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phe, a laissé beaucoup d'ouvrages estimables, parmi lesquels on distingue principalement le Cato major seu de Senectute, production l'une des mieux écrites de Cicéron et l'un des morceaux les plus intéressans de l'antiquité; le Lælius sive de Amicitia, très bon traité, quoiqu'il y soit plutôt question de cette espèce de liaison qui se forme entre citoyens des mêmes républiques et dont l'objet est la politique, que de l'amitié en général; le de Officiis, excellent ouvrage, où cependant il est moins ques tion de la morale en général, que de la morale des grands appelés à gouverner les autres, car l'auteur n'y montre pas comment l'homme doit tendre à la vertu, mais comment en observant ce qui est honnête et décent, on peut se faire estimer et considérer de ses concitoyens. Une grande partie de cet ouvra, ge, surtout les deux premiers livres, a été traduite ou imitée des ouvrages de quelques stoïciens grecs, surtout de Panætius. Il est adressé par l'auteur à son fils M. Cicéron qui alors suivoit à Athènes les leçons de Cratippe. C'est le premier des ouvrages moraux de Cicéron.

ques

Il en est qui divisent les productions philosophide notre auteur, en trois classes sous le rapport du mérite, savoir: 1.° le Traité des Devoirs, celui de la Divination, l'ouvrage sur le Souverain bien, et le Traité (imparfait) des Lois; 2.o les Questions académiques, le Traité de la Nature des Dieux, le fragment du Destin, le 1.er et le 5.e livre des Tusculanes; 3.o les trois autres livres des Tus

culanes, les Paradoxes, le Traité de la Vieillesse et celui de l'Amitié. Nous ne parlons ni de la République, ni de la Consolation, ni de la Gloire, ouvrages qui ont été perdus dans des temps plus ou moins éloignés, et dont on a cherché à réparer la perte. On pourroit bien faire quelques observations sur cette division des ouvrages philosophiques de Cicéron, en trois classes.

Nous n'avons rien à dire sur les Lettres de l'orateur romain, parce qu'il seroit trop long de détailler celles qui sont les plus importantes; il suffit d'énoncer que c'est le recueil le plus intéressant qui puisse exister pour l'histoire du huitième siècle de la République romaine. Il est composé de quatre collections: 1.o les Lettres familières ( ad diversos); au nombre de quatre cent vingt-une, distribuées en seize livres; 2.o les Lettres à Atticus, trois cent quatre-vingt-seize, divisées de même en seize livres; 3.o les Lettres à Quintus Cicéron, au nombre de vingt-neuf, en trois livres; et enfin, 4.o dix-huit Lettres à Brutus : ce qui fait en tout huit cent soixante-quatre lettres.

Cicéron s'est occupé aussi de poésie, et même avec ardeur dans sa jeunesse ; il a traduit en hexamètres les Phénomènes d'Aratus, et avoit composé une épopée dont Marius étoit le héros, et dont il cite des vers dans le 47. chap. de sa Divination ; mais les opinions sont très partagées sur ses talens poétiques. Voltaire, dans la préface de son Catiliua, fait de Cicéron un grand poëte qui peut le dis

puter à Lucrèce ; mais d'autres, riant avec Juvénal (sat. X, 122), du fameux vers :

O fortunatam natam me consule Romam!

sont bien éloignés de placer notre orateur à un si haut rang parmi les poëtes.

