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mort; mais le tout narré sans réflexion, et quelquefois avec trop de licence dans les détails. Au reste son style est simple, concis, correct, sans ornemens, sans affectation. M. de La Harpe prétend que Suétone rapporte tout, et qu'il ne peint rien; cependant il nous semble que la manière dont il raconte les crimes, puis la mort de Néron, celle de ses successeurs éphémères, etc., forme des tableaux assez animés. Il a aussi fort bien peint le caractère de Titus.

CLOTILDE DE SURVILLE (n. 1405-m. vers 1495). Nous nous garderons bien de parler ici des discussions qui ont eu lieu sur l'authenticité des poésies de cette femme extraordinaire ; il nous suffit, d'après la nature de notre travail, de dire que, dans le charmant recueil qui porte son nom, on distingue les verselets à mon premier né, dernière pièce du volume; l'héroïde à Bérenger; l'élégie sur la mort d'Héloïsa ; plusieurs chants d'amour, quelques stances et rondes, et le chant royal à Charles VIII.

CAIUS CORN. TACITE (n. 812 de R., 59 de J.-C. -m. vers 872 de R., 119 de J.-C. ). On présume que le premier ouvrage de ce célèbre historien est la Vie de Julius Agricola, dont il avoit épousé la fille en 77 de J.-C., qui étoit mort en 93, et dont il publia la vie en 98. C'est un des plus beaux morceaux de l'antiquité, et un modèle accompli de biographie, dont les dernières pages surtout sont d'une

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perfection qui ne laisse rien à désirer. La seconde production de Tacite est son traité des Mœurs des Germains, qu'il composa en 98. C'est un ouvrage curieux et intéressant, malgré les erreurs qui s'y trouvent. Nous n'avons de l'Histoire de son temps (Historiarum libri) que les quatre premiers livres et le commencement du cinquième, qui ne contiennent que l'espace d'un peu plus d'une année; le reste est perdu, et l'on ignore combien cet ouvrage devoit avoir de livres, car il commence à l'avénement de Galba, et s'étendoit jusqu'à la mort de Domitien, embrassant ainsi un espace de vingt-neuf ans. Les morceaux les plus saillans des Histoires de Tacite sont le tableau de Rome et de l'empire après la mort de Néron, Hist., liv. 1; le caractère de Galba, Hist., liv. 1; les funestes effets de l'amour du pouvoir à Rome, Hist., liv. 11; la renonciation de Vitellius à l'Empire, Hist., liv. 111; et la mort de Vitellius, Hist., liv. 11. Les Annales, en seize livres, furent composées après les Histoires, quoiqu'elles renferment des événemens antérieurs. Elles sont rédigées sur un autre plan et ne peuvent en être considérées comme la première partie. Elles embrassoient tout ce qui s'étoit passé depuis la mort d'Auguste jusqu'à celle de Néron. Malheureusement il ne nous reste que les quatre premiers livres, une partie du cinquième, et les onzième, douzième treizième et une grande partie du quatorzième ; de sorte que nous avons le règne de Tibère, chef-d'œeuvre de politique, qui est aussi le chef-d'œuvre de l'au

teur; la fin du règne de Claude, et la presque totalité de celui de Néron. Le règne de Caligula et le commencement de celui de Claude manquent. Voici les principaux morceaux des ANNALES que l'on a toujours distingués: honneurs funèbres rendus par Germanicus aux restes de Varus et de son armée, Ann., liv. 1 ; discours de Germanicus à ses soldats révoltés, Ann., liv. 1; mort de Germanicus, et arrivée d'Agrippine à Brindes avec les cendres de ce grand homme, Ann., liv. ; portrait de Sejan, Ann., liv. Iv; mort d'Agrippine, mère de Néron, Ann., liv. xiv; mort de Sénèque, Ann., liv. xv; etc.

