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rompu dans fon principe. L'Affurance étoit donc devenue ca duque.

Troifieme exemple. Le fieur André Michel avoit fait affurer 1200 liv., de fortie du Levant jufqu'à Marseille, fur corps & facultés de la Pinque le Requin. Cette Pinque étoit à Smyrne. Au lieu de faire voile pour Marseille, elle alla prendre à Salonique un chargement de cendre. Elle portoit ce chargement à Smyrne, lorsqu'elle naufragea près de Scio. Sentence arbitrale du 2 Mai 1763, rendue par MM. le Jeans, Richard, & moi, qui mit le fieur Remuzat, Affureur, hors de Cour & de procès.

Quatrieme exemple. En 1767, Jofeph Davin s'étoit fait affurer 2100 liv., de fortie de Conftantinople jufqu'à Marseille, fur les facultés de la Barque l'Entreprenante, Capitaine Charles-Roux Tropez. Cette Barque fut expédiée de Conftantinople pour Smyrne, d'où elle devoit, difoit-on, venir à Marseille. Elle fit naufrage. Procès entre l'Affuré, & le fieur Orgeas, Affureur. Deux Arbitres furent nommés. Ils furent partagés en opinion. En qualité d'Arbitre-Tiers, je donnai gain de caufe à l'Afsureur, à qui on demandoit le payement de la perte ; & en même temps je décidai qu'il devoit rendre la prime, parce que le voyage affuré n'avoit jamais eu lieu. (Vid. infrà fedt. 14, je parle du voyage changé.)

SECTION XII.

Voyage raccourci.

On a vu ci-deffus, ch. 3, fed. 1, que l'Affurance aura fon effet entier, & que l'Affureur ne fera pas tenu de reftituer la prime, fi le voyage dure moins, ou fi le voyage eft feulement raccourci. Art. 35 & 36, h. t.

Tout cela eft vrai, pourvu que dans le principe le voyage affure n'ait pas été rompu par un changement de defti

nation, ainfi qu'on vient de le voir dans la Section précédente.

§. 1. Marchandife chargée, & un

Divers Auteurs difent que fi, par force majeure, la marchandise chargée eft remife à terre, dans le lieu même du chargement, fans le fait, ni la faute de l'Affuré, la prime moment après ren'eft pas due. Kuricke diatr., n. 2, pag. 835. Roccus, not. 15. Santerna, part. 3, n. 22. Cafaregis, difc. 1, n. 51; difc.

62, n. 5.

Cela eft bon, fi par un pacte spécial, le risque ne devoit courir fur les facultés que depuis que le Navire auroit mis à la voile. Mais fi, en conformité de l'art. 13, tit. des Contrais à la groffe, le rifque des marchandises devoit courir depuis qu'elles auroient été chargées dans le Vaiffeau ou dans les Gabarres pour les y porter, la prime eft acquife aux Affureurs, quoiqu'un moment après, & pour quelque caufe que ce foit, elles aient été remises à terre, quand même elles n'auroient encore été que dans les Gabarres, fans avoir été portées à bord, parce que le cours du rifque avoit commencé. Fallit portus & ipfe fidem. Loccenius, lib. 2, cap. 5, n. 9. Marquardus, lib. 2, cap. 13, n. 36. Valin, art. 37, pag. 88. Pothier, n. 184.

Si cette opération a été faite par néceffité, & que les marchandifes foient rechargées dans le même Navire, l'Affurance reprend fon cours. L'Affurance reprend également fon cours, fi les marchandises font chargées fur un autre Vaisseau, dans le cas où le premier Navire ait été pris pour le service du Roi, ou que par fortune de mer il foit devenu innavigable.

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mife à terre.

§. 2: Navire qui ayant mis à la

Si le Navire, qui a commencé le voyage, retourne volontairement dans le lieu d'où il étoit parti, les Affureurs font déliés de leur obligation, & la prime leur eft acquife. Infrà ch. 16, voile, revient fur fect. 10. le champ dans le Port.

Mais fi ce retour eft opéré par tempête, ou par la crainte des Ennemis, on doit confidérer cet accident comme une relâche forcée. Le Navire peut enfuite remettre à la voile aux rifques des Affureurs. Santerna, part. 3, n. 52.

§. 3. Marchandifes

Cafaregis, difc. 1, n. 50, dit que fi dans ce dernier cas, le Navire eft arrêté par force majeure dans le Port, & qu'il ne puiffe pas reprendre le voyage interrompu, la prime doit être réduite à proportion de la route qui avoit été faite: Pretium affecurationis ad ratam itineris & periculi reducitur. Mais cette décifion eft contraire à l'art. 27, h. t. Dès que le Navire eft forti du Port, les Affureurs commencent à courir les rifques. Ils ont donc acquis la prime, quoique le Navire retourne auffitôt, & ne reparte plus. Valin, art. 37, pag. 87. Pothier, n. 184.

