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nombre de livres, mais les meilleurs et les plus exquis. Les auteurs dont il faisoit ses délices étoient RACINE et FÉNÉLON. On sent à la manière dont il les a peints, combien ils lui étoient analogues; c'est avec leur 'plume qu'il a tracé leur caractère. D'après la nature de ses ouvrages on peut croire PASCAL et LA BRUYÈRE, ou plutôt THEOPHRASTE dont il se rapproche davantage, lui étoient encore très familiers.

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VELLEIUS PATERCULUS (n. 735 de R., 19 av. J.-C. m. 784 de R., 31 de J.-C.) Cet historien, né l'année de la mort de Virgile, et proscrit en même -temps que Sejan dont il étoit l'ami, a laissé un abrégé intitulé Historia romana, qui mériteroit peut-être plutôt le titre d'Histoire universelle s'il nous étoit parvenu en entier; car le premier fragment qui nous reste parle de la Grèce, de l'empire d'Assyrie et du royaume de Macédoine. Ensuite, il y a une lacune qui s'étend sur les 582 premières années de Rome. Le reste du premier livre et le second que nous possédons en entier, peut-être à quelques lignes près, donnent l'histoire de Rome jusqu'à l'an 30 de J.-C. C'est un précis rapide qui ne s'arrête qu'aux masses, sans entrer dans les détails. C'est un tableau des temps et des circonstances, plutôt qu'une narration des événemens. L'auteur s'en tientaux résultats; mais il excelle dans les portraits; il les trace en cinq ou six lignes avec une force et une fierté de pinceau qui le rendent, en ce genre, supérieur à tous les anciens, peut-être même à Salluste si admirable en

cette partie. Nous en citerons pour exemple le por trait de Mithridate, de Caton, de César, de Pompée, etc. Il a aussi fait le plus grand éloge de Cicé ron, en racontant sa mort, liv. 1. Mais on lui reproche d'avoir été le vil adulateur de Tibère et de Sejan; malgré cela le président Hénault l'appelle le modèle des abréviateurs.

P. VIRGILE M. (n. 684 de Rome, 70 av. J.-C. m. 735 de Rome, 19 av. J.-C.) Quoique nous ayons consacré à cet illustre poëte, dans notre 1.ér tome, pages 59 70, un article où nous parlons en détail de ses ouvrages, nous ne pouvons nous dispenser ici d'en signaler les morceaux que l'on a toujours considéré comme les plus parfaits. C'est avoir à choisir dans un superbe écrin où tous les diamans sont précieux, ceux qui, par une heureuse taille jettent un peu plus de feu que les autres. Virgile, comme nous l'avons dit, est connu par trois ouvrages de genres différens, mais qui, tous trois, l'ont immortalisé; car dans tous on reconnoît cette perfection continue de style qui forme en général le caractère de ce poëte, et qui est telle chez lui qu'il ne semble pas donné à l'homme d'aller plus loin. Ces trois ouvrages sont : l'un, dans le genre pastoral, les Églogues; l'autre, dans le genre didactique, lés Géorgiques, et le troisième, dans le genre héroïque, l'Enéide.

Parmi les Eglogues, dont plusieurs offrent des passages imités de Théocrite, la dixième, intitulée

Gallus, passe pour la plus belle. Ce Gallus est représenté sous l'image d'un berger d'Arcadie, que l'infidélité de Lycoris a plongé dans le désespoir. Virgile le fait parler avec une vivacité et une sensibilité inexprimable. Quelle précision! quelle élégance! quels sentimens! quels tours de pensées! quelle poésie ! La sixième Eglogue, Silène, est aussi l'une des meilleures de notre auteur, quoi qu'en dise Fontenelle. Quelle force et quelle verve dans l'expression! quelle vivacité dans les images! quelle rapidité, quelle variété dans les tournures! quelle flexibilité dans les transitions! La quatrièmé, Pollion, qui jusqu'à ce jour a mis en défaut tous les commentateurs sur le nom de l'enfant dont on y célèbre la naissance, est aussi fort belle; le charme de la poésie descriptive s'y fait sentir dans beaucoup de passages. Le style en est peut-être un peu trop relevé pour une Eglogue. La première, Tityre et Mélibée, monument de reconnoissance envers César, est infiniment touchante ; il y a des passages aussi pleins d'images que de sensibilité, entre autres celui qui commence par Fortunaté senex . et qui a fait dire à Fénélon : « Malheur à ceux qui ne sentent pas le charme de ces vers, etc. etc.»