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TÉRENCE (n. 562 de R., 192 av. J.-C.-m 601 de R., 153 av. J.-C. ), est auteur de six comédies que l'on a toujours estimées, et que les gens de goût mettent au-dessus de celles de Plaute, sous le rapport de la sagesse des plans, de la vérité du dialogue sans licence, et de la pureté de la diction, quoi qu'elles leur soient inférieures dans ce que l'on pelle le vis comica. De ces six pièces, celle que l'on regarde comme la meilleure, est l'Andrienne qui a été transportée sur la scène française avec succès par Baron ou plutôt le père La Rue. Viennent ensuite les Adelphes, dont Molière a imité, dans l'École des Maris, le contraste des deux frères relativement à l'éducation des enfans; l'un a pour principe la sévérité, et l'autre, l'indulgence. Dans l'une et l'autre pièce, c'est l'éducation trop sévère qui a le dessous, et ce sont ceux

qui l'ont employée qui en sont les dupes. Une troisième pièce de Térence, Hecyra ( la belle-mère), paroît à La Harpe la plus intéressante de toutes celles de l'auteur, quant au sujet ; mais on y désireroit plus d'action et de mouvement. On sait que l'Hecyra fut interrompue au milieu de la représentation. Quant à l'Heautontimorumenos (l'homme qui se punit lui-même), c'est la plus foible de toutes les pièces de Térence. Nous ne dirons rien de l'Eunuque, dont Brueys et Palaprat ont emprunté leur Muet, ni du Phormion, dans lequel Molière puisant le fond de l'intrigue des Fourberies de Scapin, a, comme le dit Boileau, à Térence allié Tabarin.

THÉOCRITE (n. vers 200 av. J.-C.

m. vers

140), passe pour le premier des poëtes bucoliques; il reste de lui trente idylles et vingt-deux inscriptions; mais on lui attribue aussi des élégies, des ïambes, des hymnes. Tous ses ouvrages ne sont pas dans le genre bucolique; quelques-uns tiennent au lyrique, à l'épique, et même au dramatique. Son Epithalame d'Hélène et de Ménélas est un des beaux morceaux de poésie lyrique qui nous restent de l'antiquité ; et ses Pécheurs forment un poëme unique dans son genre. Quant à son Enchanteresse, Racine regardoit ce morceau comme un des plus passionnés qu'il y eût chez les anciens. En général la simplicité et la vérité sont le caractère dominant de Théocrite; mais cette simplicité n'est pas toujours intéressante, elle descend quelquefois trop bas, et c'est ce que

Virgile s'est bien gardé d'imiter en faisant de temps en temps des emprunts au poëte grec (1).

LÉON.-ANT. THOMAS (Voy. tom. 1, pag. 343). De toutes les productions de cet auteur, l'Essai sur les Éloges est celle qui a le plus réuni de suffrages,

(1) M. Gail a établi un parallèle entre Théocrite et Virgile: « Après la nature, dit-il, voilà les deux grands maîtres qu'il faut étudier. Tous deux nous ont représenté la vie pastorale avec tous ses charmes, mais chacun avec les traits qui lui sont propres. Le premier (Théocrite), se renfermant dans son genre, n'a dépeint que des objets champêtres. On éprouve en le lisant les douceurs de la solitude et le repos de la campagne. Le second, dès sa première églogue, afflige l'ame par l'idée de la misère et de la pauvreté. A l'ombre des hêtres, il rappelle les embarras et les chaînes de la ville, et même les combats, comme dans la xe. églogue. Le chantre de Syracuse représente ses bergers tels qu'ils sont; il leur donne la couleur poétique de leur caractère, de leur situation, de leur éducation; semblable à ces peintres de l'école flamande, il peint la nature avec force, mais en lui laissant ses défauts. Le poëte de Mantoue, jaloux de plaire à des courtisans polis, donne à ses bergeries un air moins rustique, des formes plus correctes, des couleurs plus brillantes : c'est le Titien, sous le pinceau duquel la nature ne se montre que plus belle et plus parfaite. L'un est plus varié, plus fécond en pensées, en portraits, en caractères; un berger ne ressemble jamais à un autre berger. L'autre est toujours plus borné, ses acteurs sont plus uniformes. Rempli de grâces naturelles, le premier se montre quelquefois âpre, agreste et brut; c'est un jeune sauvage qui folâtre, en laissant à ses charmans caprices toute liberté de s'égayer. Le second,. plus exact, plus régulier, laisse apercevoir la parure et l'art : c'est un ami de la nature, mais qui, au milieu des champs, n'a pas tout-à-fait oublié les mœurs, le langage et même le luxe des villes. Lorsqu'il chante les forêts, il veut que ses chants soient. digues d'un consul. Théocrite, plus hardi, s'abandonne à son gé

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