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qu'elles l'aideraient à désorganiser les institutions et à ruiner l'esprit de la Révolution française.

Paul Bert les montre à l'œuvre, surtout celle des jésuites. Il produit des faits, il cite des paroles, il analyse des écrits, d'où ressort la conspiration de tous ces moines et religieux contre la France nouvelle, contre l'État laïque. Cette démonstration éloquente et forte pourra être utilisée sans y presque rien changer, et en y ajoutant seulement les griefs d'hier, par les orateurs qui demanderont aux républicains de 1900 de revenir à la mesure de défense sociale qu'avaient prise les monarchistes de 1790.

C'est surtout l'enseignement congréganiste qui est dénoncé dans les pages qui composent ce volume. On le verra Paul Bert n'hésite pas à conclure, des faits authentiques qu'il rapporte, que c'est un enseignement irrationnel, immoral, antipatriotique, qui atrophie et déforme les esprits.

Mais, qu'elles enseignent ou non, il demande qu'on les supprime toutes, ces congrégations religieuses. S'appropriant le projet d'un de ses collègues, il propose de restituer aux donateurs et aux religieux actuellement vivants ce qu'ils ont apporté, d'attribuer des rentes viagères aux moines et aux nonnes dont les couvents ont été supprimés. Du reste, les biens des congrégations seraient confisqués et attribués au service national de l'instruction publique.

Ce retour à la politique de la Révolution semblait à Paul Bert indispensable pour que notre république démocratique pût enfin s'organiser. Il lui paraissait absurde de laisser se développer dans notre société

laïque des sociétés mystiques destinées à la combattre, à la détruire, une conspiration permanente de l'esprit du passé contre l'esprit de l'avenir. La liberté d'assassiner la liberté, que réclament les ennemis de la Révolution, il n'en voulait pas ; c'est précisément pour assurer la liberté de conscience qu'il voulait délivrer la France des congrégations religieuses.

Il voyait et il prévoyait. Il voyait ce qu'avaient fait et ce que faisaient les congrégations religieuses contre les principes de la Révolution, contre la raison, contre la patrie. Il prévoyait ce qu'elles allaient faire, et, depuis sa mort, nous assistons à une audacieuse tentative des congrégations et de l'Église romaine pour éliminer de France les autres cultes, ainsi que les groupements philosophiques, et pour établir l'asservissante unité religieuse.

Ce livre ne nous fournira pas seulement des arguments et des armes contre ce péril. Nous y puiserons des motifs d'espérance et de confiance. Si les prétentions cléricales sont plus hardies aujourd'hui qu'au temps de Paul Bert, la position des défenseurs de l'État est, malgré les apparences, bien meilleure. L'enseignement laïque a déjà produit le résultat essentiel la masse du peuple français est devenue plus réfractaire qu'elle n'était alors à l'influence cléricale. C'est dans la bourgeoisie que le cléricalisme a fait, depuis Paul Bert, de nouvelles conquêtes, qui lui ont inspiré cette audace nouvelle. Appuyée sur les classes prétendues dirigeantes, l'Église romaine croit qu'elle va pouvoir faire marcher la France. Mais elle n'a rallié à ses desseins qu'une partie des riches et des

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désœuvrés. Les paysans, les ouvriers, les couches profondes du suffrage universel, sont restés, dans l'ensemble, impénétrables à la propagande cléricale. Les instituteurs ont maintenu le peuple français dans les voies de la raison. Il s'agit, en s'appuyant sur le bon sens inaltéré du peuple, d'empêcher l'Église romaine de s'emparer, par un coup de surprise et pour une réaction provisoire et violente, du pouvoir politique, et de la déloger des positions privilégiées où elle s'est abusivement et furtivement introduite. La lecture de ces pages posthumes et si vivantes de Paul Bert fournira en abondance, à ceux qui vont combattre ce nouveau combat pour la raison et la patrie, des arguments, des faits, des moyens, des espérances, du courage.

A. AULARD.

Octobre 1899.

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