et severes loix. En quoy Nous nous sommes d'autant plus confirmez, que ce seroit en vain que nous travaillerions à soutenir par les armes la gloire et la grandeur de cet Etat, si cependant nous souffrions qu'il fut affoibli par le déreglement de ceux qui ne gardent aucune mesure en leurs vaines et excessives dépenses. Outre que c'est chose digne de notre soin de ne permettre point qu'au milieu des nécessitez publiques, et pendant que la pluspart de nos sujets sont incommodez par les impôts et les subsides extraordinaires, les autres fassent montre de leurs richesses, et les employent avec profusion en des superfluitez et des vanitez inutiles; au lieu qu'ils les pourroient plus utilement faire servir au public et les reserver pour le secours de leur patrie. Pour arreter donc le cours de ce desordre, et apporter des remedes à ce mal, avant qu'il se soit fortifié par la licence et par le temps; Nous avons considéré que les dépenses où le public est plus interessé, se font aux habits, où l'on employe les étoffes et les passemens d'or et d'argent, et aux ouvrages de fil qui viennent des païs étrangers; de sorte qu'outre le transport de nos monnoyes employées à l'achapt de telles étoffes, il se consume encore dans notre royaume une grande quantité d'or et d'argent que l'on convertit en de semblables ouvrages, dont il n'en revient au public aucune utilité, mais, au contraire, un tres notable préjudice, qui est encore augmenté par l'abus de quelques marchands, qui fondent les monnoyes pour les faire entrer dans les manufactures. C'est pourquoy, avant que le mal soit plus fort que les remedes, et pour conserver les richesses dans notre royaume, en empechant la dissipation des biens de nos sujets, Nous ne desirons pas seulement de renouveller les edits qui ont été ci-devant faits contre le luxe, mais encore par la rigueur que nous y apportons, Nous en voulons procurer l'exacte observation. A ces causes, sçavoir faisons, qu'apres avoir mis cette affaire en déliberation en notre Conseil; de l'avis de la Reine ré gente notre tres honorée dame et mere, et de notre certaine science, pleine puissance et autorité royale, Nous avons statué et ordonné, statuons et ordonnons, par ces présentes, ce qui ensuit : Premièrement. Faisons tres expresses inhibitions et défenses à tous nos sujets, de quelque qualité et condition qu'ils soient, de porter es habits ou ornemens, comme cordons, baudriers, ceintures, porte-épées, aiguillettes, écharpes, jarretieres, nœuds, rubans, tissus, ou tels autres ornemens qui puissent être, aucunes étoffes d'or et d'argent, ou barrées, ou mêlées d'or ou d'argent fin ou faux, à peine de confiscation desdites étoffes, habits et ornemens, et de quinze cens livres d'amende, applicable le tiers à l'hôpital des lieux, l'autre tiers aux filles de la Magdeleine établies à Paris, et l'autre tiers aux officiers qui auront fait les captures. II.-Comme pareillement défendons de mettre, sur lesdits habits ou autres ornemens, aucunes piqueures, emboutissemens, chamarrures de passemens, boutons, houppes, chainettes, porfilures, canetilles, paillettes, nœuds de soye ou d'or ou d'argent, fin ou faux, trait ou filé, ou de gez, ou autre chose semblable, qui pourront être cousuës et appliquées en forme de broderie, et dont les habits et autres ornemens puissent être couverts et enrichis. III. - Defendons aussi de faire appliquer, sur lesdits habits ou autres ornemens, aucunes pierreries, perles, boutons d'or ou d'argent simple ou doré, cuivre ou laton doré ou émaillé, et telle autre façon d'orfévrerie, telle qu'elle puisse être. IV. - Voulons que les plus riches et somptueux habillemens soient de velours, satin, taffetas et autres étoffes de soye, sans autre enrichissement que deux passemens ou dentelle de soye, de deux doigts au plus, ou d'une bande de broderie, de largeur d'un pouce: lesquelles dentelles ou bandes de broderie seront appliquées sur les étoffes des habits, sans aucune étoffe entre deux; sçavoir: sur les habits des hommes, deux à l'entour de leur collet et au bas de leurs manteaux, et sur le long et canons de leurs chausses, ouvertures des manches, haut des manches, au milieu du dos et le long des boutons et boutonnières, et aux extrémitez des basques des pourpoints ou juppes. V. — Et quant aux habits des femmes, filles et enfans portans robes, lesdits passemens ou broderie, d'un pouce de largeur, y seront appliquez, sans pouvoir mettre aucune étoffe entre deux, ainsi que dessus; sçavoir: deux passemens et dentelles, de la susdite largeur, à l'entour du bas et au devant des robes et juppes, sur le milieu des manches, autour des basques et corps des robes et juppes. VI.