l'Asie, de l'Égypte et de la Grèce, ayant reconnu la sphéricité de notre globe, arriva-t-il, que nous crûmes si long-temps la terre plus longue que large d'un tiers, et que de là nous vinrent les dégrés de longitude et de latitude; dénomination qui atteste continuellement notre ancienne ignorance?

Le juste respect pour la Bible, qui nous enseigne tant de vérités plus nécessaires et plus sublimes, fut la cause de cette erreur universelle parmi nous.

On avait trouvé dans le psaume CIII, que Dieu a étendu le ciel sur la terre comme une peau : et de ce qu'une peau a d'ordinaire plus de longueur, que de largeur, on en avait conclu autant pour la terre.

Saint Athanase s'exprime avec autant de chaleur contre les bons astronomes que contre les partisans d'Arius et d'Eusèbe. «< Fermons, dit-il, la bouche à ces barbares » qui, parlant sans preuve, osent avancer que le ciel s'é» tend aussi sous la terre. » Les Pères regardaient la terre comme un grand vaisseau entouré d'eau; la proue était à l'orient, et la poupe à l'occident.

On voit encore dans Cosmas, moine du quatrième siècle, une espèce de carte géographique où la terre a cette figure.

la

Tortato, évêque d'Avila, sur la fin du quinzième siècle, déclare, dans son Commentaire sur la Genèse que foi chrétienne est ébranlée, pour peu qu'on croie la terre ronde.

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