......

Dans les Géorgiques, ouvrage favori de Virgile, et celui sur lequel il fondoit ses droits à l'immortalité, tout est beau; c'est le poëme le plus parfait dans ce genre. Macrobe, dans ses Saturnales, liv. v, nous en indique les passages les plus remarquables. C'est au chap. xvr, où il dit que dans un poëme les

épisodes coupent agréablement l'uniformité du récit, amoenitas intertexta fastidio narrationum medetur; puis il ajoute : In omnibus verò Georgicorum libris, hoc idem summa cum elegantia fecit (Virgilius). Nam post præcepta, quæ natura res dura est, ut legentis animum vel auditum novaret, singulos libros acciti extrinsecus argumenti interpositione conclusit: primum de signis tempestatum, de laudatione rustico vitae secundum, et tertius desinit in pestilentiam pecorum; quarti finis est de Orpheo et Aristeo non otiosa narratio. En effet, rien n'est plus beau dans le premier chant que les vers qui le terminent, à commencer aux signes qui annoncent l'orage. Dans le second, après la belle description de l'Italie, l'éloge de la vie champêtre est le morceau le plus saillant. Dans le troisième, la description de la peste peut rivaliser avec les beaux vers de Lucrèce sur le même sujet ; mais on y admire encore la description du cheval et des courses de chevaux, rendue avec beaucoup de verve. L'hyver de la Scythie y est aussi tellement peint, qu'on frissonne en le lisant. Dans le quatrième, après le tableau enchanteur du bonheur dont jouit le vieillard sicilien près de Tarente, on admire le riche et touchant épisode d'Aristée, qui seul vaut un poëme, et que quelques-uns regardent comme supérieur à tout ce qui nous reste de la poésie ancienne.

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Arrivons à l'Enéide : le second livre, le sac de Troie; le quatrième, les amours de Didon; le si

l'é

xième, la descente d'Énée aux Enfers, sont trois grands morceaux regardés universellement comme les plus finis, les plus complétement beaux que popée ait produits chez aucune nation, et qui par conséquent seront à jamais le modèle et le désespoir des poëtes épiques. Voltaire dit que « Virgile n'avoit voulu réciter à Auguste que le premier, le second, le quatrième et le sixième livres de l'Énéide, qui sont effectivement la plus belle partie de ce poëme. Il n'est point donné aux hommes d'être parfaits, ajoute-t-il; Virgile a épuisé tout ce que l'imagination a de plus grand dans la descente d'Énée aux Enfers; il dit tout au cœur dans les amours de Didon; la terreur et la compassion ne peuvent aller plus loin que dans la description de la ruine de Troie. » M. Schoell, parlant de l'Énéide dans son Histoire de la Littérature romaine, tome 1.er, pag. 235, émet la même opinion : « Le second livre surtout, dit-il, est un chef-d'œuvre, et, dans toute l'antiquité, il n'existe rien qui puisse être comparé au quatrième ; le sixième leur est peu inférieur. » Les autres morceaux les plus brillans du poëme, ceux où étincellent le plus de beautés en tous gensont les suivans: le discours de Junon, et la tempête soulevée par Eole et se calmant à la voix de Neptune (livre 1.er), l'épisode d'Andromaque (livre ), les jeux célébrés en Sicile (livre v), la cour d'Evandre, l'épisode de Cacus et le bouclier d'Énée (livre vin), l'épisode d'Euryale et Nisus (livre 1x), le conseil des Dieux ( livre x ),

res,

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