Personne n'a été plus pénétré du mérite de Cicéron que Pline l'Ancien, et personne n'en a fait un éloge plus complet et plus éloquent que lui dans cette belle apostrophe : « Pourrois-je, sans crime, passer ton nom sous silence, ô Cicéron! Que célébrerai-je en toi comme le titre distinctif de ta gloire? Ah! sans doute il suffira d'attester cet hommage flatteur qu'un peuple entier, qu'un peuple tel que celui de Rome rendit à tes sublimes talens, et de choisir dans toute la suite d'une si belle vie les seules actions qui signalèrent ton consulat. Tu parles, et les Tribus romaines renoncent à la loi Agraire, à cette loi qui leur assuroit les premiers besoins de la vie. Tu conseilles : elles pardonnent à Roscius, auteur de la loi qui régloit les rangs au spectacle, et consentent à une distinction injurieuse pour elles. Tu persuades, et les enfans des proscrits se condamnent eux-mêmes à ne plus prétendre aux honneurs. Catilina fuit devant ton génie : c'est toi qui proscris Marc-Antoine. Reçois mon hommage, ô toi qui le premier fus nommé PÈRE DE LA PATRIE; toiqui le premier méritas le triomphe sans quitter la toge, et le premier obtins les lauriers de la victoire avec les seules armes de la parole; toi le père de l'éloquence et des lettres latines; toi; enfin, pour me

servir des expressions de César autrefois ton ennemi, toi qui remportas le plus beau de tous les triom phes, puisqu'il est plus glorieux d'avoir étendu pour les Romains les limites du génie, que d'avoir re culé les bornes de leur empire. >>

CL. CLAUDIEN (n. vers 365 de J.-C.-m. vers 410) étoit un poëte très remarquable pour le temps où il a vécu, mais bien médiocre si l'on rapproche ses poésies de celles qui ont illustré le beau siècle d'Auguste. Ce n'est pas qu'on ne trouve dans la plupart de ses ouvrages, surtout dans l'Enlèvement de Proserpine (poëme au reste très défectueux pour le plan), un style élevé, de fortes images, des descriptions brillantes ; mais comme ce ton est soutenu d'un bout à l'autre et que les caractères sont uniformes, cela répand sur l'ensemble une monotonie fatigante qui à fait dire à La Harpe, que «l'harmonie des poëmes satiriques ou héroïques de Claudien ressemble parfaitement au son d'une cloche qui tinte toujours le même carrillon.» Les morceaux que l'on regarde comme à-peu-près les chefs-d'œuvre de notre poëte, sont ses deux Invectives, l'une contre Rufin, et l'autre contre Eutrope, chacune en deux livres. Ces deux hommes étoient ennemis du ministre Stilicon l'ami et le protecteur de Claudien. Quelques connoisseurs trouvent le poëme contre Eutrope préférable à celui qui-regarde Rufin; et d'autres admirent particulièrement le début de l'ouvrage contre Rufin. Clau

dien a encore fait preuve d'imagination et de talent dans deux Epithalames, l'un à l'occasion du mariage d'Honorius avec Marie, fille de Stilicon et de Serena; l'autre sur le mariage de Palladius et de Celerina. On trouve encore d'assez beaux passages dane son Enlèvement de Proserpine, poëme qui a été imité et perfectionné en vers français par M. Michaud; dans ses Consulats d'Honorius, dans ses sept petits poëmes didactiques ou descriptifs publiés sous le nom d'Idylles, et parmi lesquels on distingue le Phénix et la Tendresse filiale des deux Siciliens, etc.

Enfin on peut dire que Claudien, malgré ses défauts, est peut-être après Stace, le poëte épique latin qui s'est approché davantage de Virgile, surtout dans quelques descriptions et comparaisons.

PIERRE CORNEILLE (V. tom. 1, pag. 128). Les chefs-d'œuvre de ce père de la tragédie sont Cinna, le Cid, les Horaces, Rodogune et Polyeucte. Une seule de ces pièces eût fait la réputation d'un grand écrivain. «Le Cid, selon La Bruyère, n'a eu qu'une voix pour lui à sa naissance, qui a été celle de l'admiration ; il s'est vu plus fort que l'autorité et la politique (l'Académie et Richelieu ) qui ont tenté vainement de le détruire; il a réuni en sa faveur des esprits toujours partagés d'opinions et de sentimens, les grands et le peuple. Ils s'accordent tous à le savoir de mémoire et à prévenir au théâtre les acteurs qui le récitent. Le Cid enfin est un des plus beaux

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