Au Chapitre 12, fect. 33, j'ai parlé de la Pinque St. Victor, retenues dans le qui avoit relâché à Malte. La cargaison fut retenue & payée cours du voyage par l'Univerfité de l'Ifle. Le fieur Bremond conteftoit à fes Afpour les néceffités du Pays. fureurs le payement de l'entiere prime. Sa prétention fut rejettée par Arrêt du 22 Juin 1746. On communiqua à ce fujet un Acte de Notoriété conçu en ces termes. » Nous Souffignés, » anciens Juge & Confuls, Echevins & Négocians de cette ville de Marfeille, certifions & atteftons en faveur de la vérité, qu'il a été d'ufage dans tous les temps, lorsqu'une » Affurance eft faite de fortie du Levant, de l'Amérique, » ou de quel endroit que ce foit, jufqu'à Marseille, ou » autre Port limité par la Police ou Contrat d'Affurance, » & que le rifque d'Affurance que les Affureurs ont pris, a

§. 4. Navire qui a

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» commencé de courir, la prime ou le coût de l'Affurance » convenue lors de la fignature eft entiérement acquife aux » Affureurs, bien que le Vaiffeau termine fon voyage fur fa >> route, foit que fon chargement foit vendu, ou que les mar» chandises foient déchargées à terre, fans que pour raison de ce, l'Affureur foit obligé de reftituer partie de la prime. » A Marseille le 12 du mois de Mai 1746 ».

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Les fieurs Wezemberg & Molliis fe firent affurer fur le omis de faire les corps du Navire le Waza, Capitaine Ifrael Hedman, Suééchelles défignées dois, la fomme de 5000 liv. » de fortie de Stokholm peut-il les com- » jufqu'à Mahon, permis de toucher à Tunis, touchant & pléter après être faifant Echelle en tous les lieux & endroits que bon femblera >> au Capitaine ».

dans la police,

parvenu au lieu

destiné ?

Ce Navire partit de Stokholm, & fans toucher à Tunis, il arriva à Mahon, où il configna un chargement de planches. Il mit enfuite à la voile, pour porter à Tunis 30 canons de fer, & deux caiffes de munitions qu'il avoit reçu à Stokholm, de la part du Commiffariat Royal des Convois. Il fit naufrage fur le Cap Porto - Farino, près de Tunis.

Les Affureurs attaqués en payement de la perte, difoient que le voyage avoit été terminé par l'arrivée du Navire à Mahon; qu'avant d'y parvenir, le Navire auroit pu toucher à Tunis; mais que n'ayant pas fait cette relâche, tout risque étoit fini vis-à-vis d'eux car il dépend de l'Affuré de diminuer le rifque, & de raccourcir le voyage.

Les Affurés répondoient que le Notaire avoit fait erreur : qu'au lieu d'écrire que l'Affurance étoit jufqu'à Tunis, permis de toucher à Mahon, il avoit mis jufqu'à Mahon, permis de toucher à Tunis ; que cette erreur de mot étoit évidente: 1°. Par la nature du chargement de planches, deftinées tout premiérement pour Mahon : 2°. Par la nature des lieux, puifque Mahon étoit beaucoup moins éloigné que

Tunis.

Les Affureurs, pour qui j'écrivois, répliquoient que la police étoit la feule Loi qu'il failloit fuivre, & que le voyage avoit été raccourci à leur égard. Sentence du 31 Mai 1777, qui donna gain de Caufe aux Affureurs. Arrêt du 26 Juin 1778, au rapport de M. du Bourguet, qui confirma cette Sentence. Infpici debet id tantùm, quod certum eft, inter contrahentes. Cafaregis, difc. 1, n. 108.

La qualité du chargement n'avoit pas été notifiée aux Affureurs. Ils alléguerent le pacte de la police, & la difpofition des art. 35 & 36, h. t.; ils diftinguerent le voyage affuré, d'avec le voyage du Navire, & par ce moyen, ils obtinrent gain de Caufe.

Le rifque ne

la hauteur déterminée.

SECTION XIIL

Voyage allongé.

On a vu ci-deffus, ch. 3, fect. 1, que fi le voyage eft defigné par la police, & que fa durée excede le temps limité, la prime fera augmentée à proportion. Art. 35, h. t.

Mais les Affureurs feront déchargés des rifques, & ne » laifferont de gagner la prime, fi l'Affuré, fans leur con» fentement, envoye le Vaiffeau en un lieu plus éloigné, » que celui défigné par la police, quoique fur la même route ». Art. 36.

Ces articles de l'Ordonnance parlent des cas où le voyage court que jufqu'à affuré a déja commencé; & c'eft dans ce fens qu'on doit entendre le Guidon de la Mer, ch. 9, art. 12. » Si après » avoir fait voile, eft-il dit, il y a changement volontaire de » voyage, l'Affureur ne court les rifques, finon à la hau»teur & vue du lieu du refte contenu en la police ».

Ainfi, dès le moment que fans fortune de mer le Navire fe trouve en un lieu plus éloigné que celui défigné par la police, le voyage eft rompu, malgré les claufes de faire Echelle & de dérouter. Les Affureurs font déchargés des rifques, & la prime leur eft acquife. Valin, art. 36, h. t., pag. 82.

Diverses Affurances avoient été faites fur le corps & les facultés du Vaiffeau le Lamoignon, Capitaine Antoine Simian, de fortie de Marseille jufqu'a Dumkerque & Oftende, & de retour à Marseille. Ce Navire partit de Marseille le 7 Juillet 1720. Il arriva à Dumkerque le 20 Août fuivant. Le Comte d'Heronville, Gouverneur de Dumkerque, rendit une Ordonnance, portant que le Capitaine iroit faire la quarantaine aux Ifles de St. Marcou, près de la Hougue en Normandie, où des Vaiffeaux partis de Marseille & arrivés au Havre, avoient déja été envoyés à caufe de la crainte de la pefte. Les Intéreffes au Vaiffeau le Lamoignon, trouvant plus convenable que

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