-Defendons, en outre, à tous nos sujets, de quelque qualité et condition qu'ils soient, de faire porter à leurs pages, laquais et cochers, aucuns habits de soye, ou bandes de velours, satin ou autre étoffe de soye: voulons qu'ils soient vêtus d'étoffe de laine, avec deux gallons sur les coutures et extremitez des habits seulement. VII. Faisons pareillement tres expresses inhibitions et défenses, à tous marchands, de trafiquer ès païs étrangers d'aucunes étoffes, passemens d'or ni d'argent, vrai ou faux, ni de faire ou faire faire lesdites étoffes, passemens, franges d'or ni d'argent vrai ou faux en notre royaume, à peine de confiscation desdits ouvrages, trois mille livres d'amende applicable comme dessus, et d'être déclarez indignes d'exercer ci-après la marchandise, ni autres charges. VIII. Défendons à tous tailleurs, brodeurs, carossiers, selliers, de faire aucuns ouvrages de leur métier, où il y ait aucune broderie, passemens, frange d'or ni d'argent, et generalement aucun or ni argent, vrai ou faux, à peine de confiscation desdits ouvrages, quinze cens livres d'amende, et d'être privez ci-après de l'exercice de leur métier; lesdites amendes et marchandises confisquées et applicables comme dessus. IX. -Desirant pareillement empêcher les dépenses excessives qui se font en passemens, dentelles et autres ouvrages de fil qui viennent des païs étrangers; Nous faisons tres expresses inhibitions et défenses à tous nos sujets, de quelque qualité et condition qu'ils soient, de porter huit jours après la publication de la présente Déclaration, en leurs linges, collets, manchettes, bas à botter, et generalement en tous autres linges, aucuns passemens, dentelles, entretoiles, points de Gennes, pontignacs, points-coupez, ou autres ouvrages de fil quelconques faits ès païs étrangers: à peine, contre les contrevenans, de confiscation des ouvrages qu'ils porteront, et de quinze cens livres d'amende, applicable comme dessus. X. Et d'autant que les marchands lingers sont la principale cause du luxe et des depenses excessives qui se sont faites par nos sujets, Nous leurs faisons tres expresses inhibitions et défenses, et à tous nos autres sujets, de quelque qualité et condition qu'ils soient, d'acheter ni faire trafic d'aucuns ouvrages de fil faits hors notre royaume, et à tous ouvriers en linge, d'en employer en leurs ouvrages. XI. Et, en cas de contravention à nosdites défenses par lesdits marchands, voulons que toute la marchandise dont ils se trouveront avoir trafiqué hors de notre royaume, soit brûlée, et lesdits marchands condamnez en six mille livres d'amende, applicable comme dessus, et privez pour jamais de faire aucun exercice de marchandise, ni d'aucune autre charge. XII. - Et afin que lesdits marchands ne prennent occasion de continuer ledit trafic, supposant que ce sont marchandises qu'ils avoient avant notre present edit; voulons et ordonnons que, quinzaine après la publication d'icelui, ils se transportent ès greffes des jurisdictions ordinaires des lieux où ils seront demeurans et domiciliez; pour là affirmer et déclarer la quantité qu'ils ont pardevers eux desdites marchandises étrangères, dont ils laisseront un inventaire signé d'eux; sur lequel inventaire enjoignons ausdits juges ordinaires de faire la visite desdites marchandises, en présence des maitres et gardes de la marchandise, sans que pour ce ils puissent prendre ni exiger aucun salaire. XIII. Enjoignons pareillement aux maitres et gardes desdites marchandises, de veiller et tenir la main à ce qu'il ne s'achette et débite aucunes des marchandises et ouvrages défendus, dans les boutiques des marchands, et faire incontinent le rapport à la police des contraventions qui seront faites, à peine d'être privez, pour leur négligence, de pouvoir jamais exercer la marchandise. f XIV. Voulons et entendons que les sentences et jugemens des confiscations et amendes, qui seront rendus à l'encontre des contrevenans à nos présentes défenses, soient executez nonobstant oppositions ou appellations quelconques, et sans préjudice d'icelles. Si donnons en mandement à nos amez et feaux conseillers, les gens tenans nos cours de Parlement, baillifs, sénéchaux, juges ou leurs lieutenans, et à tous nos autres justiciers et officiers qu'il appartiendra, que ces présentes ils fassent lire, publier, registrer, executer, garder et observer inviolablement, selon leur forme et teneur. Enjoignons à nos procureurs généraux, leurs substituts, y tenir la main, et faire toutes les diligences requises et nécessaires pour ladite execution; car tel est notre plaisir. En témoin de quoy, Nous avons fait mettre notre scel à cesdites présentes. Donné à Paris, le dernier jour de may, l'an de grace mil six cens quarante quatre, et de notre règne le deuxième. Signé, LOUIS; et plus bas, par le Roy, la Reine régente sa mère, presente,' DE GUENEGAUD; et scellées, sur double queuë, du grand sceau de cire jaune. II. LOUIS, par la grace de Dieu, Roy de France et de |